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vendredi 18 octobre 2024

Schnock n° 51.

La nostalgie sourit avec cette livraison bien fournie en littérature, foot, ciné et chanson.
1/3 des 175 pages du trimestriel est occupé par une évocation de Françoise Sagan 
à qui Jérôme Garcin avait demandé de rédiger son épitaphe :
« Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, "Bonjour tristesse", qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »
Ses formules fécondes et légères s’accordent bien à l’esprit et au style de la revue: 
« On ne sait jamais ce que le passé nous réserve. »
« Ce n’est pas le doute, c’est la certitude qui rend fou, disait Nietzche, ou un autre. » 
Il s’agit d’un hommage délicat et vif pour l’auteur d’ « Un orage immobile », « Avec mon meilleur souvenir » « Un peu de soleil dans l’eau froide »… à travers interview de son fils et évocation de sa bande, anecdotes et citations rassemblées dans un « Petit Sagan illustré » où il est question de Mitchum déguisé en hamburger, de Proust et de Star trek. 
Ses rapports à la musique, aux bagnoles sont également évoqués à la suite d’une sélection de dix livres du « charmant petit monstre » moderne dans ses manières d’être et dans la continuité de Colette voire de Madame de Sévigné pour le style. 
Caroline Loeb (« C’est la ouate ») qui a monté un spectacle «  Françoise par Sagan » met en relief sa liberté.
Avec Platini, Giresse, Tigana, nous revenons vers « le carré magique », où ils étaient au moins cinq en comptant Genghini et Fernandez.
Brigitte Fossey a eu une riche carrière bien après « Jeux interdits »
ainsi que « le nonchalant qui passe », « Le monocle rit jaune », Paul Meurisse, l’un des « Diaboliques ».
Avec Jonasz nous revenons sur la «  fabuleuse histoire de Mister Swing » 
avant de remettre sur le dessus de la pile de vinyles : Lili Drop, 
et celle des DVD : « Une fille cousue de fil blanc » par Michel Lang, 
alors que pour les bouquins Alphonse Boudard prophétise : 
« Les femmes sont déjà proxénètes, gangsters, policières, ministres, chefs d’état, tandis que les hommes les remplacent à la crèche, à la vaisselle, à l’atelier de couture ou sur le trottoir.Il reste encore le Vatican à investir… »

vendredi 4 octobre 2024

VIEUX.

Après avoir développé une citation de Groucho Marx dans son premier numéro : 
« Dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s'est passé.»
le magazine d’Antoine de Caunes en son deuxième numéro confirme son côté plaisant.
Le joli carnet d’adresses de l’homme de télévision lui permet de s’adjoindre des rédacteurs  à belles plumes et de badiner avec quelques personnalités sympathiques.
En couverture Iggy Pop porte dans ses bras le héros de « Nulle part ailleurs » qui donne longuement la parole à Maryse, la femme de son ancien compère Philippe Gildas.
Ces copinages passent bien quand nous retrouvons monsieur Poulpe, Patrice Leconte, Laurent Chalumeau, Zabou Breitman et Marx (Thierry) au rendez-vous de la légèreté.
Si la chronique de Thomas Legrand est convenue, la linguiste Julie Neveux prête une oreille attentive au langage des jeunes. 
« Un vieux c’est toujours un jeune d’hier. Difficile aussi de ne pas être vexé. Contrarié. Voire d’en faire un principe moral. Et voilà qu’on est devenu un vieux con. »
 Les mots, marqueurs générationnels mettent « Un daron en galère »: 
«Mais ne jetons pas l’anathème sur les djeunz à propos de cette cancelisation des voyelles » 
Nicolas d’Estienne d’Orves, lui, réhabilite des mots oubliés et Jean Louis Fournier en promo pour son livre : «  Il y a encore de la lumière sous mon chapeau » proclame sa fierté d’être vieux.
Autour des « aidants », dont le nombre est estimé à 11 millions en France, des réflexions s’avèrent nécessaires. Mais, à mon avis, le recours systématique à la collectivité dans une société où l'individualisme est la règle, devrait être interrogé aussi.
Est évoqué le succès théâtral à Avignon de « La vie secrète des vieux » où il est question de sexualité qu’une militante du CNaV (Conseil National autoproclamé de la Vieillesse) développe, avant un article sur la Viagra qui « redonne la banane », sans oublier « la tendresse bordel ! »
La riche rubrique culturelle en conclusion de ces 130 pages, nous rappelle que les premiers romans peuvent venir sur le tard. 
Un photographe a beau ne pas forcément bien « encadrer ses modèles », le résultat peut être fort beau.
Il n’a pas seulement des souvenirs de René Fallet ou des retrouvailles comme avec Pierre Richard en verve, avant que son docteur lui demande :
«  … j’ai mon bloc d’ordonnances. Alors Pierre qu’est-ce qui  vous ferait plaisir ? »  
Je découvre le dessinateur Mo/CDM ( Mo diminutif de Heimoana + Chieur Du Monde) dont le dessin «  Le rap c’est nul » tagué par un papy dont la compagne pouffe sous le capot d’une voiture abandonnée, est plutôt transgressif. 

vendredi 13 septembre 2024

Schnock. N° 49.

C’était au moment où 2023 se finissait et la revue trimestrielle qui aime bien les listes avait retenu parmi les mots à la mode : « iconique », « immersif », « pas de souci », facilement repérables alors que j’étais passé sans l’entendre près de « GOAT » (Greatest All The Time).
Dans ce numéro, nous pouvons tout apprendre de la carrière de Bernie Bonvoisin, chanteur du groupe Trust, 
et de celle du dessinateur Jean Claude Poirier, créateur de Supermatou dans Pif Gadget, héros de la ville de Raminagroville.
Après le rappel des publicités d’Isabelle Aubret pour Sol Amor, Sylvie Vartan avec Kelton, et Dalida vantant Saint Raphaël, près de 100 pages sont consacrées à Bourvil.
Sa filmographie fait l’impasse sur les insurpassables « Corniaud » et « Grande vadrouille » pour rappeler, « Les grandes Gueules » de Robert Enrico, « Un drôle de paroissien » avec Mocky ou « Le rosier de Madame Husson » pour sa période champêtre.
Concernant « La traversée de Paris » d’après une nouvelle de Marcel Aymé, nous avons droit à un instructif making-of avec des extraits de dialogue d’Aurenche et Bost : 
 « Non mais regarde-moi le mignon, là, avec sa face d'alcoolique et sa viande grise avec du mou partout, du mou, du mou, rien qu'du mou ! Mais tu vas pas changer d'gueule un jour, toi, non ?! Et l'autre, là, la rombière, la gueule en gélatine et saindoux. Trois mentons, les nichons qui déballent sur la brioche. 50 ans chacun, 100 ans pour le lot, 100 ans de conneries ! » 
Gabin, Grangil, "montait dans les tours", Bourvil interprétant Martin était plus sobre : 
« Y a pas d’âge pour être chômeur ».
 Dans d’autres films la rigolade va bien avec des vérités : 
« J’ai vendu mon fusil pour acheter des cartouches »
« En matière de justice, l’erreur est inhumaine »
« Quand on n’a rien, ça se voit de loin. » 
André Raimbourg, son vrai nom, évoqué par son fils, fut l’homme d’une seule femme. 
L’article évoquant ses partenaires Michèle Morgan, Anna Magnani, Danielle Darrieux met en valeur la douceur de l’anti-macho, du bon gars, du gentleman, qu’il soit « mâle dégrossi », voire mari indigne.
Pour ses « petites chansons » le rédacteur ne s’attarde pas sur « La tactique du gendarme » ni sur « Les crayons », il y en a tant d’autres : 
« La balade irlandaise »( un oranger)» ,« C’était bien (le petit bal perdu) »…
Enrico Macias (Gaston Grenassia) revient sur sa carrière qui l’a mené de Bab el Oued au Carnegie Hall et devant 20 000 personnes au pied des pyramides à l’invitation du président égyptien Sadate.
L’évocation du film de Laurent Heynemann « Les mois d’avril sont meurtriers » me rappelle moins Jean Pierre Marielle que Jean Pierre Bisson qui m’avait offert une de mes émotions théâtrales des plus mémorables : « Sarcelles sur mer ». 
L’artichaut serait-il si rétro qu’il a droit à son hommage ?  
« Artichaut must go on »

vendredi 28 juin 2024

Zadig n° 21. La bagnole stop ou encore ?

Après le train qui ne posait aucun problème écologique,
le trimestriel développe un questionnement équilibré autour de l’automobile.
Un grand récit historique, illustré par une 2CV en bord de route lors d'un pique-nique et un départ des 24 heures du Mans du temps des rêves de vitesse, se boucle sur l’annonce des appellations des prochaines Renault électriques : R4 et R5. 
« La bagnole cristallise les clivages territoriaux et illustre jusqu’à la caricature le dilemme entre préservation du pouvoir d’achat et décarbonation des activités humaines. »
Si les rubriques révisant le vocabulaire automobile ou l’évocation de l’auto radio comme objet culte étaient prometteuses, la mise en forme est bien plate. 
Pourtant la revue soigne son style comme dans le récit vivant d’Arles à Paris en Blablacar 
et offre des angles originaux avec l’association CAR 80 (Conduire l’automobile d’un retraité de la Somme), 
les voitures « sans pe » (sans permis) qu’adoptent des adolescents à Marseille 
ou l’évocation de la R12 pour les voyages au bled. 
Des entretiens avec des automobilistes sur une aire d’autoroute,
avec des animateurs de sites POA (Petites Observations Automobiles) sur YouTube complètent un argumentaire documenté à propos de la voiture électrique 
et des réflexions autour du genre même si  la réflexion « femme au volant, mort au tournant » est morte.
Pastoureau « le spécialiste des pigments » n ‘apporte pas grand-chose lorsqu’il constate que la palette des couleurs de voitures est peu diversifiée, 
pas plus que Le Bras et ses cartes une fois qu’il a dit que  
«  Dans la diagonale du vide, les modèles de voitures plus écolos peinent à percer mais ils ont du succès dans l’Ouest de Paris ». 
Le dessin de Catherine Meurisse et la bande dessinée de Guillaume Long séduisent toujours. 
La conversation avec Dany Boon, acteur qui ne me passionne pas à priori, s'avère intéressante et sa trajectoire extraordinaire, depuis une enfance difficile qu’il est capable de regarder avec tendresse.
Au pays des algues vertes dont une bande dessinée a contribué à la mise en cause d’un système d’agriculture bretonne malfaisant
des agriculteurs résistent, cultivent du blé noir, du chanvre, élèvent des moutons des landes de Bretagne, des vaches armoricaines et préservent des semences : coco de belle Ile, sucrine du Berry, Potimaron Angélique, ils refont haies et talus…
Dans les vignobles bordelais, les conditions de vie de roumains ou de marocains soumis à des passeurs et à des patrons véreux sont scandaleuses, alors que les passeurs de savoir-faire anciens à Grasse sentent bon.
La nouvelle de Belinda Cannone m’a laissé indifférent, 
mais j’ai découvert un écrivain Franck Courtès, dont un voisin a affiché :  
« Oubliez le chien, méfiez vous du maître », terrible. 

samedi 27 avril 2024

Les soldes chez But. Pascal Fioretto.

Ce pastiche du prix Nobel de littératchure, Annie Ernox, est réjouissant. 
« Depuis sa rencontre avec Bourdieu derrière le pilier de l’amphi Richelieu de Paris I, elle n’a jamais dérogé à la mission qu’IL lui a confiée ; écrire la Vie des pauvres pour les faire plaindre par des bourgeois lettrés. » 
Hésitant sur le pronom à employer, « je » ou « elle » pour un récit intime à vocation collectiviste, l’auteur de « L’élégance du maigrichon », de « Mélatonine », connaisseur en littérature, empaquette, en moins de cent pages, l’égérie qui fit pleurer de bonheur l’émotif Mélenchon. 
« Je veux être celle qui envoie valser les étiquettes et se contrefout comme de sa première épilation maillot du titre de ses livres. Celle qui ne sa lassera jamais de rappeler que Kundera, Roth, Pessoa, Proust, Borges, Kafka, Vila Mata… et tant d’autres tricheurs et truqueurs n’ont jamais eu SON prix. » 
Cette fois l’esthète des supermarchés 
que j’avais tant aimée et critiquée
réside - rançon de la gloire - en pays inconnu, celui de l’humour.
Après quelques certifiés ATSEM, responsables de CDI, et un seul conseiller d’éducation, une nouvelle aventure amoureuse, prétexte à écrire, nous permet de partager la misère des ultra riches et d’assister, loin de Cergy-Pontoise à un cours sur l'écriture plate dans une université américaine. 
«…  de l’écriture plate, je crois être parvenue à l’écriture creuse, celle qui ne se contente pas de mettre les choses à plat mais les évide de l’intérieur »

vendredi 19 avril 2024

Schnock n° 41.

En picorant au hasard dans la collection des revues des vieux de 27 à 87 ans 
puisque le temps ne fait rien à l’affaire, voilà le numéro consacré à celle qui « faisait peur aux garçons » : Claudia Cardinale. Honnêtement pas que peur.
N’est ce pas Paul VI qui la reçut ? 
«  Moi je suis pape mais vous vous êtes cardinal, vous pouvez faire ce que vous voulez » 
Effectivement, à travers un entretien avec elle, Jacques Perrin son partenaire de « La fille à la valise », Jean Sorel celui de «  Sandra » de Visconti, ou sa fille Claudia, la brune C.C.  face à B.B. dans « Les pétroleuses » a gagné sa liberté au cours d’une riche carrière.
Après une sélection de 12 films dont « Cartouche », « Fitzcarraldo », ses rôles se sont étoffés  dans «  Il était une fois dans l’Ouest » ou « Les professionnels ». Et dans le bric à brac sensément alphabétique allant de C comme « Cascadeuse » à C comme « Chirurgie esthétique », il n’y a pas que Moravia qui s’exprime : un admirateur  pour celle qui fut la femme d’un seul homme, Pasquale Squitieri, un réalisateur très coureur : 
« Je suis un jeune paysan, j’habite la Lozère, dans un petit village joli, je ne suis pas bien riche, mais j’ai quand même un revenu stable. J’ai sept vaches, qui donnent du bon lait et du beurre, trente trois brebis et un bouc. J’ai aussi une agréable petite maison mais… ? Il me manque quelque chose pour être tout à fait heureux. Chère Claudia, si vous le désirez, vous serez la plus heureuse et la plus chérie de toutes les femmes du monde. » 
Après ce dossier fourni, la fin prématurée de la chanteuse, Joëlle Mogensen du groupe musical « Il était une fois » donne une tonalité sombre à l’évocation d’Yves Bigot.
Et même l’article consacré au « Corned beef » fabriqué à Bressuire (Deux Sèvres) malgré son « effet bœuf » a des allures crépusculaires.
Patrick Bouchitey et Jackie Berroyer, toujours intéressants, réhabilitent en 12 pages le film rock « Lune froide » sur la route de l’oubli.
Mais le rappel des pubs d’ Europe N° 1 de 1966 à 1992, de Bellemare à Delarue, ajoute un chapitre de plus au catalogue : « La nostalgie n’est plus ce qu’elle était ».

lundi 1 janvier 2024

Almanach dauphinois 2024.

La publication annuelle réceptacle du temps passé a toujours été hors du temps, elle ne peut être démodée.
Les abeilles apprécieront toujours en janvier que « Lors d’une journée ensoleillée et calme »   soient alimentées « en candi les compagnies nécessiteuses ».
La remarque de bon sens «  Seuls les riches se vantent d’avoir été pauvres » reste vraie, ainsi que le dicton : «  C’est la dose qui fait le poison. »
Même vendus au cœur des villes, les conseils concernent surtout  jardiniers, paysans, cueilleurs de champignons et ceux qui font attention à la lune : 
« épicéa : abattu et débité les jours suivant la pleine lune, la sève se fige et le bois se conserve mieux. »
L’humour de Fafois délicieusement obsolète perdure: 
 « 5 enfants avec le même prénom ! Comment faites-vous pour vous adresser à l’un d’eux ? demande madame Fafois.
- Je l’appelle par son nom. » 
La liste des événements de l'année dernière en Isère s’étend d’un juillet à l’autre: de la visite d’Emmanuel Macron à ST Microélectronique aux émeutes urbaines. 
Pour la météo il s’agit du second été le plus chaud après celui de 2003:
2,4 degrés supérieurs aux normales de la période 1991-2020.  
Le reportage à Buis-Les-Baronnies« l’on se sait dauphinois mais où on se sent provençal » se souvient qu’au XIV° siècle il y avait 1000 habitants de plus que les 3500 d’aujourd’hui. L’employeur le plus important est l’hôpital-EHPAD et l’escalade constitue l’attrait touristique principal. L’abricot, les olives (« La tanche » variété unique au monde), le tilleul ont fait la renommée de la bourgade traversée par l’Ouvèze. Les  fils Ducros y avaient installé une usine qui employait 200 personnes dans les années 60-70 alors que l‘équipe de football féminin, les « Albertines » connaissait se heures de gloire.
L’expression de chez nous « Faire beau » signifie «  se mettre en colère ».  
« Elle a fait beau quand elle a vu arriver les gamins dans le couloir avec les souliers tout pleins de boue » 
Nous apprenons tout sur « l’amer à boire », la chicorée sauvage 
et le campagnol « dont la femelle peut avoir six ou sept portées par an de quatre ou cinq petits ».
Nous n’en sommes pas rendus à revenir au gazogène auquel certains conducteurs s’étaient convertis très rapidement pendant l’occupation, pas plus qu’à « la brèle », la Peugeot 103, qui éveille des nostalgies.
Les talents du sourcier sont de plus en plus sollicités avec le réchauffement climatique. 
L’huile de foie de morue n’éveille pas de mélancolie alors que perdure le temps des vogues, des fêtes de village dont un invitation fin du XIX° siècle dans le Champsaur était charmante. 
«  nené péréu, béus amourious… »
« Venez ici beaux amoureux
Qui cherchez une femme aimable
Nous avons des filles qui ont belle chevelure »  
« un bèun plumaje ».
Le patois varie, par exemple à  Tullins on dit : « acheu de né » 
et dans le Valgaudemar : «  à tseil néo » pour « il a neigé ».
L’histoire du petit violoniste, sous forme de conte, est celle de Lully 
alors qu’un lecteur  raconte ses vacances au bord de la mer en 1964 chez un dame qui guérissait les brûlures et les piqures de vives.
La dimension régionale est toujours affirmée avec la personnalité découverte cette année: l’affichiste Achille Mauzan né dans les Hautes- Alpes, il connut la célébrité surtout en Italie et en Argentine.
Les caractéristiques sont replacées dans un contexte plus général : 
le département de l’Isère compte deux fois plus de communes (512) 
que la Suède huit fois  plus peuplée.
Parmi les biographies des centenaires, quelques anecdotes peuvent alimenter des réflexions :
« Le brave Louis, redoutable joueur de coinche se rend toujours chez des amis pour « taper le carton » tous les vendredis après midi.  
« Comment j’y vais ? En voiture pardi ! Je conduis toujours. Je dois être l’un des automobilistes les plus vieux de France. Mais je ne vais pas loin. J’ai promis à mes filles de ne pas sortir de la commune. »

vendredi 6 octobre 2023

Zadig n°18. Eté 2023.

Depuis le premier numéro du trimestriel précieux pour la variété de ses points de vues,
un changement s’est opéré  en privilégiant un thème parmi les 170 pages. 
Et puisqu’il s’agit de se plonger dans les passions françaises, « l’amour à la française » tire la couverture à lui dans cette livraison.
L’ouverture par une interview de Charline Bourgeois Taquet et Valéria Bruni-Tedeschi est assez conventionnelle d’autant plus qu’une conversation courant sur 15 pages avec Virginie Efira , actrice à la mode, l’avait précédée. 
L’auteur de théâtre Alexis Michalik se voit sollicité. 
« Jadis l’homme avait droit aux prostituées et la femme devait être vierge. » 
Un retour historique « de la galanterie à #metoo » s'avère par contre intéressant : 
«  changer d’idéal collectif, ce n’est jamais supprimer les problèmes : c’est se débarrasser des anciens et en acquérir de nouveaux ».
Concernant aujourd’hui des experts évoquent « le trouple » (couple à trois), et rappellent qu’en 2021, il y a eu plus de 200 000 victimes de violences conjugales et 94 000 viols.
Au pays rose de Ronsard, pleurent les yeux d’Elsa.
La mémoire de ces réalités ahurissantes va avec la légèreté de l’évocation des « french lovers » des années 40 en Amérique, ou les divertissants récits d’expériences avec l’application de rencontres « Tinder » ou quand persiste le jeu du hasard et que Julie livre les résultats de sa recherche du polyamour.
Sous le titre : « La confusion des sens », les mots sont éclaircis : « embrasser » bien sûr.  « Faire l’amour » a signifié un jour « faire la cour » et amitié et amour se confondaient jadis.
« Les cadenas de l’amour » attachés au Pont des Arts ou à Montmartre éloigneraient-ils de la légèreté ? Les élans ailés perdent-ils en s’accrochant ? Faut-il une preuve ?  
Bien loin de la tendresse et des émois des amants, l’évocation de la colère de jeunes Corses après la mort d’Ivan Colonna remet en lumière un épisode de violence qui avait été éclipsé par le début de la guerre en Ukraine.
Les souvenirs de la Corrèze de Franck Bouysse ressemblent aux miens, et je sais les lueurs opalines de la Bretagne, même si ce n’étaient pas des ballots de cocaïne qui s’échouaient sur les plages.
Vanessa Springora raconte le destin des sangliers de Port Cros venus du continent à la nage et devenant un problème en se multipliant.
 J'ai trouvé la nouvelle de Philippe Claudel, « la bêche » assez plate, mais les planches gourmandes de Guillaume Long toujours aussi savoureuses : « Les gnocchis d’Océane ».  
Les brutaux faits divers choisis par Jaenada ne seraient-ils pas la face ratée de l’amour ?

vendredi 23 juin 2023

Zadig. N° 17.

Le trimestriel de Fottorino  en changeant de présentation s’attache moins à la géographie des diversités de la France qu’à rassembler les matériaux constituant nos passions.
Cette fois 75 pages sont consacrées au train avec historique et expertises, étymologie et références culturelles, cartes de Le Bras, les lignes qui font rêver, les utopies ferroviaires et les tendances d’aujourd’hui avec un reportage entre Austerlitz et Collioure depuis un wagon de nuit et dans quatre trains arrivant à l’heure - c’est dire l’originalité - pour relier Lyon à Bordeaux sans passer par Paris, réussi !
La conversation avec Kad Mérad dispensera de regretter la raréfaction des magazines dans les salles d’attente, mais quel plaisir de retrouver Guillaume Long toujours autour d’une table. https://blog-de-guy.blogspot.com/2019/01/a-boire-et-manger-guillaume-long-sonia.html 
La qualité des rédacteurs est toujours aussi délicieuse : Philippe Jaenada, Claudel, Delerm alors que le récit par Mazarine Pingeot de ses vacances de Parisienne privilégiée à Hossegor, Gordes et en Auvergne m’accroche moins.
Le rappel de saccages dans la forêt ariégeoise avec coupes rases et vols de bois vient s’ajouter à l’inhumanité des incendiaires de cet été.  
Le portfolio original rend compte du travail de sept artistes (Baudouin, Rabaté, Davodeau…) décorant une grotte dans le Quercy à la façon des ancêtres préhistoriques . 
Plutôt que des aperçus furtifs en différents lieux, nous nous sommes invités à un séjour en pays basque, territoire au caractère affirmé, face à une spéculation immobilière problématique où s’expriment des opinions régionalistes aux accents nationalistes discutables.

vendredi 2 juin 2023

Schnock. N°45.

La revue des vieux de 27 à 87 ans permet de varier le curseur de nos emballements ou de nos indifférences. 
Ainsi ce numéro consacré essentiellement à « Funny De Funès » me permet de mieux comprendre le grand père de Julia De Funès, la philosophe en vogue : 
« Sans le savoir, il prédisait ainsi ce qu’est devenu, en grande partie, le cinéma d’aujourd’hui. Un spectacle pour enfants. » 
Son entretien avec Macha Béranger se concluait ainsi : 
« Je vous remercie d’être revenu, et à très bientôt.
 - A très bientôt, j’ai été ravi, ravi, ravi ! 
- … Jacob !
 - Voilà très bien (rires) » 
Et il y a de quoi dire au-delà de répliques cultes : 
« Comment Salomon, vous êtes juif ? » 
 Nous passons de A comme Anouilh à Zizanie (la) et des entretiens avec Danièle Thompson fille de Gérard Oury, à une filmographie où l’on croise Bourvil et Coluche, où l'on voit comment s’est élaboré « Hibernatus » avec Sophie Daumier qui était «  sensass » ou quand « Carambolages » est proposé au festival de Cannes :
« c’est envoyer Miss Piggy à Rungis, Madonna en tournée en Iran ». 
Dans un autre article, Laurent Chalumeau a de la verve : 
« Marcel Bluwal fait clairement partie de ces gens qui se kiffent tant tout seuls qu’on se sent dispensé d’ajouter notre adulation à celle qu’ils se vouent déjà, de peur de faire déborder un vase rempli à l’extrême. Un peu comme chez Claude Lelouch ou Johann Sfar. » 
« Chapeau melon et bottes de cuir » à la française est de la revue 
ainsi que Marthe Keller de « Elle court, elle court la banlieue » ou SAS de Gérard de Villiers. Par contre un rageux article de Dashiell Hedayat à propos de Bob Dylan me semble destiné aux initiés alors que Jean Pierre Ferland remue les braises. 
« Fais du feu dans la cheminée, je reviens chez nous » 
Le dernier défunt, Jean-Luc Godard a le dernier mot à propos de Tarantino :
«C’est un faquin, un pauvre garçon, mais tant mieux, il est heureux. Autrefois c’était le genre de personne que l’on détestait. Mais aujourd’hui on laisse aller. »

samedi 15 avril 2023

Les traversées de Dorothy Parker. Camille Mancy.

Ce livre de 150 pages à propos de la poétesse qui rédigea son inscription mortuaire:
« Excusez-moi pour la poussière » 
a failli « me tomber des mains » tant le personnage principal est pris dès l’entame dans un crépitement d’informations biographiques qu’une exhaustive notice Wikipédia rend bien mieux.
Si les évènements décrits constituent une riche trame dramaturgique, l’émotion n’effleure qu’à de brefs moments, sous un regard trop souvent distancié. La biographe n’a pas les qualités de son modèle à l’humour ravageur, parait-il.
Le romantisme des traversées en paquebot ne transparait pas plus que l’effervescence politique quand la chroniqueuse qui appartint à la rédaction de Vogue, Vanity Fair puis au New Yorker avant d’être dialoguiste s’engage dans la défense de Sacco et Vanzetti. 
« Les étoiles d’Hollywood ne savent de quoi demain sera fait. Leurs origines sont modestes, leurs noms empruntés, leurs convictions suivent le sens du vent. »
La contemporaine d’Hemingway, de Fitzgerald entre Los Angeles, Antibes, New-York justifie le bon titre « traversées », entre les deux guerres, entre deux mondes : celui des salons de l'hôtel Algonquin et les miséreux photographiés par Dorothéa Lange 
Le récit de son passage à Madrid pendant la guerre d’Espagne quand elle débarque en chapeau à fleurs, constitue le meilleur du livre :
« En fait d’interprète, le jeune homme n’a que des rudiments d’anglais, et Dorothy ne saisit que les mots « terre », « eau », « saisons ».

vendredi 24 mars 2023

Zadig .N° 15. Automne 2022.

La question essentielle: « Que demande le peuple ? » en première page de ma revue trimestrielle préférée 
ne suscite pas des éclaircissements décisifs en dehors des demandes rituelles de participation à la vie démocratique, démenties par des taux d’abstention élevés.
Peut-on oser répondre : « Le peuple désire la paix et la tranquillité » ? 
Ce serait aller contre l’idée que se font bien des journalistes ne voyant essentiellement que des masses misérables toujours au bord de la révolte, depuis qu’ils n’ont pas vu venir les gilets jaunes.
Finalement c’est en marge de ce dossier de 60 pages que certains témoignages m’ont paru plus porteurs de sens.
Les gars qui « tiennent les murs » dans une cité de Strasbourg, objets d’une autre enquête, m’ont paru représentatifs de la passivité ambiante qui ne sait que nourrir les récriminations : 
«  Leur truc de réinsertion ça ne sert à rien, wallah ! Moi j’ai passé le Caces (permis pour conduire des engins de manutention) en détention… la vie de ma mère ! Je ne m’en suis jamais servi. C’est juste pour les remises de peine qu’on y va. »
Le contre-champ optimiste est offert par les carnets dessinés de Mathieu Sapin décrivant la journée très chargée du maire admirable de Clichy sous Bois ou par l’accompagnement de bénévoles du Secours catholique venant en aide aux migrants à Calais.
La photographe qui a suivi une jeune boxeuse du côté de Roubaix rend bien l’énergie de l’adolescente et celui qui a créé un site permettant aux aveugles de circuler dans le métro sans aide extérieure est étonnant. 
Amélie Nothomb, lors d’un entretien approfondi, livre des réflexions intéressantes sur notre pays : sa complexité administrative et notre culte du conflit, 
alors que Leïla Slimani revient sur le racisme. 
Les paroles d’Abd Al Malick me semblent tellement banalement conformes à l’air du temps que je comprends son succès, sans l'apprécier,
par contre est passionnante la vie du mécène Albert Kahn qui a financé  au début du XX° siècle des photographes afin de constituer « Les archives de la planète » en couleurs. Jaenada raconte quelques histoires incroyables 
et Benacquista son déménagement. 
Un portfolio essaye de saisir l’image d’un loup dans le Massif Central 
et le récit de la mort d’un ancien photographe spécialisé dans le flamenco nous glace : il est resté allongé sur le trottoir à Paris, rue de Turbigo, pendant 9 heures avant qu’une SDF appelle les secours, trop tard.
La page consacrée à l’étymologie des mots explique la filiation entre « grammaire », « grimoire » et « glamour ». 

samedi 4 février 2023

La vie des gens. François Morel Martin Jarrie.

La principale bibliothèque de la ville propose à ses lecteurs un coin « livres qui font du bien » ainsi que « livres faciles à lire ».
Une récidive : 
C’est dans cette catégorie que j’ai emprunté sans risque de me tromper cet album, où en face de chaque portrait dessiné d’habitant de Saint Gratien associé à un objet, correspond un texte dont il est précisé : 
«  Les propos tenus par les personnages relèvent de la fiction. » 
Pourtant ils sonnent plus vrai que vrai. 
« Qu’est ce que vous voulez que je raconte. » 
«  Ne regardez pas le ménage. » 
C’est que le chanteur en verve, chroniqueur, poète sans vers, est un révélateur.
Même s’il peut manquer parfois de légèreté : 
« J’ai eu des enfants, des angines, des chaussures neuves. » 
Il sait dire les bibelots : 
« Celui-là j’y tiens, ce n’est pas le plus beau mais c’est celui que mon mari m’a offert à Pampelune aux fêtes d la Saint Firmin, il y a de ça quarante-huit ans. » 
le destin de la boulangère : 
« Je me voyais pas dans le commerce. Trop timide. Les gens ont toujours quelque chose à dire, je ne sais pas comment ils font. »
 Et les rêves : 
« L’autre fois, elle m’a annoncé qu’elle aimerait bien voir la Grande Muraille de Chine avant ses quatre-vingt-dix ans. Ce n’est pas dit qu’on y aille pas. »
........
Après une semaine sans trop d'écrans, du temps que mes petits enfants sont là, je reprendrai mes publications dimanche 12 février. 

vendredi 27 janvier 2023

6 mois. Automne 2022 hiver 2023.

Comment ne pas trouver futile la couverture de la revue du photojournalisme consacrée à « la révolution jeunes » quand le conflit ukrainien occupe plus de 50 pages sur 292 ?
Comme toujours les textes sont forts : 
«  Une photographie, tout en conservant la trace de ce qui a été vu, se réfère toujours et par nature à ce qui n’est pas vu. » John Berger  
Il en faut des pages et des pages pour contrarier nos attentions clignotantes. 
Le choix des images accompagné de commentaires qui décrivent le hors champ nous sort des brouillages numériques disparaissant aussi vite qu’ils apparaissent.
L’histoire de la rencontre d’une vieille dame et d’une toute petite voisine à Barcelone nous fait du bien,
car il n’y a plus guère d’oasis  même sous forme de métaphore
et en réalité dans le désert marocain.« On achève bien les îlots trésors ». 
Maradona a pansé bien des plaies quand il jouait à Naples
et la rupture d’une fatalité de maltraitance d’une femme à New-York pourrait être accueillie sur le plateau de la positivité si ce problème n’était pas récurrent partout dans le monde.
Le destin de Lula est aussi un exemple de réussite incroyable.
Des visages de passants chinois ont beau être mélancoliques, ils sont beaux,
contrastant avec la désolation des terres péruviennes sur lesquelles souffrent des populations misérables.
Alors la jeunesse ? 
Des ados voire des enfants sont impatients de changer de sexe,
d’autres se perchent dans les arbres pour défendre la forêt en Allemagne,
des enfants d’immigrés se cherchent en Italie,
alors qu’en Afrique du Sud, la mixité n’est pas acquise trente ans après la fin de l’apartheid.    

samedi 14 janvier 2023

Chroniques !

L’idée est excellente de nous remettre sous les yeux des critiques exprimées souvent avec élégance pour louer ou dénigrer des livres au moment de leur sortie et que les années ont consacrés parmi les essentiels de notre culture littéraire.
Nerval vu par Théophile Gautier :
« cherchait l’ombre avec le soin que les autres mettaient à chercher la lumière. » 
Et Hugo : 
« Stendhal ne s’est jamais douté un seul instant de ce que c’était que d’écrire.» 
Mauriac avait trouvé « abject » « Le deuxième sexe ».
50 ouvrages éminents nous sont rappelés, de « Delphine » par Madame de Staël (1802) à « Molloy »(1951) de Beckett. 
Mais ces 240 pages éditées par le service des archives de la Bibliothèque de France devraient se lire parfois avec une loupe, car elles abusent des reproductions réduites des journaux d’alors qui s’avèrent redondantes de temps à autre avec des textes un peu pâlichons les accompagnant.
La diversité des chefs d’œuvres commentés est bienvenue que ce soient 
des romans : « Vingt mille lieux sous les mers », 
de la poésie : « Les chants du Maldoror » 
ou du théâtre : « Les bonnes » ou « Cyrano de Bergerac »
Les étrangers sont honorés : Dostoïevski ou Stevenson, 
et quelques désuets sont rappelés : Loti, Triolet 
des outsiders remis en lumière : Alexandra David-Néel. 
Si l’on me dit Bram Stoker, je cale, mais son œuvre « Dracula » me parle, 
par contre « Monsieur Vénus » pas plus que Rachilde restent totalement inconnus.
Des avis donnent envie d’aller voir sur place, à propos de Simone Weil :
« Des trouvailles fulgurantes, qui appellent la comparaison avec Pascal. » 
Ils confirment aussi des champions, Camus : 
« J’aime cette plume qui troue le papier… » 
ou prophétisent  dès 1933: 
«  Le Procès est comme un long cauchemar empoignant, où tout est grimaçant et où tout est vrai. Kafka apparaitra peut-être comme un écrivain de génie. »