L’image de couverture énigmatique comme le titre s’avère signifiante
après la lecture des 230 pages du livre. Il s’agit d’une faille où
s’entassent des morts, d’une fente évoquant le sexe qui mène bien des
protagonistes de cette histoire chaude et glaçante.
« Le gouffre
était un solide allié. Il s’y était caché durant trois jours et trois nuits,
autrefois, sans bouger, se préparant déjà à trembler de tous ses membres dès
que la nuit viendrait, claquant des dents par avance, gémissant par
anticipation comme n’importe quel enfant de son âge… or, contre toute attente,
en complète contradiction avec ses sombres pronostics, il s’y était senti
protégé, en sécurité, apaisé, malgré ce silence caverneux et cette noirceur
sans fond qui semblaient siffler autour de lui, et n’eussent été la soif et la
faim qui l’avaient tiraillé, le froid qui l’avait mordu, les représailles qui
l’attendaient d’une façon ou d’une autre lorsque l’on remettrait la main sur
lui, il s’était estimé relativement comblé par son séjour dans son intimité minérale
et moussue. »
Un écrivain raté enseigne l’écriture à des étudiantes et en
baise quelques unes, il vit avec sa sœur, boit et fume comme sa Fiat 500. Ses
goûts littéraires quoique désabusés sont affirmés et le narrateur met en œuvre
ce qu’il préconise :
« N'importe quel
crétin est capable de raconter une histoire.
La seule affaire est une affaire
de rythme, de couleur, de sonorité. »
Le style singulier de Djian nous permet de prendre du recul
envers cette famille tordue, d’entamer un suspens policier puis de
l’abandonner, de nous régaler à retrouver le plus rock de nos écrivains.
« Son appétit
pour elle s’aiguisait une nouvelle fois comme un rasoir, repartait comme une
flamme de la braise, dans un souffle brûlant, en sorte qu’il se leva vivement,
posa un billet sur le comptoir sans attendre sa monnaie… »
La moraliste sévit, Guy. Je n'aime pas le mot "baise", même s'il est devenu courant. Et pourtant, je ne suis ni puritaine, ni pudibonde, comme un certain nombre de mes contemporains qui se félicitent d'être "libres" et "responsables".
RépondreSupprimerPour le sexe.. j'ai ma petite hypothèse, là. L'explosion de la pornographie, du sexe "cru" dans les médias est à la hauteur de... l'absence de sexe dans nos intérieurs, dans nos chambres à coucher. C'est... logique, et j'y crois.
Entre les jeunes qui ne parviennent pas à rencontrer un/une autre, et les vieux qui n'ont plus vraiment les moyens, ça fait monter en mayonnaise une grande frustration, à mon avis, et beaucoup d'air chaud.