D’ Arcimboldo en passant par Dali jusqu’aux contemporains
annonçant le transhumanisme, le conférencier devant les amis du musée de
Grenoble a richement illustré les sens multiples donnés aux images où se carambolent
intentions de l’auteur et celles du spectateur, conscient et inconscient.
Un triptyque d’un anonyme flamand ouvrait le propos avec un phylactère annonçant:
Un triptyque d’un anonyme flamand ouvrait le propos avec un phylactère annonçant:
« Plus nous voudrons
te mettre en garde plus tu auras envie de sauter par la fenêtre »
Loin du street art qui refait la tapisserie de nos rues et
trompe nos façades, nous sommes invités à ouvrir les rétables, à mirer les
métaphores, à aller chercher dans un wikidico ce qu’est une métonymie, à voir
des toiles comme surfaces à projeter les rêves, et mesurer les déplacements du
sens et ses condensations.
Il importe de chercher où est la grand-mère dans une image
d’Epinal.
Où est la sortie chez Cornelis Escher, le graphiste géométrique
néerlandais ? L’Alhambra.
L’homme résiste à l’animalité, terrifié par les pièges du
malin, tellement humain, dans L’enfer de Memling.
Comme dans celui de Bosch à la créativité troublante avec ce jardin des délices aux monstres
hybrides.
Nous avons révisé Holbein, dont le crâne est une
signature, Holbein
signifie « os creux ».
Avec « A Still Life of Fruit »
(nature morte aux fruits) de De Heem, le meilleur est sur la table et les
couleurs chatoyantes crèvent quelque mur d’intérieurs calvinistes qui ne
s’habillaient pas que de tableaux religieux. Mais tout est vanité, le ver est
parfois dans le fruit.
Arcimboldo, directeur des fêtes et pourvoyeur
du cabinet de curiosités de Rodolphe II, prince de la maison d’Autriche, exprime
une vision ambitieuse où l’homme intègre le monde pour le valoriser dans une
« anthropomorphisation de la nature ». Même si Hérode par un anonyme
dans la manière de son maître ne porte pas le même optimisme.
La Côte escarpée du bougon Degas a allure humaine, sensuelle.
Derrière les apparences apparaît l’inconscient, Magritte
dont la mère s’est noyée, mise sur le double sens au cours de sa quête lyrique
quand la mer se confond avec le ciel dans La mémoire.
La femme au miroir de son compatriote belge Paul Delvaux
se consolera-t-elle de ses angoisses en
allant voir au-delà des apparences ?
Dali exprime souvent son désir de fusion
narcissique et son rejet des angoisses (paranoïa critique), c’est un virtuose
de la duplicité des images : 6 sujets peuvent se deviner dans L’énigme
sans fin.
Et si Ernst a fait surgir tant de monstres dans ses
paysages ruiniformes que reste-il du monde dans son Europe après la pluie ?
Dans la quête de soi-même, les rituels repris des crânes
de Bornéo peuvent se rapprocher
des grimaces de FX Messerchmidt, (XVIII°), L’homme
de mauvaise humeur,
ou du cerveau d’un obsédé vu par Gilles Barbier : Anatomie
trans-schizophrène.
L’ironie fournit une alternative à la gravité.
L’ironie fournit une alternative à la gravité.
Roland Dorgelès avait attaché un pinceau à la queue d’un âne
avant d’écrire un « manifeste de l’excessivisme » et intitulé le
tableau « Coucher de soleil sur l’Adriatique » signé Boronali (Aliboron).
La figure de l’animal était souvent péjorative, mais en ces
temps sceptiques où certains veulent abolir la frontière entre les espèces,
l’hybridation est fascinante, la transgression un vertige.
En 1668 Charles le Brun avait remis à l’honneur la
physiognomonie avec des visages sensés exprimer le tempérament.
Les louves de Leah Brown surgissent sur les dépouilles de la
féminité
Patricia Piccinini remet en question les
limites de l’humain et de l’esthétique, nos concepts de normalité.
Liu Xe propose dans une série intitulée « We are The World », des
personnages hybrides.
Les Garçons bouchers de Jane Alexander, née à Johannesbourg, sont pleins
d’animosité et son Infantry menaçante.
Orlan, pardon, ORLAN, a subi une vingtaine
d’opérations de chirurgie esthétique pour marquer sa volonté de ne pas vouloir
« être un mais tout ça », elle a payé de sa personne.
Avec ces greffes, ce désir de dépasser notre humaine
condition, n’est ce pas l’éternelle tentation originelle : devenir
Dieu ?
« Le rêve de
l'homme augmenté est celui d'un homme diminué, et content de l'être. Il se
projette en cyborg pour se dispenser de devenir humain. Il veut une
intelligence artificielle parce qu'il n'a pas commencé à penser. Il est fasciné
par le futur parce qu'il ne sait pas s'émerveiller devant le premier venu,
devant l'événement d'une naissance. » Fabrice Hadjadj
La Porte de l'Ogre
au parc des monstres de Bomarzo.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire