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mercredi 20 novembre 2024

Animal. Cirque Alphonse.

Le plaisir de jouer de la troupe familiale venue du Québec déborde du plateau.
La Belle province nous fournit ici un beau moment de cirque chorégraphié, de fortes performances acrobatiques accompagnées de musique originale en direct, du « funk agricole ».
Les chanteurs sont convaincants à la fois jongleurs, équilibristes, nous entrainant dans un rythme trépidant avec une autodérision candide, un humour réconfortant.
Roue de tracteur, poulets couineurs en latex, œufs à cuire, fourches, seaux de grains, énorme cloche, brouettes, taureau mécanique… les objets les plus prosaïques sont prétextes à cabrioles, tour de force et d’habileté.
L’originalité rencontre la poésie et l’évocation d’une campagne à ce point ludique laisse penser au travail nécessaire pour régler un tel spectacle devant prendre plus de temps que la maturation d’une moisson. Les images proposées  jouant avec les clichés ne s’enferment pas dans la nostalgie. 
Le vrai vieux (78 ans) qui grimpe à une perche portée par un hercule de foire ne sera pas celui qui grimpe au cocotier pour être secoué au point d’en tomber, les mômes jetés en l’air dans la ronde des poulets sont recueillis pas des bras solides et tendres, les deux femmes qui s’équilibrent sur des bidons de lait portent au plus haut la complicité de ce groupe de neuf autour de la tribu Carabinier.

mercredi 13 novembre 2024

Good road to follow. Quatuor Béla.

 
L’intitulé de départ: « Les clochards célestes » a changé pour un habituel titre en anglais justifié par l’évocation d’un voyage dans les musiques novatrices venues du Nouveau monde. L’allusion initiale à l’ouvrage de Kérouac exprimait cette recherche d’absolu qu’un des compositeurs joué ce dimanche matin, Moon Dog ou le « viking de New York » de son vrai nom, Louis Hardin, incarnait parfaitement.
Les trois violonistes et l’expressive violoncelliste tirent les sonorités les plus diverses de leurs instruments sur des partitions inventives, surprenantes, drôles. 
Dans les morceaux choisis aux notes parfois ténues, aux emballements réjouissants, la précision des pizzicati ne contredit pas la fantaisie des propositions. 
Classique, ou d’avant-garde, jazz ou pour cartoon, ce moment musical permet d’avoir une idée de la perfection quand est palpable le plaisir de jouer au bout d’un travail admirable. 
Nous oublions alors, pour un moment,  d’autres énergies humaines consacrées au malheur de leurs semblables.

mercredi 23 octobre 2024

La petite renarde. Ensemble Miroirs tendus.

L’opéra de Janačèk a été adapté pour un ensemble de quatre instruments : cymbalum, piano, contrebasse, flûte, dans un format d’une heure à destination d’un public d’enfants avec une conteuse en maîtresse de cérémonie.
Une renarde échappe aux hommes, séduit un renard avec lequel elle aura renardeaux et renardelles, avant que ne l’atteigne une balle.
La fantaisie de la musique m’aurait suffi si l’évocation de la nature, du cycle des saisons n’avait pas été perturbée par la récitante à la diction chuintante et au jeu d’animatrice pour anniversaires.
J’ai fait confiance à la formule des concerts du dimanche 11 h de la MC2 à des prix bien inférieurs aux représentations musicales ordinaires où des productions de qualité sont présentées aux enfants accompagnés essentiellement des grands parents.
Pourtant habitué aux spectacles destinés au jeune public qui peuvent ravir aussi les adultes, cette fois le versant pédagogique m’a paru maladroit. 
Quel besoin de dénigrer Bambi pour se faire valoir dans le journal de salle ?
La comparaison se retourne cruellement contre la critique, l’arpenteuse de scène peut remballer son gilet orange dans son sac à dos et laisser la musique, la poésie, exprimer la fragilité de la vie, ses joies et ses tristesses.           

dimanche 1 septembre 2024

Au bonheur des mômes 2024.

Les vacances se finissent en grande beauté au "Grand Bo" pour notre dixième festival,
où nous avons vu:
« La fin du monde c’est (pas) pour demain »
 
offre l’occasion d’une discussion sur l’avenir de la planète entre mon petit fils confiant en la science et sa grande sœur plus inquiète de l’épuisement des ressources. Le récit autour d’un magicien captivant appelle ces commentaires pour mieux comprendre la profondeur du propos. 
La compagnie de « La fabrique des petites utopies » replace les problèmes d’aujourd’hui à l’échelle de 24h dès lors que l’apparition de l’homme se produirait une minute avant minuit. 
« Le souffle d’un rêve. » La lune dans les pieds.
Le titre convient parfaitement au spectacle joué au bout d’une montée en téléphérique où nous étions accompagnés par des adeptes du vol libre. 
Natif d’une époque sonorisée par les guitares électriques, je me demandais si les enfants de l’électro pouvaient s’intéresser à l’accordéon. L’histoire personnelle de l’acteur concerne à la fois les contemporains de Verchuren et les familiers d’Oreslan. Sa persévérance pour obtenir l’instrument de ses rêves ne fait que prolonger le désir de son père porté par une même passion réalisée par la génération suivante. 
« Classe verte. » Robert et moi. 
Les chansons excusent les séquences à l’humour insistant autour d’un instit balourd aux compétences écologiques limitées, aggravées par une grosse fainéantise.
« Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. »
« Les misérables. » Les batteurs de pavé. 
Il faut bien que les deux bateleurs suisses choisissent quelques comparses dans la foule enthousiaste pour évoquer les nombreux personnages de l’œuvre de Victor Hugo.
L’ampleur du monument patrimonial ayant déjà impressionné quelques générations, celle qui est haranguée par les influenceuses mérite au moins quelques rappels de moments héroïques. 
L’humour appelant un regard critique peut aussi convier à connaitre de sublimes personnages à la générosité et au courage grandioses.
Ces citoyens de notre riche voisin remercient les politiques qui ont permis la gratuité de leur spectacle quand tant d’autres ne mentionnent jamais ceux qui financent leur liberté.
« Quatre fois rien. » Joe Sature et ses joyeux osselets.
 
La bande son met en valeur le rythme de la joyeuse troupe d’excentriques acteurs chevronnés. Parmi d’autres séquences vivement menées, la classique concurrence entre chefs d’orchestre nous donne l’occasion après coup d’écouter Vivaldi en revenant de la revue.
« La cuisine musicale. » Minute papillon.
Proposer de l’opéra sous un chapiteau surchauffé, malgré des bénévoles arrosant le public à la sulfateuse, relève d’une haute ambition. 
Mozart, Bizet, Puccini, Rossini sont au menu avec une chanteuse énergique accompagnée par une contrebasse née d’une poêle, d’une grille de four-harpe, d’une louche-flute. 
La salle reprend avec application les lalala universels  après plusieurs morceaux dans la langue de Verdi. 
« Quand les corbeaux auront des dents. » L’espèce de compagnie. 
Un corbeau part vers le nord pour retrouver les princes gris, les loups, anciens partenaires de chasse. Les jeux élémentaires avec les objets perdent de leur force évocatrice quand la présentation des méprisables « deux pattes » s’avère sans nuances. 
Comment de si méchants personnages pourraient assimiler les leçons délivrées par les deux actrices amies des gentilles bêtes ? 
« Hôtel Cosmos ». Le Volubile.
 
Les rires des plus petits perturbent l'ennui effleurant certains quand des valises insaisissables et des personnages se cognant partout ne mènent nulle part. 
La représentation dans cet hôtel déserté m’a semblé vide de sens. 
« Bête Beurk, la folle création du monde ». Monde à part.
 
Le dernier spectacle m’a paru bien meilleur avec un dynamique conteur rock, pourtant parfois inquiétant. La terre est plate comme un vinyle, très sèche sur sa face A, très humide face B.
Un bon roi vivait d’un côté, un monstre de l’autre. Cette dualité simpliste totalement assumée s’avère tellement drôle. 
Quoi de plus trash qu’un baiser sur les lèvres avec la langue pour les foules enfantines ? 
Leur indignation sur-jouée s’exprime dans les rires déclenchés également par l’évocation de pustules, ulcères et autres bubons plein de mayonnaise.
 

mercredi 5 juin 2024

Les quatre saisons. Le concert de la loge.

Entendu à la sortie : « c’est une bonne idée de mettre de la danse avec de la musique ». Certes, le hip hop et Vivaldi pouvaient former un couple original, mais je ressors de cette heure de spectacle plus mitigé que la salle qui a applaudi vivement les performances des danseurs.
Sur la scène étroite de l’auditorium destinée aux orchestres, les danseurs de Mourad Merzouki se sont glissés parmi les violonistes aux pieds nus de l’ensemble dirigé depuis son violon quelque peu ostensible par Julien Chauvin.
J’ai apprécié quand le groupe inventif et coordonné accompagne les élans de la musique baroque, mais bien qu’en concerto, m‘a-t-on expliqué, le soliste se confronte à l’orchestre, j’ai trouvé souvent agressifs les solos chorégraphiés. Lorsqu’ils retombent de leurs sauts spectaculaires et que claquent les planches, la subtilité des harmonies en est perturbée.
Dans le journal de salle, les biographies des interprètes sont complètes mais rien sur le « prêtre roux », Vivaldi, qui depuis trois siècles a mis de la légèreté à nos printemps, de la joie aux fêtes d’automne. 

mercredi 29 mai 2024

Après la répétition/Persona. Ivo van Hove.

Première partie (une heure et demie) :
Charles Berling, metteur en scène entre deux femmes, peut-il sortir du théâtre ?
Deuxième partie (une heure et demie) :
Emmanuelle Bercot, actrice mutique reçoit les confidences de l’infirmière qui l’accompagne.
Il faut bien trois heures pour apprécier les textes tirés de deux films d’Ingmar Bergman qui  disait en 1965 : 
« Aujourd'hui, la réalité est absurde, aussi horrible, aussi impénétrable que nos rêves.  
Et face à elle, nous sommes sans défense, comme dans nos cauchemars... » 
L’éternelle question de la distance entre représentation et réalité n’est pas réservée aux professionnels de la profession. Les dialogues et les silences prennent leur temps et parlent à tous avec une mise en scène impressionnante quand il est question de sincérité, de passion, de folie, d’écoute, du temps qui passe…
Nos façons de recevoir des scènes de séduction entre actrice et metteur en scène sont modifiées par les débats actuels où le rôle du prédateur est souvent tenu par l’homme.
Et  peut-on imaginer le récit d’une jeune femme toute à sa jouissance par un quelconque Depardieu ?
Il fut un temps où les acteurs finissaient les pièces à poil et c’était devenu un procédé.
Ici le corps nu de l’actrice souffrante, il est vrai sur une table plus proche de la morgue que du canapé de la séduction, est christique, froid et fort, alors qu’un récit de son accompagnatrice porte par la parole toute l’incandescence érotique de l’été. 
« On peut se replier, on peut s’enfermer en soi. Alors plus de rôle à jouer, plus de grimace à faire, plus de geste mensonger. Du moins, on croit. Ta cachette n’est pas étanche. La vie s’infiltre partout »

mercredi 1 mai 2024

Nous ne sommes plus… Tatiana Frolova / théâtre KnAM.

Cette fois la représentation est à la hauteur de notes d’intentions pourtant ambitieuses : 
«…  la terre… c’est elle dont la Russie a besoin. Pas des gens : eux on peut simplement les tuer ou les expulser du pays. Le territoire est une chose très importante pour mon pays, il n’en a jamais assez. Les gens veulent remplir leur vide intérieur au moins avec des terres… » 
La troupe de théâtre de Komsomolsk-sur-Amour exilée en France sait de quoi elle parle avec humour et désespoir sous des lumières magnifiques pas du tout artificielles.
Nous révisons et apprenons : 20 millions de victimes d’un stalinisme qui irradie encore, et cet enfant si curieux engagé volontaire dans l’armée quand il a eu 18 ans,  et puis le marteau collé à la faucille dans le logo P.C., remplacé par une masse comme celle qui a fracassé le crâne d’un déserteur. 
Les acteur de la troupe ont mis, dans une petite valise, quelques  objets:
un cahier de chansons, « Grand-père Gel », un mignon petit ours …
Tout est limpide et profond, sans chichi, sentimental et puissant. Mireille Mathieu est de la partie, la vie et la mort, l’absurde et la résistance, le courage et la modestie.
Pour ne cesser de regretter qu’on nous serve sur les plateaux essentiellement des déclamations et si peu de dialogues, je me suis senti cette fois destinataire des interpellations, peut-être aussi que le sujet de la guerre suggéré lors d’autres spectacles est très directement développé avec inventivité pendant une heure vingt. 
Ce théâtre documentaire nous empoigne sans nous étouffer quand le dévoiement des mots nous concerne comme la définition de la liberté à remettre sans cesse en question.
Dans le désert critique du Net en matière de théâtre, Jean Pierre Thibaudat tranche avec son blog de Médiapart : 
il a bien vu les trois points de suspension du titre permettant une pointe d’espoir,
se montre très juste lorsqu’il souligne que la troupe est partie de la partie orientale de la Russie, «  la mort dans l’âme »,
et instructif quand il précise que KnAM est le sigle de la ville de Komsomolsk-sur-Amour à 8700 km de Moscou. 
Les Komsomol étaient l’organisation des jeunesses communistes, mais les bâtisseurs furent surtout des prisonniers.

mercredi 24 avril 2024

Carcass. Marco da Silva Ferreira.

De la danse, enfin de la danse ! Sur musiques vivantes amples et variées avec batteur et DJ, en cadence, les corps de la jolie troupe sont mis en lumière dans des costumes noirs échancrés ou sous des atours colorés.
Nous ne savons distinguer ce qui est de la tradition ou de la modernité dans des mouvements d’ensemble précis et puissants des dix danseurs et danseuses. 
Un chant nous avait ému, il n’était pas traduit, mais pour un autre, quand les paroles sont affichées, affligés nous sommes. Le texte qui se conclut par « les murs tombent », joliment calligraphié, souhaite une démocratie populaire avec des ouvriers à sa tête, enfin débarrassée des traitres à la classe qui aura éliminé les bourgeois. Les marxistes léninistes les plus acharnés ne s’expriment même plus ainsi, d’autant plus que la situation au Portugal, pays du chorégraphe, ne se colore vraiment pas en ce moment du rouge de la Révolution bolchevique. 
Pourtant des effets de teeshirt sur la tête avaient participé aux inventions nombreuses qui ont rendu agréable cette énergisante heure et quart. 

mercredi 3 avril 2024

Miramar. Christian Rizzo.

Le titre aux intonations imaginées comme admiratives nous prend à contre-pied : la vue sur la mer sera noire, métallique et froide.
Des lumières crépusculaires éclairent le contour de personnages vus de dos pendant une heure avec une musique prévue avec bouchons pour les oreilles, imitant un ventilateur obsédant.
Il m’a fallu attendre les dernières minutes pour que l’évocation des flots m’apparaisse quand les dix danseurs couchés les uns sur les autres roulent vers la salle, avant qu’un incongru barbu en kilt ne brandisse une bannière composée de lanières dorées.
Les facultés d’interprétations s’épuisent quand de surcroit le son continu quoiqu’exponentiel n’offre aucun rythme pour que la danse, puisque c’est sous ce titre que nous avons été invités au spectacle, s’y accorde.
A notre tour de tourner le dos à ces mouvements posés les uns à côté des autres, masqués souvent par ceux qui à leur tour ont cessé de s’agiter sur le plateau.

mercredi 27 mars 2024

Surexpositions. Julien Rocha.

Quatre excellents acteurs évoquent Gérard Depardieu, Bertrand Blier, Miou Miou, Jeanne Moreau, Romain Bouteille, Coluche, qui ont rencontré l’acteur Patrick Dewaere au cours de sa courte vie.
Leur installation devant des tables de maquillage est complètement justifiée, comme tous les dispositifs de changements de décor qui apparaissent parfois comme empruntés dans d’autres propositions ne suscitant pas autant d’émotions.
Le texte de Marion Aubert va au-delà du biopic pour revenir sur l’éternel sujet de la distance de l’acteur à ses rôles, bien que le titre semble incriminer un système où la notoriété peut être destructrice.
Pourtant le milieu était familier à l’enfant acteur, nommé Patrick Bourdeaux, dont celle qui joue le rôle de sa mère, introduit d’une façon déchirante le récit d’un destin allant de ruptures en explosions, jusqu’au suicide.
Toute une époque nous revient pendant une heure cinquante, évitant de tomber dans l’anecdote ou la leçon rétrospective, quand sont convoquées sans complexe les sulfureuses « Valseuses » de Bertrand Blier, « La Meilleure façon de marcher » de Claude Miller ou « Série noire » d’Alain Corneau.
Les fragilités, les excès du personnage pour une fois principal, donnent de l’intensité à la pièce. 
Nos prudences habituelles privilégiant les productions patrimoniales ou les dialogues tchekhoviens en sont contredites.

mercredi 20 mars 2024

Fli. Soria Rem Mehdi Ouachek.

Né dans les années 70, le hip hop arrive encore à me paraître nouveau et ses figures m’époustouflent surtout quand elles se coordonnent parfaitement avec sept excellents danseurs.
Mais malgré quelques séquences magnifiques, intenses, le scénariste  a retenu seulement le burlesque d’un clown triste évoquant le Bip du mime Marceau, plutôt que des ambitions circassiennes acrobatiques.
«  J’ai toujours voulu être un oiseau » figure dans la note d’intention, mais sur la piste d’envol on en a vu d’autres, tellement plus grandioses, bien que quelques séquences remarquables depuis le sol, terrain privilégié des danseurs, soient émouvantes.
Des enfants rient et certains ont été sensibles à la poésie mélancolique du personnage solitaire qui se prend et reprend des baffes avec son bouquet de fleurs de la part de femmes abordées bien maladroitement, sans réplique possible, sinon malaise.

mercredi 6 mars 2024

La truelle. Fabrice Melquiot.

Dès qu‘il s’agit d’Italie mon esprit critique se fendille, alors je suis sorti content du seul en scène auquel je venais d’assister.
Cependant, homme influençable, j’ai dû bien vite me ranger aux raisons de ma comparse qui a trouvé le comédien à la voix agréable trop emphatique pour des propos assez dispersés. 
J’avais apprécié l’aveu de modestie du dispositif et les questionnements autour de la création théâtrale entre souvenirs intimes et documentaire. 
L’évocation de la Mafia ou de la Ndraghetta calabraise relèvent essentiellement de la conférence gesticulée avec tableau noir, rétroprojecteur et plaque chauffante pour cuire les pâtes. 
Le sujet de la représentation d’un phénomène dont le folklore a fasciné le cinéma et la distance à la réalité sanglante de la Cosa Nostra méritait le détour, pourtant il n’est qu’effleuré. Le racket ou « pizzo » modèle une société au silence mortifère. 
L’image titre de « La truelle » reste cependant forte sans qu’il soit utile d’en divulguer le sens puisqu’il s’agit du point essentiel de la soirée.

mercredi 28 février 2024

The Silence. Falk Richter.

Le règlement de compte familial dure une heure quarante cinq au cours d’un seul en scène liant des douleurs personnelles au destin fatal d’une humanité détestable.
Les récits intimes littéraires ou cinématographiques mettant souvent en scène des carences familiales sont devenus un genre destiné à éviter des frais de psychanalyste. 
Dans des lieux culturels où s’expérimentent en principe des formes nouvelles, des regards singuliers, les thèmes abordés ce soir ont été déjà traités: l’écriture est une torture, la famille oppressante, la guerre tue bien après la paix, les poulets en batterie sont serrés les uns sur les autres, on n’apprend pas l’amour dans les écoles …  
Stanislas Nordey, fils de Jean Pierre Mocky, tient la scène avec conviction, au service d’un texte où les finesses sont vite étouffées par un propos convenu sur des thématiques devenues banales : homophobie et « famille je vous hais » quelque peu daté. 
En ce moment la victimisation à tous crins banalise les souffrances les plus atroces.
D’ailleurs n’y-a-t-il pas violence à présenter sans réelle contradiction les différents familiaux sur un plateau ?
Le fils mal aimé a tenu la main de son père dans ses derniers instants pour recevoir ses excuses ; qui tiendra sa main pour se faire pardonner tant de déballages insistants?
Depuis la brutalité du siècle précédent et les proclamations d’amour ostensibles de maintenant oublieuse de la miséricorde, papa en vient à chérir la discrétion, la pudeur, le silence.

mercredi 14 février 2024

Autour d’Higelin.

A partir du livre de Valérie Lehoux  titré « Je vis pas ma vie, je la rêve », « L’envol du trio sexagénaire » rend un hommage, forcément vibrant, à l’auteur de « Tombé du ciel à travers les nuages » disparu en 2018 à 78 ans.
Dans l’esprit de GB Swing respectueux et original  avec Georges Brassens 
Didier Quillard a adapté à la guitare les musiques rock, venues du jazz  du « baladin fantasque » et dans une salle intime, interprète sans plagiat avec conviction et énergie, les morceaux de bravoure que le modèle des trois artistes incarnait pendant des heures pour des foules  immenses.  
En plus de son éclectisme musical, l’animateur de chanteries révèle ses talents de comédien dans son duo avec Rémi Goube le narrateur dans une version de «  C’est Normal » , créée par Areski et Fontaine, traité de façon comique, de peur de désespérer : 
« Donc on est en train de tomber
Or, tout corps tombe à une vitesse définie
Et en arrivant au sol
Il subit une décélération violente
Qui amène la rupture de ses différents composants »
Michel Marchand le percussionniste joue « Alertez les bébés » 
« Les gens épouvantés
Fuient le mal qui est en eux
Quand vous en croisez un dans le désert
Il trouve encore moyen de détourner les yeux
Car son frère lui fait peur
Il a honte de son frère
Alors il se précipite en pleurant
Dans les bras du premier Colonel Papa venu
Qui lui jure la guerre »
Nous apprenons bien des détails biographiques émouvants, mais nous sommes transportés au-delà de l’exubérance de maître Jacques, avec la puissance parfaitement restituée de sa poésie lumineuse hantée par la peur. 
En deux heures habilement organisées avec Trenet l’autre « Fou chantant » en introduction, nous croisons Henri Crolla qui lui offrit sa première guitare, ses trois femmes, et toujours une liberté que ses enfants disent lui devoir.
Je trouvais maladroite ce que je pris pour une  conclusion mais c’était pour mieux mettre en valeur «  Champagne » pour finir dans les bulles : 
« Cauchemars, fantômes et squelettes
Laissez flotter vos idées noires
Près de la mare aux oubliettes
Tenue de suaire obligatoire »

mercredi 7 février 2024

Le grand Bal. Compagnie Dyptic.

On peut comprendre que le spectacle ne dure pas plus d’une heure tant est manifeste l’énergie  de la puissante troupe, nommée ainsi pour respecter le propos du journal de salle, où le collectif passe avant les individualités.
Pourtant danseurs et danseuses excellent chacun dans une chorégraphie inventive sur une musique envoutante et variée.
Leurs visages évoquant les sculptures de Messerschmidt murmurent ou arrondissent la bouche pour un cri inaudible comme dans un cauchemar.
Si les virtuoses du hip hop dont se réclament les auteurs Souhail Marchiche et Mehdi Meghari. se retrouvent souvent seuls, ce type de danse innerve tout l’ensemble.
Il serait question de transe réveillant des individus ankylosés par le confinement que je n’ai su bien percevoir, ne voyant pas l’intérêt d’une longue arrivée par la salle des acteurs. Cependant, la variété des séquences, tour à tour angoissantes ou joyeuses, emporte le public.

mercredi 31 janvier 2024

White out. Piergiorgio Milano.

Au moment du choix pour les spectacles à la MC2 dont le catalogue portait l’interrogation : « qu’est ce que c’est tout ce cirque ? » il était possible d’envisager des acrobaties inédites, qui sans atteindre à tous coups les sommets, n’ébranleraient pas la confiance que l’on porte à l’institution inaugurée par Malraux. 
Nous avions été gâtés aussi en danse contemporaine mariée au cirque, 
mais pendant une petite heure, cette évocation de la haute montagne et de ses conquérants tombe à plat : traversée interminable du plateau par trois alpinistes harassés trainant une boule à facettes, précédant la présence d’une tente Quechua d’où s’extirpe un homme en slip transi.
Il y aura bien quelques roulades derrière un rideau de vapeur mais les combinaisons engoncent les « danseurs ». Quand ils passent d’une reptation à l’horizontale pour mimer une escalade à la corde en macramé à la verticale, la moindre école de cirque pourrait proposer à ses stagiaires d’un été de présenter des figures bien plus spectaculaires en matière de tissus aériens.
La musique tragique interrompue parfois par celle crachotée par un poste de radio confirme la pertinence du titre : 
 « En alpinisme, le terme « White out » désigne la perte complète de points de repères due à des conditions météorologiques particulières : lorsque la neige et les nuages se confondent et créent une uniformité apparente rendant tout déplacement impossible. »

mercredi 24 janvier 2024

One song. Miet Warlop.

Le spectacle pour une fois commence à l’heure et même avant que la salle ne s’éteigne comme c’est souvent l’usage cette année.
Une commentatrice, directrice de revue, inaudible et drôle, est installée dans des tribunes qui font face au public, bientôt rejointe par un groupe de supporters enjoués s’apprêtant à battre des mains pendant une heure. Elle présente les performeurs qui se saisissent l’un après l’autre de leurs instruments de musique : une violoniste monte sur sa poutre, le contrebassiste sera couché et sollicitera ses abdominaux, le clavier suspendu sur un espalier se joue depuis un tremplin, le batteur doit courir entre tous les éléments de sa batterie et le chanteur accumule les kilomètres sur son tapis roulant :
«  Sauve qui peut
Avant que tu crèves
Avant que je crève
Avant qu’on crève tous
Toc, toc, toc
Qui est là ?
C’est ton chagrin passé
Impossible
Comme au bon vieux temps
Tu sais
Le chagrin c’est un rocher
Dans ta tête
C’est dur, c’est âpre
C’est inexorable
C’est salé
Je le sens à cette goutte
Qui roule sur mon nez… »
Si je trouve souvent les textes des feuilles de salle prétentieux, j’ai apprécié la traduction de la chanson obsédante répétée pendant une heure : l’absurdité est une façon efficace de faire partager dans un sourire le tragique de la vie. 
Un pompom boy infatigable lui aussi entasse des plaques où sont inscrits quelques mots écrits blanc sur blanc «  Go », « Never », «  If », «  Stop »… comme autant de vestiges voués à la casse.
Contrairement à deux de mes comparses qui se sont  copieusement ennuyées, cette folie belge m’a bien plu.

mercredi 10 janvier 2024

Oh Johnny. Liora Jaccotet.

Six ans déjà que Jean Philippe Smet est mort après 3 280 concerts et plus de mille chansons interprétées.
Il était bien plus qu’un chanteur pour ses admirateurs que la jeune metteuse en scène installe au Petit théâtre de la MC2. Une enquête a précédé la représentation et rappelle des démarches tout aussi fécondes, restituant avec respect des paroles rarement présentes sur les plateaux.
L’évocation de ces années adroitement menée va au-delà de la description d’un fan club, en développant les portraits de la femme du garagiste, de sa copine mariée à un handicapé, d’un collectionneur et d’un imitateur.
Un hommage national avait été rendu à Johnny Hallyday, phénomène français, marqueur du temps de la jeunesse. Ce moment solennel interrogeait  même ceux qui l’avaient méprisé. 
Il était de droite et la perplexité perdure à propos de la dissociation entre classes sociales et préférences culturelles.   
La pièce évite ces bavardages et habilement, aimablement, ravit les spectateurs invités après la représentation à un karaoké après 1h 30 d’émotions, de sourires, d’empathie.

mercredi 3 janvier 2024

Chantons sous la pluie. Candide orchestra Ars Lyrica.

La troupe belge nous a servi, sur un plateau bien garni de 15 danseurs-chanteurs-comédiens, 
la reprise de la très célèbre comédie musicale des années 20,
avec un orchestre de 20 musiciens : les fêtes de Noël avaient pris de l’avance.
Les imperméables sont dorés, la pluie est une bruine et même si les voies sur berge étaient submergées par une eau tellement attendue, nous avons gouté la métaphore, quand pour nous ce n’est que de l’eau qui tombe des cintres et non des bombes et qu’il fait bon depuis l’enfance de danser dans les flaques.
La compagnie a la politesse de sur titrer les chansons et de jouer en français, la musicalité de la langue anglaise est respectée. La dynamique de la chorégraphie, l’optimisme des mélodies, l’impulsion donnée par les claquettes constituent un langage universel. 
Ce monument du music hall de Gene Kelly et Stanley Donen situé au moment du passage du cinéma muet au parlant sous se airs enjoués, nous parle aussi du vrai et du faux depuis Hollywood. 
L’illusion est préférable parfois à une réalité dont nous sommes amenés à douter quand trop de  fake news se mettent au balcon. 
« Let’s sing in the rain »