vendredi 30 juin 2017

Le Postillon. N° 41 Eté 2017.

Les rédacteurs anonymes du trimestriel satirique peuvent regretter leurs ancêtres de 1886 :
«  Aussi les amants de l’imprévu, du désordonné, du fantasque apprendront-ils avec plaisir que le Postillon reprend dès aujourd’hui, ses libres et capricieuses allures… »
Cette livraison m’a semblée bien pépère en ces temps où l’actualité a pourtant turbulé.
Mol compte rendu d’une soirée de résultats des législatives à la préfecture et immersion dans le fan-club de Benoît Hamon où l’heure n’est pas à l’auto critique : le monde ancien a beau être à 6%, il persiste à être plus content que jamais.
Concernant le « street art » nous  apprenons qu’il y avait du  gâteau quatre-quart à la conférence de presse, mais pas l’ombre d’une info en dehors du litige corporate concernant l’affichage sauvage, les opposant à la mairie.
Ils regrettent une inscription à la bombe à peinture, rue Abbé Grégoire, rare tache d’humour:
« Le travail est à la vie ce que la mer est au pétrole »… à moins que ce ne soit l’inverse.
Ils ouvrent une rubrique qu’ils sauront alimenter de leur verve toujours critique envers les technologies particulièrement bavardes dans la cuvette grenobloise: « La noix connectée »:
Une première avec la « Love box », boite en bois connectée à la wifi, surmontée d’un cœur qui tourne quand un message d’ « amour avec un grand@ » est reçu.
Le récit de deux descentes des fleuves en kayak, puis 57 ans après en radeau, de Grenoble à Cassis aurait pu être captivant, mais l’enchaînement déroutant des paragraphes appellerait plutôt une reconstitution d’un puzzle, genre devoir de vacances.
Plus réussi est le jeu de l’oie en divers moyens de locomotion :
«  Départ de l’hyper marché de Saint Martin d’Hères, tu as acheté des chips et du rosé pamplemousse avant de partir pour St maxime (du rosé pamplemousse ? Franchement).
J’apprécie Le Postillon quand il n’est pas là où on l’attend : critiques quant au Cairn, monnaie locale, compliquée, adossée au crédit coopératif dont ils ont dénoncé auparavant des fonctionnements pas très progressistes.
Au sujet du logement, avec un regard intéressant concernant des bureaux vides, leur approche à partir des squats aurait pu rester dans les marges : un dossier documenté apporte de la matière pour insister sur un problème clef en matière de justice sociale.
Un reportage dans une ferme à Vif respecte la dose habituelle d’humanité, bien que le dessin manque de poésie. La popularisation d’une lutte inventive en moyen d’actions chez EDF ou un compte rendu d’audience au tribunal à propos d’histoires de drogues sont utiles ; leur place est naturelle chez les ananars.
Une nouvelle cultive la nostalgie des boites aux lettres personnalisées du temps où les facteurs pouvaient prendre du temps.
Ce supplément est à découper : mais pourquoi  le format A 4 cohabite-t-il encore avec A 3 ?
Le massicot est-il d’une technologie contondante trop avancée et libertairement incompatible ?
……………….
La photographie choisie en tête de cet article recopiée dans ce numéro, peut donner à s’inquiéter des indulgences de manifestants syndicaux avec les cagoulés qui tiennent à leur tenue hivernale malgré la canicule qui vient. Là dessous, c'est du "Canard":

jeudi 29 juin 2017

Anselm Kiefer. C. Loubet.

L’artiste allemand vivant en France présenté par le conférencier devant les amis du musée de Grenoble, met plomb, pierre, paille et peinture en jeu pour traiter de l’Apocalypse (la révélation).
Trois de ses oeuvres viennent d’être achetées par Le Louvre. Il fallait bien le Grand Palais en 2007 pour accueillir ses constructions gigantesques et Beaubourg pour l’honorer en 2015.
Il est né sous les bombardements de 1945 entre le  lac de Constance et la forêt noire.
Beuys sera son professeur à Düsseldorf, les happenings tournaient alors à la provocation.
En se photographiant faisant le salut nazi, « Occupation » dans un cadrage évoquant Friedrich, il a l’intention d’assumer la tragique histoire germanique avec « emphase et gravité ».
Dans un « Paysage d’hiver » la civilisation saigne.
Le serpent survit dans un paysage calciné, l’artiste brûle le territoire pour le reconstruire : « Resurrexit »
« Vol de Hanneton » illustre la berceuse :
«Le hanneton vole,
Papa est à la guerre,
Maman en Poméranie,
La Poméranie est brûlée. »
La baignoire de sa grand-mère est dérisoire pour rappeler l’« Opération lion de mer », nom de code désignant le projet d’invasion de l’Angleterre par les nazis.
Il évoque les figures mythiques : « Brunehilde endormie » (Catherine Deneuve) oubliée par Siegfried, les évènements fondateurs, Hermann le Vercingétorix Teuton, les grands auteurs : Goethe, Nietzsche et compagnie…
Puis entre Icare et l’alchimie, il va citer souvent Paul Celan, poète rescapé des camps, pour exprimer sa « fascination horrifiée » pour la shoah. « Ligne de chemin de fer ».
« L’Athanor », le four alchimique de l’oeuvre au noir, de la recherche de la pierre philosophale, de la régénération, et de l’étincelle de vie, a atteint des records à la vente à New York.
Fasciné par la Kabbale de Louria où Dieu a créé le monde par son retrait, il produira de nombreuses toiles jusqu’à  « Alkahest », le dissolvant auquel aucun métal ne résiste y compris l’or.
Installé un moment à Barjac sur 35 ha, il accumule des matériaux dans « Les maisons » de la Ribaute.
Il synthétise ses visions d’autres cosmogonies où l’homme est pris entre microcosme et macrocosme. Dans « Le camp des étoiles » chaque élément céleste est numéroté ainsi que le furent les déportés.
Si le renouveau peut être issu du chaos, « La tombe dans les airs » de notre culture prométhéenne est bien bancale.
« Danaé »: depuis des livres calcinés fleurit un tournesol. Le retour du chaos et de la renaissance est cyclique.
Et avec «Le dormeur du val » rimbaldien les fleurs poussent sur une terre fécondée.
«  Je suis dans la matière, dans la couleur, dans le sable, dans l’argile, dans l’aveuglement de l’instant »
Me reviennent à la fin de l’exposé dont je n’ai retenu que quelques images d’une production très abondante, ces vers d’Eluard, quand tant de matériaux divers furent rassemblés pour accomplir un travail de mémoire endeuillée et s’élargir à une quête spirituelle embrassant mystique et occultisme : plomb, ongles, paille, photos, suie, sable, salive, tessons de verre et de porcelaine, laque,résines… 
« Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom
Liberté. »

mercredi 28 juin 2017

Palais à Venise. Fabrice Conan.

Le port d’où est parti Marco Polo était un pôle majeur de la Méditerranée avant la découverte des Amériques. Et même si le temps de la Renaissance des Titien, Le Tintoret, Véronèse, est passé, la « Sérénissime » construit, transforme au XVII° siècle et au XVIII° de fastueux palais dont le conférencier entrouvre quelques portes aux amis du musée de Grenoble.
« Ici surgit la pensée des rudes seigneurs qui se battaient ou trafiquaient sur la mer, puis, avec l’argent de leurs conquêtes, de leurs captures ou de leur commerce, se faisaient construire les étonnants palais de marbre dont les rues principales sont encore bordées. » Maupassant
Les marchands n’étaient pas spécialisés et les produits, qu’ils revendaient avec de bonnes marges, stockés au raz des eaux, variaient au rythme des bateaux venant de Constantinople ou d’Alexandrie : minerais, sel, étoffes, épices, bois précieux...
« Je fus émerveillé de voir tant de clochers, de monastères, de maisons. On me mena le long de la Grand rue, qu’ils appellent le Grand canal et qui est bien large. C’est la plus belle rue je crois qui soit au monde. Les maisons sont fort grandes et hautes, et faites avec de belles pierres. Toutes ont le devant de marbre blanc qui leur vient d’Istrie, à quelques kilomètres de là. A l’intérieur, la plupart des maisons ont deux chambres avec des planchers dorés, de riches cheminées en marbre, et de beaux meubles. C’est la plus triomphante cité que j’ai jamais vue. »
D’après Philippe de Commynes
Le long du grand canal, les « portes de la mer » des bâtisses s’ouvrent sur un grand corridor entouré de pièces pour les tractations entre négociants et au dessus à l’étage noble, le grand portego, salle bien ventilée, l’eau remontant dans les murs de 2 à 3 m, est le show room de cette époque. Les décors de cet espace semi public sont souvent refaits à l’occasion des mariages.
Dans le palais Pisani habité depuis par des banquiers, les poutres du temps des marchands ont été remplacées par des plafonds recouverts de fresques. Les lustres viennent de Murano.
Le  palazzo Barbaro dont la partie gothique est reliée à la partie baroque, abrite une magnifique salle de bal au décor de stucs. Sur les terrasses, les belles tentant la teinture en blond vénitien pouvaient prendre l’air, mais sa composition à base d’oxyde de plomb faisait tomber les dents ; finalement l’ammoniaque appliquée en shampoing, provenant de l’urine de jument, était plus saine.
La Ca' Rezzonico comme casa (maison), tient son nom de la famille d' un pape, qui a pu prendre place sur le livre d’or des notables de la ville, fermé depuis le XIII° siècle ; le droit d’entrée étant extrêmement élevé, il fallait bien payer tous ces condottieres.
Les deux obélisques du palais Balbi indiquent la présence d’un amiral dans cette maison.
Le Palais Albrizzi  au décor fastueux recèle une véritable volière de putti.
Au-dessus de la porte de la salle de bal du palais Zenobio, collège arménien, se trouve la tribune de l'orchestre. Les espaces sont démultipliés par  les miroirs. Dans le jardin, un casino (petite maison) permettait de faire des fêtes ; le carnaval durait 6 mois.
La RAI a mis en vente le Palazzo LabiaTiepolo a peint  « Antoine et Cléopâtre », c’est là que passaient par les fenêtres des assiettes constellées d’or et de rubis, le personnel tendant des filets en dessous.
Au Palais Barbarigo, sont d’autres fresques mais je ne me souvenais pas de
cette histoire trop belle : Berlusconi trouvait qu’une copie de Tiepolo, « La Vérité dévoilée par le temps » heurtait la sensibilité des téléspectateurs … Berlusconi !
Dans ces espaces gigantesques sont installés des miroirs gravés magnifiques, la vaisselle filigranée qui incorpore des fils de verre est incomparable, les grands lustres dont les bougies noircissaient les fresques, sont superbes, des tissus raffinés cachent les fissures toujours renaissantes des parois.

Le palais Grassi  construit par Massari avant l'abolition de la République de Venise par le général Bonaparte en 1797 appartient désormais à  François Pinault qui y expose de l’art contemporain. 
Le palais des Doges et la ca’ grande, la ca’ d’oro, le  palais Papadopoli, la collection Guggenheim dans le palais Venier dei Leoni ... il y aura toujours un Canaletto.
Bonaparte avait demandé à ses soldats de ne pas marcher au pas pour ne pas ébranler la ville, qui en plus d’être dans une zone sismique est assaillie aujourd’hui par le vagues des paquebots qui viennent croiser sous ses fenêtres et par les vagues de touristes… dont j’aimerai bien être.
Mais l’on ne pourra tout voir. Après avoir fouillé dans les sites à citations, que peut Sylvain Tesson :
« On a fait couler tellement d'encre sur Venise qu'elle se noie. »
contre Guy de Maupassant ? 
« Aucun coin de la terre n'a donné lieu, plus que Venise, à cette conspiration de l'enthousiasme. »

mardi 27 juin 2017

Disgrazia ! Coline Picaud.

Le dessin assez maladroit rend plus proche l’histoire de familles italiennes venues à Grenoble et Fontaine depuis Corato - qui ne le sait sur les quais de l’Isère - mais aussi de Sommatino en Sicile.
L’auteure qui exposait d’ailleurs à la bib Barnave à Saint Egrève autour d’un album plus récent consacré à l’immigration maghrébine : « De l’autre côté », s’appuie sur des témoignages remontant aux ancêtres se crevant à récolter le soufre ou à travailler pour des propriétaires terriens qui payaient d’une poignée de graines de fèves ou de pois chiche, d’où l’expression :
«  Giacomino ! Pigliate les grani nella bourse » « Prends l’argent dans le porte monnaie ».
Des histoires violentes de crimes, de femmes battues, de mariages contraints, de conditions de travail atroces et puis celle d’une émancipation, de personnes dignes, fortes.
Commencé par le recueil de paroles lors de rencontres d’amicales qui cultivent les traditions,  « Laciatemi cantare con la chitarre in mano, laciatemi cantare sono un italiano »
c’est aussi le récit d’une intégration qui ne s’est pas passée sans douleurs.
Le racisme « anti-macars » était fort dans la ville qui comptait 101 Italiens en 1911 et 12 000 en 1931 (sans compter les 3 000 naturalisés). 15% de la population.
«  Les siciliens disaient des coratins qu’ils étaient des « m’as-tu vu » fauchés et pour les coratins, on était des bandits qui jouaient du couteau. » 
Dans le quartier Berriat-Saint Bruno se trouvaient des bistrots où jouer à la « scopa » ( le balai) près des  tanneries, des gants Perrin, Raymond Bouton, Lustucru, Valisère… avec leurs cortèges ouvriers lors de grandes grèves et les écoles, les patronages, avec du mépris parfois et des encouragements. Ces témoignages honnêtes dont est mise en évidence la fragilité et la diversité, renforcent, chez le dauphinois natif des terres froides, l’idée que cette histoire là est aussi la nôtre. Grazie di cuore.

lundi 26 juin 2017

Paris pieds nus. Abel et Gordon.

Alors que nous avions tellement ri à Avignon dans leur « Danse des poules » au théâtre, j’avais déjà été refroidi par leur passage au cinéma.
J’ai confirmé ma déception avec cette histoire de retrouvailles entre une nièce et sa tante dans un Paris de carte postale.
Les moments de danse sont les seules séquences qui nous sortent de l’indifférence.
Pendant une heure vingt, une dégingandée ahurie trimballe un sac encombrant sur son dos, sa maladresse en est tellement décuplée que c’est le film qui devient balourd.
La répétition est une des bases du comique mais ne s’applique ni aux rires ni aux sourires face à cette fade production sans colonne vertébrale où la poésie et le burlesque attendus sont absents.

dimanche 25 juin 2017

Interview. Nicolas Truong.

Pendant une heure trente de théâtre, genre philosophie pour tous, nous sommes amenés, en douceur à nous interroger, certes sur la fabrication de l’information, mais au-delà sur notre présence aux autres, et nos propres vérités.
« Etes vous heureux ? »
Dans l’intimité du petit théâtre de la MC 2, ce fut du bon temps avec matière à réfléchir, à sourire, à apprécier de ne pas être pris pour de la chair à épater. Le dispositif simple est inventif, raccord avec la pédagogie décrite pour amener une personne interrogée à s’exprimer avec authenticité.
Respecter l’interviewé, prendre le temps, écouter, donner aussi.
Nous sommes en bonne compagnie avec les personnages évoqués: Edgar Morin, Jean Hatzfeld, Florence Aubenas, Marguerite Duras, Michel Foucault… Raymond Depardon et Claudine Nougaret…
Regis Debray a travaillé sur ce spectacle écrit par un journaliste du journal Le Monde.
Les acteurs sont lumineux, Nicolas Bouchaud excellent comme d’habitude,
Judith Henry est subtile et juste.
Le même jour, j’avais publié sur mon blog un article à propos du livre de  Bernard Pivot titré « Oui mais quelle est la question ? » qui du coup m’a paru plutôt narcissique et anecdotique.
Ici, sans insister mais avec profondeur, nous apprenons comment le nommé Tarzan est devenu leader de la grève des camionneurs il y a une quinzaine d’années, nous révisons les « bons clients », les paroles formatées, et les silences parlants.
« L'enfant est l'intervieweur idéal, il attend vraiment une réponse à sa question, il ne pense pas déjà à la question suivante »
Hatzfeld est revenu vivre au Rwanda  pendant 15 ans pour continuer la conversation avec les bourreaux et chercher les survivants introuvables au moment où 900 000 personnes ont été tuées. Je suis sorti avec l’envie de lire le livre qu’il a écrit sur cette expérience : il y en a cinq.

samedi 24 juin 2017

Schnock. N° 22.

L’avantage avec la revue des vieux de 27 à 87 ans c’est qu’on peut acheter le numéro 22 après le 25, http://blog-de-guy.blogspot.fr/2017/03/schnock-n25.html car peu importe aux yeux de l’histoire, que les pages consacrées à Françoise Hardy aient parues avant les souvenirs de la carrière d’Audiard.
Ce numéro qui consacre plus de 50 pages sur 175 à « La french beauté in the monde entier » comporte toujours quelques pépites dans ses rubriques habituelles où est exhumé par exemple un film de Patrick Sébastien : « T’aime » qui doit valoir son pesant :
«  Collés au buffet les Bac + 8 voient une preuve de plus que l’apocalypse guette notre planète pendant que les Grammes + 4 tutoient le septième ciel »
Tout ça à l’évocation d’une chenille intergénérationnelle sur l’air de « Sardines ».
Dans le genre «  trésor de discothèque » qui évite de regretter l’ancien temps, « Garlick » d’Hugues Aufray n’a pas eu, semble-t-il, la notoriété qu’il aurait mérité.
En ce qui concerne la maman de Thomas Dutronc qui était la seule de la période « Salut les copains » à placer ses chansons dans les charts anglais, c’est plutôt plus sans relief, ni  la verve habituelle. La robe mythique et métallique de Paco Rabanne pesait 16 kilos, mais le récit  exhaustif de ses enregistrements ne passionne pas forcément les foules. Même si Modiano, Jarre, Peellaert qui dessina « Pravda la survireuse » en son hommages, sont des personnages intéressants qui croisèrent la belle, sa personnalité se dérobe pourtant. Sa filmographie d’autre part n’a pas laissé de souvenirs impérissables, alors qu’un rappel plus explicite et développé de ses chansons m’aurait semblé plus parlant.
Si nos plaisirs de lecture sont indexés sur la connaissance des personnages retrouvés : Pierre Douglas qui imitait Marchais me parle d’avantage que Stanislas Klossowski de Rola, acteur des swinging Sixties et Margerin le père de Lucien mieux que Marie Paule Pelé qui fit la pluie et le beau temps pendant 30 ans sur la presse mode et déco.
L’idée de dresser le top 15 des candidats cinématographiques aux élections est excellente,  avec Gabin entre Clémenceau et De Gaulle pour jouer Emile Beaufort dans « Le président » (1961) ou Depardieu dans Potiche (2010) en député-maire de Saint Gudule.
Et le « Dico Hollywoodien des tifs » aurait mérité un plus grand format pour revoir les mèches de Rita Hayworth, de Zsa Zsa Gabor qui « fit un procès à l’un de ses coiffeurs pour mauvaise conduite automobile après qu’il eut précipité en 2002 la Rolls de la diva alors âgée de 87 ans, dans le décor »  

vendredi 23 juin 2017

Il se pourrait que le négatif devienne caduc.

Quand on cause de politique - nous venons de vivre de riches heures, et ce n’est pas fini - on croit s’abstraire parfois de nos passions ordinaires, bien que tout fut, comme nous le proclamions jadis, politique.
Ainsi « juger à la tête du client »: un prof face à sa classe, un député ... coup de foudre ou feeling initial à réviser.
Dans le tourniquet à images, la télévision, en allant au-delà des mots, peut agir comme un détecteur de vérité : La Pen en a fait l’expérience lors d’un débat décisif où son masque tomba.
Lors de meetings en vrai, la présence, sans aller forcément jusqu’au « charisme » peut emporter les foules. Des débats « in vivo » sont également de bons révélateurs.
J’avais vu à Grenoble une Delphine Batho authentique et donc charmante, sans avoir à jouer de son sourire, alors que j’avais surtout retenu les insuffisances de la charmeuse Filippetti.
Comme beaucoup, je ne crois plus trop aux programmes, évitant ainsi de mesurer les trahisons, bien que je m’applique à penser que l’intensité de la vie politique doit beaucoup à la réduction de cette distance entre les paroles et les actes.
Pour l’instant, notre président est reconnu, au plan mondial, comme le meilleur anti Trump et il a retourné l’ambiance négative concernant l’UE, voire les étrangers en général.
Les deux derniers porte paroles du ministère de l’éducation nationale - avant oubli : Hamon et Vallaud Belkacem - auraient bien fait de garder un peu de la bienveillance qu’ils contribuèrent à déverser sans réserve à l’intention de leurs ingrats électeurs, pour leur ancien voisin de conseil des ministres.
La représentation parlementaire qui accompagne E. Macron est désormais plus colorée, plus féminine, plus jeune; entraînante.
La petite de 24 ans qui vient de pousser à la retraite un cumulard du côté du lac d’Aix les Bains a réussi à convaincre pas seulement ceux qui, comme moi, vont vers le crépuscule, avides de fraîcheur, aimant croire à l’énergie, à la bonne volonté de ceux qui prennent des responsabilités. Les mélanronchoneurs eux n’ont-ils pas compris combien le pays a besoin de paix, de gentillesse : celle de Villani teintée d’humour renvoyant à ses bavouillages le prétentieux agressif : « j’ai vu le matheux, je vais lui expliquer… » ?
Dans la vie sociale, entre semblables, le respect est la moindre des choses et il en va de même avec la confiance en ses élus, comme avec son compagnon, ses maîtres, son assureur, son libraire, moins usant que la méfiance constante, le toujours « jamais content », vitupérant sans cesse.
Me retrouvant Macronien, après un passage Royal, de Ché en Che, souvent en deuxième (gauche) Mairiste et Rocardien, Cédétiste puis furtivement Passif : j’ai goûté bien des nuances d’un rosé qui toujours me semblait frais et enivrant.
Finalement j’ai été essentiellement bon public, confiant envers ce que me proposaient les journaux que j’ai avidement épluchés : Roudoudou, Vaillant, Spirou, Miroir sprint, Match, Pilote, Actuel, Libé, le Nouvel Obs, Grenoble ville ouverte, le Point du Jour, Zoom, Le Monde, Télérama, Le Canard, sans m’interdire Le Dauphiné Libéré, Le Point, Marianne…
Le procès permanent adressé aux médias me laisse donc de ce marbre antique qui rêvait à des unes décisives, tant que je puis aller de Médiapart en Gorafi, sans les confondre, passer par Arrêt sur image sans y rester bloqué et m’autoriser France Football et tous les timbres postes postés sur Facebook.
« Si Jésus revient, ça va être conférence de presse sur conférence de presse. »
J-M Gourio.
Entre un théâtre qui crame à Saint Etienne et le collège de la Villeneuve dont les fumées ne se sont pas dissipées, la moindre des choses serait de s’interroger. Mais à l’aune de l’échantillon des réseaux sociaux que je connais, ils sont plus chauds sur le Street Art ou les ordonnances dramatisées que sur les pompiers caillassés. Et prodigues en argent de la collectivité : certains reconstruiraient d’emblée un établissement au même endroit, alors que la diversité, pas sûr que ce soit encore revendiqué, inviterait plutôt à une scolarisation hors les murs enserrés dans ces barres à « barrettes » - on ne dit plus « beurettes ».
 Pour la route, dans Télérama, Mario Vargas Llosa:
« Nous serions pires que ce que nous sommes sans les bons livres que nous avons lus ; nous serions plus conformistes, moins inquiets, moins insoumis, et l'esprit critique, moteur du progrès, n'existerait même pas. Tout comme écrire, lire, c'est protester contre les insuffisances de la vie »
Quand ils ont entendu la formule : « un groupe des Insoumis, discipliné » par l’inénarrable Conducateur, quelques estampillés FI, ont peut être esquissé un sourire, indulgent.
...........................
Le dessin du haut est du "Canard" et celui de dessous de "La revue dessinée" qui est légendé: 
Et voilà il fallait que ça arrive...Ils viennent de se rappeler que l'un est de gauche et que l'autre est de "gauche".
 

jeudi 22 juin 2017

Rothko et le colorfield. Hélène Norloff.

La conférencière devant les amis du musée rappelle la naissance de l’école de New York, après la seconde guerre mondiale, avec ses expressionnistes abstraits  faisant pièce à l’école de Paris des cubistes et autres surréalistes.
http://blog-de-guy.blogspot.fr/2017/03/lecole-de-new-york-pollock-et-laction.html
La production culturelle du nouveau monde est un relais de la puissance américaine et propage les valeurs de liberté, d’affirmation de soi, d’expérimentations.
En ouvrant sa galerie « Art of this Century », Peggy Guggenheim pouvait porter à une oreille une boucle de Tanguy et à l’autre une de Calder.
La galeriste est une actrice majeure d’un mouvement qui se professionnalise, organisant son propre discours critique.
« Nous nous libérons des obstacles que sont la mémoire, la nostalgie , la légende , le mythe, qui ont été les dispositifs de la peinture européenne occidentale. » 
 Barnett Newman se distinguant de la gestuelle de l’« action painting », la « Colorfield painting », « peinture en champs de couleur », se consacre à la couleur pour la couleur. La scène artistique se positionne  autour de Pollock et sa subjectivité, sa rapidité, son engagement physique,  un « existentialiste », 
visé par Rothko 
 et  Gottlieb, dans le New York Times :
«… on dit que ce que l’on peint n’importe pas, pourvu que cela soit bien peint. Ceci est l’essence de l’académisme. 
Nous sommes partisans d’une expression simple de la pensée complexe.
Nous sommes pour les formes plates parce qu’elles détruisent l’illusion et révèlent la vérité. 
Nous affirmons que le sujet est crucial et que le seul contenu juste est celui qui est tragique et intemporel. C’est pourquoi nous déclarons une parenté spirituelle avec l’art archaïque. »
Sans référence aux images contingentes, la couleur occupe tout le tableau à l’exclusion d’autres signes plastiques.
Cette abstraction suggère le sublime, l’infini, une recherche de la transcendance.
Clyfford Still (1904-1980) ne donne pas de titre à ses œuvres aux harmonies sourdes, traversées d’éclairs colorés où les couleurs entrent en tension :
« Cela ne m'intéresse pas d'illustrer mon époque. L'époque d'un homme le limite, cela ne le libère pas vraiment. Notre époque est celle de la science, du mécanisme, de la puissance et de la mort. Je ne vois aucune vertu à ajouter à cette arrogance de mastodonte le compliment d'un hommage graphique ». 
 Mark Rothko (1903-1970), puisera dans sa culture d’origine juive et russe, sa force et son exigence.
Il admire Matisse dont « L’atelier rouge » voit la couleur qui ne se rattache à aucune signalétique, dévorer tous les repères de la perspective.
Si ses tableaux sont difficiles à comprendre, à interpréter, leurs formats gigantesques, leurs lumières, peuvent nous entraîner vers des vertiges physiques, métaphysiques. La puissance expressive de la couleur vient à la rencontre du spectateur, libérée de l’attirail des formes. Sous la superposition des glacis, la brume peut se lever à la recherche d’une autre couleur.
« Le silence est tellement juste ».
Barnett Newman( 1905-1970) « Qui a peur du rouge, du jaune et du bleu ?»  
Ses « zips » qui  à la fois divisent ses toiles et l’unifient révèlent la puissance de la couleur.
« Pouvoir traduire l’expression primordiale de l’homme, le cri de terreur et de colère devant sa condition tragique. Son éveil à la conscience et sa propre impuissance face au vide. »
« 14 Stations de la Croix » ou «Père, pourquoi m'as-tu abandonné» a pris six ans pour être réalisé.
« On dit que j'ai mené la peinture abstraite vers ses limites, alors qu'il est évident pour moi que je n'ai fait qu'un nouveau commencement ».