La dame de 64 ans pose le dernier Goncourt et va gratter le
pied de ses rosiers. A quel moment elle bosse ?
Pas besoin forcément de gants pour extraire de terre une pomme, alors que pour certains se taper Joyce relève toujours du pensum.
Le passage d’une activité à une autre ne peut se décrire
sous l’oxymorique vocable :« gestion du temps libre », quand la frontière
entre travail et loisir fluctue suivant les époques.
Culture et nature : « ne reste pas le nez dans tes
livres !» désormais obsolète, versus « le jardinage me détend » plutôt tendance.
Revoilà sempiternellement travaillée la notion de travail au
moment où se repose encore la date de nos mises en retrait :
gagne-pain de hasard ou œuvre d’une vie.
La séquence parlementaire qui aurait pu être éminemment
politique enfonce les tactiques politicards, quand les propositions les plus évidentes
disparaissent sous les colifichets, dans un brouhaha théâtralisé à ranger dans
la catégorie « querelles byzantines » aux fragrances décadentes.
La
dérision n’est que l’autre face d’une pièce où s’exagèrent les enjeux dans le
déni des contraintes.
Une accumulation de signes inquiétants chez nos compatriotes
auraient pu sembler plus urgente à traiter : maladies psychosomatiques, fatigues,
congés sabbatiques avant de s’y mettre, démissions.
Il y a du pain sur la planche
pour les chercheurs qui ne veulent chercher qu'aiguilles dans bottes de foin, sans connaître les prairies.
Des crédits universitaires ont été débloqués en Norvège pour
des études autour des peintures blanches des murs qui seraient un signe
d’assouvissement raciste : de quoi se rouler dans la neige, se faire un
rail ou au moins s’avaler un petit blanc.
Pour le reste, il n’y qu’à passer par les cabinets de
conseils.
D’autres études cependant fouillent, des recherches creusent,
mais les tweets gagnent à la fin, surtout quand la haine les met en évidence
parmi tellement de mots nous sommant, nous assommant, qu’on ne sait de quel
côté fuir.
La place laissée vacante par les professeurs sachant professer
voit se succéder tant de donneurs de leçons. A l’instar des bonnes âmes qui ne
voulaient pas que leur obole à un clochard finisse en vin, voilà que des
publications distinguent loisir consumériste et temps consacré à
l’épanouissement humain pour flécher nos libertés qui ne sauraient être
débridées.
Sûrement que la vacance correcte recommanderait la
fréquentation de lieux artistiques, mais à user avec circonspection, quand du pays de
Biden, de toxiques injonctions sont prises au sérieux interdisant aux acteurs
de jouer un homo s’ils sont hétéros… de doubler Mickey s’ils ne sont
souris !
Lieux des alertes, les arts sont en crise et les commentaires à leur suite: je
cherche la plupart du temps en vain des critiques en matière théâtrale où
l’entre-soi semble le plus installé, masqué derrière des écriteaux appelant à ce qu’ils ont
chassé: ouverture, simplicité, légèreté, modestie, humour.
Cette frilosité autour du spectacle vivant se retrouve dans
des commentaires certes plus abondants autour des films où domine un
conformisme frileux tel qu'il se retrouve aussi sur les plages musicales quand ne sont guère critiques
les habituels prescripteurs envers les fans et les enfants de « Nique ta
mère ».
La minceur des propositions artistiques contemporaines
s’accompagne de gloses volumineuses, et aux portes des galeries dans lesquelles s’exposent
des objets minimalistes de gigantesques fresques les serrent comme étaux.
«Ceci n'est pas une pipe» titrait Magritte sous une peinture, mais un couteau est un couteau à Saint Jean de Luz ou ailleurs.
Quand les notions de bon et de beau sont mises à la question
chaque matin, les injonctions nouvelles amènent à confisquer le dernier Vivès au
profit de la dernière Nobel.
Je me tiendrais volontiers dans une position méprisante à
l’égard des méprisants sermonneurs et autres doctes universitaires.
Ils préfèrent en revenir au temps des colonies ou étudier quelques
barbaries machistes paléolithiques plutôt que voir comment contrarier les
fatalités sociales, réhabiliter le travail et tenir sa place dans la société.
« A vouloir
enseigner trop de médecine, on n'a plus le loisir de former le médecin. »