Affichage des articles dont le libellé est livre. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est livre. Afficher tous les articles

vendredi 31 janvier 2025

Schnock. N° 46.

« J’ai connu une époque où les gens pleuraient, maintenant ils pleurnichent,
J’ai connu une époque où on riait, maintenant on ricane. »  
Claude Lelouch
Oui, le trimestriel ne cesse de convoquer la nostalgie, c’est sa raison d’être, quand il évoque  des publicités de l’année 83 rappellant le goût de l’aventure avec Wrangler, au son des claviers Bontempi.
Ce numéro consacré à l’inusable présentateur Michel Drucker, le gendre préféré de nos arrières-grands-mères, camarade de Ferrat et de Johnny, admirateur de Pelé, mari de Dany Saval, ne pouvait se passer de son avis sur quelques « schnocks » qu’il a bien connu : 
Salvador, Aznavour, Mitchell… avec une rubrique spéciale « punk à chien » où la laisse est lâchée à propos de Jacques Martin, Guillaume Durand, Dick Rivers ou Cauet…
Parmi les tops 10 des moments forts de sa carrière télé en dehors de l’inévitable rencontre entre Gainsbourg et Whitney Houston, les interventions des Nuls ou de Desproges à Champs Elysées lui valurent quelques mots de sa mère sur son répondeur : 
« Je ne te le pardonnerai jamais. Inutile de me rappeler. »
Elle avait eu d’autres occasions de s’offusquer lorsque sœur Emmanuelle ne saisissait pas l’humour de Geluck parce qu'il lui avait lancé : 
« Vous avez dit un jour : moi les pauvres j’en ai rien à foutre, 
ce qui m’intéresse dans la vie c’est l’alcool et les voitures de luxe. » 
Contrastant avec l’immense célébrité de l’hypocondriaque notoire apparu à l’écran pour la première fois en 1964, les autres personnalités auxquelles sont consacrés des articles font figure d’inconnus ou pas loin pour Gérard Hernandez aperçu dans « scènes de ménage » qui n’a « jamais été inquiet pour sa carrière puisque je n’en ai jamais eu ! » 
Et il faut bien des connaissances en disco pour avoir retenu que l’on doit à Daniel Vangarde : « Il est OK, il est bath, il est in » ou « vive le douanier Rousseau »
II convient d’être pop et in, pour situer le designer Pierre Paulin à qui l’on doit des fauteuils « Mushroom » ou « Orange slice ».
J’étais passé complètement à côté de la carrière d’actrice de Myriam Bru épouse de Horst Buchols devenue agente de Godard après une signature sur une nappe de restaurant.
Des découvertes sont possibles : si j’ai lu un de ses amis, Pierre Bayard, je ne savais rien du brillant dandy Frédéric Berthet  auteur de « Daimler s’en va » qui s’est donné la mort à 49 ans. 
« On ne badine pas  avec l’humour » mais celui-ci semble tout à fait adapté  pour traiter de la drôle de guerre avec «  Les godillots sont lourds »  de Maurice Fombeure, le poète. 

vendredi 17 janvier 2025

Schnock. n° 52.

Ah tu me plais, tu me plais, miroir schnock de mes années soixante, quand les lumières palissent et que s’arrondissent les angles. Je me suis régalé avec cette livraison du trimestriel qui jamais ne déçoit consacré à Georges Pompidou
J’étais alors très Charlie Hebdo :  
« Pour la bande à Cavanna, Pompidou, qui se présente en homme cultivé, amateur de poésie et d’art contemporain, est en réalité l’incarnation par excellence de la bourgeoisie détestée, de l’ordre moral et du capitalisme financier. » 
Aujourd’hui, j’inverse les propositions et je suis étonné par sa finesse dans la reprise d’un entretien avec Michel Droit pour le Figaro littéraire qui m’aurait fait mourir de honte ou au moins rougir à l’époque, pourtant des formules comme celle là ont de l’allure : 
«  L’œuvre d’art, c’est l’épée de l’archange et il faut qu’elle nous transperce ».
Laurent Chalumeau, dissèque brillamment un morceau d’anthologie quand dans une conférence de presse, à propos de l’affaire Russier (prof suicidée après une relation amoureuse  avec un de ses élèves) le président de la République cite Eluard : 
« Comprenne qui voudra
Moi mon remord ce fut
La victime raisonnable
Au regard d’enfant perdu
Celui qui ressemble aux morts
Qui sont morts pour être aimés. »
 Comme il est d’usage, un diconoclaste permet d’envisager la richesse du successeur du Général en plus moderne, depuis les Beach Boys jusqu’à ses dernières volontés au paragraphe « Ze end ».
Daniel Schneidermann règle ses comptes avec son ancien chef du journal  « Le Monde » tout en nous apprenant les dessous d’une querelle avec le journal Pilote à propos de caricatures de Pompon qui pouvait se montrer Pompidur avec Chaban ou Poher…
En 1978, commençait un feuilleton « Madame la juge» avec Simone Signoret
dont Montand avait dit : 
«  C’était facile de devenir l’amant de Casque d’or,
mais il a fallu beaucoup d’amour pour rester avec Madame Rosa. »
Après le top 15 des publicités pour disques (musicaux), la liste des succès en chansons arrangées par Jean-Claude Vannier s'allonge : « Mélodie Nelson »  « Que je t’aime », Brigitte Fontaine,  Herbert Léonard, Bécaud et Polnareff…
Le dessinateur Serre, «  Humour noir et hommes en Blanc », a commencé à être publié en coffret par les éditions du Grésivaudan avant de faire la fortune de Glénat dans un format plus populaire. 
Henry Guybet, certes pas « un acteur de compétition »  figure parmi les fondateurs du « Café de la Gare », son personnage de Salomon dans Rabbi Jacob, sa silhouette dans «  La septième compagnie » se sont inscrits dans notre paysage.
Parmi le recueil des vacheries, plutôt que les mots de Ségolène Royal contre l’Eurovision ou ceux de Zaho de Sagasan contre Hanouna, Ariane Mnouchkine me semble plus utile à propos des gens de culture envers le public : 
« Quand les gens disaient ce qu’ils voyaient on leur disait qu’ils se trompaient, qu’ils ne voyaient pas ce qu’ils voyaient. Ce n’était qu’un sentiment trompeur, leur disait-on. Puis, comme ils insistaient, on leur dit qu’ils étaient des imbéciles, puis comme ils insistaient de plus belle, on les a traités de salauds. »

mercredi 1 janvier 2025

Almanach dauphinois 2025.

Tel qu’en lui-même, le marqueur annuel du temps ne change guère, sauf la rubrique des centenaires qui tient de plus en plus de place avec de courts récits de vies heureuses : 
«  Je monte toujours les escaliers sans difficulté - ah si, tout de même il faut que je me tienne à la rampe maintenant. »
Elle s’était cassé le col du fémur, il y a deux ans. 
Il y a toujours une colonne pour noter la date de l’arrivée de la première hirondelle et autres phénomènes naturels récurrents.
Les néo-ruraux suivront le conseil : 
« En janvier, fumer le pied des arbres »
 mais avec le dérèglement climatique peut-on se fier aux dictons ?  : 
«  Noël herbeux, Pâques teigneux » 
Alors que bien de sentences restent vraies : 
« même tordu, le bois fait le feu droit. » 
Les lunaisons sont précisément répertoriées en regard du zodiaque où  
« la présence de la lune dans les signes de terre -Taureau, Vierge et Capricorne - agirait avec bénéfice sur les légumes poussant dans la terre : carottes, céleris, asperges… » 
Les nouvelles de l’Isère, de la Drôme et des Hautes Alpes sont répertoriées du premier juillet 2023 au 30 juin 2024 avec  
« des grêlons gros comme des balles de tennis le 12 juillet à Grenoble ».
Qui se rappelle des 100 000 personnes déplacées en Azerbaïdjan en septembre ?
Et que Jacques Julliard et Robert Budzinski nous ont quittés cette année.
Une météo qui a soufflé le froid et le chaud est un sujet central. Le réchauffement planétaire permet la prolifération des scolytes qui ravagent les épicéas et ceux-ci en stress hydrique ne peuvent se défendre alors que les insectes commençant plus tôt leur cycle de reproduction, apparaissent trois fois dans l’année au lieu de deux.
Sont rappelées les vertus de « l’eau de vie » qui servait à guérir tous les maux des bêtes et des gens avec un rappel en tout petits caractères qu’il ne faudrait quand même pas abuser.
La gnôle n’est pas reconnue au patrimoine de l’UNESCO comme la transhumance.
Les bouilleurs de cru dont on aurait pu croire à l’extinction ont obtenu l’exonération de tout impôt sur les 50 premiers litres tirés de l’alambic : le recouvrement de cette « accise » revenait plus cher qu’elle ne rapportait à l’état.
Le bestiaire de cette année est consacré au coq de bruyère et au gypaète barbu 
et l’herbier à l’onagre dite aussi « herbe aux ânes, primevère du soir ou jambon du jardinier ». 
La pomme transparente de Croncels est la variété locale mise en évidence.
Le hameau du Saugey de la commune de Brangues où se trouvait autrefois un pénitencier constitue une enclave iséroise dans l’Ain suite aux déplacements anciens du cours du Rhône.
Mémé Alice indique comment beurrer une biscotte sans la casser et autres astuces.  
La poêlée de coing fait partie des recettes proposées.
Les expressions dauphinoises sont toujours plaisantes : 
« combien ça te fait ? », « embringuer » voire le rare « margotter » en terrain boueux.
L’entreprise qui fabriquait à Sillans les skis Dynamic a connu son âge d’or dans les années 60 avec les VR 7 (verre / résine, 7 pour les années de développement).
La marque de doudounes Monclar doit son nom à la ville d’origine de ses inventeurs, Monestier de Clermont.
La commune d’Abriès-Ristolas dans le Queyras a les honneurs de la revue annuelle.
Les 380 habitants qui vivent toute l’année au pied du mont Viso de l’autre côté de la frontière avec l’Italie voient leur nombre multiplié par dix en été avec les touristes et les natifs attachés à leur beau pays. Il n’y a plus qu’un éleveur de moutons.
La pastorale des santons à Crest fait revivre en version provençale la nativité :  
«  Moi je suis l’ange Boufaréou. Ils m’ont appelé comme ça à cause des grosses joues que j’ai fini par attraper à force de jouer de la trompette chaque fois que le bon Dieu est content. » 
Les histoires de Fafois font partie du patrimoine : 
« - Comment je ne suis pas dans le train qui va à Lyon ? s’exclame le passager assis en face de Fafois.
- Non monsieur, Lyon est derrière vous.
- Eh bien dans ce cas, échangeons nos places. » 
Une mule appelée Mourette n’est pas un personnage secondaire dans le conte où Phrasie et  Siffroy se rencontrent.
« Tristan à l’auberge dressa les accords, et gagna la cravate qu’il est d’usage de donner à ceux par qui ont été manigancés les mariages. »
Deux histoires traduites du patois ne manquent pas de pittoresque : 
« Et moutron dadolin qu’embétâve déjà
D’avei tan boligâ son pronô din son crâno. »
« Et notre nigaud qu’embêtait déjà
D’avoir tant remué son discours dans son crâne. » 
Mais d’un bout à l’autre de la province souvent langue varie : une personne maladroite à Tullins était dite « in gôche » et « un tébi » à la chapelle en Valgaudemar. 
La tour Perret une autre centenaire  verra la fin de sa restauration pour l’anniversaire de son édification à l’occasion de l’exposition internationale de la houille blanche et du tourisme en 1925.

samedi 28 décembre 2024

Romans 2024.

Loving Frank. Nancy Horan.
Les yeux de Mona. Thomas Schlesser. 
La papeterie Tsubaki. Ogawa Ito.
Eugénie Grandet. Balzac.
Rencontres avec des animaux extraordinaires. Andrés Cota Hiriart.
Pour Mia (13 ans):
L'effet boule de neige.
Before.
Mille baisers pour un garçon.
Quand je suis toi et que tu es moi.  
Ma vie selon moi (1 jusqu'au 12)
Pour Nino ( 11 ans):
Tom Gate
Romulus et Rémus les fils de la louve
Simbad le marin
Ariane et le minotaure
Kamo agence Babel
 

samedi 7 décembre 2024

Les pieds tanqués. Philippe Chuyen.

Un ami enthousiasmé par le spectacle vu à Avignon, où la pièce jouée au boulodrome de l’île Piot a connu un beau succès, m’a donné l’occasion d'un aperçu des dialogues.
J’ai mieux compris à la lecture de ces 70 pages, la place que ne cessait de prendre l’Algérie dans sa vie, lui qui est né là bas, et le bien qu’a pu lui faire cette œuvre au langage fleuri permettant d’envisager les contradictions, d’exprimer regrets et chagrins, tout en continuant à jouer ensemble, à vivre ensemble. 
Depuis longtemps je n’avais pas lu de théâtre et bien que je ne goûte guère l’exercice, j’ai cru voir et entendre les quatre boulistes, sans leur truculence appréciée par ceux qui ont assisté à la représentation. 
Le mot pétanque vient du provençal quand les pieds doivent être ancrés au sol, bien « tanqués ».
J’ai mis du temps à identifier les personnages, ce qui m’a évité de tomber dans la caricature pittoresque pour approcher la complexité et l’intensité d’un sujet toujours d’actualité, traité ici avec bonhomie.
Les péripéties du jeu permettent le dialogue, les confidences. 
Le fils d’un combattant pour l’indépendance de son pays avait un oncle harki, 
le pied-noir aime l’Algérie de son enfance, 
alors que le père communiste du « Provençal de souche » portait les valises du FLN. 
Le parisien, dernier étranger à rentrer dans la partie, a sa part aussi dans ce passé douloureux qui le lie aux autres protagonistes. 
«  Parce qu’avec lui, les conversations, on n’a pas fini. »

vendredi 18 octobre 2024

Schnock n° 51.

La nostalgie sourit avec cette livraison bien fournie en littérature, foot, ciné et chanson.
1/3 des 175 pages du trimestriel est occupé par une évocation de Françoise Sagan 
à qui Jérôme Garcin avait demandé de rédiger son épitaphe :
« Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, "Bonjour tristesse", qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »
Ses formules fécondes et légères s’accordent bien à l’esprit et au style de la revue: 
« On ne sait jamais ce que le passé nous réserve. »
« Ce n’est pas le doute, c’est la certitude qui rend fou, disait Nietzche, ou un autre. » 
Il s’agit d’un hommage délicat et vif pour l’auteur d’ « Un orage immobile », « Avec mon meilleur souvenir » « Un peu de soleil dans l’eau froide »… à travers interview de son fils et évocation de sa bande, anecdotes et citations rassemblées dans un « Petit Sagan illustré » où il est question de Mitchum déguisé en hamburger, de Proust et de Star trek. 
Ses rapports à la musique, aux bagnoles sont également évoqués à la suite d’une sélection de dix livres du « charmant petit monstre » moderne dans ses manières d’être et dans la continuité de Colette voire de Madame de Sévigné pour le style. 
Caroline Loeb (« C’est la ouate ») qui a monté un spectacle «  Françoise par Sagan » met en relief sa liberté.
Avec Platini, Giresse, Tigana, nous revenons vers « le carré magique », où ils étaient au moins cinq en comptant Genghini et Fernandez.
Brigitte Fossey a eu une riche carrière bien après « Jeux interdits »
ainsi que « le nonchalant qui passe », « Le monocle rit jaune », Paul Meurisse, l’un des « Diaboliques ».
Avec Jonasz nous revenons sur la «  fabuleuse histoire de Mister Swing » 
avant de remettre sur le dessus de la pile de vinyles : Lili Drop, 
et celle des DVD : « Une fille cousue de fil blanc » par Michel Lang, 
alors que pour les bouquins Alphonse Boudard prophétise : 
« Les femmes sont déjà proxénètes, gangsters, policières, ministres, chefs d’état, tandis que les hommes les remplacent à la crèche, à la vaisselle, à l’atelier de couture ou sur le trottoir.Il reste encore le Vatican à investir… »

vendredi 4 octobre 2024

VIEUX.

Après avoir développé une citation de Groucho Marx dans son premier numéro : 
« Dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s'est passé.»
le magazine d’Antoine de Caunes en son deuxième numéro confirme son côté plaisant.
Le joli carnet d’adresses de l’homme de télévision lui permet de s’adjoindre des rédacteurs  à belles plumes et de badiner avec quelques personnalités sympathiques.
En couverture Iggy Pop porte dans ses bras le héros de « Nulle part ailleurs » qui donne longuement la parole à Maryse, la femme de son ancien compère Philippe Gildas.
Ces copinages passent bien quand nous retrouvons monsieur Poulpe, Patrice Leconte, Laurent Chalumeau, Zabou Breitman et Marx (Thierry) au rendez-vous de la légèreté.
Si la chronique de Thomas Legrand est convenue, la linguiste Julie Neveux prête une oreille attentive au langage des jeunes. 
« Un vieux c’est toujours un jeune d’hier. Difficile aussi de ne pas être vexé. Contrarié. Voire d’en faire un principe moral. Et voilà qu’on est devenu un vieux con. »
 Les mots, marqueurs générationnels mettent « Un daron en galère »: 
«Mais ne jetons pas l’anathème sur les djeunz à propos de cette cancelisation des voyelles » 
Nicolas d’Estienne d’Orves, lui, réhabilite des mots oubliés et Jean Louis Fournier en promo pour son livre : «  Il y a encore de la lumière sous mon chapeau » proclame sa fierté d’être vieux.
Autour des « aidants », dont le nombre est estimé à 11 millions en France, des réflexions s’avèrent nécessaires. Mais, à mon avis, le recours systématique à la collectivité dans une société où l'individualisme est la règle, devrait être interrogé aussi.
Est évoqué le succès théâtral à Avignon de « La vie secrète des vieux » où il est question de sexualité qu’une militante du CNaV (Conseil National autoproclamé de la Vieillesse) développe, avant un article sur la Viagra qui « redonne la banane », sans oublier « la tendresse bordel ! »
La riche rubrique culturelle en conclusion de ces 130 pages, nous rappelle que les premiers romans peuvent venir sur le tard. 
Un photographe a beau ne pas forcément bien « encadrer ses modèles », le résultat peut être fort beau.
Il n’a pas seulement des souvenirs de René Fallet ou des retrouvailles comme avec Pierre Richard en verve, avant que son docteur lui demande :
«  … j’ai mon bloc d’ordonnances. Alors Pierre qu’est-ce qui  vous ferait plaisir ? »  
Je découvre le dessinateur Mo/CDM ( Mo diminutif de Heimoana + Chieur Du Monde) dont le dessin «  Le rap c’est nul » tagué par un papy dont la compagne pouffe sous le capot d’une voiture abandonnée, est plutôt transgressif. 

vendredi 13 septembre 2024

Schnock. N° 49.

C’était au moment où 2023 se finissait et la revue trimestrielle qui aime bien les listes avait retenu parmi les mots à la mode : « iconique », « immersif », « pas de souci », facilement repérables alors que j’étais passé sans l’entendre près de « GOAT » (Greatest All The Time).
Dans ce numéro, nous pouvons tout apprendre de la carrière de Bernie Bonvoisin, chanteur du groupe Trust, 
et de celle du dessinateur Jean Claude Poirier, créateur de Supermatou dans Pif Gadget, héros de la ville de Raminagroville.
Après le rappel des publicités d’Isabelle Aubret pour Sol Amor, Sylvie Vartan avec Kelton, et Dalida vantant Saint Raphaël, près de 100 pages sont consacrées à Bourvil.
Sa filmographie fait l’impasse sur les insurpassables « Corniaud » et « Grande vadrouille » pour rappeler, « Les grandes Gueules » de Robert Enrico, « Un drôle de paroissien » avec Mocky ou « Le rosier de Madame Husson » pour sa période champêtre.
Concernant « La traversée de Paris » d’après une nouvelle de Marcel Aymé, nous avons droit à un instructif making-of avec des extraits de dialogue d’Aurenche et Bost : 
 « Non mais regarde-moi le mignon, là, avec sa face d'alcoolique et sa viande grise avec du mou partout, du mou, du mou, rien qu'du mou ! Mais tu vas pas changer d'gueule un jour, toi, non ?! Et l'autre, là, la rombière, la gueule en gélatine et saindoux. Trois mentons, les nichons qui déballent sur la brioche. 50 ans chacun, 100 ans pour le lot, 100 ans de conneries ! » 
Gabin, Grangil, "montait dans les tours", Bourvil interprétant Martin était plus sobre : 
« Y a pas d’âge pour être chômeur ».
 Dans d’autres films la rigolade va bien avec des vérités : 
« J’ai vendu mon fusil pour acheter des cartouches »
« En matière de justice, l’erreur est inhumaine »
« Quand on n’a rien, ça se voit de loin. » 
André Raimbourg, son vrai nom, évoqué par son fils, fut l’homme d’une seule femme. 
L’article évoquant ses partenaires Michèle Morgan, Anna Magnani, Danielle Darrieux met en valeur la douceur de l’anti-macho, du bon gars, du gentleman, qu’il soit « mâle dégrossi », voire mari indigne.
Pour ses « petites chansons » le rédacteur ne s’attarde pas sur « La tactique du gendarme » ni sur « Les crayons », il y en a tant d’autres : 
« La balade irlandaise »( un oranger)» ,« C’était bien (le petit bal perdu) »…
Enrico Macias (Gaston Grenassia) revient sur sa carrière qui l’a mené de Bab el Oued au Carnegie Hall et devant 20 000 personnes au pied des pyramides à l’invitation du président égyptien Sadate.
L’évocation du film de Laurent Heynemann « Les mois d’avril sont meurtriers » me rappelle moins Jean Pierre Marielle que Jean Pierre Bisson qui m’avait offert une de mes émotions théâtrales des plus mémorables : « Sarcelles sur mer ». 
L’artichaut serait-il si rétro qu’il a droit à son hommage ?  
« Artichaut must go on »

vendredi 28 juin 2024

Zadig n° 21. La bagnole stop ou encore ?

Après le train qui ne posait aucun problème écologique,
le trimestriel développe un questionnement équilibré autour de l’automobile.
Un grand récit historique, illustré par une 2CV en bord de route lors d'un pique-nique et un départ des 24 heures du Mans du temps des rêves de vitesse, se boucle sur l’annonce des appellations des prochaines Renault électriques : R4 et R5. 
« La bagnole cristallise les clivages territoriaux et illustre jusqu’à la caricature le dilemme entre préservation du pouvoir d’achat et décarbonation des activités humaines. »
Si les rubriques révisant le vocabulaire automobile ou l’évocation de l’auto radio comme objet culte étaient prometteuses, la mise en forme est bien plate. 
Pourtant la revue soigne son style comme dans le récit vivant d’Arles à Paris en Blablacar 
et offre des angles originaux avec l’association CAR 80 (Conduire l’automobile d’un retraité de la Somme), 
les voitures « sans pe » (sans permis) qu’adoptent des adolescents à Marseille 
ou l’évocation de la R12 pour les voyages au bled. 
Des entretiens avec des automobilistes sur une aire d’autoroute,
avec des animateurs de sites POA (Petites Observations Automobiles) sur YouTube complètent un argumentaire documenté à propos de la voiture électrique 
et des réflexions autour du genre même si  la réflexion « femme au volant, mort au tournant » est morte.
Pastoureau « le spécialiste des pigments » n ‘apporte pas grand-chose lorsqu’il constate que la palette des couleurs de voitures est peu diversifiée, 
pas plus que Le Bras et ses cartes une fois qu’il a dit que  
«  Dans la diagonale du vide, les modèles de voitures plus écolos peinent à percer mais ils ont du succès dans l’Ouest de Paris ». 
Le dessin de Catherine Meurisse et la bande dessinée de Guillaume Long séduisent toujours. 
La conversation avec Dany Boon, acteur qui ne me passionne pas à priori, s'avère intéressante et sa trajectoire extraordinaire, depuis une enfance difficile qu’il est capable de regarder avec tendresse.
Au pays des algues vertes dont une bande dessinée a contribué à la mise en cause d’un système d’agriculture bretonne malfaisant
des agriculteurs résistent, cultivent du blé noir, du chanvre, élèvent des moutons des landes de Bretagne, des vaches armoricaines et préservent des semences : coco de belle Ile, sucrine du Berry, Potimaron Angélique, ils refont haies et talus…
Dans les vignobles bordelais, les conditions de vie de roumains ou de marocains soumis à des passeurs et à des patrons véreux sont scandaleuses, alors que les passeurs de savoir-faire anciens à Grasse sentent bon.
La nouvelle de Belinda Cannone m’a laissé indifférent, 
mais j’ai découvert un écrivain Franck Courtès, dont un voisin a affiché :  
« Oubliez le chien, méfiez vous du maître », terrible. 

samedi 27 avril 2024

Les soldes chez But. Pascal Fioretto.

Ce pastiche du prix Nobel de littératchure, Annie Ernox, est réjouissant. 
« Depuis sa rencontre avec Bourdieu derrière le pilier de l’amphi Richelieu de Paris I, elle n’a jamais dérogé à la mission qu’IL lui a confiée ; écrire la Vie des pauvres pour les faire plaindre par des bourgeois lettrés. » 
Hésitant sur le pronom à employer, « je » ou « elle » pour un récit intime à vocation collectiviste, l’auteur de « L’élégance du maigrichon », de « Mélatonine », connaisseur en littérature, empaquette, en moins de cent pages, l’égérie qui fit pleurer de bonheur l’émotif Mélenchon. 
« Je veux être celle qui envoie valser les étiquettes et se contrefout comme de sa première épilation maillot du titre de ses livres. Celle qui ne sa lassera jamais de rappeler que Kundera, Roth, Pessoa, Proust, Borges, Kafka, Vila Mata… et tant d’autres tricheurs et truqueurs n’ont jamais eu SON prix. » 
Cette fois l’esthète des supermarchés 
que j’avais tant aimée et critiquée
réside - rançon de la gloire - en pays inconnu, celui de l’humour.
Après quelques certifiés ATSEM, responsables de CDI, et un seul conseiller d’éducation, une nouvelle aventure amoureuse, prétexte à écrire, nous permet de partager la misère des ultra riches et d’assister, loin de Cergy-Pontoise à un cours sur l'écriture plate dans une université américaine. 
«…  de l’écriture plate, je crois être parvenue à l’écriture creuse, celle qui ne se contente pas de mettre les choses à plat mais les évide de l’intérieur »

vendredi 19 avril 2024

Schnock n° 41.

En picorant au hasard dans la collection des revues des vieux de 27 à 87 ans 
puisque le temps ne fait rien à l’affaire, voilà le numéro consacré à celle qui « faisait peur aux garçons » : Claudia Cardinale. Honnêtement pas que peur.
N’est ce pas Paul VI qui la reçut ? 
«  Moi je suis pape mais vous vous êtes cardinal, vous pouvez faire ce que vous voulez » 
Effectivement, à travers un entretien avec elle, Jacques Perrin son partenaire de « La fille à la valise », Jean Sorel celui de «  Sandra » de Visconti, ou sa fille Claudia, la brune C.C.  face à B.B. dans « Les pétroleuses » a gagné sa liberté au cours d’une riche carrière.
Après une sélection de 12 films dont « Cartouche », « Fitzcarraldo », ses rôles se sont étoffés  dans «  Il était une fois dans l’Ouest » ou « Les professionnels ». Et dans le bric à brac sensément alphabétique allant de C comme « Cascadeuse » à C comme « Chirurgie esthétique », il n’y a pas que Moravia qui s’exprime : un admirateur  pour celle qui fut la femme d’un seul homme, Pasquale Squitieri, un réalisateur très coureur : 
« Je suis un jeune paysan, j’habite la Lozère, dans un petit village joli, je ne suis pas bien riche, mais j’ai quand même un revenu stable. J’ai sept vaches, qui donnent du bon lait et du beurre, trente trois brebis et un bouc. J’ai aussi une agréable petite maison mais… ? Il me manque quelque chose pour être tout à fait heureux. Chère Claudia, si vous le désirez, vous serez la plus heureuse et la plus chérie de toutes les femmes du monde. » 
Après ce dossier fourni, la fin prématurée de la chanteuse, Joëlle Mogensen du groupe musical « Il était une fois » donne une tonalité sombre à l’évocation d’Yves Bigot.
Et même l’article consacré au « Corned beef » fabriqué à Bressuire (Deux Sèvres) malgré son « effet bœuf » a des allures crépusculaires.
Patrick Bouchitey et Jackie Berroyer, toujours intéressants, réhabilitent en 12 pages le film rock « Lune froide » sur la route de l’oubli.
Mais le rappel des pubs d’ Europe N° 1 de 1966 à 1992, de Bellemare à Delarue, ajoute un chapitre de plus au catalogue : « La nostalgie n’est plus ce qu’elle était ».

lundi 1 janvier 2024

Almanach dauphinois 2024.

La publication annuelle réceptacle du temps passé a toujours été hors du temps, elle ne peut être démodée.
Les abeilles apprécieront toujours en janvier que « Lors d’une journée ensoleillée et calme »   soient alimentées « en candi les compagnies nécessiteuses ».
La remarque de bon sens «  Seuls les riches se vantent d’avoir été pauvres » reste vraie, ainsi que le dicton : «  C’est la dose qui fait le poison. »
Même vendus au cœur des villes, les conseils concernent surtout  jardiniers, paysans, cueilleurs de champignons et ceux qui font attention à la lune : 
« épicéa : abattu et débité les jours suivant la pleine lune, la sève se fige et le bois se conserve mieux. »
L’humour de Fafois délicieusement obsolète perdure: 
 « 5 enfants avec le même prénom ! Comment faites-vous pour vous adresser à l’un d’eux ? demande madame Fafois.
- Je l’appelle par son nom. » 
La liste des événements de l'année dernière en Isère s’étend d’un juillet à l’autre: de la visite d’Emmanuel Macron à ST Microélectronique aux émeutes urbaines. 
Pour la météo il s’agit du second été le plus chaud après celui de 2003:
2,4 degrés supérieurs aux normales de la période 1991-2020.  
Le reportage à Buis-Les-Baronnies« l’on se sait dauphinois mais où on se sent provençal » se souvient qu’au XIV° siècle il y avait 1000 habitants de plus que les 3500 d’aujourd’hui. L’employeur le plus important est l’hôpital-EHPAD et l’escalade constitue l’attrait touristique principal. L’abricot, les olives (« La tanche » variété unique au monde), le tilleul ont fait la renommée de la bourgade traversée par l’Ouvèze. Les  fils Ducros y avaient installé une usine qui employait 200 personnes dans les années 60-70 alors que l‘équipe de football féminin, les « Albertines » connaissait se heures de gloire.
L’expression de chez nous « Faire beau » signifie «  se mettre en colère ».  
« Elle a fait beau quand elle a vu arriver les gamins dans le couloir avec les souliers tout pleins de boue » 
Nous apprenons tout sur « l’amer à boire », la chicorée sauvage 
et le campagnol « dont la femelle peut avoir six ou sept portées par an de quatre ou cinq petits ».
Nous n’en sommes pas rendus à revenir au gazogène auquel certains conducteurs s’étaient convertis très rapidement pendant l’occupation, pas plus qu’à « la brèle », la Peugeot 103, qui éveille des nostalgies.
Les talents du sourcier sont de plus en plus sollicités avec le réchauffement climatique. 
L’huile de foie de morue n’éveille pas de mélancolie alors que perdure le temps des vogues, des fêtes de village dont un invitation fin du XIX° siècle dans le Champsaur était charmante. 
«  nené péréu, béus amourious… »
« Venez ici beaux amoureux
Qui cherchez une femme aimable
Nous avons des filles qui ont belle chevelure »  
« un bèun plumaje ».
Le patois varie, par exemple à  Tullins on dit : « acheu de né » 
et dans le Valgaudemar : «  à tseil néo » pour « il a neigé ».
L’histoire du petit violoniste, sous forme de conte, est celle de Lully 
alors qu’un lecteur  raconte ses vacances au bord de la mer en 1964 chez un dame qui guérissait les brûlures et les piqures de vives.
La dimension régionale est toujours affirmée avec la personnalité découverte cette année: l’affichiste Achille Mauzan né dans les Hautes- Alpes, il connut la célébrité surtout en Italie et en Argentine.
Les caractéristiques sont replacées dans un contexte plus général : 
le département de l’Isère compte deux fois plus de communes (512) 
que la Suède huit fois  plus peuplée.
Parmi les biographies des centenaires, quelques anecdotes peuvent alimenter des réflexions :
« Le brave Louis, redoutable joueur de coinche se rend toujours chez des amis pour « taper le carton » tous les vendredis après midi.  
« Comment j’y vais ? En voiture pardi ! Je conduis toujours. Je dois être l’un des automobilistes les plus vieux de France. Mais je ne vais pas loin. J’ai promis à mes filles de ne pas sortir de la commune. »

vendredi 6 octobre 2023

Zadig n°18. Eté 2023.

Depuis le premier numéro du trimestriel précieux pour la variété de ses points de vues,
un changement s’est opéré  en privilégiant un thème parmi les 170 pages. 
Et puisqu’il s’agit de se plonger dans les passions françaises, « l’amour à la française » tire la couverture à lui dans cette livraison.
L’ouverture par une interview de Charline Bourgeois Taquet et Valéria Bruni-Tedeschi est assez conventionnelle d’autant plus qu’une conversation courant sur 15 pages avec Virginie Efira , actrice à la mode, l’avait précédée. 
L’auteur de théâtre Alexis Michalik se voit sollicité. 
« Jadis l’homme avait droit aux prostituées et la femme devait être vierge. » 
Un retour historique « de la galanterie à #metoo » s'avère par contre intéressant : 
«  changer d’idéal collectif, ce n’est jamais supprimer les problèmes : c’est se débarrasser des anciens et en acquérir de nouveaux ».
Concernant aujourd’hui des experts évoquent « le trouple » (couple à trois), et rappellent qu’en 2021, il y a eu plus de 200 000 victimes de violences conjugales et 94 000 viols.
Au pays rose de Ronsard, pleurent les yeux d’Elsa.
La mémoire de ces réalités ahurissantes va avec la légèreté de l’évocation des « french lovers » des années 40 en Amérique, ou les divertissants récits d’expériences avec l’application de rencontres « Tinder » ou quand persiste le jeu du hasard et que Julie livre les résultats de sa recherche du polyamour.
Sous le titre : « La confusion des sens », les mots sont éclaircis : « embrasser » bien sûr.  « Faire l’amour » a signifié un jour « faire la cour » et amitié et amour se confondaient jadis.
« Les cadenas de l’amour » attachés au Pont des Arts ou à Montmartre éloigneraient-ils de la légèreté ? Les élans ailés perdent-ils en s’accrochant ? Faut-il une preuve ?  
Bien loin de la tendresse et des émois des amants, l’évocation de la colère de jeunes Corses après la mort d’Ivan Colonna remet en lumière un épisode de violence qui avait été éclipsé par le début de la guerre en Ukraine.
Les souvenirs de la Corrèze de Franck Bouysse ressemblent aux miens, et je sais les lueurs opalines de la Bretagne, même si ce n’étaient pas des ballots de cocaïne qui s’échouaient sur les plages.
Vanessa Springora raconte le destin des sangliers de Port Cros venus du continent à la nage et devenant un problème en se multipliant.
 J'ai trouvé la nouvelle de Philippe Claudel, « la bêche » assez plate, mais les planches gourmandes de Guillaume Long toujours aussi savoureuses : « Les gnocchis d’Océane ».  
Les brutaux faits divers choisis par Jaenada ne seraient-ils pas la face ratée de l’amour ?