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samedi 6 décembre 2025

Comme un empire dans un empire. Alice Zeniter.

Encore un titre qui ne dit pas grand-chose ou trop, bien que les 445 pages qui suivent s’avèrent copieuses, comme pour illustrer l’ambition de Robert Capa à propos duquel un des deux personnages principaux essaye, en vain, d’écrire un livre. 
« Si la photo n'est pas bonne, c'est que tu n'es pas assez près ». 
Les paysages familiers se succèdent : ZAD, « Nuits debout », « Gilets jaunes ». 
«  ça ne ressemblait à rien, les signes qu’ils s’étaient choisis, les gilets jaunes, les ronds points c‘était épars, c’était moche et ça ne voulait rien dire à part ça, exactement ça : l’absence de forme. »
Dans le foisonnement des réflexions, parfois non-conformes, autour de l’engagement en politique, un dispositif narratif élémentaire met en scène avec une certaine finesse psychologique :
- l’un en « dehors », Antoine, assistant d’un député socialiste. 
« Et maintenant... nous régnons sur des miettes et elles continuent pourtant à exploser.
Quatre socialistes, six opinions, n'est-ce pas ? »
« Je ne participerai pas à la ronde de grimaces dans laquelle s'engagent les élus qui veulent prétendre qu'ils ne sont pas hors-sol. Je suis hors-sol. »
 - et L, hackeuse, au « dedans » vivant parmi les « haters », les « backstallers », les « concerned », les « griefers », les « crybabies », les religieux, les pervers, les « grammar nazis », les « shitposters »...
« Des adolescents qui savaient qu’ils n’avaient aucune chance de devenir quoi que ce soit dans la viandosphère, mais qui, sur Internet, regagnaient un pouvoir dont ils étaient privés. »
En ces temps paranoïaques, les deux dépressifs finissent par se croiser.
Parfaitement documentée, l’écriture appliquée, m’a semblé parfois laborieuse, assez loin, à mon avis, de la découverte heureuse que fut « L’art de perdre » 

vendredi 5 décembre 2025

A bord de nuit. Marie Claude Durand Paire.

Sous un titre poétique signifiant « à la tombée de la nuit », « la » Marie Claude, a recueilli des expressions dauphinoises depuis son village de Chélieu, à côté de Virieu, auquel elle est restée fidèle.
Elle remercie celles qui : 
« Toutes trempes après la radée, se réchauffaient les mains dans leur pichaule. » 
Voilà de quoi enrichir le lexique de quelques mots inédits pour moi : 
Un tâque : une vraie « peau de vache », un trumeau.
Une ratapène : une chauve-souris, une personne fluette.
Un muet : tas de bois.
Marliaque : neige fondue, plat raté, équivalent de la patiauque …
Les variantes pour désigner les pas très dégourdis ne manquent pas : niarin, nioque rien qu’à la lettre « N ».
Les instruments de travail ont gardé longtemps leur noms spécifiques :
bariot (petite charrette) ,
benatte (récipient),
biguard (fourche recourbée),
le carbot (étui pour mettre la pierre à aiguiser le daillon (La faux),
un goui (serpe).  
Les glissements de genre sont fréquents : un vipère, une ongle, une lièvre, un dinde, de beaux affaires, un dragée, …avec parfois l’extension du domaine du pluriel : les autrefois.
Je révise la surprise : « Ben des fois ! »
la lassitude : « ça me fait flique »
la discrétion: « ça sera pas de connaître », « elle veut pas que ce soit le dit ».
Les sonorités appellent  souvent le sens : « débarouler », «  chounier », « empiager », « gabouiller ».
Je n’aurai pas orthographié boï mais plutôt boye pour une génisse, et quelques accents peuvent aussi être sujets à discussion : des lapés et non des lapès pour ces maudits rumex si difficiles à déraciner.
« La Mino » du Pin, une « payse », a joliment illustré ces 50 pages éditées à compte d’auteur.  

samedi 29 novembre 2025

Le pays dont tu as marché la terre. Daniel Bourrion.

Le titre ne ment pas en annonçant un style singulier en adéquation avec son sujet, sans rechercher à épater le lecteur.
« Je ne sais par où commencer, cela remonte au loin, suffisamment pour avoir laissé à quelques décennies tout le loisir de mâchouiller le peu qu’il reste de l’époque et tout autant de nous. » 
Ce retour vers un personnage de son enfance rejoint mes préoccupations autour des souvenirs et de leur restitution, surtout quand il s’agit d’un être mystérieux, solitaire, toujours absent, maintenant disparu.
Le mérite de l’auteur revenu au village est de revivifier les mots les plus simples prononcés par celui auquel il consacre 125 pages honnêtes, aimables. 
« J’habite toujours ici ». 
Cette recherche littéraire en train de tâtonner, au service du lien avec ses semblables, transportant les regrets d’avoir manqué des occasions, respecte les secrets de ceux qui apparaissent dans ce livre édité par Héloïse d’Ormesson. 
« Je n'ai que peu de peine à peindre cette solitude. Je peux parfaitement me la représenter. 
Ces tiennes routines, manger, dormir, boire, fumer, attendre la suite qui était très exactement la même histoire, je sais ce qu'elles peuvent être. Lentement, sans même y prêter garde, on voit le temps se brouiller totalement. Même les mots qui ne servent plus, on finit par les oublier, jusqu'à atteindre le dernier. » 
Ce livre touchant fait du bien parmi tant de propositions revanchardes, lourdes, sans recherche.
Cette poésie fraternelle, amenant « les gens de peu » à la lumière, nous réchauffe.

samedi 22 novembre 2025

Les derniers jours de l’apesanteur. Fabrice Caro.

Cette chronique de la vie d’un lycéen juste avant de passer son bac dans les années 80 est moins originale que le précédent roman de l’auteur multicarte
 mais tout aussi plaisante à lire. 
« Et je passais un temps infini, les yeux béants devant des fiches bristol où tout était surligné en jaune fluo, la moindre formule, le moindre mot, de sorte que le fluo en perdait de fait sa fonction.» 
La nostalgie des années Sting, « Cercle des poètes disparus » et « Jonathan Livingstone le goéland » s’illumine dans la douce lumière d’un humour léger.
« Maman il s’est passé du temps depuis mes bons points et mes vingt en orthographe, j’ai grandi, les filles sont passées par là, les fêtes et les copains aussi, […] j’ai lâchement abandonné mon 103 sport et mes goûters au Nutella, Cathy Mourier m’a quitté… »
 Pendant 216 pages lues d’un trait, la banalité prend des couleurs quand l’imagination des adolescents s’enflamme. 
« Elle était lascivement allongée sur la courbe de la fonction exponentielle, sautait à la corde avec la double hélice d’ADN … » 
Les passions théâtralisées sont mises à distance, bien qu’une réussite au Bac représentât alors un passage vers l’âge adulte plus tranché que maintenant. 
« Guillaume Marchand était allongé par terre, sur le bitume, le visage entre les mains, comme un joueur de Roland-Garros à la fin d'un match, et, sans l'expression du visage, il était difficile de déterminer s'il s'agissait d'une marque de joie ou de désespoir infini ». 
Les postures de la jeunesse, les maladresses, constituent pourtant un éternel recommencement. 
« Nous prônions la liberté à tout-va mais nous empressions à la moindre occasion de tout codifier à l'extrême : nos groupes, nos habitudes, notre façon de nous habiller, nos places dans chaque cours, immuables, alors que nous avions le loisir de nous asseoir où nous voulions. Nous ne valions pas mieux que nos parents dont nous aimions moquer la rigidité. »

samedi 15 novembre 2025

Les rivières pourpres. Jean-Christophe Grangé.

« Les nuages voyageaient lentement dans le ciel,comme un convoi funéraire parti enterrer le soleil. »
 
Le livre policier installe une ambiance surréaliste angoissante bien que des références puissent être familières à ceux qui connaissent le massif de Belledonne dans les Alpes.
« Le jeune Beur observait les réverbères qui clouaient encore les ailes brunâtres de la nuit. »  
Deux policiers violents exercent leurs talents dans des lieux éloignés, mais se retrouvent pour retrouver les coupables d’une histoire horrifique.  
« Nous avons un meurtre stupéfiant, un cadavre pâle, lisse, recroquevillé, exhibant les signes d’une souffrance sans limite. »
 L’angoisse monte et nous avons hâte d’arriver au terme des 400 pages aux dévoilements quelque peu tarabiscotés. 
« Le crime se reflète toujours sur les esprits des témoins et des proches. Il faut les considérer comme des miroirs ; le meurtrier se cache dans un des angles morts. »
 Lecteur complice, nous aimons être manipulés : 
«Chaque crime est un noyau atomique et les éléments récurrents ses électrons,oscillant autour de lui et dessinant une vérité subliminale. » 
Et il peut nous arriver de chérir les stéréotypes même incroyablement increvables. 
« … il serait un combattant des villes, fébrile, obstiné,qui noierait ses propres peurs dans la violence et la rage de l’asphalte. » 
Le goût épicé de la mise en bouche perdure jusqu’à ce que l’accumulation des invraisemblances altère un plaisir qui fut si vif pour tant de lecteurs des années 1998 et des admirateurs du film de Kassovitz avec Jean Reno et Vincent Cassel en 2000 ou de la série par Olivier Marchal en 2018. 

samedi 8 novembre 2025

Ta promesse. Camille Laurens.

Une écrivaine orfèvre en romans d’égo-fiction a rompu sa promesse de ne pas mettre en scène son amant marionnettiste, qui avait lui-même trahi son serment de fidélité. 
« Je veux être dans ta vie, pas dans tes livres. » 
Le produit de 360 pages dissèque finement les étapes menant de la séduction à la destruction entre pervers narcissiques, très tendance, du genre Trump qui parlait d’un jour ensoleillé lors de son investiture, alors qu’il avait plu toute la journée. 
« Je pense que parfois nous pouvons être en désaccord avec les faits ». 
Au-delà des relations complexes entre Claire et Gilles, les mots sont pesés :  
« Ecrire est un exercice d’amour,une magnifique et profonde et audacieuse expérience d’intelligence de l’autre. » 
Par contre une juge, cite Lacan puisqu’il est question très tôt d’un procès dans un déroulé haletant : 
«Si vraiment je comprends quelque chose, je suis sûr de me tromper. » 
Dans notre monde de vérités alternatives, la littérature vient à notre secours pour aller au-delà des apparences et débusquer les mensonges. 
«L’oreille a du nez : ça sent la mort. La langue a rendu l’âme. Le cliché est une charogne. »
Les formules brillantes scintillent dans cette histoire qui ressemble parfois 
à la « new romance » qu’apprécie ma petite fille laquelle n’a pas dans sa tête l’air des Rita Mitsouko: « Les histoires d’amour, les histoires d’amour finissent mal en général ». 
« J’attendais qu’il revienne. Qu’il revienne à lui. Qu’il revienne à moi. »
« Souffrir passe. Avoir souffert ne passe pas. »
« L’avenir ne m’a jamais tellement réussi. »
«Ton passé a mangé tout ton avenir ; un jour on est humilié et ce jour dure toujours. »
«ça ne veut rien dire « qui on est ». On n’est rien. L’être n’est qu’une syllabe du paraître. »
« - Oh moi, tu sais je suis d’une moralité douteuse : je doute de la morale des autres. » 
L’écrivaine précise aussi les mots des autres, ceux de Benjamin Constant : 
« Elle voulut pleurer, il n’y avait plus de larmes.Elle voulut parler il n’y avait plus de mots ».
La disparition du pronom traduit la disparition de l’être qui se fond dans l’impersonnel. »
Le lecteur pourra aller bien au-delà du résumé par la magistrate du roman qui n’a vu que jalousie envers un homme qui a souhaité refaire sa vie.
Un livre qui tient ses promesses.

samedi 1 novembre 2025

Eduardo Camavinga. Luca Caioli Cyril Colo.

Ce livre m’a été recommandé par une visiteuse de prison peu au fait du foot mais soucieuse d’amener son public captif à la lecture. 
Le parcours du milieu de terrain du Réal de Madrid et de l’équipe de France est remarquable.
Né aux limites improbables de la province angolaise du Cabinda, une exclave (« territoire totalement entouré par un pays étranger »), entre la République démocratique du Congo et le Congo Brazzaville, il grandit à Fougères en Bretagne. 
Les premiers chapitres témoignent des capacités de la France à intégrer aussi bien par ses institutions que par des citoyens solidaires, quand la maison familiale brûle, contredisant l’accent mis habituellement sur les souffrances des immigrés. 
« Le responsable de l’école de foot débarque un jour les bras chargés au nouveau domicile des Camavinga. Il arrive avec un camion rempli de matériels et une grande nouvelle : Eduardo est invité à un essai au Stade rennais. » 
Ce sport critiquable, décrié à la hauteur de son influence constitue aussi un instrument de fraternité et de plaisir. Son parcours pas aussi pittoresque que celui de Salif Keita « perle noire » de Saint Etienne dans les années 60, auquel livre et film intitulé « Le Ballon d’or » ont été consacrés, donne lieu à 200 pages intéressantes.
Eduardo Camavinga a accumulé les records de précocité depuis ses 16 ans : le plus jeune joueur à débuter en ligue 1, puis le buteur le plus jeune de l’équipe de France. Il commence une carrière au sommet en étant souvent utilisé comme joker ou plus exactement comme « revulsivo », 
« Joueur capable de modifier le visage de son équipe lorsqu’il entre en jeu, qui bonifie ses partenaires et contribue à inverser le résultat. » 
Son sourire apprécié de tous, souvent cité, justifie le sous titre du livre qui lui est déjà consacré : « bleu solaire ».

samedi 25 octobre 2025

Chantecler. Edmond Rostand.

Au moment le plus chaud de l'été, j’avais envoyé dans le réseau familial la moins ronflante des strophes extraite de l’ « Hymne au soleil » du coq le plus bavard du répertoire. 
« Tu changes en émail le vernis de la cruche ;
Tu fais un étendard en séchant un torchon ;
La meule a, grâce à toi, de l’or sur sa capuche,
Et sa petite sœur la ruche
A de l’or sur son capuchon !
 »
 
Et puis après avoir ajouté un autre extrait, 
« Toi qui sèches les pleurs des moindres graminées,
Qui fais d’une fleur morte un vivant papillon,
Lorsqu’on voit, s’effeuillant comme des destinées,
Trembler au vent des Pyrénées
Les amandiers du Roussillon, »
 
je suis allé jeter un œil dans une édition de 1910 qui figurait, inexplorée, dans mon héritage et là, j’ai été saisi par la modernité de la pièce de théâtre dont même les didascalies sont poétiques. 
« Un rayon de lune traverse la toile d’araignée, qui semble tamiser de la poudre d’argent. » 
La nature, les animaux sont magnifiés, frétillants comme ceux de notre film d’animation préféré, « Madagascar », les alexandrins en moins. 
L’humour est constant avec en particulier un merle persifleur. 
« - Que dis-tu quand tu vois sur les monts l’aube luire ?  
 - Je dis que la montagne accouche d’un sourire ! » 
La poésie donne du talent aux cigales- pardon- aux « tzigales » : 
«  Ici - C’est si – Vermeil - Qu’on s’y - Roussit - Merci ! »
Le héros emplumé qui croit faire lever le jour peut se trouver en proie au doute.
Il tombe amoureux d’une poule faisane, en transition de genre, travestie dans les couleurs du mâle faisan.
A bout du quatrième acte, lorsque des humains s’annoncent, le rideau rouge retombe.
Il s’était levé avec retard, l’attente de la représentation avait duré quatre ans, le directeur du théâtre était intervenu : 
« Chut ! Avec tous les bruits d'un beau jour, la Nature
Fait une rumeur vaste et compose en rêvant
Le plus mystérieux des morceaux d'ouverture,
Orchestré par le soir, la distance et le vent ! »
 Chantecler dialogue avec le rossignol : 
« - Vais-je pouvoir chanter ? Mon chant va me paraître
Hélas ! trop rouge et trop brutal
- Le mien peut être
M’a semblé quelque fois trop facile et trop bleu. […]
- Oh être un son qui berce
- Etre un devoir qui sonne. »
Toutes sortes de coqs participent à un défilé « kaléidoscopiquement cosmopolite » dans une variation de « Kikiriki » «  Cocorico » internationaux, participant à un feu d’artifice de mots qui ajoute des couleurs à une vie d’autant plus célébrée qu’elle est éphémère.  

samedi 18 octobre 2025

Passages. Georges Navel.

L’auteur aurait pu être lauréat du « Prix du roman populiste » auprès de Jules Romain, Louis Guilloux, Bernard Clavel dont le manifeste proclame :  
« Nous en avons assez des personnages chics et de la littérature snob ; 
nous voulons peindre le peuple. 
Mais avant tout, ce que nous prétendons faire, c’est étudier attentivement la réalité. »
 …tant cette biographie répond à la devise :  
« Le peuple plus le style ». 
Le sens péjoratif accordé désormais à l'adjectif populiste signe une époque peu favorable aux ouvriers et paysans. 
« Intimidé par leur aspect, j’hésitais à mettre ma main dans leurs grandes pinces. 
Un regard attendri précédait le geste, je les trouvais finalement très gentils, ces ogres, 
ces gaillards qui me serraient la main sans me faire mal. » 
Très jeune, il multiplie les expériences, exerçant une multitude de métiers, en Algérie où la Croix Rouge l’a mis à l’abri de la guerre qui bouleversait sa Lorraine natale, puis à Lyon où il fréquente les milieux libertaires.
« J’entendais les essoufflements de l’usine et les grattements espacés de la pioche des vieux travaillant leurs vignes. Le grand pré du versant dégageait en toutes saisons une bonne senteur de vie. »
Ce récit, respectueux des hommes et de la nature, bien écrit par le petit dernier d’une famille de 13 enfants, enthousiaste à dix ans au début de la guerre de 14, n’est pas figé dans un passé  haut en couleurs :  
« On connaissait des jeunes crâneurs qui durant leur séjour en prison s’étaient fait tatouer sur la poitrine : « Fils de veuve ne sera pas militaire ».  
Ces 380 pages alimentent nos questionnements contemporains après que les valeurs de travail, d’instruction, de solidarité aient basculé.
Les péripéties s'enchaînent et illustrent concrètement les mots centenaires toujours d'actualité. A part peut être « termitière » aucun de ces termes n’a pris la poussière. 
« Termitière, esprit de troupeau, sectarisme, conformisme, grégarisme, dogmatisme, nationalisme, chauvinisme : ces mots revenaient souvent dans les propos de notre ainé, de même qu’optimisme, aveuglement, naïveté, esprit critique, libre examen, volonté, précurseur, ouvriérisme, rationalisme, universalisme. »

samedi 11 octobre 2025

Le caveau de famille. Katarina Mazetti.

Quel plaisir de retrouver, comme de vieilles connaissances, la bibliothécaire et le paysan qui dans cette suite de « La tombe d’à côté » se mettent en ménage !
Benny et Désirée « font famille » comme le suggère le titre laissant croire à une tragédie alors que la vie déborde dans ces 260 pages avec ses douleurs, ses difficultés, ses amours simples et des arrangements où l’humour bienveillant vient adoucir les épreuves.
Benny vivait avec sa cousine Anita quand son ancienne amante lui fit part de son envie d’enfant. 
« Anita essaya d'arracher, avec ses ongles, le papier peint qu'elle venait de poser. Et elle lança le nouveau lecteur CD, à travers la fenêtre. Fermée la fenêtre, par dessus le marché!
Benny cacha le couteau à désosser et mit une pile neuve dans l'alarme incendie. »
La santé des protagonistes surmontant leur fatigue remonte le moral dans un récit à deux voix qui évite toute vision surplombante d’un quotidien éprouvant. 
« Je souris souvent un peu jaune quand on parle de l'homme suédois égalitaire qui "endosse sa part". Je veux dire, on n'arrache pas les comportements avec les racines aussi vite que ça seulement parce que les hommes ont formellement la possibilité de prendre un congé paternité ! Et j'ai le sentiment que ce n'est pas à la campagne qu'on trouve les fers de lance en matière d'hommes nouveaux. En revanche, il y a beaucoup de congés paternité durant la chasse à l'élan. » 
Les observations justes et fines concernant le métier de paysan en Suède ou la condition féminine s'avèrent plus efficaces que de véhémentes leçons. 
« Vers le milieu de l’automne quand j’ai commencé à laisser les enfants à la crèche, j’ai réalisé que s’ils étaient sales ou si leurs vêtements étaient tachés, ce serait à moi de me sentir gênée en venant les chercher même si c’était Benny qui les avait déposés dans cet état. » 
Quand des bavards saturent nos oreilles alors qu’ils n’ont rien à dire, ce conducteur de tracteur, pas vraiment un taiseux, nous console lorsqu’il reconnaît que les mots lui manquent et puis se tait.  Il rappelle une évidence oubliée : le silence peut être salutaire.  

samedi 4 octobre 2025

Ascendant beauf. Rose Lamy.

Le bob rose, très second degré, offert en produit dérivé à l’achat du livre m’a ouvert l’appétit sur un sujet qui m’interroge depuis longtemps. 
Mais la question « Pourquoi le RN séduit plus facilement les pauvres que la gauche » reste en suspens et les critiques concernant les médiatiques transfuges de classe ne sont pas assez développées.
Même si je suis passé facilement par-dessus l’excluante écriture inclusive de l’auteure, j’ai apprécié davantage ses récits autobiographiques et ses incertitudes qui lui font oublier le point médiant quand elle se définit comme « beaufe » plutôt que ses plates amorces d’analyses, paresseusement bourdieusiennes.
Rien de bien neuf depuis l’opposition première entre Duduche et son beauf créé par Cabu : 
« misogyne, machiste, homophobe, raciste, xénophobe, anti-intellectuel, partisan de l’ordre, conservateur, conformiste, grossier, obtus, belliqueux, chasseur, militaire, fan de centrale nucléaire, ignorant, bête, inculte. » 
La barque répétitive est quelque peu chargée.
La notoriété de Rose Lamy, née sur Instagram, lui a valu d’être publiée dans un processus déjà en place pour les chanteurs de la génération d’après les Goldman, Aznavour et Dassin qu’elle cite abondamment avec tendresse.
Dans ces 176 pages faciles à lire, sa critique du film « Vingt dieux » est pertinente 
comme son rappel utile du juste combat bannissant l’excuse «  meurtre passionnel » pour qualifier les féminicides. 
Mais quand elle ironise: 
« quand j’aurai besoin de désigner un homme méprisable, bête et de moralité douteuse, je dirai qu’il est un macroniste »
son arrogance est du même ordre que celle de la bourgeoisie à l’égard des classes populaires décrites par... Gramsci qu'elle cite: 
«  Un ensemble de pauvres hères moralement et intellectuellement inférieurs, un ramassis de brutes qui se préoccupent seulement de se remplir le ventre, de faire l’amour et de cuver leur soûlerie dans un profond sommeil. » 
ou pour s’en tenir à des dates plus récentes (2012), dans la même veine que Technikart qu’elle épingle, décrivant Guéret sous le titre «  La bouse ou la vie » : 
« Un parking où zonent quelques bouseux en casquette-survêt- banane tchachant probablement de la mobylette à Greg. »    

samedi 27 septembre 2025

Le grand secret. René Barjavel.

Comme ma culture en science-fiction s’approche pour moi du vide sidéral, il était temps que j’aborde cet auteur réputé dans le genre, recommandé dans les lycées.
Les thèmes abordés dans les années 70 : l’équilibre des puissances mondiales, la guerre des générations… sont toujours d’actualité. Bien que quelques procédés d’avant l’ADN et l’intelligence artificielle aient pris la poussière, ces 343 pages bien ficelées sont intéressantes.
L’élégance datée du style me convient.
« Jeanne et Roland combinèrent une escapade de cinq jours, juste le temps d’aller, tout près en Normandie, voir éclater les arbres ronds de fleurs, et jaillir de la terre la foule de l’herbe nouvelle drue, émerveillée de pâquerettes, si pressée d’atteindre le ciel avant l’hiver. »
L’amour, moteur narratif, se doit d’être intense et variable: 
«Tout à coup, j’étais nue, écorchée de toi, saignante de toute ma chair comme une bête accrochée au croc de l’abattoir. » 
Voire tendrement osé : 
« Elle se mit à rire doucement avec tendresse et reconnaissance, en regardant le sexe endormi. Il avait l’air, dans un nid de mousse, d’un oiseau épuisé à couver des œufs trop gros pour lui. »
L’ambiance initiale très « peace and love » aux couleurs pastel d’un territoire ignorant la mort tranche avec les paysages noircis d’après l’apocalypse de romans plus contemporains.
Cette utopie de la vie éternelle pose quelques problèmes à De Gaulle, Khrouchtchev et Kennedy… tout en permettant au lecteur de poursuivre la conversation à propos de la démographie, de l’avortement, de la vie, de la mort, de la liberté 
Une uchronie : « Récit d'évènements fictifs à partir d'un point de départ historique. »

samedi 20 septembre 2025

Un autre ailleurs. Agnès Riva.

Créteil dans les années 70 nous emmène loin dans le temps et l’espace.
Un jeune homme s’extasie devant les panneaux publicitaires apposés devant les chantiers de la ville nouvelle en construction, il va devenir un animateur convaincu d’un de ces quartiers. 
« Sur la palissade qui en interdisait l’accès une fresque naïve représentait des gens accoudés à une barrière qui, tournant le dos au vrai lac, regardaient des voiliers rouges et bleus de comptine naviguer sur un fond bleu. »  
Ce roman nous dépayse puisque seules quelques mesquineries effleurent avant les dernières pages qui finissent bien.
C’est le temps des couleurs, des expérimentations pédagogiques et architecturales, des fêtes antillaises ouvertes à tous. 
Une candide journaliste en devenir, lit à l’organisateur son projet de compte-rendu où elle projette son « désir d’île ». Le guadeloupéen relativise la joie de vivre de ce qui ne s’appelait pas encore une communauté, sans tomber toutefois dans une peinture sombre du déracinement.
Les amours en devenir se vivent sans drame et la douceur et la complicité entre femmes permet de surmonter l’épreuve d’un avortement. 
A propos de la pilule : 
« - Moi, je crois que ça rassure les mecs au fond, qu’on ait la trouille à chaque fois qu’on baise, renchérit la grande brune.
- Pas tous, quand même, lui répondit celle qui avait lancé la conversation. » 
Ailleurs.

samedi 13 septembre 2025

Ces fleuves qui coulent en nous. Erik Orsenna.

Beau titre pour une exploration de notre corps où la poésie rend la science aimable.
L’académicien illustre parfaitement la formule de Bachelard : 
« Qui enseigne est enseigné, qui est enseigné enseigne », agréablement. 
Devant notre merveilleuse machinerie, il convient de revenir aux fondamentaux. 
« Les relations entre l’intestin et le cerveau font intervenir les mêmes acteurs que le commerce planétaire. D’abord, la mer, sur laquelle passe comme tu sais, 80% des échanges. Dans notre corps, ce liquide est le sang. Y circulent des « cargos » : le cargo du cholestérol, le cargo des glucides, le cargo plein d’hormones… Cette flotte n’arrête pas de monter du ventre vers la tête. » 
Le souvenir d’« Il était une fois la vie », série télévisée destinée aux scolaires, dans laquelle les virus étaient personnifiés, peut être convoqué tant l’habileté de l’écrivain permet de mieux appréhender la complexité et nous conduire vers des réflexions profondes.
L’évocation des légendes indiennes ou japonaises, la sagesse des chercheurs antiques, leurs erreurs, excusent nos ignorances et stimulent la curiosité. 
Hildegarde de Bingen tient une place de choix dans ce rappel de l’histoire des sciences.
La découverte des sources du Nil par Burton ne s’est pas faite en un jour : 
« Oui, vive ce fou curieux né à Torquay deux jours avant la venue du printemps 1821 ! Il prouve en était-il besoin ?, que ces fleuves qui coulent en nous ne sont pas faits que d’eau mais aussi de mots et d’émois, d’histoires grandes et petites, de vérités avérées comme autant de songes improbables, de légendes et de mélodies. » 
Plutôt que de livrer une bibliographie plantureuse, Orsenna nous promène en 200 pages dans les rues de Paris pour aller d’un infectiologue à un spécialiste de l’autisme ou une familière des moustiques, en notant au passage quelques bonnes adresses de restaurants.
Il voit Robert Hue en tant qu'ancien rocker- judoka, qui a créé une ONG pour lutter contre la drépanocytose, la plus fréquente des maladies génétiques, née de la mutation d’un gène codant l’hémoglobine (80 % en Afrique et 15 % en Inde) : 260 000 décès d’enfants en bas âge.
L’écrivain compare cette maladie à l’embâcle quand les troncs s’accumulaient dans les rivières canadiennes, et que les draveurs couraient sur les radeaux mouvants. 
« ça commence au fond du lac Brûlé, 
Alentour du huit ou dix de mai. 
La mort à longues manches,
Vêtue d'écume blanche,
Fait rouler le billot
Pour que tombe Sylvio. »
 
Félix Leclerc
En partageant son gai savoir, l’ambassadeur de l’Institut Pasteur remercie la vie.

vendredi 12 septembre 2025

Colonisations. Front populaire.

La revue de Michel Onfray fournit une matière riche à un débat souvent escamoté sous des positions sommaires et irréconciliables où « repentance », « indépendance » dansent et que « soumission » et « insurrection » font impression.
Le philosophe a le sens de la formule et porte le fer dans la plaie lors de son édito traitant des empires.  
«  La France ne sait pas démanteler un point de deal à saint Ouen […] mais elle a la prétention de croire qu’elle pourrait entrer frontalement en guerre contre Moscou. »
Si la dénonciation des faiblesses de l’Europe est davantage documentée que des propositions de la part des souverainistes, les dernières lignes de la livraison de ces vacances 2025 à propos  de «  Vendredi ou les limbes du Pacifique » de Michel Tournier laissent une impression raisonnable et sensible.  
« … au lecteur de repenser, à la lumière de cet hymne à l’univers, érotique et solaire, les codes et les critères qui sont les siens, dans notre monde civilisé. » 
Une bibliographie claire, « Au temps des colonies », caractérise Fanon, Césaire, Senghor, Glissant dans leurs apports divers, mais aussi Gide, Conrad, Vuillard, Daoud… dont des citations vont enrichir divers articles de ces 160 pages copieuses traitant
- de la « rente mémorielle » algérienne,
- de l’instrumentalisation anti-coloniale et anti-raciste aux racines de l’antisionisme,
- mais aussi de la colonisation des esprits avec les partis pris de Wikipédia
- et l’emprise numérique en général
- ou lorsque le marché infiltre l’Etat.
Montaigne a sa place dans la généalogie de l’idée décoloniale :  
« Chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage. » 
Quelques mises au point sont nécessaires pour infirmer l’idée que la colonisation serait un projet spécifiquement européen et essayer de clarifier la notion d’ingérence. 
« Sur le plan commercial, ce sont les acteurs privés qui se sont enrichis véritablement. »
Les affects ne sont pas oubliés et la question se pose : «  L’histoire est-elle morale ? ».
La description de l’évolution de l’idée de décolonisation des années 50 à nos jours est stimulante en mettant en cause l’idée d’un universalisme européocentré porteur par ailleurs des idées d’émancipation.
Avec le recul des raisons cachées se révèlent: 
« De Gaulle veut passer l’éponge, amnésie, amnistie, coopération […] est-ce la contrepartie de la jouissance de droits pétroliers et stratégiques négociés au Sahara pour quelques années ? »  
Hors de la thématique centrale, la revue trimestrielle participe aux débats tendances du moment à propos de l’héritage, de la GPA, des ZFE, des retraites… des terroirs à réenraciner et développer technologiquement… avec des recommandations d’autres lectures dont un alléchant : « Face à l’obscurantisme woke » visant à « déconstruire la déconstruction ».

samedi 6 septembre 2025

Jacaranda. Gaël Faye.

Le mot « génocide » avait été prononcé il y a trente ans pour qualifier le massacre de 800 000 Tutsis.
L’auteur du remarquable « Petit pays » retrace l’histoire du Rwanda sur quatre générations. 
 «  Le taxi traversait une ville ocre au paysage grillé par la saison sèche, troué ici et là par de verts bosquets. Sur la chaussée pleine de fondrières, le véhicule brinquebalait, les roues soulevaient une latérite aérienne et suffocante qui se répandait en un brouillard de poussière sur les malheureux piétons, les façades des bâtiments et la végétation environnante. » 
Les mémoires se reconstituent difficilement parmi les hésitations, les silences. 
« C'était une histoire de monarchie et de guerres, de grands troupeaux et de clans, d'intrigues de cour et de drames familiaux, une histoire où les colonisateurs arrivaient et changeaient la société rwandaise en mesurant les nez et les fronts avec un compas à glissière, puis en imposant une religion et des lois venues d'ailleurs. »
La folie des hommes, leur vitalité quand même, sont dévoilés avec pudeur et force au cours de 380 pages où les personnages évoluent, ne restent pas figés.
« J’observais les gamins comme on se venge de tout - des enfances gâchées, des bagarres de rue, des coup de couteau et de machette, des nuits à dormir dehors, des overdoses de colle à sniffer, des familles décimées, de la misère crasse, de l’alcool frelaté, des viols, des maladies, de l’indifférence ou de la pitié des honnêtes gens. »
 Le récit bien écrit ne cache rien des violences parfois inouïes, avec deux séquences d’exposés replaçant les destins de quelques familles dans une histoire venue de loin.
«  En 1957, parut le Manifeste des Bahutu, un document qui désignait les Tutsi comme des envahisseurs et des exploiteurs. Avec ce texte, le poison de la division et de l'ethnicisme habillement distillé par les colons belges et l’Eglise devint la prison mentale dans laquelle la grande majorité des Rwandais se laissèrent enfermer et dont ils ne sortirent plus. » 
Victimes et bourreaux vivent maintenant dans ce pays dont la résilience n’apparaît pas artificielle, alors que se redessinent progressivement des identités.

samedi 28 juin 2025

Un été avec Alexandre Dumas. Jean Christophe Rufin.

Au rendez-vous annuel de la jolie série : un été avec…
un bel écrivain écrit en bien à propos d’un des plus vivants de nos romanciers dont le fils avec « La Dame aux camélias » entra à l’académie Française qui s’était refusée au père des « Mousquetaires » maintenant au Panthéon. 
Une belle formule extraite de « Joseph Balsamo » pourrait résumer l’œuvre et la vie romanesque du descendant du général Davy de la Pailletterie et d’une servante Cézette Dumas. 
« Nous aimons le monde comme les damnés le paradis : sans le connaître ». 
Alexandre a visité tant de pays, connu fortune et faillites, réalisé une œuvre foisonnante, seul et en collaboration, aimé tant de femmes.
« … il multiplie les liaisons avec des actrices. Virginie, Hyacinthe, Henriette, Caroline, les noms des victimes s’alignent, comme sur un monument aux amours mortes. »
Les succès cinématographiques de Monte-Cristo et des Mousquetaires confirment des siècles plus tard, sa qualité d’orfèvre  mettant en valeur le matériau brut extrait par les historiens.
« Qu’est-ce que l’histoire ? C’est un clou auquel j’accroche mes romans. »
Il contredit Feydeau qui décrit parfaitement cette fin passionnante du XIX° siècle : 
«  A une époque qui a enfanté le suffrage universel, les emprunts nationaux, les embellissements de Paris, les associations de capitaux, les chemins de fer, les télégraphes électriques, les bateaux à vapeur, les canons rayés, la photographie, les expositions de l’industrie, tout ce qui va si vite, tout ce qui est mathématique, utile, matériel, commode, le réalisme est la seule littérature possible. »
Dans ces 186 pages où figurent des recettes de cuisine du maître des feuilletons, la description de ses bateaux, de son château, le rappel de quelques souvenirs de voyages, des échos de ses rencontres avec Hugo, Garibaldi, ses expériences de spiritisme, je retiens une dernière citation pour apprécier sa tolérance : 
« C’est une des singularités de ma vie, d’avoir connu tous les princes et, avec les idées les plus républicaines de la terre, de leur avoir été attaché, du plus profond de mon cœur. »  

lundi 23 juin 2025

Le festival de Cannes ou le Temps perdu. Santiago H Amigorena.

Le « Temps perdu » avec la majuscule c’est celui gaspillé par le lecteur après 345 pages qui ne disent rien et  n’évoquent surtout pas Proust pourtant sollicité à l’évocation de chaque triste fête, autour d’un festival où il n’est pas question de cinéma. 
Comme l’ancien amant de Philippine, ce « Monsieur Gayet » ou « Monsieur Binoche » ainsi que le nomme le concierge du Carlton prétend au Panthéon littéraire, il ne lui sera rien pardonné, même si son manque de délicatesse est tempéré par quelque autodérision pas plus sincère que les emballements amoureux du piètre baiseur. 
«…  plus désireux de plaire en bavardant que de m’instruire en écoutant. »
 Sa chronique people est bien fade, et la magie du festival bien éventée. 
« On a cru faire partie d’un monde, on finit par faire partie des meubles ». Un tapis.
Il ne s’agit pas d’un dévoilement des coulisses de cet événement mondial, mais par le fait qu’un tel livre puisse être édité, preuve est faite de la vacuité d’un milieu culturel où à aucun moment n’effleure la moindre raison d’admirer, de s’émouvoir, d’être surpris…    
Ses apostrophes au lecteur, ses répétitions, son style de bric et de broc ose ce genre d’astuce : « Nez en moins, si je comprends, ou feins de comprendre… »
 Quand « La grande librairie » titre : « Proust sur la Croisette », le dossier concernant les connivences critiques s’épaissit . 
« Je me demandais même si, ayant réussi à imiter Proust au point d’être méprisé par certains comme un écrivain mondain… » 
Les écrivains mondains ont au moins plus d’humour.

samedi 21 juin 2025

La nuit n’est jamais complète. Niko Tackian.

Pour diversifier mes lectures, je suis allé au rayon livres de mon Supermarché, oubliant les suggestions de mes magazines et journaux habituels.
Une atmosphère apocalyptique, proche du livre «  La route » de Cormac McCarthy que je n’avais pas apprécié contrairement à l’ensemble des critiques, nous remet le nez dans la poussière noire.
L’accumulation des déboires d’un père et de sa fille arrêtés en plein désert sur le site d’une mystérieuse mine abandonnée et l’addition de tous les motifs propres à faire monter l’angoisse m’ont incité pourtant à aller au bout des 248 pages pour voir comment l’auteur allait se tirer de ce festival de clichés étouffants. 
« Il vit le puma à la gueule sanglante, la bête tapie dans l'ombre qui les menaçait,
cette bête, c'était lui. »  
Le style conventionnel participe au malaise résolu pourtant dans une conclusion horrifique bien ficelée qui nous sort de la perplexité.
Nous aurons d’autres cauchemars.