Le conférencier devant les amis du musée de Grenoble s’est
attaché à nuancer l’opposition souvent mise en scène http://blog-de-guy.blogspot.fr/2014/03/ingres-vs-delacroix.html
entre réaction et modernité en reprenant la formule d’Henri Foncillon,
historien de l’art, pour caractériser l’auteur de « La grande odalisque »
: « le romantique du classicisme».
Degas le collectionnait, Man Ray, Léger et Matisse ont fait
savoir tout ce qu’ils lui devaient.
Jean-Auguste-Dominique est né le 29 août 1780 à Montauban
dont le musée qui lui est consacré est fermé pour réfection.
Le cartel de cet « autoportrait » réalisé
à 24 ans porte les dates de 1804 et 1850, c’est qu’il modifie sans cesse ses
productions. Même devenu sénateur, couvert d’honneurs, le vieux monsieur
continuera à copier les anciens : « j’apprends ».
Son père franc-maçon, artiste « touche à tout »
est son premier formateur. Après des études à l’académie de Toulouse, il
rejoint le plus grand atelier d’Europe, celui de David.
Il réalise les accessoires du « portrait de madame
Récamier », commandé à son
maître, en bonne place au Louvre, bien qu’inachevé.
Avec « Les Ambassadeurs d’Agamemnon et
des principaux de l’armée grecque, précédés des hérauts, arrivent dans la tente
d’Achille pour le prier de combattre » il gagne le prix de Rome à sa deuxième tentative. Le sujet
érudit met en valeur la culture de l’artiste et sa maîtrise technique.
L’ambassade d’Ulysse auprès d’Achille retiré dans sa tente sera réussie.
Dans la même veine « La Maladie
d'Antiochus » met en scène le prince inguérissable jusqu’à ce
qu’un médecin comprenne que la cause de la maladie qui a du mal à se déclarer est
là : il est amoureux de la deuxième femme de son père.
Il réalise des portraits avant de partir effectivement à
Rome, mais si le genre lui parait secondaire, les commanditaires sont prestigieux.
Bonaparte a aimé « Bonaparte, Premier
consul » inspiré de Gros,
mais Napoléon a trouvé trop
frontal « Napoléon sur son trône », quelque
peu « Jupitérien ».
« La famille Rivière » est livrée en trois tableaux de formats
différents :
Le père dans un cadre carré, viril, traité avec la précision d’un
Holbein se tient devant une gravure de « la vierge à la chaise » de
Raphaël déjà cité dans un détail du tapis de l’empereur ci-dessus. Un cahier de
musique figure également sur la table, en hommage à Mozart - l’expression
« le violon d’Ingres » n’est pas usurpée - et un livre de J.J.
Rousseau.
Madame est dans un ovale,
la demoiselle porte gants et boa, devant un
paysage raphaëlique. L’étrangeté qui se dégage de la toile n’appelait tout de
même pas le cruel sobriquet « bilboquet » donné à la jeune fille qui
devait décéder un an plus tard.
Le public ne fut pas seulement dérouté par l’érotisme troublant de « Jupiter
et Thétis » au chromatisme original qui s’accorde avec la pureté
des lignes modifiant la nature : le bras de la belle est
démesuré.
Destiné au palais du Quirinal pris au Vatican, et prévu pour le roi de
Rome « Le songe d’Ossian » a tout du romantisme :
poésie fantastique et atmosphère lunaire. Le poète gaélique fut remis à la mode
par un écrivain qui avait écrit des poèmes soit disant redécouverts :
l’escroquerie somptueuse donne une occasion d’évoquer de crépusculaires
ambiances.
Il s’adonna également à la « peinture troubadour »: « Paolo
et Francesca », les amants assassinés sculptés aussi par Rodin figuraient
dans l’enfer de Dante.
Au moment de la chute de l’empire, il perd des commandes de
l’état mais après avoir emménagé à Florence après Rome, il triomphe à son
retour à Paris.
"Le portrait de Monsieur Bertin" au reflet flamand
d'une fenêtre sur le bras du fauteuil,
représente pour Manet « le
bouddha de la bourgeoisie, repue, cossue, triomphante ».
Il peint baronnes et princesses mais souvent les reflets
dans les miroirs sont impossibles, ainsi avec « Madame Moitessier »
Pour « La Princesse de Broglie », il convient de mettre en regard
une « étude de nu » qu’il va, en fidèle à l’école davidienne,
habiller par la suite.
Théophile Gauthier voit sous l’armure « palpiter le sein de la jeune vierge » avec « Jeanne d'Arc au sacre du roi Charles VII ».
Le vert prédécesseur de Picasso rompit deux fiançailles et se maria deux fois.
Celui pour lequel on compta six muses lui rend hommage en « copiant le
copieur ». Il n’a pas eu peur de l’ « Odalisque » aux
vertèbres surnuméraires.
Réalisé à 82 ans, « Le bain Turc » cite
plusieurs œuvres antérieures dont « La baigneuse Valpinçon »
du nom du commanditaire. Cette toile achetée par un parent de Napoléon III
effaroucha sa femme recroquevillée dans la bigoterie devant les infidélités de
son mari ; il rendit le tableau. Après avoir subi des
transformations jusqu’à cette forme en « tondo », celui-ci fut acheté par Khalil-Bey à qui
appartint un moment « L’origine du monde » de Courbet.
Ingres qui pensait que le dessin était la probité de l’art a
poussé bien des barrières traditionnelles en ne respectant pas forcément ce
qu’il prônait.
Oui, un très grand peintre, parmi les plus grands que la France a produit.
RépondreSupprimerJe suis heureuse de le découvrir aussi... bon vivant, disons.
On sent qu'il aime/a aimé les femmes. Cela se dégage bien de ses tableaux.
Il s'en dégage une sensualité qui est beaucoup moins tourmentée et coupable que dans l'art de Fantin Latour.
J'ai passé des heures à rêver devant un tableau de Madame de Moitessier qui appartient à la National Gallery à Washington. La dame est habillée de noir, et se dégage contre des tentures cramoisies. Très beau portrait d'une très belle dame.
Les deux portraits ci-dessus sont de Madame de Moitessier ? Jeune et moins jeune ?