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vendredi 22 novembre 2024

Progressiste.

L’autre jour, à la vue d’une liste de verbes irréguliers griffonnée à la main, j’ai eu un sentiment d’étrangeté, prouvant que je m'étais fait à la défaite de l’écrit.
Pourtant pour s’approprier un savoir, je ne vois rien de mieux, car si une recherche s’effectue sans effort, sans maturation, la mémoire n’aura rien acquis. 
Mais à quoi bon regretter l’encre violette quand même une ancienne élève quadragénaire rencontrant son vieil instit' déplore les évolutions de l’école, elle sait que c'est en vain.
Le temps pris pour apprendre à faire du vélo en classe se fait au détriment du lire, écrire, compter… voilà pourquoi votre fille République est malade !
Et la gauche, qui a oublié depuis Rocard d’analyser ses défaites, rejette toute idée d’évaluation de l’efficience du service public. Surdité et aveuglement ne sont pas moins néfastes que les fake news les plus grossières.
Mais trop de raisons de se lamenter se bousculent, que de bafouillants tapotis sur le clavier ne résoudront pas. Il reste juste à mettre son stylo à la brocante et retourner scroller en attendant le début du cours de calligraphie.
Nous profitons des avancées technologiques et je m’en voudrais d’entrer dans la cohorte des agents qui ont permis l’obsolescence du mot « progressiste ». 
La peur de l’avenir fondée sur les dégradations de l’état de la planète pourrait profiter aux écologistes, hélas leurs troupes courent les aéroports tout en adressant des leçons à la terre entière.
Les livres de développement perso de chez perso se vendent mieux que les essais envisageant le commun de chez ensemble.
On demande aux politiques d’indiquer la voie, d’élaborer des programmes dont pourtant personne ne croit en leur application. Ils se doivent de donner du sens collectif face à des corporations demandant toujours plus pour eux-mêmes sans qu’une hiérarchisation ne puisse émerger.
Les rapports entre individus se brutalisent alors que la race supérieure des « éveillés (woke) » énerve tout le monde. Ces sectaires se disant tellement bienveillants ont plus contribué à la victoire de Trump que les talents républicains. Le thème de l’avortement sensé être décisif d’après la presse que je lis, a participé entre autres à la confusion préparant une surprise attendue, bien que le mot «avortement»  soit remplacé par «droit reproductif». Certaines prophéties auto-réalisatrices ont pu voir le jour ; ce n’est pas pour ça que l’euphémisation adoucit les traumatismes.
Les communautés sont déjà suffisamment clivées sur les réseaux: l’interdiction d’entrer dans une salle parce que blanc me parait aussi scandaleuse que les lavabos réservés chez les sudistes de jadis. 
«Tel philosophe aime les Tartares, pour être dispensé d'aimer ses voisins » 
Jean - Jacques Rousseau
Les « inclusifs »ont tendance à beaucoup exclure, les « racisés»  à invoquer la race.
Le lexique se rétrécit lorsque « pluralité » ne va plus de soi.
La démagogie, les tactiques électorales polluent les élections où immédiateté, agressivité abiment la démocratie dans leurs jeux à la com’.
La distance entre la France des « assistés » et celle « des oubliés » s’allonge avec des boutefeux aux deux extrémités qui conjointement « battent le briquet ».
La compétition victimaire entraine de délétères présupposés quand un prolétaire blanc sera soupçonné à priori de racisme, alors que le sans papier sera lui accusé « de voler le pain des français » qu’il a pétri tôt ce matin. 
«  Le progrès a encore des progrès à faire. » 
Philippe Meyer

vendredi 8 novembre 2024

Pas beau.

La notion de « beauté » » ne se cantonne pas aux musées, mais l’opprobre que fait naître ce mot, bien au-delà de certains milieux déconstucteurs, enlaidit un peu plus notre présent.
Dans les rues barbouillées aux herbes folles, les silhouettes s’emmaillotent de noir. Quand un brin de peau se dévoile, apparaissent souvent des tatouages grimaçants plus inaltérables que quelques cheveux bleus dont les mamies ont abandonné l'exclusivité. 
« Le sculpteur du futur aime la beauté brisée. » José Artur.
Je rejoins sur le tard un de mes amis qui regrettait que l’on ne s’habille plus pour aller au spectacle. Sans endosser un habit pour escalier d’opéra, comment accompagner le côté exceptionnel d’une soirée ? Dans le domaine vestimentaire, je me confonds avec les murailles et si les sapeurs me réjouissent, les fashion victims me désolent, même si une belle tenue permet de se tenir dans le monde.
Le fluo s’impose sur les routes, mais bien qu'agrémenté de sandales sur chaussettes me parait dispensable au théâtre quand bien même des gravats joncheraient le plateau.
Il ne nous reste plus qu’à regarder dans le rétroviseur pour goûter encore aux élégances.
La séduction, soin de soi et des autres, n’est plus de mise, alors que les jambes de certaines chanteuses en promotion prennent plus la lumière que leurs textes.
Dans mon village d’enfance, les familles attentives à l’avis des autres fleurissent joliment le cimetière. Le conformisme social constitue aussi du lien comme le sentiment de culpabilité que les indifférents voudraient ignorer. Les civilités superficielles appartiennent à la famille du civisme.
La simple politesse devrait revenir pour remplacer le mot « bienveillance » mis à toutes les sauces fadasses.
Elles ne sont pas belles belles, les attitudes peu reluisantes des députés ayant abandonné tout sens commun. Les grossiers les plus épais donnent le ton depuis l’assemblée nationale devenue le temple de la « bordélisation ». Cette image déplaisante de la vie parlementaire déconsidère un système démocratique déjà bien fragilisé.
Quand une proportion importante des habitants notre pays libre ne reconnaît pas le message des suffrages, il y a de quoi s’inquiéter. 
Meloni a été élue, Maduro aussi, Trump réélu, l’extrême populisme n’a même pas besoin de ses nervis ni de truquer les urnes pour progresser de partout.
Des valeurs morales s’affichent encore mais leur reniement les fait disparaître.
On se bouche le nez pour Elisa Martin, Hugo Prevost, pourtant leurs supporters sans odorat continuent à plastronner et déroulent le tapis évidemment rouge à leurs comparses démagogues à l’autre bout du champ.
Le déshonneur est d’autant plus féroce qu’il touche ceux qui ne cessent de vouloir punir les autres. La distance entre vertus publiques et vices privés ajoute du discrédit envers tous ceux qui s’engagent pour le bien public. Confiance, légitimité, autorité se périment vite pour laisser place aux ressentiments, à l’animosité, aux pulsions sans réflexion.
Les grandes gueules qui tapaient sur des casseroles en ont quelques bruyantes à leurs basques. 
Il n’y a pas qu’en Dauphiné que les proclamés héritiers de "l’incorruptible" Robespierre contreviennent à la loi. Comme leurs actes n’ont pas suscité de campagne à l'instar d’un ministre contraint de démissionner pour avoir mis du homard au menu, je reprends les informations concernant le député Andy Kerbrat, surpris lors d’un achat de drogue qu’il faut préciser de synthèse, car pour de l’herbe, il n’y aurait rien de notoire à signaler. Ce fait présenté comme banal  disparaitra derrière un autre, ancien candidat insoumis mis en examen, accusé d'avoir abusé d'une fillette de 4 ans en situation de handicap. 
Tous les LFI ne sont pas des malhonnêtes, comme tous les hommes ne sont pas des violeurs en puissance.
« La beauté intérieure c’est important mais, 
en boîte de nuit, si t’as pas la beauté extérieure, tu bois tout seul ! » 
Michèle Bernier.

vendredi 25 octobre 2024

Les non-dits.

Maudit, soit celui qui prétendrait à plus de lucidité que ses contemporains quand l’intelligence forcément humaine est si vite soupçonnée d’arrogance et d'artificialité. Nos sociétés voient leur ciel s’obscurcir encore un peu plus derrière les nuages de poussière des villes bombardées, sous un ciel témoin d’évolutions affolantes du climat.
Antilles et Nouvelle Calédonie, nos îles lointaines souffrent et les discours décoloniaux s’éternisent bien que notre ancien Empire ait été réduit depuis longtemps à l’état de confettis. Les guerres de libération les plus glorieuses étaient animées par des nationalistes ayant étudié dans nos facultés. Leurs indépendances ont été conquises au prix du sang pour « regagner » - à entendre dans tous les sens - leur sol, mais ces transitions complexes ont clopiné dans la douleur et ont fait long feu. Autour du mot « libération » que de crimes contre la vérité, que de crimes tout court. Dégagés de leurs chaines, certains viennent se soigner, se nourrir, travailler, chez l’ancien oppresseur. 
La fierté patriotique des peuples désormais autonomes à l’instar de nos compatriotes derrière nos barricades hexagonales, se manifeste tout autour de notre planisphère. 
Les xénophobes de tous pays se font des clins d’œil par dessus les murs.
Si les cartes du XIX° siècle étaient coloriées aux couleurs britanniques ou françaises, aujourd’hui l’encre de Chine fait tache. 
Les faiseurs d’histoires remontant à l’esclavage et aux bagnes, délivrant des images en noir et blanc incontestablement scandaleuses, allègent de leur responsabilité les politiques exerçant présentement dans les territoires anciennement colonisés.
Les populistes extrêmement gauches y trouvent du combustible depuis les boucs missionnaires de jadis, aussi caricaturaux que les démagogues d’extrême droite et leurs étrangers en boucs émissaires. S’il n’y avait pas les anciens convertis des pères blancs comme prêtres dans nos campagnes, les messes seraient encore plus rares.
Les « toubabs » savent bien que la crise de recrutement ne touche pas que les toubibs et les vétérinaires.
Les thématiques coloniales, religieuses ou souverainistes étaient peu abordées dans nos conversations, elles ont cheminé et sautent aux yeux si bien qu’elles nous aveuglent. 
Alors que le mot « race » était à manier avec des pincettes, « racisé » est arrivé et le blême est invité à sortir de la salle.
Le terme « Grand remplacement » vient des fachos avec son cortège de peurs et d’exclusion, mais qu’y a-t-il de mal à remarquer qu’à la station de métro, nous sommes les seuls pâlichons si nous avons abandonné toute idée de supériorité?  
On peut ne pas voir de péril dans l’engoncement des silhouettes des mamans à la sortie des écoles, mais qui peut nier que les coiffures ont changé? 
Ne pas le reconnaître fait le jeu de ceux qui se vantent de dire tout haut ce qui se pense tout bas. Devenus les rois des sous-entendus, les réseaux d’extrême droite cultivent leur entre-soi. LFI fait de même avec des allusions aux « Dragons célestes »  contrôlant le monde « comme qui vous savez » : les juifs. 
Les homosexuels ont une situation qui s’est améliorée ces dernières années, allant vers une indifférence recherchée. Il serait souhaitable que la couleur de peau puisse passer de la qualité de marqueur au détachement, quand les chanteurs de Marseillaise les plus expressifs sont nos champions devenus atones au-delà du podium.
« Quand vous gagnez, vous êtes Français. 
Quand l'équipe perd, vous êtes considéré comme Sénégalais »
Patrice Evra 
Danger des généralisations : aurait-on pu parler de réfugiés pour les pieds noirs en 1962 ?Ceux qui demandaient de ne pas essentialiser au moment des attentats islamistes voient en chaque homme un violeur potentiel pour manifester leur solidarité avec la courageuse Gisèle Pélicot. 
Maintenant que s’est adoucie la culpabilité portée par l’idéologie judéo-chrétienne, il est cocasse de voir la conscience du mâle blanc d’un certain âge être chargée de tous les maux. Mais après m’être insurgé contre ces fardeaux genrés, je me suis demandé si nous n’avions pas, y compris, les tribunitiens du « Monde » un peu du Trump en nous. Dans nos mondes parallèles, nos ghettos peints aux couleurs universelles, nous cultivons nos vérités alternatives, écartant ce qui nous gène, ne retenant que ce qui vient de nos cercles. 
« En vérité, la vérité, il n'y a pas de vérité ! » 
Jean-Claude Van Damme.

vendredi 11 octobre 2024

Voir ce que l’on croit.

Plutôt que de faire semblant d’être dans le match depuis le bord d’un terrain, en déblatérant au milieu d’explosions irréelles, je vais essayer de me tenir à ce qui se présente sous mon nez, collé aux écrans.
Grace à Facebook, je me tiens au courant d’une certaine vie de la cité avec «  saint- égrévois et fontanilois entre NOUS ».
Cartes de bus trouvées, chats et doudous perdus, clefs oubliées, propositions de cours de danse, de baby-sitting et plat du jour, hélicoptère dans le Néron, fumées suspectes … constituent le fil des informations les plus fréquentes. 
Quelques recherches de sociabilité passent par des questions qui pourraient se résoudre en adressant des requêtes directement aux moteurs de recherche : «  Quelle est la pharmacie de garde ? » Le ton et les échanges sont très majoritairement courtois, mais comme l’intitulé du site le mettait en majuscule, la tentation de « l’entre-soi » émerge parfois avec une certaine méfiance envers ceux qui viendraient d’ailleurs. Et lorsqu’une tornade casse des branches, la recherche d’un coupable arrive depuis quelques claviers.
Les bénéfices et limites d’Internet se lisent globalement et localement.  
Je commente rarement sur cet outil de proximité, comme j’ai restreint mes interventions sur d’autres sites où les désaccords tournent vite au vinaigre.
Même dans un groupe qui devrait être paisible, puisque consacré aux dessins du délicat Sempé, l’administrateur est contraint de fermer parfois les commentaires.
Petit claviste, j'ai été rassuré par mon inaptitude à modifier le cours des choses. Les puissants auxquels on reproche leur impuissance sont tellement entravés qu'ils abusent de la parole, bien qu'ils en connaissent les limites, voir l'impuissance des diplomates. 
Les seuls à  être respectés seraient-ils les porteurs de flingues ? 
« Tu vois, le monde se divise en deux catégories, ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent. Toi, tu creuses. » 
Le bon, la brute et le truand.
Parmi les « vieux cons » de ma génération, souvent protégés par un anonymat nuisible, nous aurions tendance à prêter nos insuffisances aux autres. Pour un bon mot on endosserait des costumes à la férocité contagieuse.
Même si je sais bien que les Bisounours ont parfois le cul sale, je m’en voudrais d’entrer dans la horde des jamais contents, des méfiants.  Maintenant que les slogans « l’école, la santé, c’est l’affaire de tous » sont devenus obsolètes, car partagés par tous, j’ai tendance à faire confiance aux pros, à mes kinés, à mes fournisseurs d’infos, de salades, même si l’effacement de la conscience professionnelle me navre.  
Mes anciens camarades, troquant bandiera rossa contre chasuble jaune, ont fréquenté alors des crèmeries de comédie où coulaient beurre et argent du beurre : moins d’impôts et plus de service publics.
Cet épisode a écrasé la social-démocratie et les ronds points ont donné un ton braillard au Palais Bourbon, l’ « argent magique » a commencé ses tours. 
En ce moment, où quand même le problème des déficits revient au premier plan, il n’est pourtant pas un interviewé qui ne demande pas des sous à l’état. Cet état honni est toujours sollicité, « Tout pour ma gueule » demande tout à la collectivité. Et sur le coup, en bon légitimiste, de nouveaux impôts concernant les plus riches me semblent une bonne mesure, au delà d'une symbolique plus forte que ne le croit Darmanin.  
Les paradoxes, la dialectique, sont des moteurs, mais ne doivent pas tourner à l’incohérence. Le PS a demandé la destitution mais ne la votera pas : qui est déchu ?
Qui déchire la France, mettant en concurrence bourgs et tours ? 
Les extrêmes chauffent leurs communautés et la stratégie prend le pas sur les idées, la laïcité est passée où ?
Les américains nous précèdent toujours: dans notre exposition aux cornfakes news, 
la « cancel culture » entame la diversité des idées par les deux bouts.
Nous n’en sommes plus à demander à voir pour croire, 
mais à rechercher à voir ce que l’on croit. 
« Avec un mensonge on va loin, mais sans espoir de retour. »
 Proverbe juif

vendredi 27 septembre 2024

Déréliction.

Quelques croassements anticléricaux paraissent bien fades quand est décrochée la silhouette de l’abbé Pierre des entrepôts d’Emmaüs.
Déjà que tout tir est prohibé en direction des ambulances ; à l’égard des corbillards, seul l’oubli s’en suivra. Nos dieux sont morts et nos saints se raréfient.
Lorsque les bouffe-curés les plus affamés remontaient à l’Inquisition pour caractériser les catholiques, il y avait toujours quelque admirable missionnaire pour écoper l’eau des bateaux vermoulus armés par le Vatican.
Les dernières révélations ensevelies sous les silences constitutifs de l’institution religieuse sont venues planter quelques ultimes clous dans le cercueil des influenceurs à l’ancienne. 
Le mot « amour » tellement chanté sous les croisés d’ogives était déjà bien abimé quand il évoquait d’avantage quelque libidineux célibataire que la générosité de mère Térésa
Bien que les églises se vident  et que les vocations se tarissent, la dimension religieuse revient plus que jamais dans les conversations.
Pour éviter de se laisser aller à la complaisance dans le répertoire de nos défaites, suffirait-il de les décrire pour se donner l’illusion de nous ébrouer?  
Dans une atmosphère assombrie par les incendies volontaires en Amazonie, par les explosions incessantes dans tous les coins de la planète, peut-on saisir des liens qui ne soient pas calcinés, en tirer du sens ?
Un titre du  journal « Le Monde » : «  Le Sud pleure la mondialisation libérale » n’arrange pas la visibilité quand il prend à contre-pied une vision unique diabolisant les échanges internationaux. 
« … à jeter le remède libre-échangiste avec l’eau du bain, comme on le fait aujourd’hui au nom du climat ou des priorités stratégiques, on se condamne à une régression dans la lutte contre la pauvreté… »
 Bien que cette échelle mondiale reste inaccessible au plus commun des boumeurs,
le mot «  déréliction », signifiant « abandon », convient pour caractériser la période. 
« Tout concourt à opprimer les politiques qui n’avaient déjà pas besoin de cela pour être en proie à un sentiment d’accablement et de déréliction. » 
Alexandre Soljenitsyne.
Péripéties gouvernementales mises à part, quand s’oublie l’intérêt de la nation chez les squatteurs des canaux d’information, je relève dans un domaine à ma mesure, la satisfaction des syndicats face à l’abandon de toute modification du brevet des collèges. 
Cela confirme leur manque d’ambition pour l’école et pousserait volontiers ma curiosité du côté de l’auteur de « La fabrique du crétin », Brighelli.

vendredi 6 septembre 2024

Vacances.

Les participants aux jeux paralympiques, par leur volonté, leur jovialité, vont tellement à contre-courant des geignards habituels que l’on peut souhaiter la prolongation de cet été de grâce.  
Les JO nous ont fait des vacances : oiseaux de mauvais augures et autres râleurs « l’ont mis en veilleuse », si bien que j’en aurais presque perdu une occasion de râler.
Ces bolées de fierté et d’allégresse partagées ne garantissent pourtant pas plus de sérénité et moins de démagogie pour les jours à venir.
Les marchands de peur et de colère, vers lesquels se tendent les micros friands d’insultes et de gonflettes, récusent toute notion d’extrême depuis leurs bords parallèles, tout en accentuant leur radicalité. Incapables de reconnaître des points positifs chez l’adversaire, ils sont prêts à user de méthodes encore plus contestables que celles qu’ils fustigeaient. Point de ponts ! 
Les journaux regrettent la montée du RN et de LFI après avoir jours après jours critiqué systématiquement tout acte des décisionnaires européens ou nationaux.
Les populistes ont vu que le communautarisme rapporte des voix : alors hardi petit blanc ou  grand keffieh! La « bordélisation » est devenue une stratégie. 
Nos élèves, dont nous souhaitions développer l’esprit critique, criticaillent tout, une fois devenus grands. La règle du « Tout pour ma gueule » ne contredit pas l'affaiblissement des expressions personnelles. L’inénarrable Olivier Faure ne sait que dire: «les français ont dit ». Et le toutou qué qui dit, lui ? 
Nous avons les politiques qu’on mérite. Ils croient diriger alors qu'ils suivent les suiveurs de tendances qui dans les rayons «  Bien être et développement personnel » cherchent l’harmonie, mais en couple ou dans le travail ont du mal avec les accommodements. 
Divorces et burn out.
Les nuances apparaissent comme des faiblesses et les incertitudes excitent les péremptoires, les compromis ne sont pas de mise. 
Suivant l’expression « l’éléphant dans la pièce » souvent employée ces temps, les pachydermes se bousculent. 
A la une : l’Ukraine, la Nouvelle-Calédonie, Israël, les bisons en Roumanie…  « déficit public » et « montée de l’extrême droite en Allemagne ».
Les problèmes migratoires s’accentuent alors que les populations vieillissent, le rédacteur aussi.
L’intelligence artificielle suscite des craintes mais nous l’appelons à chaque instant.
Les médias s’abêtissent, critiquent les réseaux sociaux et s’en nourrissent, comme moi.
Le nombre de followers impressionne les journalistes influencés par les influenceuses qu’ils ridiculisent par ailleurs. 
Il n’y a pas que les localiers pour se contenter de reproduire des communiqués de presse. 
Concernant le théâtre par exemple, bien rares sont ceux qui ne reprennent pas le pitch vu sur tous les sites. Cette complaisance entre initiés contraste avec de la violence des propos en matière politique.
Après avoir été les relais assidus du french-bashing, les animateurs à la télévision virent à l’hystérie pour une médaille de bronze tricolore, quand ils ignorent le vainqueur d’un autre pays. 
Devant chez moi, dimanche, un cèdre tricentenaire a éclaté sous les bourrasques. 
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs »  Jacques Chirac. 
Pas moyen de regarder ailleurs.  
Pour la planète, il faudrait plus de croissance, avec tous ses défauts, pour financer la transition écologique, mais les plus convaincus de l'urgence voient plus de vertus à la glandouille qu’aux gains de productivité. 

vendredi 21 juin 2024

Balle au centre.

 
Bien que regrettant un individualisme associé à une rareté des expressions personnelles ensevelies sous les copié /collé, je persiste dans l’exposition de mon opinion.
Vacciné contre les excès, réfugié dans la modération, je voterai centriste au premier tour.
Quand le regard porte sur la planète, on n’y voit que du feu, pourtant concernant une taxation des super riches, Paris, Brasilia, Berlin et Madrid sont sur la même ligne offensive, qui le dit ?
A l’échelle européenne, a été abordé le problème des migrations qui selon la formule en vogue en ce moment fait figure « d’éléphant dans le magasin de porcelaine ».
Mon pays, de papiers noircis de la rage de Céline ou de la générosité d’Hugo, qu’est-il devenu ?
Quelles citations choisir entre deux interrogations ? 
« Cultiver la sagesse en même temps que la force permet  d’éliminer la violence et d’établir des relations plus constructives avec son environnement. » 
Chrétien de Troyes
« En même temps » a fait monter dans leurs tours les extrêmes, ne voulant surtout pas être nommées ainsi, alors que la haine envers l’étranger ou la police ne peut être acceptée en démocratie. Désormais, la scansion : « tous ensemble, tous ensemble » se joue de Philippe Poutou à François Hollande : « en même temps ».
Mes cabotages souverainistes puis européistes, me dispensent de voir Léon Blum réincarné en François Ruffin. Après son intervention « Front Populaire » le soir de la dissolution 
- « dite solution » - où il dénonce un « taré », un reportage à son QG révélait que l ‘expression avait été pesée par l’artiste qu’aurait pu excuser une émotion authentique.
Mais je ne vais pas interpréter ce langage en termes psychanalytiques sur un terrain encombré par trop d’observateurs privés d’indignations au cas où le recours au peuple aurait été différé. 
« Les humains doivent se reconnaître dans leur humanité commune,
 en même temps que reconnaître leur diversité tant individuelle que culturelle. » 
Edgar Morin
Les urnes ne garantissent plus une légitimité dans nos sociétés grippées alors que nous avons mérité Emmanuel Macron en Président et Eric Piolle comme maire, quel député va advenir ?
Quand Gabriel Attal se montre plus compétent que Jordan Bardella, cela devient contre productif. Le face à face avec le RN ne paye plus et les manifs pour - faire - barrage ont-elles modifié l’opinion des followers de Jordan?
Nous avons instruit en civisme des générations, mais l’absentéisme a dû être important aussi en cours de géographie quand pour certains la terre persiste dans sa platitude et que nous voilà rendus à causer de cravates
 ou à compter sur les déclarations d’un footballeur pour convaincre les abstentionnistes. 
Ariane Mnouchkine n’est « pas certaine qu’une prise de parole collective des artistes soit utile ou productive » car « une partie de nos concitoyens en ont marre de nous : marre de notre impuissance, de nos peurs , de notre narcissisme, de notre sectarisme, de nos dénis ».

vendredi 14 juin 2024

Dress code.

Le RN gagne du terrain. Quand le fond boueux est remué, des réalités peuvent apparaître à la surface. Les fariboles ci-dessous visent à distraire du stress démocratique dans lequel nous sommes plongés, tout en revenant sur des aspects en apparence hors sujet, avec la prétention de ne pas reproduire tant d’avis qui se ressemblent. 
Jadis, le baromètre s’en remettait à l’expertise de l’ancêtre de la maison qui après en avoir tapoté la vitre délivrait ses prévisions météorologiques.
Désormais le thermomètre est devenu l’instrument de nos angoisses planétaires quand 
«  Non seulement nous sommes en danger, mais nous sommes le danger ». 
António Guterres secrétaire général de l’ONU.
L’été hésite, la désinvolture apparaît hors saison, les robes légères seraient-elles devenues désuètes ?
Sans insister sur des photographies des années 1960 d’Afghanes ou d’Iraniennes « délurées », que de voiles noirs hissés ici et là en 2024 !
Même s'il s'agissait d’une anodine mode vestimentaire destinée à se faire remarquer pour sa discrétion, les tenues les plus couvrantes et les moins chatoyantes ont donné le ton.
Le plaisir de plaire s’est-il perdu ?
Le noir est chic certes, encore faudrait-il que le moindre regard ne conduise à se retrouver face à un juge en toge sombre. 
Depuis qu’ « enfoiré » est devenu un marqueur amical et que perdure le « grunge », « se faire une beauté » est devenu suranné. 
Pourtant montrer son meilleur aspect n’est pas que narcissique et l’on peut choisir la discrétion. Pourquoi le choix de la sophistication serait réservé aux drag-queens ou aux tribus exotiques (les Wodaabe en illustration de l’article) ?
Les hommes - pas tellement les femmes - se « foutent sur la gueule » depuis l’aube des temps jusqu’au crépuscule présent des civilités, alors que c’est par l’agréable commerce avec ses semblables que le chétif et frustre préhistorique a survécu, allant jusqu’à se sentir pousser des ailes par amour de son prochain ou de sa proche.
Lors du festival de Cannes, un dress code strict en vigueur au palais participe au côté exceptionnel des premières cinématographiques. Mais il y a belle lurette qu’on ne s’habille plus pour aller au spectacle et que la beauté a disparu des programmes. De la soupe éclabousse des tableaux. Les casqués en sandales - chaussettes sortis du garage à vélos au pied d’une scène couverte de pétales de fleurs de Pina Bausch détonnent-ils encore ?
Voilà les habits du dimanche relégués dans les armoires de mémé avec la blouse et les costars qui distinguaient les politiques quand ils pensaient honorer ainsi leurs électeurs. 
C’est d’ailleurs un des rares arguments de Bardella, mis en valeur par de conformistes Insoumis pensant afficher leur « rebellitude » en évitant la cravate.
Respect et distance sont dépassés, le tutoiement est de mise. Le journal « Le Monde » qui avait jadis de la tenue, tape volontiers sur le ventre du Président de la République  et par contre donne du « Monsieur » à Yahya Sinouar, le chef du Hamas. Combien de médias manquent de déférence envers les élus, tout en regrettant que ceux-ci soient attaqués violemment par de mauvais citoyens. 
La politesse ne remet pas en cause l’égalité républicaine, elle aurait permis peut être de faire des économies de garde du corps. 
« La politesse est plus généreuse que la franchise,
car elle signifie qu’on croit à l’intelligence de l’autre. »
Roland Barthes
Ces soupirs rétrogrades passeront pour moins pathétiques s’il ne fallait pas rappeler que la contradiction est indispensable à la conversation. 
Des pressions fortes font taire les opinions contraires aux dogmes communautaires et poussent au conformisme, bien que paradoxalement l’uniforme à l’école puisse marquer  la dignité, la singularité de l’institution républicaine, son prestige.
Faut-il inscrire certains lieux d’éducation parmi les « territoires perdus de la république » quand des portes se ferment au nez d’une juive et que se fragilise le lieu commun où il était permis de rencontrer d’autres milieux, d’autres individus, pour sortir de soi, de l’entre-soi, pour devenir soi? 

vendredi 7 juin 2024

L’Europe à 38.

Quand un individu se met en avant lors d'un selfie, le monument prestigieux, devant lequel il pose, passe à l'arrière. Quant au personnage vu à la télé qui sourit à côté du photographe, il donne l’illusion de se mettre au service de celui qui l’a mis dans la boite.
Tout le monde clique claque et tique tocque, y compris les collectivistes véhéments.
Tous encouragent cette forme de privatisation de la vie politique constituée par la prolifération d'égo portraits, aggravée par la progression d’une fragmentation en communautés de genres et de races.
Ce bain démago peut rapporter gros au loto électoral mais détériore un peu plus « le vivre ensemble » au point que le terme devient aussi obsolète que « fraternité ».
Les émoticônes ont pris le dessus, l’émotion prime sur la raison, les violences se permettent tout, quand chacun s’estime victime dans un environnement où les civilisations se distinguent de plus en plus, alors qu’on aurait pu espérer des rapprochements avec la mondialisation.
« Quand l'Europe ouvre la bouche, c'est pour bâiller. » François Mitterrand  
Pour des élections européennes revenant tous les cinq ans, le débat me semble bien étouffé, même si le Président de la République a besoin de rappeler que :
« Si le RN et ses alliés avaient gouverné ces cinq dernières années en Europe,  
nous n’aurions pas eu le vaccin, pas eu de plan de relance européen, pas de capacité à répondre aux défis migratoires en Européens, on n’aurait pas eu de Green Deal européen et une capacité à gérer la décarbonation » […]  
« On aurait lâché l'Ukraine pour soutenir la Russie, que soutiennent tous les nationalistes dans nos pays. Et, donc, l’histoire ne serait pas la même »
Pour l’avenir dans notre continent vieillissant:
Comment préserver notre modèle social ? 
Comment nous défendre ? 
Comment assumer la transition énergétique, investir dans les nouvelles technologies ? 
« Pour que l'Union européenne fonctionne, il faut la compétition qui stimule, la solidarité qui unit et la coopération qui renforce. » Jacques Delors
38 listes se présentent : en faut-il encore d’autres pour satisfaire abstentionnistes ou blanc votants ?
Estimant jadis que Strasbourg était trop loin du citoyen, je pense aujourd’hui, que nonobstant les lobbies, il est bon que les instances délibératives échappent quelque peu aux intérêts particuliers qui ne manquent pas de brailler.
« Je me sens plus européen que les idéologues qui veulent construire une Europe dans les nuées au lieu de partir des réalités qui sont d’abord nationales. » Jean-Pierre Chevènement
Pour être passé de René Dumont à Emmanuel Macron, je garde au cœur l’internationalisme, pourtant j'avais fréquenté un moment quelques souverainistes bien peu universalistes
« Nous aurons ces grands États-Unis d'Europe, 
qui couronneront le vieux monde comme les États-Unis d'Amérique couronnent le nouveau.
Nous aurons l'esprit de conquête transfiguré en esprit de découverte ;
nous aurons la généreuse fraternité des nations au lieu de la fraternité féroce des empereurs ; 
nous aurons la patrie sans la frontière, le budget sans le parasitisme, le commerce sans la douane, la circulation sans la barrière, l'éducation sans l'abrutissement, la jeunesse sans la caserne, le courage sans le combat, la justice sans l'échafaud, la vie sans le meurtre, la forêt sans le tigre, la charrue sans le glaive, la parole sans le bâillon, la conscience sans le joug, la vérité sans le dogme, Dieu sans le prêtre, le ciel sans l'enfer, l'amour sans la haine. » 
Victor Hugo.

vendredi 31 mai 2024

Poteaux.

La tentation est grande de ne pas lever le nez après avoir admiré le cœur d’une pivoine plutôt que de se piquer les yeux aux incendies de Nouméa à 20 h d’avion d’ici, à Kharkiv à 3h de Paris, à Rafah...
Bien que le moment approche pour les citoyens de donner une voix aux députés européens, le temps consacré à l’Europe est restreint par les candidats eux-mêmes : symptôme des difficultés à envisager notre appartenance.
Alors que l’Occident joue contre le reste du monde, il serait malvenu de dire que la balle est dans notre camp; des équipiers semblent bien indécis avec même quelques buts CSC (contre son camp).
Les débats sont sommaires : toute objection à l’encontre de l’extrême gauche vous renvoie à l’extrême droite. De même l’accusation d’antisémitisme pour toute critique envers Netanyahou s’avère stupide, inopérante, et participe à l’aveuglement, à l’isolement, au rejet d’Israël.
Dans bien des domaines, je m’en remets à la fataliste formule : «  c’est comme ça ! » 
mais  qui empêchera le sujet de la Palestine de supplanter les chicanes concernant la politique agricole de l’U.E. ?
Les problèmes enfouis resurgissent, amplifiés, échappant à toute raison et il est vain de regretter l’inculture américaine ou les hors sujets hexagonaux.
La Palestine est une question centrale quand devient indécidable un engagement de troupes   européennes ici ou là.
Pour reprendre la formule féconde de Badiou à propos de Sarkozy : « De quoi est-il le nom ? » il n’est pas besoin d’ânonner les éléments de langage intersectionnels pour comprendre que les échauffements des campus recouvrent une surface plus étendue que « du fleuve à la mer » et remontent bien avant la déclaration Balfour (1917).
« La paix n’a pas de frontières » Yitzhak Rabin a été assassiné.
Si les comparaisons fleurissent avec mai 68, ne pas oublier juin et le ras de marée conservateur (387 sièges de députés à 91). Dans le pays où avait brouté la bête immonde, et pas que là, l’extrême droite prospère et sourit devant les selfies (égo portraits).
Il était prometteur le slogan : « Cours camarade, le vieux monde est derrière toi » et voilà le cacochyme revenant promis à la victoire et nous à bout de souffle.
Mais est-ce parce que le courage était prôné par les forts de la mâchoire qu’il a déserté le camp progressiste ?
L’épisode néo calédonien condense quelques paradoxes quand certains osent avancer qu’il est urgent d’attendre, alors que le dialogue est engagé depuis des décennies.
Jean-Marie Tjibaou a été assassiné par un indépendantiste en 1989.
Droit du sol ici et pas là bas et inversement.
Tiens, où en est la proposition de droit de vote des étrangers aux élections (locales) ?
Qu’en pensent les militants sans frontières qui pansent les plaies occasionnées par les dresseurs de miradors aux « anciens parapets » ?
La violence nait de l'ignorance avec cependant une conscience de ses limites qui interdit d'écouter les autres. Le vide en politique représenté par le sourire de Lecanuet faisant jadis se pâmer la rombière s'est élargi.  
Si bien que contaminé par les délires présents, il est tentant de s'approcher, pour le fun, des mirages utopiques voire absurdes, guère plus vains que les rodomontades chroniques.
L’harmonie régnerait sur le monde si les contours des contrées plutôt que de suivre fleuves et crêtes des montagnes, épousaient les rotondités de chaque être humain :
Somalie sommeillerait avec Somaliland, la Corse voguerait sous son pavillon à tête de Maure, la Transnistrie cesserait sa sécession et Le Soudan n’aurait pas perdu le Nord… 
Feujs et rebeux joueraient dans le même championnat en Judée-Samarie et la « Bonne mère » marseillaise aurait fait rebondir le ballon parisien du bon côté des poteaux (PSG= Poteau Saint Germain). 
« L'humour ne peut exister que là où les gens discernent encore la frontière entre ce qui est important et ce qui ne l'est pas. Aujourd'hui, cette frontière est indiscernable. » 
Milan Kundera

vendredi 3 mai 2024

Ecrans.

Amateur de paradoxes, je ne vais pas rechigner à reconnaître l’absurdité d’entamer une critique de l’abus d’écrans par écran interposé. La fugacité de leur clignotement et ma courte vue ne permettent pas de prendre le temps de s’appesantir pour aller au delà de l’image de foules regardant  le creux de leur main.
De petites observations peuvent cependant émerger à propos des mutations progressives de nos configurations mentales.
- Lors d’un match de ligue 2, vu en vrai, je n’ai pas été emballé par le spectacle, trop gavé de séquences répétitives des fulgurances de Ronaldinho ou Messi  qui permettent de patienter dans les salles d’attente. Le réel est décevant. La vélocité de Mbappé demeure aussi lointaine qu’un destin de princesse promis à tout enfant. 
- Je persiste à expliquer en vain à ma petite fille que le requin en baudruche au plafond du magasin est inoffensif, mais combien de vessies ai-je pris pour des lanternes? Tellement de feuilles de papier, de pigments et de pixels m’ont rongé les sangs. 
- Pédagogiquement parlant, la virtuosité des artistes sur Instagram décourage-t-elle les spectateurs ou fait-elle naître des vocations ?
Le développement des innovations technologiques (IA) est tellement fulgurant que la lenteur à se réformer de nos démocraties, accompagnant nos aveuglements, n’en est que plus flagrante.
Les querelles virtuelles ne restent pas forcément dans le fictif, elles plantent leur tente au coin des rues et des amphis. Des informations traumatisantes parfois gonflées à l’infox désinhibent les violences qui croissent de leurs croisements.
Les débats se déportent spécialement quand il s’agit de l’Europe : poule woke et coq nationaliste crachotent ou s’égosillent, les ergots plantés dans le fumier, ignorant toutes les décisions qui ont permis de traverser de sérieuses crises (Covid) et d’en affronter d’autres tant bien que mal (Ukraine).
Parmi les expressions qui me ravissent le « Tout à l’égo » a une place de choix. Et s’il en est de la traditionnelle querelle de générations, le boomeur, bavard par définition, ne peut fermer sa gueule, quand les abords de nos villes sont tatoués de signatures débordant des entrepôts désaffectés et des arrières cours ferroviaires, pour constituer de nouvelles arches à nos portes, sous nos ponts.
La gravité se leste de légèreté. Des faits anodins prennent une importance démesurée depuis un exemple déjà mentionné, quand avait été vu comme un Weinstein des bacs à sable, un garçonnet qui avait soulevé la jupe d’une fillette au bas d’un toboggan. Cette fois un élève privé de voyage scolaire apparaissant sur le fil de nos infos aurait dû voir son cas réglé sur place et qu’on n’en parle plus.
Il y avait de quoi s’esclaffer quand les médias qui avaient campé devant la porte d’une caravane pendant des heures s’indignaient que la vie privée d’un chanteur soit trop exposée. 
« C'est du vent le cinéma, de l'illusion, des bulles, du bidon. » Jean Gabin
.…….
J’interromps mes publications pendant 3 semaines … je vais m'étourdir de films au festival de Cannes où désormais Truffaut serait mis impitoyablement à l’index  par quelques indulgentes avec tant de malfaisants, lorsqu’il disait : 
«  Le cinéma c’est l’art de faire faire de joies choses à de jolies femmes ».

vendredi 26 avril 2024

Petite musique.

Qu'il est difficile d’apprécier la tendresse vintage d’une petite fille sur les genoux d’un vieux monsieur, dans une publicité ancienne, quand l’innocence d’aujourd’hui alerterait d’urgence # MeToo!
Mon moteur d’écriture est bien souvent à réaction lorsque je frisonne sous l’air du temps climatisé. Mais quelques précautions s'imposent pour ne pas se retrouver parmi les gaulois réfractaires toujours râleurs, alors que nombreux sont ceux qui vivent aussi confortablement que moi dans notre beau pays.
Quelques paradoxes familiers insistent : les amplis médiatiques font de moins en moins la fine bouche devant une extrême droite à laquelle ils ne cessent de fournir des billes. Les termes populisme et démagogie moins usités auraient pu pourtant caractériser les flatteurs de communautarismes à forte teneur religieuse des deux extrêmes côtés. Alors que loin de 98, le blanc de la trilogie footeuse a le plus souvent les burnes out, et que blacks et beurs font le job.
Pour chaque mesure gouvernementale annoncée, les « mutins de Panurge » donnent la priorité aux passions tristes et négatives, comme ils avaient valorisé davantage les frondeurs vis-à-vis de Hollande que ceux qui lui étaient fidèles.
Le sondage plaçant Volodymyr Zelensky au premier rang des dirigeants populaires d'Europe devant Emmanuel Macron a été peu commenté, alors que la petite musique annonçant le succès de Jordan Bardella aux prochaines élections européennes s’amplifie.
Pourtant ce brouhaha audiovisuel bourdonne parfois hors sol : désormais les vélos sont davantage utilisés que les autos à Paris, tandis que les dispositifs mis en place par Anne Hidalgo étaient soit disant impopulaires. En même temps, les achats de SUV progressent malgré la publicité massive pour les voitures électriques. J’avais retenu du temps où j’avais de la colle sur les doigts, que l’affichage en matière politique ne modifiait guère les opinions, mais il donne l’impression aux militants d’être utiles.
La dilution des notions de droite/gauche avait compliqué les façons de penser des teneurs de micro, ils sont revenus à une dichotomie paresseuse à coups de reprises de communiqués de presse qui taxent d’extrême droite toute critique de la gauche extrême. 
A lire certaines opinions d’élèves de sciences po ça ne va pas aller en s’arrangeant.
Quant aux campus américains : « seulement 47 % de ceux qui soutenaient le slogan « Du fleuve à la mer » qui appelle à la destruction d’Israël, savaient à quel fleuve et à quelle mer il faisait référence. Certains pensaient qu’il s’agissait du Nil ou de l’Euphrate, qui sont tous deux des fleuves, ou de la Mer Morte, de l’Atlantique et des Caraïbes, qui ne sont pas des fleuves. »
Cette ignorance bête et méchante nourrit des excès symétriques et bas du front, coqs et woke : «  bienvenue à tous les miséreux »  contre «  tous les étrangers à la mer ».
Le « en même temps » de Julia De Funès me convient :  
« A l’instar des religions, dépourvues de vérité objective mais porteuses de sens subjectif pour les croyants, la pensée positive pourrait devenir salutaire.
Encore faudrait-il qu’elle maintienne son refus de l’autoritarisme sans nier l’apport de l’autorité ; 
qu’elle soutienne l’idéal égalitaire sans persifler l’excellence ;
qu’elle conserve l’objectif d’efficacité sans refuser l’effort dans la durée sans quoi rien n’est robuste ;
qu’elle soutienne l’idée d’une volonté agissante tout en restant en prise avec le réel et ses limites.
C’est par ces ajustements que la pensée positive ne serait plus seulement un déballage de niaiseries en série truffées de clichés démagogiques, mais sortirait enfin de son dogmatisme… pour le bonheur de tous. » 
Dans le conflit éthiopien depuis 2020 au moins 600 000 morts et personne à haïr.