La revue de Michel Onfray fournit une matière riche à un
débat souvent escamoté sous des positions sommaires et irréconciliables où
« repentance », « indépendance » dansent et que « soumission »
et « insurrection » font impression.
Le philosophe a le sens de la formule et porte le fer dans
la plaie lors de son édito traitant des empires.
« La France ne
sait pas démanteler un point de deal à saint Ouen […] mais elle a la prétention
de croire qu’elle pourrait entrer frontalement en guerre contre Moscou. »
Si la dénonciation des faiblesses de l’Europe est davantage
documentée que des propositions de la part des souverainistes, les dernières lignes
de la livraison de ces vacances 2025 à propos
de « Vendredi ou les limbes du Pacifique » de Michel Tournier
laissent une impression raisonnable et sensible.
« … au lecteur de repenser, à la lumière
de cet hymne à l’univers, érotique et solaire, les codes et les critères qui
sont les siens, dans notre monde civilisé. »
Une bibliographie claire, « Au temps des
colonies », caractérise Fanon, Césaire, Senghor, Glissant dans leurs
apports divers, mais aussi Gide, Conrad, Vuillard, Daoud… dont des citations
vont enrichir divers articles de ces 160 pages copieuses traitant
- de la « rente mémorielle » algérienne,
- de l’instrumentalisation anti-coloniale et anti-raciste
aux racines de l’antisionisme,
- mais aussi de la colonisation des esprits avec les partis
pris de Wikipédia
- et l’emprise numérique en général
- ou lorsque le marché infiltre l’Etat.
Montaigne a sa place dans la généalogie de l’idée décoloniale :
« Chacun appelle barbarie ce qui n’est
pas de son usage. »
Quelques mises au point sont nécessaires pour infirmer
l’idée que la colonisation serait un projet spécifiquement européen et essayer
de clarifier la notion d’ingérence.
« Sur le plan
commercial, ce sont les acteurs privés qui se sont enrichis
véritablement. »
Les affects ne sont pas oubliés et la question se
pose : « L’histoire est-elle morale ? ».
La description de l’évolution de l’idée de décolonisation
des années 50 à nos jours est stimulante en mettant en cause l’idée d’un universalisme
européocentré porteur par ailleurs des idées d’émancipation.
Avec le recul des raisons cachées se révèlent:
« De Gaulle veut
passer l’éponge, amnésie, amnistie, coopération […] est-ce la contrepartie de
la jouissance de droits pétroliers et stratégiques négociés au Sahara pour
quelques années ? »
Hors de la thématique centrale, la revue trimestrielle
participe aux débats tendances du moment à propos de l’héritage, de la GPA, des
ZFE, des retraites… des terroirs à réenraciner et développer technologiquement…
avec des recommandations d’autres lectures dont un alléchant : « Face
à l’obscurantisme woke » visant à « déconstruire la
déconstruction ».