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lundi 18 novembre 2024

Anora. Sean Baker.

Liaisons dangereuses d’une stripteaseuse chez les oligarques russes à New York.
Un prix pour l’actrice principale Mikey Madison aurait été mérité, quant à la palme à Cannes, 
il faut croire que la concurrence ne devait pas être vigoureuse, ni très inventive.
Youri Borissov est aussi intéressant.
Nous passons cependant de bons moments chauds, sentimentaux, drôles, alors que tombe la neige, que les émotions sont celles de la coke, que nous en sommes à plaindre de pathétiques méchants et que la chair même ficelée joliment est plus frénétique que romantique.
L’histoire (2h 20) de ces paumés dans un monde perdu, sans sommeil, vigoureusement menée, nous emmène une première fois vers les lumières de Las Vegas pour y revenir quand les promesses ne tiennent plus. 
Qui parle encore de rêve américain ? 

lundi 11 novembre 2024

L’histoire de Souleymane. Boris Lojkine.

A l’issue du film, quel spectateur n’accorderait pas ses papiers à l’acteur qui joue le rôle d’un livreur clandestin ?
Nous suivons le jeune Guinéen dans sa course contre le temps entre clients difficiles, patron de restaurant tout puissant, compatriotes quémandeurs ou profiteurs. 
Nous retenons notre souffle dans l’attente d’un entretien d’une grande intensité.
Pas le temps de s’appesantir dans le seul bref moment de détente quand il s’agit de se chambrer avec les ivoiriens pour du foot alors qu’il s’agit de grappiller quelques €uros avant d’attraper le bus de ramassage social vers un toit pour une nuit où il ne trouve même pas le repos. 
La volonté, le calme du héros forcent la sympathie et amènent utilement nos regards vers ceux qui participent à notre confort.
L’acteur travaillant comme mécanicien dans la vraie vie est le plus parisien des parisiens dans la sombre ville lumière, aux rapports humains intraitables, aux rues dangereuses. 
Film violent et doux, fort,  sans que le propos ne soit grossièrement manichéen.

lundi 4 novembre 2024

All we imagine as light. Payal Kapadia.

Le titre « La lumière telle qu’on l’imagine » pourrait sembler ambitieux, alors que modestement persistent dans la mémoire quelques ampoules de couleurs habillant une guinguette, au bout des deux heures plutôt sombres et pluvieuses.
Trois femmes de trois générations, sans que cette structure soit trop didactique, se soutiennent : deux infirmières en colocation et une travaillant à la cantine, menacée d’expulsion. 
Veuve, elle retourne au village accompagnée de celle dont le mari travaillant en Allemagne ne donne plus signe de vie, et de la plus jeune qui entame une relation avec un musulman. 
Dans un contexte où la vision féministe va de soi pour rompre avec les mariages arrangés, aller contre les pressions communautaristes, surmonter solitude et précarité sociale, ces femmes en imposent par leur courage.
On n’oublie pas dans cette histoire traitée avec douceur, la ville de Mumbaï (Bombay), 12 millions d’habitants, décrite au début en quelques plans évocateurs d'un affolant foisonnement humain.
Lorsque Prabha, Anu, et Parvaty se réfugient, provisoirement pour deux d'entre elles, au bord de l’océan, l’introduction d’une dimension onirique, rappelant un autre film tout aussi indispensable, m’a semblé pour un instant tourner au procédé, mais adoucit l’âpreté des conditions des trois belles protagonistes. Oui belles comme on dit « belles personnes » alors que l'expression s'use d'être trop employée comme le mot « sororité » qui convient pourtant parfaitement à ce film.

 

lundi 28 octobre 2024

Sauvages. Claude Barras.

Nino 11 ans :
Le film Sauvages dénonce la déforestation de Bornéo pour planter des palmiers qui feront plus tard de l’huile de palme. Ce film m’a beaucoup touché et je me dis qu’il y a des gens qui coupent des arbres où habitent des orangs outans qui n’ont rien demandé et qui veulent juste vivre leur vie tranquillement. Le peuple nomade appelé Penan défend la jungle.
C’est décidé : JE NE MANGE PLUS DE NUTELLA !
Mon personnage préféré : Oshi le bébé orang-outang.
 
Pour les vacances d’automne - on ne dit plus vacances de Toussaint - le film d’animation recommandé cette année se déroule dans l’île de Bornéo où la forêt primaire est menacée.
La dénonciation de la perte de la biodiversité par le réalisateur d’ « Une vie de courgette » est bien sûr légitime, mais avec finesse, il va au-delà de l’interrogation facile : qui sont les sauvages ? 
Le méchant de l’histoire pose le problème de la responsabilité des consommateurs du monde avec de gentils autochtones non dépourvus de contradictions.
Presque tous les protagonistes ont de grands yeux attendrissants mais les rapports entre les personnages bien typés évoluent, les mentalités changent.
La chanson de Balavoine nous accompagne après une heure et demie de belles images. 
« Comme un fou va jeter à la mer
Des bouteilles vides et puis espère
Qu’on pourra lire à travers
SOS écrit avec de l’air
».

lundi 21 octobre 2024

Quand vient l’automne. François Ozon.

Comédie, comme au cinéma, dramatique, comme dans la vie.
Le scénario habile nous laisse dans un doux doute avec des acteurs excellents :
Hélène Vincent (« La vie est un long fleuve tranquille »), Josiane Balasko (« Les bronzés »), 
Pierre Lottin ( « La nuit du 12 ») avec lesquels nous passons une heure trois quarts agréables. 
Tout au long du récit aux allures de policier pépère, la vieillesse est évoquée dans des nuances dorées qui précèdent la chute, les rapports mère/ fille et la rédemption par le petit fils, et aussi la culpabilité, le mensonge et même la distance Paris /province.   
« L'important n'est pas tant de faire le mal que d'avoir voulu faire le bien ». 
Alors que des spectateurs critiquent la lenteur du début du film, j’ai trouvé au contraire que ce moment donnait toute sa profondeur à ce film troublant.
La petite citation, extraite d'une chanson populaire, devenue habituelle, est revigorante:
«Aimons-nous vivantsN'attendons pas que la mort nous trouve du talent» 
François Valéry
Du prolifique réalisateur d’une trentaine de films, la mémoire de mon ordi fait revenir : 

lundi 14 octobre 2024

Le moine et le fusil. Pawo Choyning Dorji.

Tout tourne autour d’un stupa
(tas de pierres contenant une relique du Bouddha), au pays du BNB (Bonheur National Brut) : religion, démocratie, modernité et traditions, pétoire et armes de James Bond.
S’il est vrai que le royaume du Bhoutan est passé à la démocratie parlementaire au début des années 2000, ce film d’une heure quarante sept a valeur de fable souriante dans de beaux paysages.
Il ne manque pas de nous interroger sur nos valeurs et les mécanismes de la démocratie avec un humour léger et un rythme apaisé. 
La pédagogie appliquée pour faire comprendre ce que sont les élections pourrait aussi instruire les électeurs blasés de nos contrées.
Les personnages finalement tous sympathiques se retrouvent autour d’une conclusion surprenante quoique logique pour répondre à la question : 
que peut bien faire un moine avec un fusil ?

lundi 7 octobre 2024

Le Comte de Monte-Cristo. Alexandre de La Patellière Matthieu Delaporte.

Cette 25° version cinématographique conserve le souffle romanesque
revenu du fin fond de l’enfance de l’inusable Dumas, tout en l'allégeant.
Rien que le résumé de l’œuvre littéraire tient plus de place que certaines brochures contemporaines écrites pour durer le temps d’un trajet de métro.
Edmond Dantès châtie les méchants qui l’avaient conduit à dix ans de réclusion dans des conditions dantesques. Avec une obstination surhumaine, il avait gagné sa liberté, bien aidé par une fortune providentielle et les enseignements de l’abbé Faria, compagnon d’infortune  dans le cachot du château d’If.  
Nous feuilletons à nouveau l’auteur de quatre-vingts romans pendant trois heures de rebondissements pour une vengeance sophistiquée dont on ne regarde pas les invraisemblances pour apprécier seulement l’inventivité du feuilletoniste. 
La musique attachée à ce genre manque d’originalité, mais on peut s’attacher aux décors. Les acteurs : Pierre Niney, Anaïs Demoustier, Laurent Lafitte, Anamaria Vartolomei …nous font passer un excellent moment. 
« Celui-là seul qui a éprouvé l'extrême infortune est apte à ressentir l'extrême félicité.
Il faut avoir voulu mourir, Maximilien, pour savoir combien il est bon de vivre. »

lundi 30 septembre 2024

Les graines du figuier sauvage. Mohammad Rasoulof.

Dans la file nombreuse des spectateurs attendant d’entrer pour une projection de deux heures trois quarts, une dame sortant de la salle tend le poing et proclame : « si on n’aime pas le film on est complice ! ».
Les réactions ne sont pas toujours aussi caricaturales mais s’inscrivent dans l’air du temps où l’intimidation devient banale. Les affiches annonçaient un chef d’œuvre pour ce film et également pour celui qui était projeté dans la salle voisine.
Est-il possible d’émettre quelques réserves à propos de ce récit au titre poétique, bien que le contenu soit loin d’être savoureux, puisqu’il s’agit de la dénonciation de l’insupportable tyrannie iranienne ? 
Qui peut se taire, sinon quelques indulgentes à l’égard des mecs tournés vers la Mecque ? 
Le réalisateur traite avec force l’impact de la profession du père de famille au service du régime, à travers la personnalité de la mère prise entre sa loyauté à l’égard de son mari et ses filles sensibles au mouvement d’émancipation «  Femme, Vie, Liberté ».
Le pouvoir meurtrier, aux abois, pervertit les individus et toute relation, retourne les tiroirs, mais une conclusion trop symbolique abime la description utile de l’oppression.

lundi 23 septembre 2024

Ma vie, ma gueule. Sophie Fillière.

Agnès Jaoui au sommet de son art en quinquagénaire excentrique rencontre brièvement Philippe Katherine parfait dans ce film fantaisiste, original, doux-amer.
La comédie enjouée aux dialogues bien troussés évolue vers plus de gravité  au moment où les thèmes du vieillissement, de la folie, de la relation avec les enfants sont évoqués. 
Quand les rires ne sont pas des ricanements et que les destins ne tournent pas à l’apocalypse, scènes cocasses et  atmosphère poétique permettent d’illustrer parfaitement la catégorie «  comédie dramatique », drôle et sérieux, cocasse et émouvant, morose et rose.  

 

lundi 16 septembre 2024

A son image. Thierry de Pedretti.

Ce film inspiré du roman de Jérôme Ferrari « Une vie violente » parcourant les 20 dernières années de l’histoire de la Corse ne répond pas aux interrogations que soulèvent les rapports des insulaires au continent, entre volonté d’indépendance et dépendance envers l’état central.
Pendant ces deux heures, seule transparait la lassitude de la compagne d’un énigmatique indépendantiste souvent en prison. 
Malgré les ellipses, l’absurdité des engagements atteint son apogée lorsque les jeunes mâles du FNLC s’entretuent, c’est alors que le point de vue des femmes un peu plus développé aurait pu être intéressant. Difficile cependant de partager les sentiments de la mystérieuse jeune photographe puisqu’une voix off se charge d’expliquer ce qui n’apparaît pas à l’écran. 
Pas une de ses photos ne sera retenue lors de son voyage à Vukovar, où la guerre en 91 n’était pas du cinéma. Mais cette autre bonne idée n’est pas exploitée non plus. 
Le titre souligne l’importance d’un rapport aux images qui s’avère bien peu traité, alors qu’avec son appareil la débutante « mitraille » jusqu’à l’absurde la bande immature de ses amis clandestins.

lundi 9 septembre 2024

La prisonnière de Bordeaux. Patricia Mazui.

Pas de souci de casting : la bourgeoise excentrique ce sera Isabelle Huppert.
Hafsia Herzi est aussi très bien dans son rôle.
La chabrolienne rencontre au parloir de la prison Mina qui "assure" avec ses deux enfants à la périphérie de Narbonne depuis que son braqueur de mari est en cabane à Bordeaux.
La fantaisie de la très riche extravagante permet d’installer la possibilité de nouveaux départs chez les deux femmes aux rapports problématiques à la vérité. Pour moi, cette sororité bancale ne peut passer pour de l’amitié.
La différence de classe semble abolie un moment pour reparaitre quand se referme la parenthèse enchantée pendant laquelle les enfants hébergés dans l’hôtel particulier sont trop gâtés, comme leur mère, a qui un travail a été proposé dans la clinique du mari emprisonné après un délit de fuite.
Au terme de cette rencontre improbable, l’hurluberlue se dessille, la laborieuse se libère des liens dangereux de sa vie d’avant.

lundi 2 septembre 2024

Vice Versa 2. Kelsey Mann.

La charmante petite fille de l’inventive création Pixar est bouleversée par la puberté.
 
Le thème est traité avec humour mais sans le surplomb habituel de ceux qui ont passé l’épreuve : simplicité et délicatesse sont toujours au rendez-vous.
J’ai partagé ce bon moment avec mon critique de 11 ans qui a du penser à son ainée de treize ans, l’âge de Riley, virtuose du hockey, riche d’émotions nouvelles autour de « L’estime de soi ».  
« Anxiété »  accompagnée d’ « Envie », supplante « Peur » alors que « Nostalgie » n’a pas encore voix au chapitre bien que la concurrence des souvenirs entre dans la construction d’une personnalité attachante. 
« J’ai bien aimé ce film car il y a plein de rebondissements comme la fois  où ils se sont fait expulser de la tour de contrôle par une explosion de dynamite.
Je trouve que l’utilisation  de Bloofy, personnage de dessin animé dans un film animé est très drôle. La très mignonne « Honte » est utile pour « Joie » et son équipe, mais j’aurais préféré appeler « Flemme » à la place d’« Ennui ». NIno

lundi 1 juillet 2024

Un petit truc en plus. Artus.

Je n’ajoute pas de commentaires à ceux de ma petite fille et de ses amies de treize ans pour ce film sympathique vu par près de huit millions de personnes : 
« J’ai aimé ce film qui m’a fait rire avec toutes les personnalités différentes des handicapés et m’a aussi émue avec la relation père/fils de Sylvain et Orpi car celui-ci ne montre aucune tendresse envers son fils qui essaye pourtant de l’attendrir ». Mia. 
Le père et le fils en question après un braquage échappent à la police en se glissant dans un groupe d’handicapés en partance pour un séjour dans le Vercors. 
« J’ai aimé ce film car il englobe un sujet sensible mais malgré cela, c’était drôle et  il donnait l’image d’un groupe soudé. Les éducateurs ont aussi un rôle très important ». Kali 
« Ce qui m’a marquée c’est que la personnalité des acteurs était aussi celle des personnages, ce sont aussi leurs vrais prénoms qui sont utilisés ». Mona.
...............
Je termine la saison sur ce papier et reprendrai en septembre avec les écoliers.
Merci aux lecteurs et à ma fidèle commentatrice.
 

lundi 24 juin 2024

Border Line. Alejandro Rojas, Juan Sebastián Vasquez.

Ce film de 1h 17 parait bref par rapport aux formats habituels, mais l’attente dans l’aéroport de New-York est longue pour un couple venu d’Espagne, lui vénézuélien, elle catalane.
La tension monte et les questions intrusives de la police aux frontières amènent le thème des migrations au cœur des histoires intimes.
Même nés du bon côté du mur, nous sommes impliqués dans cette histoire parfaitement construite et remarquablement jouée d’un homme et d’une femme cherchant à vivre mieux. 
Les émotions suscitées par les tergiversations autour de la permission d’entrer aux Etats-Unis nous amènent au-delà des clichés qui voient l’étranger comme le danger ou comme le rédempteur et nuancent ces idées générales ne manquant pas d’enflammer les débats en ce moment et partout dans le monde.

lundi 17 juin 2024

Le Deuxième acte. Quentin Dupieux.

Ce film dans le film, on ne peut mieux à sa place en ouverture du festival de Cannes,
aborde avec légèreté  des sujets plombants: ne sommes nous pas à nous abuser dans le divertissement quand la planète est vouée à sa perte ?
Humour grinçant, «  politesse du désespoir » : la salle rit quand il est question de la désaffection des salles.
Les acteurs, Lindon, Garrel, Seydoux, Quenard, sont mis en valeur lorsqu’ils doivent rejouer des scènes, car ils ont débordé dans leurs improvisations écrites avec malice.
Les soucis du cinéma vont au-delà de l’entre-soi : # MeToo, l’intelligence artificielle, égo des stars… Tout est fiction et c’est bien bon.
On ne voit pas passer le temps : 1h 20 avec un dernier travelling pendant lequel peut se lire toute l’ambition du cinéma et sa vanité, sa démesure et sa modestie, la voie des rêves et la banalité d’un chemin vers nulle part.

lundi 10 juin 2024

Frères. Olivier Cassas.

Les derniers documents apparaissant au bout d’une heure et demie de film sont très utiles pour arriver à croire à cette histoire d’enfants disparus comme des milliers d’autres dans l’Europe de l’après guerre.
Deux garçons de cinq et sept ans vont vivre dans la forêt pendant sept ans, oubliés de tous. Cette épreuve incroyable va les marquer « à mort » même devenus architecte pour l’un et l’autre médecin.
Leur bel attachement vital forgé dans le froid et la faim exclut les autres malgré une réussite sociale peu explicitée.
Le récit de ces destins vertigineux a enthousiasmé de nombreux spectateurs sur « Allo ciné » alors que la presse est beaucoup plus réservée qui relève des redondances et quelques ellipses alimentant une incrédulité se rappelant à nous à plusieurs reprises.  

lundi 3 juin 2024

Les Vieux. Claus Drexel.

L’excellent documentaire recueillant la parole d’une trentaine de vieux, se montre fidèle à son titre franc trop souvent masqué par les litotes.
Le film d'une heure trente aborde d'une façon honnête et en couleurs le sujet que la tragique et sublime chanson de Brel, où nous attend « La pendule d'argent qui dit oui qui dit non », avait exprimé avec force.
La diversité des conditions sociales, familiales, géographiques, culturelles, des états de santé, de nos ancêtres, ponctuée de paysages magnifiques, va à l’universel.  
Ainsi, un noble, propriétaire d’un château dont l’ainé ne veut pas assurer les charges, pose le problème de la succession pour chacun de nous. 
Une centenaire ne veut pas être un boulet pour sa famille, alors qu’un sage trouve une place de témoin qui lui convient dans cette étape de la vie. 
Rien n’est masqué : le vieillard perdu derrière ses papiers, et les interrogations sur la mort, la perte du conjoint, les nuances entre solitude et isolement. 
Et nous nous rassurons avec la sereine énergie d’un montagnard ou celle de la maîtresse de conférence, qui porta l’étoile jaune et mourra en hurlant, d’autres en souriant.    

lundi 27 mai 2024

Cannes cinéphile 2024.

Pas besoin de tapis rouge pour apprécier le cinéma aux alentours du festival de Cannes où nous avons embarqué pour des voyages imaginaires dans quelques salles obscures du quartier de La Bocca.
Nous avons vu 19 films des diverses sélections, sauf l’officielle dont quelques propositions seront visibles plus tard, à domicile, et critiquables ici chaque lundi.
Cette année, avec un film sur deux comportant comme évènement notable un décès, les personnages décalés, atypiques, voire "frapadingues" ne manquaient pas… 
« Poppy » jeune australienne trisomique enjouée assiste efficacement ses proches dans une version ensoleillée de la vie.
Un jeune homme dépressif rencontre une jeune marginale atteinte d’une infection grave dans « Every thing in between ».
Agnès Jaoui en excentrique trouve sur son chemin le baroque Philippe Katherine avec la dernière livraison de Sophie Fillière : « Ma vie ma gueule ».
Qui mieux qu’Isabelle Huppert en bourgeoise hurluberlue « Prisonnière de Bordeaux » ? 
« La nouvelle femme », le combat singulier de Maria Montessori pour l’émancipation des enfants est cohérent avec son destin extraordinaire de pionnière féministe.
Dans la sélection « Vision sociale » reprenant des films déjà projetés, le palpitant « Border line »  avec un pareil titre participe à la thématique non conformiste : un couple venant d’Espagne interrogé à la frontière américaine se situe dans un indécis entre-deux.
« Le déserteur » israélien, lui aussi, ô combien, en marge, soulève des tas de questions ne se résolvant pas dans une formule vaine telle que « la guerre c’est pas bien ». 
« Frères », vus en prologue des festivités festivalières, conte la vie de deux enfants qui ont vécu seuls sept ans en forêt charentaise dans les années cinquante. Insolite mais vrai.
« Tazio », choisissant de poursuivre une activité de charbonnier, dans les années 1980 en Espagne, échappe au destin commun.
Les bookmakers argentins de «  Something old, something new, something borrowed » sont clandestins comme les magrébins à la recherche d’une « Miss Visa » faisant la connaissance d’un policier hors normes alors que « La mer est loin ». 
« Les filles du Nil » se battent pour leur émancipation en présentant leurs spectacles dans la rue et affrontent l’indifférence, l’hostilité de la plupart des hommes.
Les élèves de « Château rouge » peuvent sembler étranges, hermétiques, bien que les acteurs de l’éducation nationale déploient des trésors de patience.
Julie, championne de tennis en devenir, garde le silence, alors que son entraineur est licencié, « Julie keeps quiet ». 
« Most people die on Sunday » et «  In retrait » présentent un personnage éberlué pour l’un en Argentine et un autre, hébété, étranger à sa propre ville, au Ladakh.
Les masseuses chinoises dans « Le Blue sun palace »  à New York vivent en vase clos.
Elles ne sont pas aussi malheureuses que les migrants surexploités à Taïwan de « Mongrel » au plus bas de l’inhumanité.
Après un mariage arrangé, l’indienne « Sister midnight » dérange bien du monde, fait rire quelques spectateurs, mais pas tous.
Ce serait violenter cette recherche de fil conducteur si «  Chrismas eve in Millers’ point » 
n’était pas mis à part, puisqu’il s’agit d’un moment destiné à réunir une grande famille ordinaire, enfin presque, italienne et américaine.
Sinon en 2024, presqu' autant de cigarettes sont fumées que dans les années 50, et à part Tazio en pays basque ou avec Maria en 1900, il y a toujours une petite bière à s’envoyer. 
De cette cuvée, située en quantité entre le minimum de l’an dernier et notre record d’il y a près de 10 ans, ne se retiennent ni d’inoubliables chefs d’œuvre ni des indignes, dans ce que nous avons vus, encore que notre mémoire se montre parfois plus vive pour des œuvres énervantes que pour des coups de cœur. 

lundi 29 avril 2024

Sidonie au Japon. Élise Girard.

L’inoxydable Isabelle Huppert dédicace son livre lors d’un séjour au pays des cerisiers en fleurs organisé par un éditeur impénétrable lui aussi.
Bien qu’elle doive son succès d’écrivaine à la description de la disparition de sa famille, elle a du mal à faire le deuil de son mari ; elle n’écrit plus.
Pour ce film langoureux, fantomatique, légèrement loufoque qui vaut plus par ses silences que par ses dialogues engourdis, nous avons savouré la douce musique.
Comme les albums de « Martine à la plage », nous suivons « Sidonie au Japon » trottinant d’hôtels déserts et confortables en hôtels zen au pays des courbettes et des clichés.
Pourtant le Japon vu par un occidental peut avoir bien des charmes 
 et les réalisateurs japonais ne déçoivent jamais,
cette fois il faut être bien fatigué des violences alentours pour trouver quelque apaisement pendant cette heure trente au scénario minimaliste.

lundi 22 avril 2024

Amal - Un esprit libre. Jawal Rhalib.

Le cinéma s’invite beaucoup en ce moment dans les lieux d’éducation : en France où « Pas de vague » a été tourné, en Allemagne avec «  La salle des profs ». 
Ce film belge va au-delà des murs.
Mila harcelée, déscolarisée, Samuel Paty - et comment s’appelait-il ce prof ? - Dominique Bernard, assassinés, reviennent dans nos mémoires lorsque pendant 2 h de fiction aux allures de documentaire, s’affrontent liberté et obscurantisme, évitant cependant tout manichéisme.
Les coups de poignard sont malheureusement vraisemblables de même que la « Taqiya » d’un néo converti en costume cravate aux doucereuses paroles, camouflant sa délétère influence, tel un Tarik Ramadan.
Ce film, riche de sujets civilisationnels brûlants, traite de l’intolérance des intégristes musulmans dont sont victimes en premier lieu les modérés, de l’homophobie, du rôle des réseaux sociaux, et de la digue fragile que constitue la laïcité.
Une prof, jouée par l’énergique Lubna Azabal
ne s’en laisse pas compter par des parents aux pouvoirs disproportionnés, elle propose à ses élèves un poème du VIII°siècle d’Abû Nuwâs qui met le feu aux poudres : 
« Cinq fois par jour je fais pieusement mes prières.
 Docile, je confesse l’Unité de Dieu. 
Je fais mes ablutions lorsqu’il me faut les faire. 
Je ne repousse pas l’humble nécessiteux. 
Une fois l’an, j’observe tout un mois de jeûne. 
Je me tiens à distance de tous les faux dieux.
 Il est vrai, cependant, que point ne suis bégueule 
 et que j’accepte un verre quand il est en jeu. » 
Investie totalement dans sa tâche émancipatrice, Amal apparait malheureusement comme une héroïne assez esseulée, et lorsqu’elle dit : « dans ma classe Hallah n’a rien à faire » elle sait bien que dans le cours voisin de religion jusque là obligatoire en Belgique, le salafisme s’impose dans bien des têtes, protégé par de vagues « pas de vague » qui éclaboussent au-delà de l’administration, chaque acteur éducatif.