dimanche 30 avril 2023

Optraken. Le Galactik Ensemble.

Après avoir pris connaissance de la signification d’« Optraken », l'étrangeté de ce moment offert par la MC2, son originalité, restent intactes: 
« tire-bouchon en norvégien, il désigne aussi un mouvement de repli des jambes à skis, qui permet un saut contrôlé, évitant le décollage au passage d’une bosse ».
Le spectacle des cinq circassiens, original, surprenant, pétaradant, suscite rires et angoisses.
Il commence dans un dispositif astucieux où des paravents mobiles découvrent et camouflent les personnages d’abord statiques puis s’animant en milieu glissant dans une profusion d’objets affolés.
Les artistes sur le qui-vive échappent aux boulettes jetées depuis les côtés et aux sacs de farine s’abattant lourdement sur le sol depuis les cintres.
Le plafond leur tombe sur la tête et la poussière les recouvre, les corps malmenés esquivent et chutent, le sol est jonché de débris.
Le spectacle est éminemment politique quand un escogriffe en slip dont le dos est siglé « 49.3 » essaye d’éviter les projectiles sur fond d’écriteaux valant surtout pour leur rime riche : 
« Les retraites c’est comme la galette on la veut complète ».
Cette correspondance entre la scène et ce qui se déroule dans nos rues, permet-elle d’induire ce que j’ai pris pour des allusions à la situation en Ukraine où les protagonistes n’échappent pas aux balles avec tant de grâce et d’efficacité que les acrobates sur le plateau de la MC2 ?

samedi 29 avril 2023

Du côté de chez Swann. Marcel Proust.

Je viens d’accéder enfin au fin du fin de la littérature, avec une certaine fierté d’avoir surmonté quelques à priori concernant les fameuses phrases interminables décrivant un milieu mondain d’un autre siècle.
La forme arborescente, hors du commun, intense, va fouiller au plus vif les passions, les caractères, les faux-semblants, la vérité, au cœur de la mémoire où l’imagination rend plus coloré le réel.
Les notations fiévreuses qui embellissent les lieux, les intermittences du cœur, transcendent les descriptions d’une belle époque parmi tant de beautiful people semblables aux nôtres si lointains et, si proches :  
« … il la suivait de ses yeux attendris, qui enfilait courageusement la rue Bonaparte, l’aigrette haute, d’une main relevant sa jupe, de l’autre tenant son en-tout-cas et son porte-cartes dont elle laissait voir le chiffre, laissant baller devant elle son manchon. » 
La tentation d’accumuler les citations peut vite s’épuiser, tant sont abondantes les occasions d’enchâsser de pertinentes observations teintées d’humour, 
« Qui du cul d'un chien s'amourose,
Il lui parait une rose. » 
de revenir sur des périodes déjà abondamment renseignées, 
« Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir. »
de s’enivrer d’une langue tellement précise et délicate. 
« …se substituait en moi le rêve contraire le plus diapré, non pas le printemps de Combray qui piquait encore aigrement avec toutes les aiguilles de givre, mais celui qui couvrait déjà de lys et d’anémones les champs de Fiesole et éblouissait Florence de fonds d’or pareils à ceux de Fra Angelico. » 
L’essentiel se mérite. 

vendredi 28 avril 2023

Mépris.

Les débats dans la plus politique des nations -dit-on- ne me semblent guère politiques, ni dans le sens de l’intérêt général ni dans la prospective. Nous sommes plutôt abreuvés d'intéprétations à l'arrache sur les caractères forcément mesquins des protagonistes, loin d’une psychologie fine et éclairante.
Je ne vais cependant pas bouder mon plaisir à tremper dans les chamailleries.
Les médias portent une attention soutenue aux enjeux climatiques mais desservent la cause écologique et féministe en donnant exclusivement la parole à Sandrine Rousseau. Elle devient la meilleure propagandiste du barbecue tant elle se montre méprisante à l’égard de ses contradicteurs qui n’ont qu’à la laisser parler pour emporter le morceau.
Par contre si Mélenchon ou Le Pen, les Roux et Combaluzier des extrêmes, avaient appelé à « casser la baraque » les réactions indignées n’auraient pas manqué. 
Mais quand c’est Berger, l’intouchable de l’heure, qui proclame cette intention, avant de s’excuser quand même,  «  ça passe crème ». 
Il regrette «  une crise démocratique » qu’il alimente, se montrant intransigeant en dénonçant l’intransigeance des autres, excitant le mépris envers le « méprisant de la République ». 
Les appels à la négociation n’ont pas manqué, et quand elle arrive : les syndicats logent à l’« hôtel du cul tourné ». Des politiques ont obtenu des modifications mais ne se sont pas montré plus fiables que ceux qui ont regretté la retraite à points sans le défendre quand elle était à l’ordre du jour.
L’avis du conseil constitutionnel devait être la date limite, les cheminots CGT ne l’entendaient pas ainsi, alors le chef  de la CFDT, premier syndicat de France, les a suivis. 
Le courage appartient au passé d’une organisation qui avait connu des dissidences du temps de Maire, Notat, Chérèque ; est-ce que cela avait permis une clarification profitable au réformisme ?
Je ne vais pas insister dans la pochade envers Rousseau la petite femme et Berger l’homme modérément grand se réservant la place du prudent quand sonnent les casseroles qu’il a contribué à mettre en mains.
Le refus de toute réforme va avec l’affichage du mot Révolution : «  la retraite en CE1 » tagué sur le mur d’un lycée pourrait faire sourire, rappelant des slogans surréalistes d’un autre siècle, mais révèle aussi la volonté de sortir de l’Histoire, de s’abstraire du monde, d’affirmer une ignorance de son appartenance à l’Europe. Qui se souvient que celle-ci nous bien aidé pendant la pandémie et la crise qui en suivit ?
Innocents à jamais, cachés derrière leurs écrans saturés de cœurs en bandoulière, câlinant leurs chatons virtuels, confinés dans leur égo, les déambulateurs du soir s’accordent  parfois une sortie ludique sur les boulevards ou rue des Martyrs. Le jour c’est pour les vieux, et les scrutins c’est trop tôt le matin, un dimanche !
Victimes toujours, la haine envers leurs représentants n’éclabousse-t-elle pas le jugement porté à eux-mêmes ?
« Dieu n'existe pas. S'il existait, depuis le temps que je dis des horreurs, il m'aurait déjà foudroyé. Ou Dieu est un mythe, ou il est sourd, ou c'est du mépris. » Francis Blanche

jeudi 27 avril 2023

Herboriser au musée. Catherine de Buzon.

La conférencière en visioconférence chez les amis du musée de Grenoble sait bien que 
« nul n’a jamais eu besoin de personne pour s’émerveiller devant la Nature » 
mais que « les tournesols sont autrement tournesols depuis Van Gogh ».
Baudelaire convient bien en surimpression d’un tableau d’Ernest Quost, « Fleurs de Pâques » : 
« La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers. »
« Vertumne »
par Giuseppe Arcimboldo peut aussi illustrer Marcel Proust : 
« Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux. » 
La nature rencontre la culture par le regard singulier des peintres, parfois.
Verlaine organise  cet exposé : « Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches… » Dans « Le jardin des Hespérides » Frédéric Leithon,
les pommes d’or de l’immortalité portent en leur centre comme une étoile visible dans une coupe à l’horizontale, celle de l’esprit dans la chair.
Mais ce fruit peut être objet de discorde quand Minerve, Junon et Vénus demandent au troyen Pâris de remettre une pomme d’or à la plus belle. « Le Jugement de Pâris » Sandro Botticelli.
En croquer, apporte la connaissance et la liberté, en abuser approcherait du mal quand le ver est dans le fruit« Adam et Eve », Hans Holbein.
Ne pas confondre une pomme et sa représentation, les mots et la chose : Magritte.
Qui dit « pomme » dit Paul Cézanne, « Nature morte aux pommes et aux oranges »,
alors que la « Nature morte, pichet et fruits » de Picasso is "still life".
Dimitri Tsykalov
a participé  en 2010 à l’exposition du Musée Maillol : Vanités : C’est la vie ! 
Le raisin était sacré du temps de Dionysos dieu grec « aux trois naissances »,
alors que la fonction était plus sociale quand les romains diffusaient la culture de la vigne dans leur empire.
Le vin est au centre de « 
La Bacchanale des Andrians » Le Titien.
À Saint-Étienne-du-Mont, « Le pressoir mystique » voit le sang du Christ  mis en tonneaux.
« Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. »
dit celui-ci dans la chapelle Suardi près de Bergame où Lotto a peint ses fresques des murs au plafond.
« Les raisins »
de Juan Fernandez El Labrador vont bien avec la générosité de Mucha.
Quant au lys marial et royal, il serait une goutte de lait d’Héra tombée sur terre au moment de « La Naissance de la Voie lactée » de Pierre Paul Rubens.
Au moment du « Jugement Dernier » de Rogier van der Weyden,   
il représente la parole qui sauve face au glaive qui juge.
Le soir tombe, 
« Carnation, Lily, Lily, Rose » de John Singer Sargent enthousiasma le public.
Si on n’a pas le temps d’en faire un roman,  la rose, reine des fleurs, ne perd pas de sa délicatesse en se multipliant : « La vierge au buisson de roses » Martin Schongauer.
Mais la mère pleure quand
« L’enfant Jésus se blesse à la couronne de roses »  
de Fransisco Zurbaran.
Osons le rapprochement de « La Rose de Malmaison » tellement française avec Joséphine de Jean-Louis Victor Viger du Vigneau et
« Le jardin enchanté »
so british par John William Waterhouse.
Lawrence Alma-Tadema montre les convives de l’empereur romain ensevelis sous les fleurs, « Les roses d'Héliogabale ».
 
Le « Jardin de Roses » de Paul Klee est moins étouffant :  
« L'art ne reproduit pas le visible, il rend visible ».
Des branches : celle d’olivier que porte « La colombe de la paix » de Picasso durera ce que durent les guerres. 
Le land art est branché https://blog-de-guy.blogspot.com/2017/09/nils-udo-gilbert-croue.html
« L’Amandier en fleurs »
de Vincent van Gogh a perdu parait-il de ses nuances, 
il reste un bel annonciateur du printemps
et « L'arbre des fées » de Richard Doyle permet à l’enfant émerveillé 
d’avoir 200 occasions de rêver.
Le balai, assemblage de branchages, occupe le premier plan dans « Vue d’intérieur » de Samuel van Hoogstraten
Après avoir évoqué l’extraordinaire aussi bien que le plus ordinaire, l’arbre quand il devient généalogique, nous relie dans le temps à notre lignée et
dans le « Dessin du système nerveux »  par André Vésale révèle notre arborescente intimité.
« Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches.
Et puis voici mon cœur qui ne bat que pour vous.
Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches. »

mercredi 26 avril 2023

Royan # 3

Ce matin rien ne presse, nous disposons de plus de temps pour nos ablutions.
Lorsque nous sortons,  J. en jardinage dans ses bordures nous abreuve en renseignements intéressants qui influenceront les visites de la journée.

Dès le départ, nous suivons ses conseils en commençant par la visite de TALMONT- estuaire Gironde sur la route de Mescher. Un grand parking à l’entrée du village prédit un lieu touristique  très fréquenté.  Effectivement la bourgade proprette possède beaucoup de petites  boutiques d’artistes ou d’artisanat populaire: savonnettes, souvenirs.  Dans les ruelles, les maisons anciennes me font penser à celles de l’île de Ré avec leur façade blanche et leurs volets bleu / gris, devant lesquelles s’élèvent des roses trémières.

Mais le détour vaut surtout pour l’église romane, son cimetière attenant et ses murailles dont les pieds plongent dans l’eau. La fragilité de la falaise inquiète sur l’avenir de l’église  aux pierres bien endommagées.

Nous pénétrons à l’intérieur caractérisé par une grande sobriété. Puis de l’église, nous empruntons la promenade aménagée au-dessus de la Gironde, avertis par des panneaux des dangers d’effondrements.

En s’éloignant un peu nous pouvons distinguer des carrelets d’évidence plus authentiques que le village trop léché où j’aurais aimé croiser plus d’habitants ou apercevoir des marques de la vie quotidienne alors que nous n’avons vus que des touristes. Nous nous accordons un café tardif à l’entrée du village dans un restaurant destiné à nos semblables.

Nous récupérons la voiture sur le parking (3€), et nous passons par  Mescher  en délaissant ses grottes troglodytes.

 Nous nous dirigeons vers le musée de Royan, il est situé à l’intérieur de l’ancien marché Pontaillac, dans un quartier tranquille avenue de Paris, où le stationnement est facile.
Une heure convient bien à la découverte de ce petit musée consacré à l’histoire de la ville de la préhistoire à nos jours à travers des affiches, des photos, un cabinet de curiosités. Une seule grande salle contient toutes les expositions à parcourir chronologiquement.
Nous nous intéressons aux études et vieilles gravures du phare de Cordouan, aux dangers maritimes surmontés par les pilotes de la Gironde, aux images témoignant de la période dorée des débuts de la station balnéaire,
mais aussi à l’histoire des guerres mondiales à Royan et à la présence de Picasso.

Nous nous contenterons d’une restauration rapide à un rond-point, dans une boulangerie type Marie Blachère avant de nous déplacer vers LA TREMBLADE.

A cause de la chaleur, nous n’avons guère d’énergie pour visiter le village, bien que nous ayons remarqué de jolies halles de petite taille et peut-être passons nous à côté d’autres édifices dignes d’intérêt.
Nous faisons un crochet quand même par l’Office du tourisme à la recherche d’infos et plans concernant le secteur pour des balades  en voiture avec clim, abandonnant le circuit proposé à pied. Nous partons vers Ronce-les-bains et poursuivons jusqu’au phare de la Coubre (un phare « paradis » puisque sur le continent).
Nous l’atteignons en logeant des plages signalées tout au long de la route, accessibles par des sentiers tracés à travers la forêt domaniale, ce qui entraine des files de voitures garées sur le bas-côté de la chaussée.
Dans le parking ombragé de 300 places près du vieux  phare, l’enchevêtrement et la quantité des voitures montrent la présence importante des vacanciers. Nous dégottons une place  près de l’enceinte du phare. Il se présente comme une grande cheminée percée comme un hautbois, de forme conique, blanc en bas et rouge au deux tiers en haut. Une petite queue patiente pour monter les 300 marches, nous n’insistons pas, persuadés que nous n’éprouverions pas le même plaisir qu’à Cordouan.