Affichage des articles dont le libellé est livre. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est livre. Afficher tous les articles

vendredi 19 avril 2024

Schnock n° 41.

En picorant au hasard dans la collection des revues des vieux de 27 à 87 ans 
puisque le temps ne fait rien à l’affaire, voilà le numéro consacré à celle qui « faisait peur aux garçons » : Claudia Cardinale. Honnêtement pas que peur.
N’est ce pas Paul VI qui la reçut ? 
«  Moi je suis pape mais vous vous êtes cardinal, vous pouvez faire ce que vous voulez » 
Effectivement, à travers un entretien avec elle, Jacques Perrin son partenaire de « La fille à la valise », Jean Sorel celui de «  Sandra » de Visconti, ou sa fille Claudia, la brune C.C.  face à B.B. dans « Les pétroleuses » a gagné sa liberté au cours d’une riche carrière.
Après une sélection de 12 films dont « Cartouche », « Fitzcarraldo », ses rôles se sont étoffés  dans «  Il était une fois dans l’Ouest » ou « Les professionnels ». Et dans le bric à brac sensément alphabétique allant de C comme « Cascadeuse » à C comme « Chirurgie esthétique », il n’y a pas que Moravia qui s’exprime : un admirateur  pour celle qui fut la femme d’un seul homme, Pasquale Squitieri, un réalisateur très coureur : 
« Je suis un jeune paysan, j’habite la Lozère, dans un petit village joli, je ne suis pas bien riche, mais j’ai quand même un revenu stable. J’ai sept vaches, qui donnent du bon lait et du beurre, trente trois brebis et un bouc. J’ai aussi une agréable petite maison mais… ? Il me manque quelque chose pour être tout à fait heureux. Chère Claudia, si vous le désirez, vous serez la plus heureuse et la plus chérie de toutes les femmes du monde. » 
Après ce dossier fourni, la fin prématurée de la chanteuse, Joëlle Mogensen du groupe musical « Il était une fois » donne une tonalité sombre à l’évocation d’Yves Bigot.
Et même l’article consacré au « Corned beef » fabriqué à Bressuire (Deux Sèvres) malgré son « effet bœuf » a des allures crépusculaires.
Patrick Bouchitey et Jackie Berroyer, toujours intéressants, réhabilitent en 12 pages le film rock « Lune froide » sur la route de l’oubli.
Mais le rappel des pubs d’ Europe N° 1 de 1966 à 1992, de Bellemare à Delarue, ajoute un chapitre de plus au catalogue : « La nostalgie n’est plus ce qu’elle était ».

lundi 1 janvier 2024

Almanach dauphinois 2024.

La publication annuelle réceptacle du temps passé a toujours été hors du temps, elle ne peut être démodée.
Les abeilles apprécieront toujours en janvier que « Lors d’une journée ensoleillée et calme »   soient alimentées « en candi les compagnies nécessiteuses ».
La remarque de bon sens «  Seuls les riches se vantent d’avoir été pauvres » reste vraie, ainsi que le dicton : «  C’est la dose qui fait le poison. »
Même vendus au cœur des villes, les conseils concernent surtout  jardiniers, paysans, cueilleurs de champignons et ceux qui font attention à la lune : 
« épicéa : abattu et débité les jours suivant la pleine lune, la sève se fige et le bois se conserve mieux. »
L’humour de Fafois délicieusement obsolète perdure: 
 « 5 enfants avec le même prénom ! Comment faites-vous pour vous adresser à l’un d’eux ? demande madame Fafois.
- Je l’appelle par son nom. » 
La liste des événements de l'année dernière en Isère s’étend d’un juillet à l’autre: de la visite d’Emmanuel Macron à ST Microélectronique aux émeutes urbaines. 
Pour la météo il s’agit du second été le plus chaud après celui de 2003:
2,4 degrés supérieurs aux normales de la période 1991-2020.  
Le reportage à Buis-Les-Baronnies« l’on se sait dauphinois mais où on se sent provençal » se souvient qu’au XIV° siècle il y avait 1000 habitants de plus que les 3500 d’aujourd’hui. L’employeur le plus important est l’hôpital-EHPAD et l’escalade constitue l’attrait touristique principal. L’abricot, les olives (« La tanche » variété unique au monde), le tilleul ont fait la renommée de la bourgade traversée par l’Ouvèze. Les  fils Ducros y avaient installé une usine qui employait 200 personnes dans les années 60-70 alors que l‘équipe de football féminin, les « Albertines » connaissait se heures de gloire.
L’expression de chez nous « Faire beau » signifie «  se mettre en colère ».  
« Elle a fait beau quand elle a vu arriver les gamins dans le couloir avec les souliers tout pleins de boue » 
Nous apprenons tout sur « l’amer à boire », la chicorée sauvage 
et le campagnol « dont la femelle peut avoir six ou sept portées par an de quatre ou cinq petits ».
Nous n’en sommes pas rendus à revenir au gazogène auquel certains conducteurs s’étaient convertis très rapidement pendant l’occupation, pas plus qu’à « la brèle », la Peugeot 103, qui éveille des nostalgies.
Les talents du sourcier sont de plus en plus sollicités avec le réchauffement climatique. 
L’huile de foie de morue n’éveille pas de mélancolie alors que perdure le temps des vogues, des fêtes de village dont un invitation fin du XIX° siècle dans le Champsaur était charmante. 
«  nené péréu, béus amourious… »
« Venez ici beaux amoureux
Qui cherchez une femme aimable
Nous avons des filles qui ont belle chevelure »  
« un bèun plumaje ».
Le patois varie, par exemple à  Tullins on dit : « acheu de né » 
et dans le Valgaudemar : «  à tseil néo » pour « il a neigé ».
L’histoire du petit violoniste, sous forme de conte, est celle de Lully 
alors qu’un lecteur  raconte ses vacances au bord de la mer en 1964 chez un dame qui guérissait les brûlures et les piqures de vives.
La dimension régionale est toujours affirmée avec la personnalité découverte cette année: l’affichiste Achille Mauzan né dans les Hautes- Alpes, il connut la célébrité surtout en Italie et en Argentine.
Les caractéristiques sont replacées dans un contexte plus général : 
le département de l’Isère compte deux fois plus de communes (512) 
que la Suède huit fois  plus peuplée.
Parmi les biographies des centenaires, quelques anecdotes peuvent alimenter des réflexions :
« Le brave Louis, redoutable joueur de coinche se rend toujours chez des amis pour « taper le carton » tous les vendredis après midi.  
« Comment j’y vais ? En voiture pardi ! Je conduis toujours. Je dois être l’un des automobilistes les plus vieux de France. Mais je ne vais pas loin. J’ai promis à mes filles de ne pas sortir de la commune. »

vendredi 6 octobre 2023

Zadig n°18. Eté 2023.

Depuis le premier numéro du trimestriel précieux pour la variété de ses points de vues,
un changement s’est opéré  en privilégiant un thème parmi les 170 pages. 
Et puisqu’il s’agit de se plonger dans les passions françaises, « l’amour à la française » tire la couverture à lui dans cette livraison.
L’ouverture par une interview de Charline Bourgeois Taquet et Valéria Bruni-Tedeschi est assez conventionnelle d’autant plus qu’une conversation courant sur 15 pages avec Virginie Efira , actrice à la mode, l’avait précédée. 
L’auteur de théâtre Alexis Michalik se voit sollicité. 
« Jadis l’homme avait droit aux prostituées et la femme devait être vierge. » 
Un retour historique « de la galanterie à #metoo » s'avère par contre intéressant : 
«  changer d’idéal collectif, ce n’est jamais supprimer les problèmes : c’est se débarrasser des anciens et en acquérir de nouveaux ».
Concernant aujourd’hui des experts évoquent « le trouple » (couple à trois), et rappellent qu’en 2021, il y a eu plus de 200 000 victimes de violences conjugales et 94 000 viols.
Au pays rose de Ronsard, pleurent les yeux d’Elsa.
La mémoire de ces réalités ahurissantes va avec la légèreté de l’évocation des « french lovers » des années 40 en Amérique, ou les divertissants récits d’expériences avec l’application de rencontres « Tinder » ou quand persiste le jeu du hasard et que Julie livre les résultats de sa recherche du polyamour.
Sous le titre : « La confusion des sens », les mots sont éclaircis : « embrasser » bien sûr.  « Faire l’amour » a signifié un jour « faire la cour » et amitié et amour se confondaient jadis.
« Les cadenas de l’amour » attachés au Pont des Arts ou à Montmartre éloigneraient-ils de la légèreté ? Les élans ailés perdent-ils en s’accrochant ? Faut-il une preuve ?  
Bien loin de la tendresse et des émois des amants, l’évocation de la colère de jeunes Corses après la mort d’Ivan Colonna remet en lumière un épisode de violence qui avait été éclipsé par le début de la guerre en Ukraine.
Les souvenirs de la Corrèze de Franck Bouysse ressemblent aux miens, et je sais les lueurs opalines de la Bretagne, même si ce n’étaient pas des ballots de cocaïne qui s’échouaient sur les plages.
Vanessa Springora raconte le destin des sangliers de Port Cros venus du continent à la nage et devenant un problème en se multipliant.
 J'ai trouvé la nouvelle de Philippe Claudel, « la bêche » assez plate, mais les planches gourmandes de Guillaume Long toujours aussi savoureuses : « Les gnocchis d’Océane ».  
Les brutaux faits divers choisis par Jaenada ne seraient-ils pas la face ratée de l’amour ?

vendredi 23 juin 2023

Zadig. N° 17.

Le trimestriel de Fottorino  en changeant de présentation s’attache moins à la géographie des diversités de la France qu’à rassembler les matériaux constituant nos passions.
Cette fois 75 pages sont consacrées au train avec historique et expertises, étymologie et références culturelles, cartes de Le Bras, les lignes qui font rêver, les utopies ferroviaires et les tendances d’aujourd’hui avec un reportage entre Austerlitz et Collioure depuis un wagon de nuit et dans quatre trains arrivant à l’heure - c’est dire l’originalité - pour relier Lyon à Bordeaux sans passer par Paris, réussi !
La conversation avec Kad Mérad dispensera de regretter la raréfaction des magazines dans les salles d’attente, mais quel plaisir de retrouver Guillaume Long toujours autour d’une table. https://blog-de-guy.blogspot.com/2019/01/a-boire-et-manger-guillaume-long-sonia.html 
La qualité des rédacteurs est toujours aussi délicieuse : Philippe Jaenada, Claudel, Delerm alors que le récit par Mazarine Pingeot de ses vacances de Parisienne privilégiée à Hossegor, Gordes et en Auvergne m’accroche moins.
Le rappel de saccages dans la forêt ariégeoise avec coupes rases et vols de bois vient s’ajouter à l’inhumanité des incendiaires de cet été.  
Le portfolio original rend compte du travail de sept artistes (Baudouin, Rabaté, Davodeau…) décorant une grotte dans le Quercy à la façon des ancêtres préhistoriques . 
Plutôt que des aperçus furtifs en différents lieux, nous nous sommes invités à un séjour en pays basque, territoire au caractère affirmé, face à une spéculation immobilière problématique où s’expriment des opinions régionalistes aux accents nationalistes discutables.

vendredi 2 juin 2023

Schnock. N°45.

La revue des vieux de 27 à 87 ans permet de varier le curseur de nos emballements ou de nos indifférences. 
Ainsi ce numéro consacré essentiellement à « Funny De Funès » me permet de mieux comprendre le grand père de Julia De Funès, la philosophe en vogue : 
« Sans le savoir, il prédisait ainsi ce qu’est devenu, en grande partie, le cinéma d’aujourd’hui. Un spectacle pour enfants. » 
Son entretien avec Macha Béranger se concluait ainsi : 
« Je vous remercie d’être revenu, et à très bientôt.
 - A très bientôt, j’ai été ravi, ravi, ravi ! 
- … Jacob !
 - Voilà très bien (rires) » 
Et il y a de quoi dire au-delà de répliques cultes : 
« Comment Salomon, vous êtes juif ? » 
 Nous passons de A comme Anouilh à Zizanie (la) et des entretiens avec Danièle Thompson fille de Gérard Oury, à une filmographie où l’on croise Bourvil et Coluche, où l'on voit comment s’est élaboré « Hibernatus » avec Sophie Daumier qui était «  sensass » ou quand « Carambolages » est proposé au festival de Cannes :
« c’est envoyer Miss Piggy à Rungis, Madonna en tournée en Iran ». 
Dans un autre article, Laurent Chalumeau a de la verve : 
« Marcel Bluwal fait clairement partie de ces gens qui se kiffent tant tout seuls qu’on se sent dispensé d’ajouter notre adulation à celle qu’ils se vouent déjà, de peur de faire déborder un vase rempli à l’extrême. Un peu comme chez Claude Lelouch ou Johann Sfar. » 
« Chapeau melon et bottes de cuir » à la française est de la revue 
ainsi que Marthe Keller de « Elle court, elle court la banlieue » ou SAS de Gérard de Villiers. Par contre un rageux article de Dashiell Hedayat à propos de Bob Dylan me semble destiné aux initiés alors que Jean Pierre Ferland remue les braises. 
« Fais du feu dans la cheminée, je reviens chez nous » 
Le dernier défunt, Jean-Luc Godard a le dernier mot à propos de Tarantino :
«C’est un faquin, un pauvre garçon, mais tant mieux, il est heureux. Autrefois c’était le genre de personne que l’on détestait. Mais aujourd’hui on laisse aller. »

samedi 15 avril 2023

Les traversées de Dorothy Parker. Camille Mancy.

Ce livre de 150 pages à propos de la poétesse qui rédigea son inscription mortuaire:
« Excusez-moi pour la poussière » 
a failli « me tomber des mains » tant le personnage principal est pris dès l’entame dans un crépitement d’informations biographiques qu’une exhaustive notice Wikipédia rend bien mieux.
Si les évènements décrits constituent une riche trame dramaturgique, l’émotion n’effleure qu’à de brefs moments, sous un regard trop souvent distancié. La biographe n’a pas les qualités de son modèle à l’humour ravageur, parait-il.
Le romantisme des traversées en paquebot ne transparait pas plus que l’effervescence politique quand la chroniqueuse qui appartint à la rédaction de Vogue, Vanity Fair puis au New Yorker avant d’être dialoguiste s’engage dans la défense de Sacco et Vanzetti. 
« Les étoiles d’Hollywood ne savent de quoi demain sera fait. Leurs origines sont modestes, leurs noms empruntés, leurs convictions suivent le sens du vent. »
La contemporaine d’Hemingway, de Fitzgerald entre Los Angeles, Antibes, New-York justifie le bon titre « traversées », entre les deux guerres, entre deux mondes : celui des salons de l'hôtel Algonquin et les miséreux photographiés par Dorothéa Lange 
Le récit de son passage à Madrid pendant la guerre d’Espagne quand elle débarque en chapeau à fleurs, constitue le meilleur du livre :
« En fait d’interprète, le jeune homme n’a que des rudiments d’anglais, et Dorothy ne saisit que les mots « terre », « eau », « saisons ».

vendredi 24 mars 2023

Zadig .N° 15. Automne 2022.

La question essentielle: « Que demande le peuple ? » en première page de ma revue trimestrielle préférée 
ne suscite pas des éclaircissements décisifs en dehors des demandes rituelles de participation à la vie démocratique, démenties par des taux d’abstention élevés.
Peut-on oser répondre : « Le peuple désire la paix et la tranquillité » ? 
Ce serait aller contre l’idée que se font bien des journalistes ne voyant essentiellement que des masses misérables toujours au bord de la révolte, depuis qu’ils n’ont pas vu venir les gilets jaunes.
Finalement c’est en marge de ce dossier de 60 pages que certains témoignages m’ont paru plus porteurs de sens.
Les gars qui « tiennent les murs » dans une cité de Strasbourg, objets d’une autre enquête, m’ont paru représentatifs de la passivité ambiante qui ne sait que nourrir les récriminations : 
«  Leur truc de réinsertion ça ne sert à rien, wallah ! Moi j’ai passé le Caces (permis pour conduire des engins de manutention) en détention… la vie de ma mère ! Je ne m’en suis jamais servi. C’est juste pour les remises de peine qu’on y va. »
Le contre-champ optimiste est offert par les carnets dessinés de Mathieu Sapin décrivant la journée très chargée du maire admirable de Clichy sous Bois ou par l’accompagnement de bénévoles du Secours catholique venant en aide aux migrants à Calais.
La photographe qui a suivi une jeune boxeuse du côté de Roubaix rend bien l’énergie de l’adolescente et celui qui a créé un site permettant aux aveugles de circuler dans le métro sans aide extérieure est étonnant. 
Amélie Nothomb, lors d’un entretien approfondi, livre des réflexions intéressantes sur notre pays : sa complexité administrative et notre culte du conflit, 
alors que Leïla Slimani revient sur le racisme. 
Les paroles d’Abd Al Malick me semblent tellement banalement conformes à l’air du temps que je comprends son succès, sans l'apprécier,
par contre est passionnante la vie du mécène Albert Kahn qui a financé  au début du XX° siècle des photographes afin de constituer « Les archives de la planète » en couleurs. Jaenada raconte quelques histoires incroyables 
et Benacquista son déménagement. 
Un portfolio essaye de saisir l’image d’un loup dans le Massif Central 
et le récit de la mort d’un ancien photographe spécialisé dans le flamenco nous glace : il est resté allongé sur le trottoir à Paris, rue de Turbigo, pendant 9 heures avant qu’une SDF appelle les secours, trop tard.
La page consacrée à l’étymologie des mots explique la filiation entre « grammaire », « grimoire » et « glamour ». 

samedi 4 février 2023

La vie des gens. François Morel Martin Jarrie.

La principale bibliothèque de la ville propose à ses lecteurs un coin « livres qui font du bien » ainsi que « livres faciles à lire ».
Une récidive : 
C’est dans cette catégorie que j’ai emprunté sans risque de me tromper cet album, où en face de chaque portrait dessiné d’habitant de Saint Gratien associé à un objet, correspond un texte dont il est précisé : 
«  Les propos tenus par les personnages relèvent de la fiction. » 
Pourtant ils sonnent plus vrai que vrai. 
« Qu’est ce que vous voulez que je raconte. » 
«  Ne regardez pas le ménage. » 
C’est que le chanteur en verve, chroniqueur, poète sans vers, est un révélateur.
Même s’il peut manquer parfois de légèreté : 
« J’ai eu des enfants, des angines, des chaussures neuves. » 
Il sait dire les bibelots : 
« Celui-là j’y tiens, ce n’est pas le plus beau mais c’est celui que mon mari m’a offert à Pampelune aux fêtes d la Saint Firmin, il y a de ça quarante-huit ans. » 
le destin de la boulangère : 
« Je me voyais pas dans le commerce. Trop timide. Les gens ont toujours quelque chose à dire, je ne sais pas comment ils font. »
 Et les rêves : 
« L’autre fois, elle m’a annoncé qu’elle aimerait bien voir la Grande Muraille de Chine avant ses quatre-vingt-dix ans. Ce n’est pas dit qu’on y aille pas. »
........
Après une semaine sans trop d'écrans, du temps que mes petits enfants sont là, je reprendrai mes publications dimanche 12 février. 

vendredi 27 janvier 2023

6 mois. Automne 2022 hiver 2023.

Comment ne pas trouver futile la couverture de la revue du photojournalisme consacrée à « la révolution jeunes » quand le conflit ukrainien occupe plus de 50 pages sur 292 ?
Comme toujours les textes sont forts : 
«  Une photographie, tout en conservant la trace de ce qui a été vu, se réfère toujours et par nature à ce qui n’est pas vu. » John Berger  
Il en faut des pages et des pages pour contrarier nos attentions clignotantes. 
Le choix des images accompagné de commentaires qui décrivent le hors champ nous sort des brouillages numériques disparaissant aussi vite qu’ils apparaissent.
L’histoire de la rencontre d’une vieille dame et d’une toute petite voisine à Barcelone nous fait du bien,
car il n’y a plus guère d’oasis  même sous forme de métaphore
et en réalité dans le désert marocain.« On achève bien les îlots trésors ». 
Maradona a pansé bien des plaies quand il jouait à Naples
et la rupture d’une fatalité de maltraitance d’une femme à New-York pourrait être accueillie sur le plateau de la positivité si ce problème n’était pas récurrent partout dans le monde.
Le destin de Lula est aussi un exemple de réussite incroyable.
Des visages de passants chinois ont beau être mélancoliques, ils sont beaux,
contrastant avec la désolation des terres péruviennes sur lesquelles souffrent des populations misérables.
Alors la jeunesse ? 
Des ados voire des enfants sont impatients de changer de sexe,
d’autres se perchent dans les arbres pour défendre la forêt en Allemagne,
des enfants d’immigrés se cherchent en Italie,
alors qu’en Afrique du Sud, la mixité n’est pas acquise trente ans après la fin de l’apartheid.    

samedi 14 janvier 2023

Chroniques !

L’idée est excellente de nous remettre sous les yeux des critiques exprimées souvent avec élégance pour louer ou dénigrer des livres au moment de leur sortie et que les années ont consacrés parmi les essentiels de notre culture littéraire.
Nerval vu par Théophile Gautier :
« cherchait l’ombre avec le soin que les autres mettaient à chercher la lumière. » 
Et Hugo : 
« Stendhal ne s’est jamais douté un seul instant de ce que c’était que d’écrire.» 
Mauriac avait trouvé « abject » « Le deuxième sexe ».
50 ouvrages éminents nous sont rappelés, de « Delphine » par Madame de Staël (1802) à « Molloy »(1951) de Beckett. 
Mais ces 240 pages éditées par le service des archives de la Bibliothèque de France devraient se lire parfois avec une loupe, car elles abusent des reproductions réduites des journaux d’alors qui s’avèrent redondantes de temps à autre avec des textes un peu pâlichons les accompagnant.
La diversité des chefs d’œuvres commentés est bienvenue que ce soient 
des romans : « Vingt mille lieux sous les mers », 
de la poésie : « Les chants du Maldoror » 
ou du théâtre : « Les bonnes » ou « Cyrano de Bergerac »
Les étrangers sont honorés : Dostoïevski ou Stevenson, 
et quelques désuets sont rappelés : Loti, Triolet 
des outsiders remis en lumière : Alexandra David-Néel. 
Si l’on me dit Bram Stoker, je cale, mais son œuvre « Dracula » me parle, 
par contre « Monsieur Vénus » pas plus que Rachilde restent totalement inconnus.
Des avis donnent envie d’aller voir sur place, à propos de Simone Weil :
« Des trouvailles fulgurantes, qui appellent la comparaison avec Pascal. » 
Ils confirment aussi des champions, Camus : 
« J’aime cette plume qui troue le papier… » 
ou prophétisent  dès 1933: 
«  Le Procès est comme un long cauchemar empoignant, où tout est grimaçant et où tout est vrai. Kafka apparaitra peut-être comme un écrivain de génie. »

dimanche 1 janvier 2023

L’almanach dauphinois 2023.

Comme il en est des travaux à mener au jardin suivant les saisons, voilà comme de coutume, ma livraison de début d’année tellement plus rétrospective que prospective.
Les premières pages fleurent bon le champignon, le miel, les plantes médicinales, et tout est répertorié :
en février « les pies s’accouplent à partir du 15 ».
Une place est prévue pour compléter la date du départ des hirondelles.
Les dictons se renouvellent :
« Se faire aimer prend des années, se faire haïr prend cinq minutes »
« On ne commande à la nature qu’en lui obéissant. »
« Apprends avec peine, tu sauras avec plaisir ».
La rubrique concernant les centenaires s’étoffe d’année en année, 14 500 étaient recensés en 2008, ils sont plus de 21 000 aujourd’hui (record d’Europe). C’est la génération de la guerre et plusieurs d’entre elles ont été héroïques, la « Marianne » de Crémieu ou la FTP de Saint Laurent à Grenoble. L'une d'elles rapporte des conditions de vie particulières à Saint Véran dans le Queyras quand un cartable en bois servait de luge.
Marie Jeanne de son nom de résistante (Paulette Jacquier- Roux) de la Frette, disparue en 1975, m’avait accordé un entretien lorsque je cherchais des témoignages sur la seconde guerre pour mes élèves. Son histoire incroyable est racontée : combattant au col du Banchet, faite prisonnière, elle s’échappa et reprit le combat.
D’autres personnalités locales sont mises à l’honneur : François-Jacques Larderel a laissé son nom à un village de Toscane, Larderello, pour lequel il a su tirer partie de la chaleur dégagée dans une zone volcanique parsemée de sources chaudes : il fut un des pionniers de la géothermie
Céleste Mogador, de son vrai nom Céleste Venard issue d’une famille dauphinoise noble a laissé son nom à un théâtre parisien, elle a inventé le french cancan. 
Saint Georges d’Espéranche, passé de 3000 à 3500 habitants en 10 ans, située dans la sphère d’influence de Lyon, essaie de ne pas devenir un village dortoir. Berliet et l’Unité hermétique de La Verpillière procuraient des emplois, maintenant ceux-ci sont répartis entre Lyon, Bourgoin et Vienne avec une zone d’activité au carrefour La Fayette à la sortie du village. Le croisement porte le nom de La Fayette, depuis que le marquis fit un grand banquet électoral en opposition à Charles X en 1829. 
L’attention à la météo n’est plus anecdotique dans le rappel des nouvelles de l’Isère de l’année dernière où le recensement fait apparaître une perte de 300 habitants à Grenoble et un gain de 1600 habitants à Bourgoin.
Les rubriques sont immuables :
la chanson : 
« C’est la mésange et le pinson (bis)
Voulant se marier tous deux, 
Landerinette,
Voulant se marier tous deux
Landreriron » 
Les expressions dauphinoises: 
« être bien mis », « être remonté »
Les plantes : 
salsifis des prés 
et les fruits : la poire de Montluçon.
Les bêtes : comment distinguer une couleuvre d’une vipère qui se disait en patois « la barbotte » dans les Terres froides ou « lou gisclar » à Dieulefit pour l’une et le « vipiau » à Saint Chef pour l’autre.
Le matefain parmi les recettes.
Les choses disparues : les « cribs » : les séchoirs à maïs qui formaient comme des murs dorés dans les campagnes des années 60. Ils ont presque tous disparus comme les punitions à l’école et les courses cyclistes d’amateurs. 
Au  col du Barioz ou en Mathéysine des bénévoles persistent à faire vivre de petites des stations de ski. 
Selon Fafois, une parole d’honneur vaut mieux qu’un serment : "un serment ça se prête, alors qu’une parole d’honneur ça se donne." 

vendredi 30 décembre 2022

Essais 2022.

Quand « Impensable » est le seul mot possible face à l’invasion de l’Ukraine
des romans peuvent toucher et aider à comprendre le monde: « Guerre » de Céline.
Houellebecq avec « Anéantir » ausculte l’époque,
et la revue « Zadig » varie les focales. 
A l’abord d' écoles sans vagues, toute contribution est bonne à prendre : 

vendredi 9 décembre 2022

Urgence pour l’école républicaine. Camille Dejardin.

Qu’est ce que j’ai à m’obstiner à lire des textes concernant l’école ?
« Notre système scolaire, inefficace et pourvoyeur d’illusions, est de plus en plus frustrant pour tous les acteurs. »
Porter un avis concernant une institution attaquée de toutes parts ne peut que m’amener à ressortir la bannière fatale : « c’était mieux avant » et donc accroître ma boomer illégitimité.
Mais je fais confiance à la collection « tract » de chez Gallimard:
La clarté, la vigueur de l’auteure de ces 50 pages donne à réfléchir avec quelques embruns rafraichissants au pays du « pas de vague ».  
Se rappellent d’emblée les 90 % de réussite au bac pour ensuite 60% des inscrits à l’université qui échouent à terminer une licence, et les classements internationaux indignes.
Concernant les évaluations, on sent le vécu quand elle évoque les mécanismes scandaleux d’harmonisation dans les jurys d’examen: 
« en amont, des épreuves trop faciles pour le niveau censément évalué, et en aval une injonction à applaudir à ce qu’on trouve pour ne rien avoir à changer.»  
Je ne peux que relever une remarque qui m’a servi de viatique pendant ma carrière après que des encouragements excessifs de ma part ont trompé un père au moment de l’annonce d’un redoublement :   
« Soulignons qu’avouer que l’on ment sur le niveau des élèves n’est nullement les traiter d’imbéciles. C’est précisément parce qu’on ne les mésestime pas qu’il faut dénoncer un système condescendant qui ne fait que des perdants. »
 Le rapprochement entre le slogan « l’élève au centre du système » et celui de MacDo : « Venez comme vous êtes » est pertinent. 
« Contre cette vision, on rappellera que l’école se justifie en tant qu’un enfant doit être formé et instruit et qu’une institution collective, nationale et non communautaire, est jugée la plus à même de lui fournir les références et pratiques prioritairement requises pour la vie commune. » 
Est-il besoin de l’affirmer, tant ça n’irait pas de soi ?Je trouve sa description des bâtiments scolaires plutôt exagérément misérabiliste quand les établissements du centre ville sont parfois plus inconfortables que des constructions récentes en banlieue où est appliqué parfois ce qu’elle souhaite en matière d’éco responsabilité et de résilience.
Elle demanderait volontiers de laisser les portables aux portiques pour rejoindre des classes aux effectifs moins lourds, quelque soit la zone.
La prof de philo suggère des solutions et revient à la racine des mots qui tant se réduisent : 
« Il faut aussi circonscrire la place à accorder à l’objet ambigu qu’est le «monde contemporain. A vrai dire, si celui-ci est vraiment « monde » (du latin mundus, harmonieux, traduisant le grec kosmos, totalité organisée) et vraiment « contemporain » (du même temps que nous) alors il est à la fois trop vaste et trop restreint pour l’école. Trop vaste, car il ne saurait s’apprendre in abstracto : en tant que « monde » il doit être exploré. Trop restreint, car il est l’élément spontané de nos vies : « contemporain », il doit être mis en perspective pour être compris. L’école est ou doit précisément être le lieu du refus de l’immédiateté - dont la « facilité » et « le quotidien » sont deux avatars invasifs - au profit du doute constructif et de la prise de recul informée. » 

dimanche 20 novembre 2022

Schnock n°44.

« Salut ! Tu-Vas-Bien ? » 
«Les Inconnus » ne le seront plus guère après 84 pages que lui consacre la revue des 27 à 87 ans.
« Bernard c’est plus le rock indé. Didier a une formation de guitariste classique et des goûts assez étranges (rires), comme les chansons de vampires, il est très à l’aise dans beaucoup de styles. Pascal, c’est la culture du jazz, de musiques brésiliennes et de soul… »
Leurs parodies étaient très musicales et l’évocation de leurs sketchs constitue une agréable révision d’années souriantes.
Didier Bourdon, Bernard Campan, Pascal Légitimus nous ont bien fait marrer : « Les trois frères »  ont été vus par 7 millions de spectateurs en 1995 : « cent patates ! »
Il reste de la place pour d’autres articles toujours bien troussés.
Si Jean Louis Livi, neveu d’Yves Montand, a pu passer incognito dans nos vies, son rôle de producteur lui a fourni un carnet d’adresses de stars, nous avons forcément croisé Philippe Labro qui a touché au journalisme à la télé, à la radio, dans la presse écrite, la chanson, la littérature, le cinéma.
J’avais retenu de Pompidou davantage son passage chez Rothschild que son Anthologie de la poésie française. Interrogé sur l’affaire Russier, il pouvait citer Eluard : 
« Comprenne qui voudra, moi mon remords ce fut la victime raisonnable, au regard d’enfant perdue, celle qui ressemble aux morts qui sont morts pour être aimés. » 
On peut trouver dans le passé des confirmations et des découvertes.
« La saison cinématographique » de 66 à 93 recensait chaque année tous les films : «  La petite sainte y touche » et Jean Rouch.
Doisneau avait saisi des images d’un duel en 1949 entre un nostalgique de Napoléon et un journaliste : arrêt au premier sang.
Dans les rubriques habituelles puisqu’il s’agit pour les livres, les musiques ou les films de dégoter des trésors : Jean Amila auteur de la série noire m’avait échappé, Extraballe était resté au secret et caché « Le dossier 51 » de Deville.
Par contre le top 15 de la lingerie féminine sera accompagné pour longtemps encore de la musique de Dim et du regret de ne plus voir Aubade aux arrêts de bus.