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vendredi 15 mars 2024

Dodo.

Il parait qu’à la recherche de lecteurs perdus, « Le Nouvel Observateur » devenu «  L’Obs » reprendrait son ancien titre, quant à  moi actif désactivé, je persiste à jouer l’ancien observateur.
Les violentes pressions paysannes des semaines passées retardent les évolutions tendant à préserver l’environnement, mais il faudra faire avec : est-ce le peuple tant évoqué lorsqu’il était vêtu d’un gilet jaune qui a parlé ? « La Coordination Rurale » était-elle intersectionnelle?Les agriculteurs ont mis des points sur les « i » des inégalités chez ceux qui travaillent la terre, si loin des chercheur.e.s de poils sur les œufs, avec leurs points avant les « e ».
Il faudra essayer de comprendre l’opprobre massif à l’égard des écologistes entrainant le mépris de l’écologie. Une Sandrine Rousseau absorbée par les médias tournant aux clashs et friands de caricatures, dessert les verts. Ses excès excitent et contrarient les pragmatiques qui voudraient faire admettre la nécessité de la préservation de la bio diversité. Pour ce qui est de leur refus de débattre avec l’extrême droite, au-delà de leur faiblesse tactique, ils se conforment à une image d’intolérance préfèrant la soupe sur les tableaux à la contradiction. « Le monde change » a été conjugué à tous les temps.
Nous assistons aux soubresauts du passage de l’agriculture familiale à l’agro industrie.
Alors que la consommation de produits bio s’effondre, l’agro écologie peut-elle convaincre ?
Il y a 25 ans, Braudel, historien du temps long, relevait dans «  L’Identité de la France »: 
« Comme me le disait plaisamment mais finement un de mes amis, fils de paysans, né en 1899 : « Nous ne manquions de rien, sauf d’argent… ». 
Le soja pour nos vaches vient du Brésil, les carburants pour les tracteurs John Deere du Golfe, les engrais de Russie, les pesticides d’Allemagne et de Chine, les datas des GAFAM US…
Les postures nationalistes, protectionnistes sont des impostures : les tomates débarquent du Maroc et en Espagne ce sont des Marocains qui les ont ramassées. Nous consommons plus d’ananas que de poires…
Est-ce qu’il y a un loup pour qu’arrivent massivement des moutons depuis les antipodes ?
Nos saumons, nos mangues et avocats, nos chocolats ne sont pas tricolores, et si peu nos poulets, mais nous abreuvons le monde de nos champagnes : so french, le luxe!   
Du bas de laine privé effiloché à la dette publique qui file, les contes finissent par compter.
Il n’y a pas que les paysans obéissants à des injonctions contradictoires : le bon sens emprunte les sens interdits, les paradoxes obèses se nourrissent de contradictions.
Les notions de cohérence se pulvérisent quand la surpopulation mondiale cause essentielle de l’épuisement de la planète ne peut se résoudre dans l’absurdité d’un coitus interruptus généralisé.
Ceux qui ont tout, ne voient pas d’un mauvais œil l’effritement de la croissance économique, voire une décroissance. Si bien que les anecdotiques enfants de « No futur », ne veulent plus d’enfants, ils expriment la dépression des fins de race, d’une civilisation à bout de souffle puisque le désir de se reproduire a disparu, stade ultime de l’individu s’endormant sans risque d'être réveillé par des pleurs d’enfants. 
Le temps de sommeil diminue et les dodos ont disparu depuis la fin du XVIIᵉ siècle. 
« Souffrant d'insomnie, j'échangerais un matelas de plumes contre un sommeil de plomb. » Pierre Dac

vendredi 1 mars 2024

Marcher sur la tête.

Je ne goûte guère les histoires de fantômes et la formule : « nous vivons avec les morts » me semble relever d’une poésie ne consolant plus grand monde dans notre univers mortifère. 
Sans solliciter plus que de raison des mots irrémédiables, j’ai l’impression d’être renvoyé à un temps disparu, loin des vivants vitupérants d’aujourd’hui. Familier des Sempé et Maradona tombés depuis peu et premier dans la file des défunts à venir in my family, je ne vais pas contourner les évidences ni m'ensevelir à l'avance, mais mon passé est plus profond que mon futur ultérieur.
Le transfuge que je fus, aurait des dispositions à se repaître d’images d’antan, mais je ne parviens pas à suivre les ruraux arracheurs frénétiques de haies, quand sur les trottoirs des villes croissent les herbes folles.
Et comment comprendre ceux qui demandent tout à l’Etat tout en ne cessant de miner son autorité ? Les cravatés du RN sages à la chambre ont aimé le bordel au salon.
Où sont les « leçonneurs » quand les tracteurs se mettent en travers des routes ?
Ils le diront une fois les décisions prises. Quand les élus du peuple ont eu la parole, ils ont refusé de débattre par exemple des problèmes migratoires, allant jusqu’à remettre en cause la légitimité du conseil constitutionnel ; des élus Républicains !
Les travailleurs de la terre et les défenseurs de la Terre, ayant planté leurs tentes aux antipodes les uns des autres, estiment que le monde marche sur la tête.
Des réglementations envahissantes n’arrivent pas à masquer le faible pouvoir des techniciens impuissants à faire valoir une rationalisation des pratiques dans des espaces où a fondu la biodiversité. Encore un effet de la défiance vis à vis des intellos et retour de bâton envers une parole écolo hégémonique dans les médias qui traitent de lobbies tous contradicteurs des bêbelles paroles bobo.
La terre s’épuise et « un agriculteur sur deux partira à la retraite d'ici 2030 ». Plus personne ne veut faire ce boulot comme tant d’autres pauvres jobs, pourtant si on veut éviter les désherbants chimiques, il conviendrait de se pencher sur la question.
Pour illustrer d’autres décalages où l'expérience  ne sert plus : me mêlant à une conversation sur l’école où j’ai passé quelques annuités, je me suis aperçu  face à une écoute pourtant polie que ce que je racontais était périmé, démodé, caduc. Je revenais sur l’histoire d’un môme submergé pendant les cours, bien que ses talents de footballeur lui garantissaient d’être dans le bon groupe sur d’autres terrains. J’avais convaincu difficilement son papa qu’une orientation en SEGPA serait la bonne pour son fils. L’année suivante celui-ci apportait son témoignage positif dans la conversation que j’avais avec d’autres parents confrontés au même choix.
L’inclusion, mot de l'heure, a privilégié la forme « sympatoche » sur les exigences de fond, la transversalité a percé de part en part toute recherche de compétence, et chacun s’est couché devant l’horizontalité. Je travaillais dans une institution forte, je ne suis plus sûr que ce soit le cas à ce jour.  
Je me prévaux d’une enfance en blouse et des chaussures laissées à la porte de la classe dont j’étais le maître, comme en d’autres lieux sacrés, pour me permettre de dire que je serais volontiers favorable à l’uniforme qui distingue l’écolier du consommateur de fringues et signe une appartenance républicaine transcendant des replis communautaires.
Nous ne manquons pas de coach pour avoir des mollets en état de marche; pour la tête, je persiste à croire aux fondamentaux de la vieille école qui  prétendait s’approcher de l’exactitude par l’écriture et titille ainsi quelques neurones en voie d’extinction.  
« Ce qui me tue, dans l'écriture, c'est qu'elle est trop courte.
Quand la phrase s'achève, que de choses sont restées au-dehors ! » J.M.G. Le Clézio

vendredi 23 février 2024

Sémantique.

Peut-on percevoir des signes annonciateurs de l’omnipotence de l’intelligence artificielle et de la venue au pouvoir de l’extrême droite ? Sait-on voir ce qu’on voit ? A défaut de penser, on se pince.
Sur nos sols artificialisés, tant de paroles préfabriquées encore discernables sonnent faux.
A la surface des réseaux sociaux, en dehors de quelques phrases jetées en réaction, rares sont les pensées personnelles construites d’individus se disant libres pourtant alors qu’ils n’ont que leur nombril comme horizon. Inutile d’insister sur l’inflation des cœurs artificiels pixélisés.
Dans les débats, l’affirmation de soi passe essentiellement par la dénonciation de l’autre et de son registre sémantique.
Ainsi l’emploi des mots «  sécurité », « nation », « laïcité », « travail », « mérite », « équilibre budgétaire »… donnent droit à réduction sur le ticket à destination du goulag.
Je fus dans le parti dont Faure est le liquidateur, mais je constate chez ceux qui se réclament de gauche, sans avoir jamais tendu le moindre tract en pleine bise, une fâcheuse tendance à privilégier l’étude malveillante des textes d’en face plutôt que la production d’une écriture propre. Encore eut-il fallu porter sur soi le même regard sans concession que celui qui débusque la bête immonde dans les propos d’autrui. Pour des motifs tactiques P.S. et EELV ont ouvert la boîte de Pandore des mesures visant à réguler l’immigration, LFI se lèche les babines le thème de la prochaine manif, c’est cadeau.
Les femmes se dévouent les soirs de défaites électorales, mais les échecs se sont masqués sous « le bruit et la fureur » et le destin du parti socialiste à devenir un autre parti « radical » n’a pas été contrarié par des accords opportunistes : une poignée de sièges pour préaux déserts.
Habitués à battre leur coulpe, les cathos de gauche dont le premier terme vacille et le deuxième s’efface, étaient plutôt engagés dans cette démarche d’âpre lucidité, ils sont devenus inaudibles. Cette indigence est le résultat de l’indulgence envers les glissements progressifs à l’œuvre à l’école depuis si longtemps. Le nombre d’heures de français décroit sans cesse, avec dissertations en voie de disparition et démonstrations en mathématiques défaillantes. Un formalisme comptable s’est installé en tous lieux au détriment d’un esprit critique nuancé, argumenté.Il est loin le temps où le citoyen se constituait dans l’écriture patiente de rédactions à l’évaluation certes bien plus subjective que des QCM en batteries, mais il pouvait trouver dans des découvertes persévérantes, personnelles, contradictoires, sa voie vers l’authenticité.
Dans un monde peuplé essentiellement de victimes, les dispensateurs de bonheur, même à ceux qui n’ont rien demandé, ne manquent pas de clientèle. Ils en arriveraient à se réjouir de l’injustice quand  les déclinologues ne sont pas les seuls à prospérer sur le malheur. 
« C'est le déclin quand l'homme se dit “Que va-t-il se passer ?”, 
au lieu de dire “Que vais-je faire ? »Jacques Chirac.

vendredi 9 février 2024

« Meuh ! »

La mention de mon arbre généalogique avec sa kyrielle de laboureurs dauphinois ne peut constituer un argument d’autorité, tant les métiers de la terre ont changé.
Cependant je peux essayer de m'interposer face aux donneurs de leçons qui ne savent pas distinguer un épi de seigle d’un épi de blé, suivant les critères de compétence de mon grand-père.
Je sais qu’il ne subsiste plus qu’une pincée d’éleveurs dans mon village alors qu’ils étaient hégémoniques dans les années 60, heureux comme mon père avec ses sept vaches.
Je vais les voir au cinéma et les odeurs qui remontent à ma mémoire ne sont pas seulement celles du foin coupé, quand on a été élevé « au cul des vaches ».
Dans l’impitoyable défilé des images de flammes de la semaine chassant celles de la semaine précédente avant que d’autres oriflammes apparaissent sur nos écrans un soir d’élections, les démagogues ont léché les bottes de ceux qui ne veulent pas de réglementation, après avoir flatté ceux qui veulent nous régenter jusqu’au fond de nos frigos.
Depuis les portiques de Hollande pour taxer les camions, en passant par les révoltés du gasoil et de la limitation de vitesse, les décideurs se sont trouvés bien seuls ; les vertueux verts se faisant exceptionnellement discrets, bien que les recommandations écologiques n’aient guère cessé avec une efficacité relative pour prôner la voiture électrique alors que les SUV pullulent.
Quant aux tracteurs électriques : voir au rayon tondeuse à gazon.
Nos paysages sont-ils condamnés à la scission entre des plaines sans arbres et des collines abandonnées par les troupeaux où gagnerait encore plus la forêt?
La dichotomie est elle fatale entre industriels de l’agro-alimentaire voués à assurer la souveraineté dans nos assiettes et jardiniers assurant à proximité la bonne conscience des habitants de leur hameau avec au désherbage quelques migrants supplétifs de ceux qui veulent garder les mains propres et ne pas courber le dos ?
Quand la profession d’enseignant encore prestigieuse m’a tendu les bras : je n’avais plus à mentir comme dans mes années collège lorsque « pagu » sonnait comme « blédard ». Profession des parents : « propriétaires » mentionnait mon voisin bouseux.
Déjà à cette époque, la FNSEA représentait des situations tellement diverses au profit des « gros » mettent en avant ceux qui sont loin en dessous du SMIC .
Le monde de la campagne présenté comme conservateur s’est adapté à grande vitesse aux nouvelles technologies quand la laitière numéro 83 reçoit sa dose personnalisée de tourteaux par ordinateur interposé.
Finalement, il vaut mieux que les écolos en restent à leur « booty therapy » ou thérapie des fesses, plutôt que d’énerver tout le monde. Ils hystérisent les débats mais se taisent en temps de crise. Quelles étaient leurs solutions pour répondre à la colère paysanne ?
Les pauvres biquets se parfumant au cocktail Molotov auraient bien aimé que les prolétaires de la sécurité foncent dans le tas… de fumier.
Après coup, les éditos transversaux et si confortablement transgressifs vont fleurir de la part d’universitaires bien en chaire et hors sol, sans tenir compte des avertissements à eux adressés : leur radicalité a appelé d’autres outrances qui accélèrent le rabougrissement de la bio diversité. Se caricaturant eux-mêmes dans leur vision manichéenne du monde (agricole), ils sont comme ceux prétendant connaître le football parce qu’ils avaient vu la marionnette de Papin aux guignols de l’Info. Ceux là, nous les avons tant aimés et pourtant ils ont contribué aux fractures culturelles: l’élite méprisant les « beaufs ».
Le court terme fait passer au second plan les mesures du moyen et du long terme ; d’ici dix ans, 1/3 des agriculteurs seront partis à la retraite. Alors que la part de l’alimentaire dans nos budgets était plus importante autrefois, il conviendrait de payer le prix pour favoriser une agriculture plus vertueuse.
Chaque fois que des décisions sont prises, il y en a toujours pour les trouver insuffisantes, mais nous avons appris récemment qu’on reprochait à la France d’avoir « surtransposé » des directives européennes. Les algues vertes sont moins abondantes en Bretagne, il serait pédagogiquement efficace de tenir compte des avancées.
Quand dans les bavardages autour de l’arboriculture, aviculture… et autres cultures, certains semblaient découvrir que 1% de la population nous nourrissait,  alors on peut trouver quelques citations plus roboratives :  
«  Il n’y a pas de plus méchant diable qu’un paysan qui devient seigneur. » Proverbe lituanien.
Je ne me lance pas dans une trilogie où après « Euh ! » vient « Meuh ! », évitant « Beuh » qui risquerait d’être encore plus fumeux que d’habitude.

vendredi 2 février 2024

Euh !

Quand nous dénoncions la présence U.S. au Vietnam, nous prenions exemple sur les chevelus qui s’y opposaient depuis Berkeley : le maître du monde s’affirmait au napalm et la contre culture de là-bas nous séduisait. La guerre en ces années brûlait des fillettes qui s’enfuyaient le long des rizières mais il était « interdit d’interdire » à nous, enfants de l’après guerre précédente, fantasmant sur « jouir sans entrave ».  
Tina est morte et Woody est plus morose que jamais.
La planète s’est encore rétrécie mais la sempiternelle rupture générationnelle se reproduit, encore, alors le vieil observateur ne peut que regretter : aujourd’hui entre Trump et « woke » avec qui rire et danser ?
Nous restons formatés par Google gum et sous X que les médias traditionnels vilipendent tout en ayant comme principales inspirations ces « gafafeurs », en toute intelligence artificielle avec  les Dieux de la Silicon Valley.
La subtilité a disparu aussi de la vieille Europe quand se vérifie la banale remarque que les mouvements de la société US débarquent chez nous peu de temps après. La 666 a été rendue  au désert  et le dernier des shérifs a été revêtu de goudron et de plumes.
Nous sommes dans le double-face des bigots, avec jovialité surjouée et brutalité, positivité affichée et compétition impitoyable, puritanisme déclaré et grossièreté.
La judiciarisation de la société marque la méfiance générale sous des proclamations de tolérance à géométrie variable et les injonctions concernant la vie privée se multiplient alors que se blinde chaque personnalité derrière son quant à soi. 
L’argent  est devenu la mesure de chaque geste et l’individualisme a vaincu. 
« Etre pauvre, c'est être étranger dans son propre pays, c'est participer d'une culture radicalement différente de celle qui domine la société normale. » Michael Harrington
Nous nous asseyons de moins en moins à table, et les émissions de cuisine à succès ne comblent pas des plans de travail de plus en plus vastes, nous ne lavons plus une salade. La planche à repasser devient ringarde et le coup de peigne superfétatoire. Les devoirs se font sur les genoux et les bonjours s’ignorent au détriment d'autoportraits au téléphone, alors il faut multiplier les émojs pour faire croire en sa présence et à son attachement. On ne va plus guère au cinéma et le canapé recueille plutôt un avachi solitaire que la famille autour d’un même programme.
En contrepoint de cette complainte d’un vieux du vieux monde, je sors - un court instant - de mes déplorations pour apprécier dans les vœux de la municipalité de Saint Egrève la reprise de la formule olympique : « l’important est de participer ». Outre qu’elle évoque un évènement à venir susceptible de réunir une nation querelleuse, ce souci de contribuer, d'être avec les autres, se remarque localement tout au long de l’année avec valorisation de chaque membre du conseil municipal et appel aux citoyens à apporter leurs contributions à la réflexion collective. Pourtant du même parti écologiste que le célèbre maire de Grenoble, la pratique de la nouvelle équipe municipale est discrète, respectueuse, tout le contraire du sectaire promoteur du burkini ne sachant que mettre sur le dos de l’état ses manquements.  Au point qu’il me donnerait envie de reprendre un double scotch quand il demande de souscrire au « Dry January », alors que vous êtes en train d’adopter tout seul un comportement plus vertueux en matière de liquide alcoolisé. 
« Est fanatique celui qui est sûr de posséder la vérité. Il est définitivement enfermé dans cette certitude ; il ne peut donc plus participer aux échanges ; il perd l’essentiel de sa personne. Il n’est plus qu’un objet prêt à être manipulé. » Albert Jacquard 
Je viens aussi de me régaler d’un article, tellement inhabituel : compte rendu d’une classe dédoublée à Noisy- Le- Sec par une journaliste allemande décrivant un bonheur d’apprendre et à enseigner qu'elle juge inspirant pour son pays. 

vendredi 19 janvier 2024

Redoublement.

« - Comment ça va ?   
- ça va comme le temps. » 
Ainsi allons-nous d’alerte canicule à inondation, éruptifs, dépressifs, so sots.
Les inquiets des changements écologiques ou démographiques voient ces bouleversements comme des signes de l’« extinction de la planète » ou celui d’un « grand remplacement ».
Ces formulations absolues ont le mérite de la clarté, comme toute caricature, bien que les émetteurs respectifs ne veuillent pas reconnaitre une part de vérité possiblement émise par le camp adverse. 
Pourtant des liens existent : le réchauffement de la planète est une des causes poussant les migrants à quitter leurs pays pour venir dans une France pourtant si peu respectueuse d'elle même.
Ces querelles permises participent pourtant de l'attractivité de nos états démocratiques devenus minoritaires parmi d’autres nations où sont emprisonnés les audacieux capables de vérifier ce qu'est un vrai tyran.
Parmi quantité de sujets clivants, je me demande si chez nos transversales de chez les intersectionnelles, décolonisateur.es des femmes, a été prévu un paragraphe pour les afghanes et les iraniennes.
Querelleur ne prétendant pas entrer à Sciences po Grenoble, je me mets à l'écart des allergiques au terme « islamo-gauchiste » - pas forcément une insulte- abusant pourtant envers les autres du terme « islamophobe ». 
Autre débat « touchy », mot choisi de préférence à « délicat », pour faire djneu’s dans un argumentaire risquant de sentir la naphtaline dont il est difficile de savoir d'où vient l'odeur, il est question de l'école.
Nos résultats ne sont bons ni en instruction ni en éducation et les réponses en terme de moyens n’ont pas ralenti la dégringolade.
Le collège unique vilipendé au moment de sa création par les syndicats dont je faisais partie est défendu aujourd’hui par ces mêmes organisations qui veulent que rien ne change, alors qu’il serait temps de revoir le modèle car les inégalités se sont creusées sous l’étiquette finalement fallacieuse de « collège unique ».
Le temps long invoqué pour que les réformes soient évaluées est écoulé. 
« Sans une éducation d’excellence, notamment dans la science, la technologie, l’engineering et les mathématiques (STEM), notre pays court le risque de déclassement, grevant le pouvoir d’achat des particuliers et la capacité de la puissance publique à investir dans la santé, la transition écologique ou… l’éducation. »  
Jean Tirole Prix Nobel d’économie
Je ne sais si les groupes de niveaux seront miraculeux mais une nouvelle dynamique peut naître dirigée vers le haut plutôt que s’endormir dans l’indulgence en ignorant les capacités de progrès de ceux qui sont en difficulté. Respecter les élèves c’est dire la vérité. 
Le « peux mieux faire » est plus éducatif que l’octroi de 5 points pour avoir seulement écrit son nom sur une copie. 
La revalorisation de l’avis du professeur en matière d’orientation est déterminante de même que l’annonce de la fin du « pas de vagues » parait susceptible d’encourager les courageux. L’orientation doit impliquer les familles pour ne pas laisser aux initiés la priorité des  bons choix. Les ambitions mal informées, souvent indexées sur les représentations du milieu d’origine masquent le bouton accessible de l’ascenseur social et souvent s'épuisent. 
« Puisqu'on ne peut changer la direction du vent, il faut apprendre à orienter les voiles. » James Dean

vendredi 5 janvier 2024

Guère.

En appréciant à l’écran des combats bien chorégraphiés du temps des mousquetaires, je pensais à d’autres batailles terriblement actuelles :  
« depuis le temps, décidément les hommes… » 
Je suis l’un d’eux, violent ou manquant de courage, ajoutant une banalité à une autre : 
« Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui » Sartre
Les canons de Gaza ou d’Ukraine, apparaissant aussi sur écran, nourrissent nos scrolls.
Là bas les hommes s’attachent à tout détruire, l’affirmation de leurs empires sans innovation sinon pour tuer, les mène vers le néant.
Derrière nos climatiseurs ronronnants, peut s’affirmer le sentiment que toute contribution aux débats politiques équivaut à une dilution homéopathique de 5 CH (10–10 = 0,0000000001 soit un dix-milliardième). 
Certains croient à la goutte d'eau du colibri, à l’homéopathie, d’autres pas.
D’ailleurs que dire de plus après Angus Deaton, prix Nobel d’économie en période de paix ? 
« La mondialisation est devenue une source de mécontentement. 
Qu’elle ait contribué à une réduction sans précédent de la pauvreté n’a pas apaisé les colères dans les pays riches, attisées au contraire par ce succès » 
Avant qu’une nouvelle chasse une autre nouvelle: nous avons été contemporains de Jacques Delors quand l’histoire soufflait par là et nous effleurait. Mais un sourire indécent en temps de funérailles pourrait naitre à entendre louer la rigueur du défunt par ceux qui ont manqué tellement de courage.
Malgré la prophétie médiatique auto-réalisée de la fin du « en même temps », je ne sais voir que si nous sommes là où nous sommes, ce n’est que le résultat de nos passions, de nos actions paradoxales, faites par les hommes de tous bords propulsant la roue de l’histoire à coups de contradictions.
C’est le moment de ressortir Clémenceau :
« la Révolution française est un bloc dont on ne peut rien distraire ».
Les raisons généreuses apportées par les scientifiques jouent sur les décisions des états, des banques, des publicitaires, ceux-ci ont à prendre en compte aussi les peurs de leurs électeurs, l’avidité de certains clients, la surdité des autres.
Les bilans étaient au programme de fin d’année, mais s’oublient au moment des résolutions du début de la période nouvelle. Les rapports finissent dans les tiroirs pas seulement dans les ministères mais aussi dans la zone de mon propre magistère.
En choisissant de grandes sphères voire en m’en tenant à la forme hexagonale, je risque de partager le maillot tricolore avec des compatriotes qui taisent des conditions personnelles satisfaisantes, se pardonnent des décisions contestables, mais pointent sans cesse le négatif autour ou au dessus d’eux, vilipendent les autres et tout ce qui bouge. Jamais responsables de rien, ils sont quelques uns à distribuer sans retenue l’infamante étiquette de nazi au moindre contradicteur banalisant l’extrême droite, tout en soulignant leur propre faiblesse argumentaire. 
« J’essaie de ne pas vivre en contradiction avec les idées que je ne défends pas. »
Pierre Desproges

 

vendredi 22 décembre 2023

Tableaux Rossignol.

Au temps, d’avant le réchauffement climatique, où je connaissais la boue des cours de ferme, de belles images aux couleurs pastels destinées aux leçons de vocabulaire étaient affichées sur les murs des classes.
Ces planches pédagogiques et leurs variantes du nom de Madame et Monsieur Rossignol instituteurs, parmi d'autres éditeurs, tapissent aujourd’hui les brocantes.
Leurs scènes paisibles et proprettes se sont poursuivies pour mes enfants dans les images de Pomme d’Api et me font préférer leur univers harmonieux à celui de la famille Adams.
Nous sommes nous leurrés avec de tels artifices, car nous avons appris, depuis que nous avons cassé nos lunettes roses, que la nature humaine est  plutôt noire ?
Nous aimerions cependant nous dire que ces jolies années, quand les fleurs se penchaient au dessus des fontaines, n’ont pas été complètement mensongères et peuvent même se retrouver avec une intensité décuplée dans une flaque au bout de rues jonchées de seringues et de crottes de chien. 
« La seule chose qui nous console de nos misères est le divertissement. 
 Et cependant c’est la plus grande de nos misères. » Pascal.
Face aux horreurs orientales et à l’effondrement occidental, le déni est une tentation, alors que les trompe-l’œil se sont multipliés sur les murs de nos villes et que nous nous cachons  derrière des écrans en tous genres.
Qui peut prétendre résoudre des problèmes en des milieux désertiques abandonnés par la raison quand les plus fins connaisseurs ne croient même plus à la solution à deux états ?
Pas tous les israéliens ni les palestiniens ne veulent jeter les autres à la mer, pourtant le slogan explicite « Du fleuve à la mer... » affiché dans des universités appelle à l'intensification des massacres .    
« Le père Noël est une ordure » a marqué dans un sourire crispé la fin des mythes, Dieu était mort chez l’homme blanc, sa femme, ses descendants. Et la parole politique s’est abimée dans les sarcasmes de marionnettes que nous avions prises pour argent comptant.
Ces images rêvées, ces rigolades constituaient donc un rideau occultant de saumâtres rivières, de méphitiques atmosphères.
Une fois que nous avons trié consciencieusement nos déchets, nous n’assumons pas nos rejets que ce soit  notre souffle, nos flatulences, une boite de sardines ou le produit de notre paresse, de nos renoncements. La moindre contrariété révulse bébé-roi, papa et papi-rois, nous ne savons pas voir la violence et la mort même si s'esthétisent volontiers ordures en tas dans les FRAC et issues fatales en vidéo-game.
Les pensées se sont retournées : nous pensions être devenus indifférents à la couleur de peau, à l’orientation sexuelle. Maintenant des femmes excluent les hommes de leurs réunions et les noirs tiennent à leur ghetto comme certains riches.
Les actes ne comptent plus, seule l’identité compte.
Les faits ne comptent plus, seul le buzz compte.
Le mérite est vilipendé, l’indifférenciation souhaitée lorsque les cultes du moi se juxtaposent.
Parmi les déplorations envahissantes de mes rubriques blogueuses, il m’arrive de sourire comme Sisiphe quand Guizot à la fin de la monarchie de juillet 1848 regrettait:  
« Les vrais moyens de gouvernement ne sont pas dans ces instruments directs et visibles de l’action du pouvoir. Ils résident au sein de la société elle-même et ne peuvent en être séparés. La société humaine n’est pas un champ que vienne exploiter un maître ». 
Lui, dont Victor Hugo disait : 
« Il me fait l’effet d’une femme honnête qui tiendrait un bordel ».

vendredi 15 décembre 2023

Le niveau monte.

Les comportements les plus excessifs, même ceux que l’on déplore, nous influencent, 
ainsi je me retrouverais avec les complotistes qui adorent dénicher des liens entre les faits pour poser la question :
Y a-t-il une correspondance entre la montée de l’extrême droite et l’effondrement scolaire ?
Le RN a mis la main sur le drapeau tricolore et la laïcité. En face, des intolérants voudraient guider nos goûts et renvoient le mot travail à Pétain habillant toute objection de brunes chemises. La fille du détailleur était à la marche contre l’anti sémitisme et d’autres non.
Qui remet en cause la démocratie, qui discrédite le parlement ?
Les succès des « Onnouscachetout » naissent de l’inculture historique, du dédain de l’économie, de l’emprise de l’émotion sur la raison, de la haine des autres. Pourtant que de belles leçons, de beaux films, et tant de gentillesse chez nos conseillers pédagogiques.
Depuis tant d’années qu’on nous disait avec Baudelot et Establet, « le niveau monte » et il ne s’agissait pas du niveau des mers ! 
Avec PISA, nous avons pris fissa la pente descendante.
Cela n’influence guère les négationnistes de l’évaluation toujours mécontents du monde mais contents d’eux. J’utilisais l’encre rouge et considérais que l’erreur est féconde, on peut bien ne plus décerner des bonnets d’âne et aimer se situer, se connaître.
A tout dramatiser, on pourrait croire que le burn out s’inviterait dès la maternelle. 
Les notations se raréfient à l’école alors qu’elles deviennent omniprésentes dans la société : « balance ton prof », « note ton kiné ».  
Peut-on espérer que parmi tant de vaines paroles, celles qui disent la fin du «  pas de vagues » soient entendues ?
Parmi les mesures avancées, le recours au redoublement, peut signifier que chaque élève comprenne que l’investissement, le travail sont corrélés aux résultats. Cette mesure peut être utile s’il y a accord avec l’intéressé et la famille. Le brevet offert à tous n’est pour personne. 
L’illusion entretenue que tout le monde peut aller à la fac, comme si c’était un droit sans rapport avec les compétences, ne favorisera guère l’adhésion du désinvesti qui trouvera bien volontiers des compagnons de rigolade près des radiateurs, depuis qu’intello est devenu péjoratif. 
Les prudences d’emploi du mot « mérite » signent nos défaites françaises et la victoire des minables qui méprisent l’intelligence. Bien que discernement et culture soient dépréciés, le travail manuel n’est pas mieux considéré.
Peut-on parler de postes à faire miroiter, de métiers enviables, quand les loisirs dictent les calendriers ? Mais proposer de chauffer un siège dans un amphi pour contempler un horizon bouché relève de l’escroquerie. Sous couvert de non-discrimination, les frustrations vont s’aggraver au moment où sont oubliées exigence et sincérité.
L’allongement des études ne correspond guère à une élévation des compétences et des appétences. Les artisans ne sont pas les seuls à se désoler de ne pas avoir de relève. A la liste des métiers en tension, il convient d’ajouter la pénurie de main d’œuvre dans la cyber sécurité. Que font les gamers ?
Le Bourdieu mal digéré justifie les renoncements face à une fatalité sociale qui serait immuable. Mektoub! Les demandes de moyens  automatiques n’y pourront pas grand-chose : les dépenses pour l’éducation en France sont supérieures à la moyenne des pays de l’OCDE.
Décidément « Les héritiers » ! Les compagnons de Célestin Freinet qui après guerres avaient redonné la parole aux enfants se retrouvent-ils dans le silence des adultes de ce siècle ? 
« Un silence peut être parfois le plus cruel des mensonges. » Robert Louis Stevenson.

vendredi 17 novembre 2023

Nous sommes tous…

« Nous sommes tous des juifs allemands » chantions nous joyeusement en mémé 68 pour répondre à Le Pen Jean Marie et à Georges Marchais qui pensaient ainsi discréditer l’anarchiste allemand Daniel Cohn Bendit.
A Grenoble, en novembre 2023, nous étions à la manifestation pour dire aux juifs qu’ils ne sont pas seuls face à l’antisémitisme.
Je me suis décidé à répondre à l’appel des présidents de nos assemblées démocratiques après avoir lu qu’un témoin de la Shoah était sous protection policière quand il intervenait dans des lycées en Allemagne. La formule banale : «  on n’a rien appris » se vérifiait une fois de plus.
Je doute pourtant que la portée de la mobilisation, plus massive que je l’envisageais, aille au-delà de la semaine, même si ces centaines de milliers de personnes silencieuses venaient en appui des plantons devant les synagogues.
La moyenne d’âge des marcheurs du dimanche devant le monument des déportés n’incitait pas à l’optimisme. Nous les enfants de l’après guerre, nous étions submergés d’informations sur les camps, la sidération était passée, mais les mots se sont banalisés. « Génocide », terme ultime, a été mis à toutes les sauces, l’étoile du drapeau israélien absente des dignes rassemblements du 12 novembre avait trop souvent été dessinée, sur bien des poitrines illégitimes telles celles des anti-vax.
A l’heure des réseaux « Terre plate », il suffit que l’information passe par l’école pour qu’elle soit remise en cause. Au royaume de la légèreté inappropriée voisinant avec des hystérisations sans second degré, l’histoire ne peut être seulement l’affaire des vivants ; les survivants des camps se font rares et un voyage à Auschwitz n’est pas obligatoire pour avoir une idée de l’holocauste. Si l’Allemagne se débarrasse en ce moment d’une culpabilité qui a pesé pendant des décennies, des professeurs d’éducation civique bien de chez nous risquent d’échapper à la gravité en ne retenant pas que le nombre d’actes antisémites a explosé sous notre nez.
Il s’agit évidemment de dissocier la situation française de celle du Moyen-Orient : tous les américains ne ressemblent pas à Trump et tous les juifs ne sont pas Netanyahou.
L’ancien sénateur Mélenchon a gagné la partie quand des médias mettent en avant sa non-participation plutôt que le large appel à marcher contre l’antisémitisme. Pourvu qu’on cause de lui. Les Insoumis étaient moins regardants sur l’identité des participants quand ils faisaient copains-copains avec les gilets jaunes du RN. Autour des ronds points s’étaient accentués bien des traits d’une société clivée où les extrêmes s'aiment : démagogie, non respect des règles démocratiques, confusion des valeurs, blocage des décisions… Rivarol, journal de droite depuis 1792, négationniste et antisémite à n’en plus pouvoir, vient de couvrir d’éloges le chef éructant des Insoumis. Le monde de la culture s’estime à gauche mais les comportements violents, intolérants, manipulateurs,  le soupçon permanent, le mépris, marques de fabrique de l’extrême droite ont envahi la société.
Et les contre-feux ne peuvent venir de chroniqueurs boute-feux de France Inter se proclamant « islamo gauchistes » pour rendre cette posture dérisoire et mieux en accentuer les outrances. Des bouffe-curés poursuivent des fantômes en se montrant acerbes contre ceux qui portent soutane mais sont branchés en admettant avec déférence l’abaya. Devant tous ces voiles, j’en ai des vapeurs.
Ceux qui reprochent aux politiques d’avoir appelé à cette initiative citoyenne pour « diviser » le pays vont mécontenter le prophète de la « bordélisation », en inversant les responsabilités.
A une toute autre échelle et si loin de nous, dans l’enchainement des causes et des effets, il faut remonter à la nuit des temps lorsque les juifs étaient appelés palestiniens. Abel et Caïn. Les extrêmes là bas aussi se sont nourris, ils ne veulent pas de résolution au conflit, l’extrême droite israélienne a souhaité un ennemi détestable, le Hamas semant la terreur et convoquant l’horreur sur son territoire martyrisé.  
« … Il n'est pas davantage acceptable que des violences soient perpétrées sur des personnes à raison de leur pratique religieuse, de leur orientation sexuelle ou de leur couleur de peau. Toutes ces formes de violence notamment conjugales, de discrimination, de racisme, d'antisémitisme seront combattues avec la dernière énergie. » Jean Castex 2020.

vendredi 3 novembre 2023

Dénis.

Dans l'histoire cruelle du monde, les services de renseignement israéliens n’ont rien vu venir.
Ils ne sont pas les seuls malvoyants.
Intimement, n'avons nous pas la même infirmité, savons nous regarder la mort en face quand les rangs se déciment autour de nous?
Concernant la cuisante chronique de la planète, je viens de lire qu’un lac immense en Irlande étouffe sous les algues vertes. Le souvenir du lac Tchad asséché se rappelle à l'ancien riverain du lac de Paladru.
« il ne savait pas avec quelle furie cette mer des passions humaines fermente et bouillonne lorsqu'on lui refuse toute issue, comme elle s'amasse, comme elle enfle, comme elle déborde, comme elle creuse le cœur, comme elle éclate en sanglots intérieurs et sourdes convulsions, jusqu'à ce qu'elle ait déchiré ses digues et crevé son lit. » 
Victor Hugo
Pouvons-nous tout saisir quand les tiroirs des malheurs débordent ?
En dressant la liste de nos aveuglements proches ou lointains, nous ne savons évaluer la haine envers notre pays devenue courante de par le monde, quand nous ne nous aimons pas nous même.
Dans ces espaces infinis, l’idée de disserter sur les affrontements de civilisations s’approche du vide abyssal, lorsqu'à toute petite échelle, il est impossible par exemple de faire respecter l’extinction de l’éclairage une partie de la nuit dans le parc de la copropriété.
Ne resterait qu’à parler de la pluie et du beau temps : même pas ! 
Je reviens inévitablement à mon territoire favori, l’école, présentée comme source de tous les problèmes et recours face à toutes les difficultés. Et c’est peut être bien là un de ses embarras. 
Un texte personnel travaillé par un élève aura toujours plus d’efficacité, qu’un cours de morale de plus. 
Quand il est nécessaire de réaffirmer les vertus basiques de la rédaction, c’est qu’il y a eu manquement, érosion, perte de sens, pour l’un des piliers de la triade scolaire : 
lire, écrire, compter.
Enfin est remise en cause la doctrine du « pas de vague » pouvant redonner autorité et confiance aux enseignants percés de flèches et de poignards.
Le chemin sera long pour sortir des excuses paresseuses, des lâches compromissions, quand les postures à courte vue empêchent tout diagnostic partagé donc tout résultat à soumettre à évaluation. 
Dommage que les Guignols de l’Info aient disparu : Olivier Faure aurait pu fournir l’archétype du froussard.  
« Les vagues ne naissent pas quand elles déferlent sur la plage. 
Elles roulent longtemps en mer avant de se casser sur un repli de sable. » 
Geneviève Dormann.
J'ai pu utiliser de nombreuses fois le mot "déni" mis en titre, comme cette fois là:

vendredi 20 octobre 2023

La paille et la poutre.

«Lorsque tu ôteras la poutre de ton œil, 
alors tu verras clair pour ôter la paille qui est dans l’œil de ton frère. »  Matthieu
Comment ne pas entretenir des défauts qui nous hérissent chez les autres ?
Ainsi en est-il, en ce qui me concerne de la tendance à généraliser voire à essentialiser.
C’est que la tentation est grande quand un fait mineur donc original semble significatif de l’époque.
Ainsi je voyais volontiers comme accélérateur de l’individualisme contemporain, l’émission des années 2000 «  C’est mon choix » d’Evelyne Thomas où s’exhibaient : « Je m’habille comme ma fille », « Je suis un macho », « Ma passion passe avant ma femme »
Elle fut choisie pour incarner Marianne dans les salles des mariages, son influence était peut être plus grande que celle des plus pertinents éditorialistes.
J’aime aussi voir un basculement des valeurs lorsqu’ « intello » a été admis comme une injure. Dans la même veine, l’abandon de la matinée du samedi a signifié que l’école n’était plus maître du temps.
Nous ne savons anticiper les déplacements tectoniques alors de petits signes peuvent obséder.
Ceux qui échapperaient aux passions de l’heure, ne savent pas forcément mieux analyser les séquences longues.
Le mouvement des lumières a débouché sur la révolution française, dont même la devise liberté, égalité, fraternité est mise à la question aujourd’hui.
Vers quelle obscurité allons-nous, depuis que nous sommes sous pseudos, sous masques, sous voile ?
Notre planète aplatie, en voie d’effondrement, n’est plus au centre du monde depuis Copernic mais suivre cette pente funeste nous dispenserait de réagir comme le lancinant constat de l’école en tant que matrice des inégalités serait l’alibi à tous les renoncements.
Le désespoir démobilise alors que ChatGPT est une chance, si on ne suit pas ce collégien: « A quoi bon apprendre, tout est sur Internet ».
Relever des paradoxes me parait toujours fécond et ne me dispense pas de répercuter une critique contre l’abus d’écrans par écran interposé, vautré dans la contradiction.
Comment célébrer la réflexion, la créativité sans se cacher derrière son pouce à scroller ?
Wikipédia est le Larousse d’aujourd’hui, mais la chèvre de Monsieur Seguin, 
« et ses longs poils blancs qui lui faisaient une houppelande » 
procure plus d’émotions que bien des  algorithmes.
Fatigué des tics d’aujourd’hui, je ne peux me couper des tik-tok, je viens de voir un de mes amis en train de perdre ses mots dans la douleur de ne plus pouvoir s'exprimer. Si je dois bien chercher pour trouver un titre de film ou de spectacle qui serait dans la langue de Dujardin cela reste anecdotique, mais nos répertoires s'appauvrissent, notre langue n'est plus à la mode que ce soit dans le tram ou dans les lieux branchés.    
Je me sens « out », exclu, quand un évènement lyonnais se présente ainsi :  
« des talks pas chiants, des masterclass pas pompeuses, un playground illustré, des courts-métrages animés, des concerts augmentés, du tatouage, des battles d’illustrateur·rice·s et plein d’autres chic formats. » 
Le vieux dauphinois "y " est allé, nous avons fait une partie de baby-foot, il y avait beaucoup de monde aux Subsistances.
« Les mots qui font fortune appauvrissent la langue.» Sacha Guitry
 

« La cabane est tombée sur le chien »

Vendredi dernier, à l’échéance de ma publication hebdomadaire de bavardages politiques, je n’ai pas publié de texte, j’ai pas pu.
Face aux rumeurs et aux clameurs, les mots manquent quand toute pensée est ensevelie.
Sur ce blog, j’essaye de ne pas délivrer de trop contreproductives leçons; il ne me reste qu’à plaindre profs et parents qui se doivent d’expliquer l’innommable.
De beaux textes se sont multipliés, mais je retiendrai que « Le Monde » a titré «  terrorisme islamiste » et une représentante du SNES a utilisé aussi cette expression auparavant  taboue pour certains. Panot n’a pas les mots : l’ignominie de la responsable des Insoumis à l’assemblée refusant de qualifier les auteurs du dernier pogrom en a peut-être poussé quelques autres à désigner clairement les choses. 
Boko Haram est explicite dès son intitulé qui signifie : « l'éducation occidentale est un péché ». 
« Depuis six mille ans la guerre
Plaît aux peuples querelleurs,
Et Dieu perd son temps à faire
Les étoiles et les fleurs. » 
Victor Hugo
L’inconcevable barbarie ne se dissout pas dans le progrès technique: depuis toujours au cœur des hommes, elle s’accroit chaque jour, favorisée par les marées cliqueuses.
Dans l’actualité de cette mi-octobre devenue une liste des horreurs, n’était pas encore venu s’insérer le poignard de l’assassin d’Arras, alors que les sables du Néguev avaient déjà ajouté une couche à nos découragements.
Les terres brûlées des Dieux uniques obscurcissent nos horizons : rendez nous Zeus et Vénus !
Palestiniens et Israéliens s’accordent pour aggraver leurs situations et l’idée même de discussion apparait plus vaine que jamais, ridicule. Les dessins où se tiennent par les épaules un enfant à kippa et un autre à keffieh sont dérisoires, voire niais.
Les trop chrétiens arméniens du Haut Karabagh, affamés depuis des mois, passent furtivement en bas de nos écrans, réfugiés parmi les réfugiés.
La déraison est sans frontières : alors que le Président en Corse ouvrait un chemin de conciliation, lors d’une « nuit bleue » de plus, explosaient quelques résidences secondaires d’impurs continentaux, sans que soit émise la moindre protestation des Indignés patentés.
« La France, soit tu l’aimes soit tu la quittes » était un slogan du Front National.
Quand « France » est remplacée par « Corse » cela deviendrait-il progressiste ?
En marge de ce maelström d’inhumanités, « la cabane est tombée sur le chien » comme on disait dans les  matchs de rugby. La pittoresque expression serait  appropriée pour dépeindre l’ensemble de nos accablements. Les réactions de  Fabien Galthié refusant d’entrer dans les critiques adressées à l’arbitre viennent confirmer les vertus de ce sport : respect.
Dans le bain des moqueries, des dérisions, des satires, un spot d’une campagne contre le harcèlement scolaire ne peut que s’éteindre aussitôt qu’il s’allume. Le mépris devenu tellement courant dans les relations permet aux dédaignés de jouer les victimes et d’insulter les autres. Les gilets jaunes avaient illustré l’irrévérence contre l’indifférence, mais l’arrogance n’a pas de camp :  dans la provocation crachotante, il y a du Trump chez Mélenchon. 
Comment croire en la force des mots et des modes quand les informés Patrick Cohen et Anne Sinclair s’étonnent que « Meetoo » ne soit pas connue en banlieue ? Seraient-ils à ce point dans l’illusion de leur pouvoir, eux qui savent que de trolls de types pensent que la terre est plate ?
La parole écologiste n’a jamais été autant répandue et pourtant sert de repoussoir dans bien des contrées. Parler du temps qu’il fait n’est plus anodin, mon atavisme paysan me fait souhaiter la pluie et bannir le terme « beau temps » tandis que les thermomètres automnaux explosent. Sale temps.
Pour ne pas me complaire dans le négatif comme tant de mes compatriotes, il me plait d’évoquer un beau moment vécu à l’occasion d’une soutenance de thèse portant sur les atteintes cardio-vasculaires chez des enfants présentée par un jeune homme plusieurs fois opéré du cœur. Le sauvé est devenu soignant et pas seulement des corps, il redonne un peu de vigueur à notre foi en l’Homme. Au moment où l’humanité s’acharne contre elle même, les exigences du jury faisaient plaisir et l’éternel serment d’Hippocrate a concerné et ému ses nombreux amis dans l’assistance.