jeudi 4 décembre 2025

Malo les bains

Nous ne nous éternisons pas dans notre logement riquiqui 
après cependant une bonne nuit de sommeil.
Avant de quitter Dunkerque, nous partons à pied désireux de voir les bains Dunkerquois. 
https://blog-de-guy.blogspot.com/2025/11/dunkerque-2.html
Nous découvrons un joli monument du XIXème  siècle de style néo-mauresque   
avec des ouvertures en fer à cheval. 
Celui,  plus conséquent de  de la porte principale  joue de l’opposition des motifs floraux stylisés sur fond blanc et d’un encadrement  carré en mosaïque bleue.
Quant au toit, il supporte un petit bulbe comme dans  un palais des mille et une nuits. Deux lions rouges gardent l’entrée, bien que plus personne ne franchissent le seuil de cet établissement fermé, ayant servi autrefois  d’école de natation, de bains douches et de lavoir public. 
Pour l’instant, des restaurations indispensables  ont permis la préservation du bâtiment mais il faudrait effectuer beaucoup d’autres travaux, notamment à l’intérieur, dévasté, pour le remettre en état et l’ouvrir à nouveau au public.
Nous retournons à la voiture pour nous déplacer vers le petit port de plaisance, le pont basculant, puis le quai de la Cunette où s’élève un ensemble de maisons modernes identiques  accolées et coiffées de toits pentus en métal. Nous abordons maintenant  un quartier en pleine construction, laissant libre cours à une architecture moderne sans extravagance.
C’est ainsi que sans nous en rendre compte, nous basculons dans Malo-les-Bains, aujourd’hui quartier rattaché à Dunkerque, autrefois commune à part entière.
Nous posons la voiture rue du maréchal Foch en stationnement gratuit comme nombre de places à Dunkerque, très bien situé; déjà dans la rue, se dressent de jolies maisons datant de la belle époque, devant lesquelles s’arrêtent des admirateurs.
Nous gagnons  la longue promenade aménagée au bord de la mer du Nord, 
elle est réservée aux piétons et aux cyclistes.
Côté plage, de belles cabines  forment des petits groupes  en ligne qui se  distinguent  les uns des autres par des motifs peints, chaque groupe déclinant les siens en variant les tons.
Derrière, la mer arbore des teintes céladon,  couleurs « d’huitre », 
parfaitement en accord avec les lumières douces du nord.
Une seule femme tente le bikini et le bronzage, il faut avouer que  la température extérieure  de même que celle de l’eau ne déclenchent pas des envies irrépressibles chez les estivants.
D’ailleurs, les terrasses des bars et restaurants en bord de plage se tiennent frileusement  à l’abri de parois vitrées protégeant les clients du vent.
De l’autre côté de la promenade, des villas  du XIXème siècle ou des années folles, apportent originalité et fantaisie à cette station balnéaire, même un peu d’exotisme  avec des noms comme villa mauresque, villa Lakmé…
L’ensemble me parait plus modeste qu’à  Mers-les-Bains,   
avec moins d’exubérance dans les ornements, moins de diversité dans les couleurs , une dimension plus réduite des villégiatures.
Il fait bon cependant se promener dans ce lieu charmant  le long de la plage la plus fréquentée du nord parait-il, bien loin du sur-tourisme.
Nous avons bu notre café et respiré un grand bol d’iode,
en prenant le temps, le temps des vacanciers, avant de partir pour la Belgique.
Lancés sur l’autoroute gratuite dans cette direction, nous ne voyons aucun poste  frontière, seule une petite pancarte nous annonce le passage dans « le pays plat » ; à partir de là plus aucune information en français n’est concédée.
Nous poursuivons en direction d’AALTER que nous avons choisi comme camp de base pour quelques jours. (lieu du air b&b). Les constructions de la petite ville à l’apparence récente favorisent majoritairement la briquette.
Sur place nous contactons notre logeuse qui nous délègue sa maman afin qu’elle nous transmette les clés, qu’elle  nous présente dans un français hésitant le vaste et lumineux duplex à larges baies vitrées face à la gare et nous gratifie de quelques infos pratiques propres au quartier (parking, commerces, restau …)
Le séjour s’annonce bien ! Nous lui faisons confiance pour le restaurant au centre- ville, le « Barz » où nous nous rendons pour manger des spaghettis sauce bolognaise maison, arrosés d’eau servie uniquement en bouteille, pas de pichet, et plus chère que la bière.
L’établissement voisine avec  une église moderne accessible via un grand parking gratuit.

mercredi 3 décembre 2025

Fernand Léger. Eric Mathieu.

Le conférencier venu du Québec ouvre le cycle consacré aux collections permanentes du musée de Grenoble avec « La danse » de Fernand Léger qui fréquenta l’école d’architecture de Caen. Exposé aux Etats-Unis dès 1925, il devra attendre l’après guerre pour une reconnaissance française.
 
 
Né comme Picasso en 1881, au moment où l’impressionnisme est à son apogée, 
il commence par peindre dans ce style avant de détruire la plupart de ses toiles. 
« Les fortifications d’Ajaccio » avaient semblé tellement exotiques au jeune normand.
Il découvre les chercheurs de formes, Braque, Picasso, fréquente les « cubistes des Salons » comme Gleize marqués eux aussi par Cézanne, explorateur de « la géologie de la montagne Sainte Victoire » et les futuristes italiens faisant dialoguer le visible et l’invisible. 
https://blog-de-guy.blogspot.com/2014/10/le-futurisme.html
« Nus dans la forêt »
, toile qualifiée de « tubiste », garde du relief dans un espace géométrisé.
Dès le moyen âge, les carnets du constructeur de cathédrale Villard de Honnecourt  avaient montré  les rapports de la figure humaine à la géométrie.
Il privilégie les couleurs dans l’abstraite « Dame en bleu »
et leur donne une personnalité dans « La fumée » 
au dessus de la ville vue comme une machine.
L’effervescent « 14 juillet 1914 » précède de peu sa mobilisation dans l’armée où après un travail dans le camouflage, il devient brancardier.
 
« Il n’y a pas plus cubiste qu’une guerre comme celle-là qui te divise plus ou moins proprement un bonhomme en plusieurs morceaux et qui l’envoie aux quatre points cardinaux …»
« La partie de cartes »
. 
« La culasse d'un canon de 75 ouverte en plein soleil m'en a plus appris que tous les musées. »
« Soldat à la pipe »
.
En 1919, il célèbre « La ville »
et « Le mécanicien ».
« Le grand remorqueur »
condense un paysage qui défile comme au cinéma.
« Les Disques »
mettent en action le milieu urbain. 
A la façon des publicitaires
« Le siphon » s’inscrit dans une modernité 
décrite Baudelaire:  
« La modernité, c’est le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art,
dont l’autre moitié est l’éternel et l’immuable. »
Fernand léger
réintègre de l’humain à l’intérieur des habitats dans « Le Grand déjeuner».
Il travaille avec Mallet Stevens, Le Corbusier
https://blog-de-guy.blogspot.com/2011/11/plateau-dassy-leglise.html  
« La Joconde aux clefs » met tout sur le même plan.
Le batelier français rencontre la libre américaine dans le monumental « Adam et Eve » inspiré des muralistes mexicains,  
.
Durant les années 40, là bas aux États-Unis, 
il peint « Les acrobates en gris » .
 Il dit « Adieu New York » 
et revient en France en 1946.
Les couleurs existent par-dessus le dessin à la façon des panneaux éclairés dans la nuit, comme il avait peint « Les quatre cyclistes ».
« Les loisirs »
hommage explicite à David ( La mort de Marat) exaltent les congés payés dans une forme qui oppose le communiste à Aragon défendant le réalisme socialiste : 
 
« Je fais de la peinture, pas de la littérature descriptive »
L’homme libre, fidèle à la classe ouvrière, admirait aussi les gratte-ciels des milliardaires ; 
il fait appel à la raison et ne méprise personne.
Il avait écouté les avis très réservés des employés de Renault à la cantine où était accroché   « Les constructeurs »,  mais se sentit rassuré quand un gars lui dit :
 
« Vous allez voir […] quand on aura enlevé les toiles, quand ils auront le mur tout nu devant, 
 ils vont s’apercevoir ce que c’est que vos couleurs ». 
Il meurt en 1955.

mardi 2 décembre 2025

La dernière rose de l’été. Lucas Harari.

Le joli titre n’a pas grand-chose à voir avec cette histoire légèrement policière prétexte à de charmants cadrages sur les villas de bord de mer, mais il participe à l’ambiance élégante de cet ample album de 190 pages.
Dans le style jazzy de Loustal, une atmosphère désabusée s’installe.
Sous le soleil méridional, bien que des carrelets graphiquement intéressants ou des ferrys menant aux iles soient plutôt atlantiques, personne ne transpire, les corps se croisent, disparaissent et les individus solitaires gardent leur mystère dans des couleurs ravissantes.
Des chansons diverses rythment le récit qui s’épaissit en cours de route, devient inquiétant, sans se départir d’une certaine distance gracieuse.
On peut penser à Hitchcock, à Sagan,
même si l’anti-héros aux velléités d’écrivain n’écrit pas une ligne, bien qu’il ait acquis le livre de Jack London, « Martin Eden », décidément indépassable. 

lundi 1 décembre 2025

Tu n’as pas changé. Jérôme Commandeur.

« Une comédie douce-amère pleine d'humour et de nostalgie. »
 
La citation banale de Télé 7 jours conviendra parfaitement pour cette heure et demie distrayante comme une séquence de « Rires et Chansons » quand on a la chance de tomber sur un sketch amusant.
De bons acteurs, Paradis, Laffite, Commandeur, Damiens agrémentent ce film sympathique en donnant une occasion de rire avec des vacheries devenues une expression de la tendresse.
Je nuancerais volontiers l’expression heureuse de l’Obs qui en référence au film de Scola formule : « Nous nous sommes tant haïs ». 
Les lycéens des années 90 étaient aussi cons et maladroits, que devenus quinquas mais les blessures de la vie peuvent cicatriser dans quelques sourires complices qui auraient oublié d’être niais, 

dimanche 30 novembre 2025

Vanessa Wagner.

Notre rendez-vous mensuel musical à 11h le dimanche a des airs "calotins" comme disait mon grand-père pour désigner les talas (ceux qui vont-à-la messe) pour remonter à des enfances pieuses se rappelant des cloches d’antan. 
Cette fois dans l’auditorium comble de la MC2, Vanessa Wagner, la pianiste d’une grande notoriété, chevalière de la légion d’honneur, alterne Philippe Glass et Jean Sébastien Bach avec une virtuosité qui mérite tous les agenouillements. 
Dès la première note, je fus sous le charme et si je reconnaissais la fluidité apaisante du luthérien allemand, je suivais, fasciné, les mains de la pianiste pour les constructions fascinantes du juif new-yorkais qu’il est encore permis d’entendre. 
Rien qu’un piano et nous voilà sous le dôme des mélodies entre études et préludes au-delà des soucis, des petitesses, au royaume des compositeurs surhumains par l’entremise d’une interprète impressionnante. 
Le minimaliste contemporain gagne en poésie et le géant baroque du XVIII° apporte sa sérénité à la petite fille qui posait sa tête devant nous sur l’épaule de son papa et à tous les paroissiens.

samedi 29 novembre 2025

Le pays dont tu as marché la terre. Daniel Bourrion.

Le titre ne ment pas en annonçant un style singulier en adéquation avec son sujet, sans rechercher à épater le lecteur.
« Je ne sais par où commencer, cela remonte au loin, suffisamment pour avoir laissé à quelques décennies tout le loisir de mâchouiller le peu qu’il reste de l’époque et tout autant de nous. » 
Ce retour vers un personnage de son enfance rejoint mes préoccupations autour des souvenirs et de leur restitution, surtout quand il s’agit d’un être mystérieux, solitaire, toujours absent, maintenant disparu.
Le mérite de l’auteur revenu au village est de revivifier les mots les plus simples prononcés par celui auquel il consacre 125 pages honnêtes, aimables. 
« J’habite toujours ici ». 
Cette recherche littéraire en train de tâtonner, au service du lien avec ses semblables, transportant les regrets d’avoir manqué des occasions, respecte les secrets de ceux qui apparaissent dans ce livre édité par Héloïse d’Ormesson. 
« Je n'ai que peu de peine à peindre cette solitude. Je peux parfaitement me la représenter. 
Ces tiennes routines, manger, dormir, boire, fumer, attendre la suite qui était très exactement la même histoire, je sais ce qu'elles peuvent être. Lentement, sans même y prêter garde, on voit le temps se brouiller totalement. Même les mots qui ne servent plus, on finit par les oublier, jusqu'à atteindre le dernier. » 
Ce livre touchant fait du bien parmi tant de propositions revanchardes, lourdes, sans recherche.
Cette poésie fraternelle, amenant « les gens de peu » à la lumière, nous réchauffe.

vendredi 28 novembre 2025

Responsabilité.

A l’image des chevaux ombrageux, voilà que les grands mots m’effraient, comme celui du titre qui pouvait occuper toute une vie, jadis. 
Pourtant j’avais déjà décliné, le mot. 
Je persiste à déplorer l’effacement de l’implication de chacun dans sa propre trajectoire.
L’individu, fils de toute une dynastie d’enfants-roi, préférant se placer en victime, estime que ce sont toujours les autres les fauteurs de difficultés, alors que Moimoi ne prend pas tellement part à la marche de la société bonne fille. 
La confiance et le respect ayant fui, la démocratie souffre.
De subventions à l’industrie à l’arrosage des vignerons pour arracher leurs vignes, 
la collectivité est constamment sommée d’agir.
Toujours plus de moyens sont demandés à l’Etat, entité abstraite en poils de bouc émissaire à laquelle on refuse toute contribution nouvelle.
Les maîtres d’un destin sans Dieu ni tribun, en sont pourtant toujours à se plaindre. "Le vertige écologique et la fragilisation économique" seraient des excuses pour les drogués. Quelques bien-pensants ne veulent surtout pas culpabiliser les consommateurs alimentant de puissants réseaux de narco trafiquants aux mœurs capitalistes des plus sauvages. 
Ni responsable, ni coupable.
Je me mets dans la file des amateurs d'absurdités et remarque dans un vieux film un bellâtre au moment de sa déclaration qu'un robot sans I.A. aurait pu formuler: 
« Si un jour je te fais mal, ce ne sera pas de ma faute ». 
Ma position de boomer me conduit à jouer souvent en défense, mais arrivé en haut du cocotier, de celui qu’on secoue pour faire tomber papou, j’assume aussi mes options de citoyen, de père, de grand-père, de mari, d’ami …
A la manière d’un Clémenceau affirmant 
« la Révolution française est un bloc dont on ne peut rien distraire », 
j’aime « en même temps », à contre temps de tant de tambourineurs, 
les contradictions de mon pays, ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas.
On en arrive à manquer de mots comme le délicat Souchon doutant que « les français soient assez cons… » Et bien qu’il n’y ait pas d’autres raccourci en territoire populiste, il se montre contreproductif.
Le G 20, la Cop 30 ne disent plus rien. Trump fait peur au monde, à tout le monde.
Nos députés votant contre un budget par eux discuté paraissent anecdotiques bien que membres éminents du royaume de l’absurde. Ils s’amusent à l’abri de l’Europe mastrichienne, que certains vilipendent encore, alors que l’€uro nous a épargné dévaluation et autre crack.
Accablés de lointaines nouvelles catastrophiques où s’épuisent les clichés de chute de la falaise, la proximité vaut essentiellement pour le contenu de notre assiette, alors que nous n’avons pas vu qu’un proche n’était pas vraiment dans son assiette.
Pour se détendre, mon journal propose à la page des films de la semaine : 
l'enregistrement d’une fillette palestinienne avant sa mort, un documentaire avec les rushs de « Shoah », « Une traversée de l’Amérique des marges », « Queer panorama », « Hell in paradise »… « La monstruosité filmée au cœur de la maison familiale ». 
La fréquentation des salles de cinéma serait en baisse. 
« L'homme est responsable de Dieu. » 
André Gide