dimanche 30 juin 2013

Proverbes détournés.



Pour clore la saison, je suis allé chercher sur d’autres sites dont je n’ai pas retenu l’appellation*, quelques formules amusantes. 
Quand on tape « proverbes détournés » sur le moteur de recherche, les trouvailles savoureuses abondent.
- Vaut mieux avoir volé un bœuf
Tout le poulailler et l’étable
Que piquer l’œuf.
- Un âne averti en vaut deux.
- Pour vivre heureux, prends ton cachet.
- Il faut pas casser les mêmes œufs
dans l’même panier.
- La nuit tous les fachos sont gris.
- C’est-y qu’y a pas d’fumier sans dieu.
- Ventre affamé n’a pas d’papiers.
- La flemme est l’avenir de l’homme.
- C’est pas ton frère, s’il se nettoie.

Bonnes vacances aux lecteurs fidèles et rendez-vous début septembre.
* Une buissonnière comparse précise:
"Les proverbes détournés sont une bien belle chanson d'Allain Leprest, Loïc Lantoine, musique JeHaN, chantée par JeHaN avec dans le refrain: "je suis pour l'indépendance du verbe" et qui a pour titre Tous les proverbes,  enregistrée sur le CD : Les ailes de JeHaN. "
Merci.
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Voilà l'été

samedi 29 juin 2013

L’hiver des hommes. Lionel Duroy.



Après une rencontre avec l’auteur organisée par la librairie du Square, j’ai acheté son  livre au titre fort qui ne trompe pas sur le contenu.
L’ancien reporter de Libération se consacre désormais à sa vie d’écrivain et s’il invente dans ce roman un personnage qu’il appelle Marc, il ressort de ces pages documentées, une sincérité émouvante. L’écriture est limpide, les décors bien plantés, les portraits vifs. Nous sommes amenés à nous interroger sans cesse mais sans sommation.
« …je vois que la neige s’est remise à tomber. Personne n’a songé à venir allumer, de sorte que l’ombre des flocons sur les murs, dans le jour finissant, donne le sentiment qu’une pluie de cendres s’abat lentement sur nos têtes. »
Il a essayé de résoudre ses blessures d’enfance sous d’autres titres mais en enquêtant sur la mort de la fille de Ratko Mladić « le bourreau des Balkans », et en s’interrogeant sur  ce que sont devenus les enfants des nazis, il n’est  toujours pas guéri d’être le fils d’un père d’extrême droite.
La superposition d’une l’histoire personnelle et des évènements de 1995 quand la Yougoslavie disparaissait avec le plus grand massacre en Europe depuis la seconde guerre (6000 à 8000 personnes) est poignante, sans effet spectaculaire mais d‘une grande efficacité.
Nous le suivons pendant 350 pages dans le  misérable territoire serbe en Bosnie, du côté de Pale, d’où sourd une tristesse infinie.
« Celui qui nous conduit à la gare routière est en panne d’essuie glaces, de sorte qu’il roule avec sa vitre baissée pour pouvoir sortir le bras à intervalles et dégager son pare-brise à l’aide d’une raclette qu’il a ficelée au bout d’un fil de fer. »
Il rencontre des acteurs de ce drame qui se disent vainqueurs, mais ils sont en réalité désespérés, s’estimant trahis par tous, y compris des serbes de Belgrade, ils vivent comme en prison dans une peur qui n’en finit pas.
Un éclair d’espoir, in extrémis, quand il passe à Sarajevo, il aperçoit deux reclus qu’il avait connus lors de son séjour. Les deux amoureux se tiennent par la main :
« Ils ont osé venir et maintenant ils voient combien ce qu’on raconte là haut est faux - délires de survivants aveuglés par la peur et par  la haine. »
C’est à la dernière page.

vendredi 28 juin 2013

Internet : quelles révolutions ?



« Les réseaux sociaux interdits aux moins de 13 ans sont utilisés par 64% d’entre eux. »
Une pelletée de plus extraite du fossé d’incompréhension entre générations dont la plus ancienne, la mienne, qui occupe habituellement les estrades, n’a pas pris toute la mesure.
Dans le Forum de Libération  2013 à Grenoble qui affichait : « Jeunes débattez-vous ! » la thématique internet traversait tous les débats. J’avais déjà remarqué qu’à l’occasion la formule « éducation populaire » lui était  parfois attribuée ; une bonne occasion de se refaire une jeunesse.
Les jeunes intervenants sont prometteurs.    
Mehdi Benchoufi fondateur du Club Jade dans un texte charpenté, qui peut se retrouver bien sûr sur le net, avait prévenu :
«  l’Ecole française est un espace reclus, où l’on ne partage pas, où pire, partager est gruger, un espace compétitif où l’on bâtit l’estime de soi contre celle des autres. A l’heure où le savoir circule partout à toute vitesse notamment et notablement par internet, il s’en faudra peu pour que l’Ecole et l’université n’apparaissent aux yeux des générations qui viennent ce que nous percevons aujourd’hui des abbayes du bas moyen-âge, des lieux canoniques, clos et fermés de dispensation du savoir. »
Bien entendu, nous n’échappons pas à l’anglais : « Serious gaming », « learning by doing » pour faire valoir des choix pédagogiques promus jadis sous d’autres appellations.
Descendu  désormais de mon estrade, je leur préfère encore les expressions : « la main à la pâte » ou « tâtonnement expérimental ».
Ce qui n’enlève  par ailleurs aucun bienfondé à des prophéties pas si folles :
« les enjeux économiques sont forts et il ne faudra pas s'étonner que le sort réservé aux Majors et autres Virgin ne soit celui de l’industrie éducative. En effet, La bataille du savoir étant une des clés, sinon la clé qui ouvrira le chemin de la compétitivité, de nombreux pays développent des stratégiques économiques agressives autour d’un marché de l’apprentissage aujourd’hui mondial. »
Jérémie Zimmermann fondateur de la quadrature du Net « un collectif citoyen qui informe sur des projets législatifs qui mettent en péril les libertés individuelles dans l’environnement numérique » s’est battu contre HADOPI, mais  la bagarre  sur le plan européen contre ACTA est  d’actualité depuis 2 ans « Les règles de l’ACTA et, plus généralement, de la propriété intellectuelle ont un impact énorme sur nos vies quotidiennes. Culture, éducation, santé ou communication … »
Sabine Blanc journaliste à Owni.fr, est spécialisée en matière de « hacking » piratage citoyen qui porte l’ambition de férus de bidouillage vers une alternative démocratique où la machine changerait la vie. « L’homme doit contrôler la machine et non l’inverse. »
Ces stimulants intervenants sont nés dans ce bain d’échanges, de mise en commun, de transparence, aux allures libertaires qui adorent divulguer ce qui est caché,  et se montrent très vigilants quant aux entraves mises aux libertés.
Ces acteurs du Net  prouvent que le jugement  peut porter sur leurs œuvres et non sur leur âge, leur position, leur nationalité, leurs diplômes.
Quand Facebook en sait plus sur chacun d’entre nous que notre famille, il est temps de faire jouer l’intelligence collective et: «  RTFM ! Read The Fucking Manual ! » Foutus anglais !
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Dans le Canard de cette semaine:



jeudi 27 juin 2013

Schnock. n°7. Eté 13.



Miou Miou remonte une bretelle de sa robe légère en couverture du trimestriel qui consacre un dossier complet aux « Valseuses » de bientôt quarante ans d’âge.
Souvenir jubilatoire pour une génération, bien que la revue Ecran trouva, lors de sa sortie, ce film de Bertrand Blier « authentiquement nazi, putride comme un abcès mal soigné ».
Le sens de la nuance a-t-il existé ?
 « On est pas bien là ? »
Outre la souvenance de quelques dialogues croustillants, pendant 175 pages nous pouvons nous rappeler la victoire de Noah en 83,  de « Bonne nuit les petits » en 62,  de Gérard Pirès  auteur de « Fantasia chez les ploucs en 1971,  de Bercoff  qui eut son succès sous le nom de Caton en 88 et du critique Angelo Rinaldi « l’as des piques »…
« Mon désespoir ne serait rien si je ne pouvais vous le décrire » Madame de Sévigné.
Et quel plaisir de découvrir une plume alerte : Benjamin Chagall qui pointe des bourdes dans les chansons françaises :
« c’était fin août début juillet » Johnny Hallyday,
et à même la pochette de Carene Cheryl : « Ne raccroches pas. Je t’aime » 
le correcteur orthographique en reste muet !
J’ai appris que Cino Del Duca fut un personnage beaucoup plus complexe que l’image qu’il m’en restait aux couleurs de « Nous deux » :
 « ses anciens camarades du parti communiste trouveront toujours auprès du richissime éditeur qu’il va devenir un travail ou une aide financière »
Dans l’article consacré au tour de France une dernière citation du maître Blondin :
« Anquetil incarnait la partie libre de l’homme, Poulidor sa partie fatale »

mercredi 26 juin 2013

Diégo Rivera et les peintres muralistes.


Christian Loubet nous lit à la fin de sa conférence un extrait d’une déclaration du sous- commandant (j’ai toujours adoré ce grade) Marcos :
« Nous les indigènes ne faisons pas partie du passé mais du futur. Car on regarde vers l’arrière mais on rêve vers l’avant. Nos pieds demeurent dans la glaise de l’histoire mais notre tête aperçoit de lumineux lendemains »
 C’est que d’histoire il en fut question, pas celle d’archives scellées mais s’inscrivant au présent, indissociable du sujet de la soirée aux amis du musée. 
Dès 1906, Murillo professeur à l’académie des beaux arts fait appel au nationalisme des  peintres mexicains contre «  le colonialisme parisien ». Il invente des procédés nouveaux (visions aériennes pleines de courbes), de nouveaux produits (pétro résine).
C’est avant le temps de Pancho Villa et Zapata dont les révoltes commencées en 1911 seront confisquées par Obregón en 1920.
Siqueiros, élève de Murillo participe à la révolution activement puis il rencontre Diégo Rivera à Barcelone avec lequel ils lancent un appel aux artistes d’Amérique, rejoints par Orozco.
« Nous proclamons que lorsqu’on passe d’un ordre décrépit à un ordre neuf, les créateurs de beauté doivent faire tous leurs efforts afin que leur production ait une valeur idéologique pour le peuple. Ainsi le but de l’art qui est actuellement une expression de la masturbation individualiste, sera enfin un art pour tous, d’éducation et de lutte. »
Ils bénéficient de commandes du ministre Vasconcelos.
Rivera  nourri de Giotto exécute une grande fresque : « La création » sur 100 m 2, avec des personnages à la Gauguin.
« Le dîner de capitalistes » occupera 1600 m2 et prendra 4 ans.
Bien d’accord pour fustiger la peinture aristocratique de chevalet, ils vont vers un expressionisme tropical qui réactualise des traditions et se nourri de l’énergie du futurisme.
Le trotskiste Rivera sera traité de « folkloriste » par son comparse le stalinien Siqueiros, allant  lui vers plus d’abstraction.
Lors de leur séjour aux Etats-Unis, ils seront fascinés par la société industrielle, ses immeubles, son dynamisme.  Au temps du « New deal », Roosevelt  leur procure aussi du travail.
Rivera réalise «L’homme à la croisée des chemins » qui avait été refusé par Rockefeller à cause d’une représentation de Trotski, figurait aussi Darwin.
Frida Khalo, sa jeune épouse passionnée, sera au centre d’une fresque distribuant des armes aux paysans et aux prolétaires. Elle qui n’a pu être mère, protège Diégo enfant dans «  Rêve dans le parc d’Alameda ».
Le palais national  sera la Sixtine de Rivera : l’histoire mexicaine avec son versant colonial, révolutionnaire autour de l’aigle et du serpent originels est rappelée.
Le monde indien y figure dans toute sa richesse :
le Quetzalcóatl, serpent à plumes des Toltèques,
le marché Aztèque où une femme tatouée auréolée d’arums reçoit un bras en offrande,
chez les Zapotèques,  au pays de l’or et  de la plume, les prêtres portent des masques de mort,
les artistes Tarasques travaillent le caoutchouc, les teintures,
les voladores Totonaques effectuent 13 cercles  autour de mâts (13X4= 52 semaines),
le maïs est à l’honneur chez les Huastèques, et le sisal et l’agave.
L’origine de ces représentations est citée sur les grisailles en soubassement du  colossal panorama où Cortès n’a pas le beau rôle, les noirs sont marqués au fer rouge, le servage est montré dans toute sa violence. 
Orozco  dans sa « tranchée » guerrière, exprime toute sa noire vigueur.
Le combattant Siqueiros apporte un souffle épique avec sa « Marche de l’humanité », son « Peuple en armes », sa puissante « Nouvelle démocratie », quand il représente la sécurité sociale et son « écho d’un cri » résonne encore.
Ces peintres ont magnifié le collectif dans des rythmes puissants, mis au jour l’héroïsme individuel, rappelé les aspirations du peuple, ses valeurs, ses luttes, dans des cathédrales contemporaines en conviant l’histoire, quand l’avenir se peignait de couleurs vives.

mardi 25 juin 2013

Le démon du soir ou la ménopause héroïque. Florence Cestac.



Dès la première page : « Tumeur bénigne, microkystes calcifiés, opacité tumorale, biopsie mastopathie, tumorectomie », même en bulles, ce vocabulaire n’est pas vraiment hilarant.
Alors quand la sexagénaire, qui a dépassé « le démon de midi » et « d’après midi » depuis deux BD, va se tirer d’affaire après quelques angoisses,et  refaire sa vie avec une énergie décuplée.
Elle quitte son travail, d’autant plus qu’elle elle se sent poussée vers la sortie.
« Je vous rippe les visuels dans le CTP ou je vous les switche ?
Ok ! je vous fais une sortie papier comme d’hab…»
Elle divorce d’un mari éteignoir, se libère de sa fille donneuse de leçons dont elle verra moins mais mieux les enfants. Sa mère qui se prend pour Brigitte Bardot ne la reconnait plus. 
Elle émigre dans les Pyrénées dans une maison qu’elle retape avec des artisans tels qu’ils s’appliquent à se caricaturer, quoique l’un deux est honnête et prévenant, et finit dans les délais…
La mamie boomeur va vivre ses utopies hédonistes qui firent florès dans les années 60, ici ramenées à des bains au soleil et des repas sous les arbres. Les générations suivantes peuvent « prendre les boules » devant ces privilégiés qui ne manquent pas de se poser tellement intelligemment en modèles tellement rigolos.
Elle a cultivé les copines, et « cougard chez les ploucs » se sent heureuse comme un papillon.  
Cet album se lit le temps d’un sourire.
Il va faire un malheur pour les départs à la retraite. Son optimisme passe sans niaiserie avec une dose de vacheries, de dévoilements qui lui font visiblement du bien ; à nous aussi.

lundi 24 juin 2013

Effets secondaires. Steven Sorderbergh.



Nous sommes à New York au pays du roi pognon, dans le milieu des psys, des labos pharmaceutiques, où tout le monde prend ses pilules pour se dessiner un sourire. Mais il y a du sang sur le parquet et les cuisines recèlent des armes de destruction efficaces pour vous faire sursauter, les médias s’emballent et les histoires d’amour, « les histoires d’amour finissent… »
Tout l’intérêt du dernier  film du réalisateur de « Sex mensonges et vidéo » de 1989, est dans les faux semblants que nous nous attendons à gober : alors comme il se doit il ne convient pas de révéler l’issue de ces manipulations dont nous sommes les complices consentants même si la conclusion s’étire pourtant un peu au bout d’une heure quarante. L’actrice Rooney Mara, mystérieuse, fragile, porte le film, l’emmène au-delà d’un divertissement qui ne laissera pourtant aucun souvenir impérissable.

dimanche 23 juin 2013

Un homme. Albin de la Simone.



La poésie ne niche pas seulement dans les éditions confidentielles autoéditées, elle est dans le dernier CD de celui qui a pris le nom de la rivière de son village de Picardie, et dans la pochette élégante qui l’accompagne.
Cette dernière production agréable, permet de patienter en attendant le prochain Souchon, si l’on aime la légèreté, la modestie, les hommes complexes, l’allégresse qui côtoie la gravité, et l’amour qui n’en finit pas des s’inventer.
Sa sensibilité nous réveille bien plus que des  exhortations péremptoires.
« Et toc un coup du ciel, à nouveau la vie est belle
Pour un oui pour un non, tout va bien pour de bon
C'est la crise, c'est la crise qui m'épuise, rien à faire
C'est la crise, c'est la crise, qui s'éternise, on va s'y faire »
Des chansons d’avril prometteuses mais qui se souviennent d’une fin d’hiver incertaine.
« Le poids de mon nom ridicule,
Ce fantôme à particule,
Qui avance quand je recule
J'espère que tout cela va tenir sur mes épaules,
Pas bien gaulées, pas baraquées»
Le nouveau papa parle de son enfant récemment venu au monde.
Sa voix est douce, et l’éloignement des fracas contemporains ne nous fait pas de mal, tout en nous rappelant qu’on peut mourir en plein air.

samedi 22 juin 2013

Mon traître. Sorj Chalandon.



S’il ne m’avait pas été recommandé je serai passé à côté de ce livre important qui va bien au-delà de la guerre en Irlande.
L’ancien journaliste de Libération qui revient en romancier sait de quoi il parle et il nous interroge : depuis le temps des engagements qu’avons nous laissé en chemin ?
Au pays où il trouve « la bière amère, noire, lourde comme un repas d’hiver »
A Belfast : « Ici encore, tout était en dimanche. Avec cet air épais de tourbe et de charbon. L'odeur de Belfast. En hiver, en automne, en été même, lorsque la pluie glace, je ferme les yeux et j'écoute l'odeur de cette ville. Un mélange d'âtre brûlant, de lait pour enfant, de terre, de friture et d'humide. »
Le luthier parisien dont il décrit avec finesse le travail minutieux découvre l’amitié virile dans les pubs et il apporte son aide à la cause des opprimés catholiques :
«  J’avais un goût de briques, un goût de guerre, un goût de tristesse et de colère aussi. J’ai quitté les musiques inutiles pour ne plus jouer que celles de mon nouveau pays. »
Bien que nous sachions d’emblée de quoi il retourne, nous allons au bout des 216 pages avec avidité tant la construction simple est habile et l’écriture acérée sans froideur, délicate et forte.
L’émotion  alimente une réflexion qui ne nous livre pas tous les secrets pour nous laisser face à des interrogations essentielles sur la culpabilité, le mensonge, l’amitié, l’identité, la trahison…

vendredi 21 juin 2013

Fin de l'Occident, naissance du monde. Hervé Kempf.



L’animateur du site Reporterre " le forum de tous ceux qui imaginent le nouveau monde où l’on arrêtera de détruire l’environnement et qui retrouvera l’idéal de la justice", chroniqueur au journal « Le Monde » était invité par la librairie du Square.
Les titres de ses livres dont certains  furent recommandés par Chavez :
« L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie », « Pour sauver la planète, sortez du capitalisme », « Comment les riches détruisent la planète », « La Guerre secrète des OGM », sont évocateurs.
Face aux questions simplistes du président de la Maison de la nature, il devait se montrer plus nuancé que ne l’annoncent ses propres titres en reconnaissant la force de séduction du commerce et récusant la notion de « faute » toujours présente chez les prêcheurs écolos.
Cependant ses appels à des convergences politiques pour aller vers « une décroissance heureuse » sont pollués par des réflexes durables qui sacrifient aux plaisirs de « bons » mots : «  les boas constrictors que doivent avaler les verts comme autant de saucisses de Francfort ».
Le renvoi de Cohn Bendit comme commentateur de foot sur Canal+ parlent peut être à un public de convaincus mais stigmatise un produit qui fut séduisant.
La dénonciation de Rosanvallon pour cause de défunt club Saint Simon peut paraitre anecdotique mais réduit encore le nombre des accessibles à la convergence ; quant au PS n’en parlons pas : reste le PC dont il semble être le seul à ne pas avoir aperçu l’évanouissement.
Visiblement peu au fait des évolutions ni de l’apport de l’auteur de « La société des égaux » qu’il renvoie à une pensée datant de la guerre froide, il n’en maintient pas moins une condamnation hors d’âge. Il fait douter de la dynamique d’un groupe, devant impulser des changements vitaux , qui risque plutôt la régression comme banquise.
Pourtant le regard est renouvelé sur des constats incontestables : 
les disparités existent bien autant à l’intérieur des pays qu’entre la zone Nord et le Sud.
Dans un monde peuplé et riche de ses capacités techniques, les ressources primaires vont se tarir : qui ne le sait ?
Revisitant des cycles historiques longs jusqu’à la révolution industrielle qui a entamé « la grande divergence » après des millénaires de relative égalité énergétique, l’essayiste explique la suprématie occidentale d’alors par le charbon anglais et le coton américain venant après le lin et la laine de proximité.
Il estime que la technique n’existe pas en soi mais dans un rapport social: la science jadis gouvernée par l’état est entrée dans la logique de la libre entreprise (les OGM).
Les remarques concernant des réalités minorées par les médias, bras armés de l’oligarchie économique et politique, illustrées par les 2 millions de manifestants portugais disparaissant derrière Rigide Fardeau, alimentent un optimisme dans l’issue des luttes sociales qui me semble démesuré.
Les manifestations en Turquie amorcées autour d’un parc menacé de destruction ou au Chili autour des droits d’inscription à la fac ne visent pas uniquement à réorienter la croissance au même titre que les opposants à l’aéroport de Notre Dame des Landes.
Bien que depuis quelques jours le pays de Neymar  secoue les cocotiers.
……………
Dans le Canard de cette semaine :

jeudi 20 juin 2013

Une passion française : la collection Hays.



Après un tour du côté du cimetière de Montparnasse où subsistent des souvenirs de l’universalité artistique de la capitale, il est intéressant, même rétrospectivement, de voir à Orsay les tableaux d’un couple américain qui aimait tant Paris.  
Ces témoignages de « la belle époque » sont mieux mis en valeur que dans leurs appartements du « nouveau monde ».
Les nabis nous enchantent : Bonnard,  Denis, Vuillard.
Leurs compositions originales contribuent à la chaleur de l’intimité des scènes.
Nous découvrons de nouveaux pastels de Degas  déjà très présent dans les collections permanentes.
Les saltimbanques mélancoliques de Fernand Pelez sont très forts.
La princesse de ligne de Paul Helleu a bien du charme.
Les fauves Derain, Marquet rougissent.
Pour des amateurs, au départ, le couple texan a su s’éclairer et reconnaitre aussi Matisse et Modigliani, les impressionnistes étaient trop chers.
« Les Nabis peignent la famille, les amis, la vie quotidienne. Et c'est ce que nous apprécions »a dit M. Hays qui avait commencé sa carrière en vendant des livres au porte à porte, quand il a été décoré par Aurélie Filipetti.

mercredi 19 juin 2013

Art brut. Lausanne.



La Mecque de l’art brut est située au château Beaulieu à Lausanne depuis 1976 avec au départ la donation du pape du mouvement : Dubuffet.   
« Une chanson que braille une fille en brossant l’escalier me bouleverse plus qu’une savante cantate. Chacun son goût. J’aime le peu. J’aime aussi l’embryonnaire, le mal façonné, l’imparfait, le mêlé. J’aime mieux les diamants bruts, dans leur gangue. Et avec crapauds »
Ma première visite avait été un choc, qui m’avait fait placer cette forme artistique au sommet de l’intensité émotionnelle, je viens d’y retourner et retrouver quelques œuvres singulières, magiques, magnifiques :
les lambris de Clément Fraisse sculptés à l’aide d’une cuiller,
la robe de mariée de  Marguerite Sir, réalisée à l’aiguille à coudre avec du fil tiré de draps usagés,
un retable de Verbena en bois flotté,
et ces fleurs étonnantes, si fines, qu’elles en creusent le papier d’application  
Je ne me souvenais pas de Teuscher mais ses traits ondoyants au café m’ont impressionné, comme celui qui prenait ses cheveux pour confectionner un pinceau et d’autres du suc de fleurs comme couleurs, ou leurs excréments.
Cette nécessité impérieuse de s’exprimer, le caractère élémentaire des moyens sont émouvants, et le résultat appelle souvent les adjectifs les plus étonnés.
Ce lieu nécessiterait des heures d’exploration tant sont nombreuses les œuvres présentées (700), tant sont incroyables les destins des auteurs, souvent  placés enfants comme valets de ferme, dont l’origine s’est diversifiée avec l’enrichissement des collections.
Aloïse après avoir été gouvernante, tellement enflammée en religion qu’elle sera internée, coud ses cartons pour présenter un univers foisonnant de princesses.
Ratier anime des sculptures inventives, Krüsi commence à dessiner ses vaches à l’âge de cinquante-cinq ans…
En ce moment, une exposition temporaire consacrée à Deeds aux dessins délicats est plus saisissante que celle consacrée aux mises en scène des personnages de comics américains de Daniel Johnston.
Une vidéo consacrée à Paul Amar qui compose des tableaux de coquillages aux vives couleurs nous fournit un contre-point joyeux bienvenu dans un ensemble où se manifestent surtout des souffrances.

mardi 18 juin 2013

Le monde est chez moi. Kambiz.



Avec le bandeau : « Le Sempé perse », même avec les yeux bandés, j’aurais acheté ce recueil de dessins.
Je n’ai pas été déçu même si le natif de Shiraz est plus porté vers le symbolique que le bordelais. 
Le rappel des dessins qui sont alors titrés au bout des 115 pages n’était pas vraiment indispensable, comme les poèmes qui séparent les trois parties :
la servitude, le détachement, l’envol.
Le trait dépouillé qui rappelle Bosc ou Chaval se suffit à lui-même.
Les arbres, les ailes, les oiseaux, les livres sont des objets poétiques efficaces et quelques  trouvailles élémentaires sont percutantes.
Un pêcheur a tellement péché que sa barque menace de  couler,
devant sa fenêtre murée un homme ouvre des boites de conserves découvrant des étoiles, une lune.
Des douaniers se montrent soupçonneux devant une valise contenant une plume et un encrier : 
ont-ils raison d’avoir peur?

lundi 17 juin 2013

Blackbird. Jason Buxton.



Prix écran junior à Cannes en  2013, il a récolté une moisson de récompenses  au Canada. 
Film pédagogique sans lourdeur sur les pièges des réseaux internet qui peuvent compromettre la liberté des individus alors qu’ils permettent par ailleurs qu’elle s’exprime. Le danger d’images en fragments sur fond de société parano.
La violence contemporaine est montrée sans complaisance en offrant une issue optimiste qui a en général le don d’agacer nos gencives de ce côté de l’Atlantique mais qui est cohérente avec la démarche positive du film.
Un lycéen qui a adopté le look gothique est exclu par d’autres élèves. Il se défoule sur Internet et la police voulant  éviter un nouveau massacre type Colombine va trouver des éléments pour nourrir ses soupçons d’où enfermement préventif et engrenage répressif inquiétant.
Le poids de la communauté, une famille éclatée, l’emprise du conformisme, mais au bout des épreuves, l’amour est là.

dimanche 16 juin 2013

Chanson française. Alexandre Tharaud.


La saison 2013 à la MC2 finit en beauté avec une soirée de gala autour du pianiste classique qui débuta avec Bartabas des collaborations au-delà de son domaine de prédilection et apparut dans le film « Amour » de Haneke.
Le dispositif fait apprécier la variété des invités. Des reprises de chansons de Barbara lient la sauce d’une représentation respirant une authenticité sans tapage.
« Avant que le soir ne se pose
j'ai voulu voir
les maisons fleuries sous les roses,
j'ai voulu voir
le jardin où nos cris d'enfants
jaillissaient comme source claire. »
Juliette qui a déjà travaillé avec le meneur de jeu virtuose rayonne, emporte le morceau grâce à son abattage formidable et  à sa voix ronde et puissante.
« Le vin comme l'amour, l'amour comme le vin,
Qu'ils soient impérissables, qu'ils soient sans lendemain
Qu'ils soient bourrus, tranquilles, acerbes ou élégants,
Je suis sûre qu'il ne faut pas mettre d'eau dedans ! »
Si Dominique A, le plus loué des chanteurs, ne m’avait pas convaincu en CD, j’ai été sensible à sa singularité.
« Je suis venu vers toi un jour où rien n'allait
Je suis venu vers toi parce que tu étais là
Tu m'as pendant longtemps demandé pourquoi moi
Je ne t'ai pas menti je te l'ai toujours dit
Parce que tu étais là »
Je garde toujours beaucoup de tendresse pour Delerm et Albin De La Simone et je me suis senti vraiment gâté de retrouver mes chanteurs favoris ce soir.
« Les nouveaux murs de la maison
Sous la peinture et les faux plafonds
Notre futur en question
Le souvenir de mes vies premières
Troupeaux de moutons de poussières
Mes gravats de célibataire
Et cet enfant qui pleure qui mange
Kilos de lait, kilos de langes
Et tout cet amour en échange »
Je me suis montré attentif à Alain Chamfort que je ne connaissais guère.
Le public était transporté et  s’est déplacé  de l’auditorium au grand théâtre qui avait ouvert son plateau aux circassiens Mathurin Bolze sur trampoline avec Yoann Bourgeois  qui jongle aussi. 
Alexandre Tharaud  acrobatique au piano va payer de sa personne dans une conclusion où la poésie nait de la performance physique. Merci.
Il n’a fait que jouer la musique de « Quand reviendras-tu ? » et depuis me revient :
« A voir Paris si beau dans cette fin d´automne,
Soudain je m´alanguis, je rêve, je frissonne,
Je tangue, je chavire, et comme la rengaine,
Je vais, je viens, je vire, je me tourne, je me traîne,
Ton image me hante, je te parle tout bas,
Et j´ai le mal d´amour, et j´ai le mal de toi, »

samedi 15 juin 2013

Tout ce qui reste de nos vies. Alain Rémond.


Un livre d’Alain Rémond dont je lis avec plaisir les chroniques en dernière page de Marianne après celles de « mon œil » qu’il délivrait à Télérama, ça ne se refuse pas. J’avais adoré Chaque jour est un adieu (2000).
J’ai trouvé cependant que ces 100 pages reprenaient le chemin déjà parcouru des souvenirs familiaux avec la même sincérité, mais sans la fraicheur première. 
« On devrait écrire chaque livre comme si c’était le dernier ».
Pourtant l’entame de cet ouvrage laisse deviner l’impérieuse nécessité de l’écriture.
Sous le hangar d’une ferme abandonnée où s’abritent des promeneurs sous l’orage, des papiers qui sont tout ce qui reste d’une famille ouvrent la réflexion, éveillent les souvenirs.
Est-ce parce que j’avais pris à la lettre  la comptine du mois de juin : « les cahiers au feu, la maîtresse eu milieu »,  que je ne me suis pas laissé envahir par les papiers ?
Alors j’ai trouvé parfois redondante la plainte du mélancolique qui vire hypocondriaque de la préservation de la facture et de la quittance.
Les actes de vente, les livrets militaires, les fiches d’état civil sont des mines, les sources des histoires, mais j’espère que celui qui a su nous faire partager ses tourments avec les cintres suivra les conseils qu’il délivre à son petit fils :
« Pense aux morts mais occupe- toi des vivants »

vendredi 14 juin 2013

Préjudice moral.



Des millions d' €uros pour Tapie victime d’ « un préjudice moral » au pays de Descartes (à gratter):
« non mais allo ! quoi je cauchemarde ! »
Alors que nous devrions demander des indemnités à celui qui cloua son bec à Le Pen lui que nous avions admis dans notre camp qui était celui de Jaurès : il nous a trompés grave !
Il fut un premier symptôme de notre effondrement moral et nous faisons comme s’il avait toujours été pote seulement avec le conférencier de chez Goldman Sachs.
« La vérité rougit les yeux mais ne les crève pas »
J’ai recopié quelques maximes de la sagesse du Burkina Faso aux éditions Jouvence pour les intercaler entre quelques humeurs disparates.
« Indignez-vous ! » le livret  de Stéphane Hessel a connu le succès une saison parce que sa forme brève faisait également appel à un sentiment qui use d’une mèche courte.
Chaque jour nous pouvons sursauter aux injustices, aux manipulations, aux violences, aux gabegies, à la mauvaise foi. Alors nous oublions Cahuzac en quelques semaines, Tibéri depuis des années et DSK nous lasse. Il a eu sa punition : il en est réduit à son entre jambes.
«Si tu ne sais pas où tu vas, sache au moins d’où tu viens »
Le rapprochement avec les années 30 tellement répandu pour  essayer d’éclairer nos années d’avant 14 devrait intégrer quelques circonstances aggravantes.
Les groupes factieux d’alors n’avaient pas encore vu la concrétisation de leurs idées.
Ils ne pouvaient se faire tatouer « Jedem das Seine »  qui figurait à l’entrée de Buchenwald : « chacun reçoit ce qu'il mérite » comme le font quelques skins branchés.
Les extrêmes nous renseignent sur l’état de notre société. Du côté droit s’ils en sont arrivés à tuer, c’est que le climat de haine envers la gauche a été travaillé par tant de hauts parleurs.
La gauche remporte la majorité de suffrages à toutes les élections  depuis des années: ça les énerve et ils ne cessent de gueuler à l’illégitimité de ceux qui ont été élus. Ils ne peuvent croire à leurs cris et perdent  leurs nerfs.
 « Ce qui est vieux a été neuf »
Côté gauche le  mot charisme est devenu courant dans nos conversations.
Je le préfère prononcé à la François Morel avec le « cha » comme « chat ».
Depuis le fin fond des âges démocratiques, l’identité de la gauche s’est forgée dans le refus du pouvoir personnel des rois, des empereurs, des généraux avec tant de personnalités qui ne se sont guère installées au pouvoir comme Gambetta ou Mendès France. 
Pourtant l’exercice du pouvoir par Hollande passe aujourd’hui pour de l’effacement coupable alors que l’Omnipotent  Azimuté qui l’a précédé lassait même son camp : nous aimons les chefs pour pouvoir les critiquer, les vilipender…   
Et quand un tribun à la rouge écharpe, en appelle à une sixième république, lui qui « sait ce qu’il faut faire contre la crise », il n’est pas forcément le mieux placé pour se réclamer d’une tradition de méfiance à l’égard des pouvoirs personnels.
« Qui déteste les étrangers doit commencer par expulser sa mère »
…..
Dans le canard de cette semaine après un dessin de Politis en cours d’article.

jeudi 13 juin 2013

Résonances/raisonnances. 2013.



La formule qui associe peinture et musique s’appliquait cette fois à l’Italie, terre de peinture et de musique s’il en est.
Pour clôturer la saison des conférences aux amis du musée, Catherine De Buzon historienne d’art et Daniel Jublin musicologue ont réuni leur érudition pour nous offrir deux heures de découvertes, de retrouvailles, de plaisir, malgré des reproductions de tableaux aux couleurs parfois saturées et des aléas techniques qui ont fait perdre de l’ampleur à la musique.
Je rabâche volontiers que « la culture c’est retrouver », mais ce soir là, j’ai surtout apprécié des surprises : Vivaldi n’a pas que quatre saisons sous l’archet, et l’étal du boucher de Carrache, arrache.
Inspiré par la thématique ritale, j’aurai bien imité Cavanna qui excellait à sous-titrer des peintres pompiers en jouant avec la Sainte famille de Michel Ange.
Ainsi j’aurai bien fait dire à Marie qui semble refourguer son Jésus à Joseph :
«Tiens occupe t’en un peu, c’est toujours moi qui suis sur la photo avec lui… »
Au pays de Messiaen, les couleurs de la musique ne sont pas que métaphores et si les mélodies suivent des courbes, les sons forment  aussi des architectures. 
La Galatée de Raphaël est sensuelle, l’Atalante de Reni est blafarde lors de sa rencontre avec Hypomène d’une violence saccadée soulignée par un extrait combatif de Monteverdi.
Nous sommes plus familiers de la renaissance italienne que de ses peintres du XIX° qui m’ont beaucoup plu : Morbelli et sa gare centrale, Severini avec une bagarre effervescente dans une galerie marchande, et Quadrone dont un chasseur dit à ses chiens: «  Entrez, il fait froid ».
Le chien de Balla le futuriste a la laisse dynamique et les contemporains Merz et Penone  représentant de l’arte povera frappent fort et poétiquement quand il s’agit de « respirer l’ombre ».
"Avoir le temps d’un arbre, de la pierre, du fleuve, du son, de la lumière, de l’escargot, de l’insecte, la stabilité, l’éternelle durée d’une fleur pour un papillon."
Morricone et Rota les accompagnent à merveille. Et Caresana que je ne connaissais pas sur fond de Masaccio : ça va bien  comme le poing de Zorio avec « Orlando finto pazzo » de Vivaldi.
 Qui d’autre que Pergolèse mort à 26 ans et son stabat mater avec la pietà éperdue de Carrache ?
Et Le Caravage évidemment, sa sainte Catherine et son « manteau de certitude », Masaccio, Rossini le gourmand, Mantegna le sévère, Verdi, Fra Angelico, Scarlatti, Le Titien
E un gelato al limone !

mercredi 12 juin 2013

France culture papier. Eté 2013.



Le trimestriel trouvé à Carrefour en est à son numéro 6. 
Il est bien bon de s’attarder sur des paroles fortes avec des personnes qui parlent comme des livres. Comment ne pas y avoir pensé plus tôt de fixer ces voix sur du papier?
Rocard, avec l’insolence que l’on prête à la jeunesse bénéficie d’un cahier spécial, il évoque son père et porte des paroles toujours aussi exigeantes et décapantes :
« Il vous tombe dessus tous les jours des pulsions de l’opinion sur n’importe quoi et le gouvernement a pratiquement l’interdiction de la négliger [….]  C’est naturellement idiot, dangereux et inefficace mais c’est une créance médiatique sur le pouvoir qui est un empêchement de gouverner sérieusement. »
Danielle Sallenave qui plaide pour la transmission évoque Cocteau, à qui l’on demandait ce qu’il emporterait si le feu prenait dans sa maison, a répondu : le feu ! Elle : la transmission de la langue.
Le récit de la vie de Walt Disney artiste et entrepreneur est passionnant, retraçant un parcours exceptionnel sans négliger le côté sombre.
Les articles autour de la thématique principale de la clandestinité ne sont pas tous périphériques comme: Cartouche le bandit populaire, un détective privé et un ouvrage clandestin  de sciences de la vie du XVII°. 
Il est aussi question d’un prisonnier chinois qui a vécu l’enfer de la torture, de l’ « odyssée des bas fonds » de sans papiers, de la « black économie » ( 2/3 de l’économie au Bénin est informelle) et du rappel de séminaires secrets d’intellectuels à Prague pendant la guerre froide.
Les sujets graves ne manquent pas : les enfants sorciers du Bénin sont parfois protégés, comme en témoignent des femmes travaillant dans un hôpital, mais il arrive pour des dents qui poussent d’abord sur la mâchoire supérieure,  qu’un bourreau fracasse la tête d’un petit contre un arbre.
Les témoignages d’un guetteur, d’un charbonneur des quartiers Nord de Marseille sont intéressants, désespérants et inattendus puisque l’article s’interroge : « pourquoi les dealers vivent chez leur maman ? »  
Il faut bien un entretien avec Resnais ou un retour vers Blondin suiveur de 28 tours de France qui rappelle que « l’homme descend du songe et a tendance à y retourner » pour  souffler un peu. 
Les dernières pages finissent sur un sourire par l’équipe des « papous dans la tête » :  Dans une bibliothèque, la vie de certains romans et pas des moindres avec une « Madame Bovary » jamais contente qui se confie à « Guerre et paix » chez monsieur Duval, un dormeur. L’étagère finit mal, car de toutes les façons « la bêtise consiste à vouloir conclure », et ça c’est de Flaubert.

mardi 11 juin 2013

Guide du mauvais père. Guy Delisle.



Trop court.
La surprise est au rendez vous à chaque moment de ses histoires éducativement incorrectes, qui font éclater de rire à tous coups.  
Papa, va-t-il oser ? Oui, tout le temps et au-delà.
Il oublie à plusieurs reprises de mettre sous l'oreiller l’argent de la petite souris qui vient récupérer la dent tombée de son fils et se sert de sa distraction pour dire que si les parents jouaient le rôle de la petite souris, ils n’auraient pas oublié la pièce !
La vie familiale du dessinateur canadien apparaissait dans ses chroniques originales et éclairantes en Birmanie, à Jérusalem, à Pyongyang ; cette fois le décor a disparu, les enfants sont au centre.
Ils ont bien de la chance d’avoir un papa qui a autant d’humour même si parfois il les fait hurler de peur ; c’est si bon de crier, de se déculpabiliser de ses manquements et de rire de soi.