lundi 11 février 2019

La mule. Clint Eastwood.

Papy passe de la culture des lys d’un jour au transport de drogue et se réconcilie avec sa famille qu’il avait négligée.
Film à propos de la vieillesse : une vieillesse comme ça : ça va ! Quelques nanas par deux de préférence et bien peu de scrupules sur le contenu des sacs qui lui sont confiés.
Mais il convient pour rappeler la légende de l’acteur cinéaste, de se montrer inébranlable face à des méchants méchants et rétif face aux envahissants téléphones portables.
Le road movie teinté d’humour, de nostalgie, est agréable à suivre, en écoutant de la musique avec Clint au volant dans les lignes droites; il n’a jamais eu un PV de sa vie, une prouesse admirable.    

Debra qui commente souvent sur ce blog m'a fait parvenir cet article: 
 Il s'agit du dernier film de Clint Eastwood, un film testament en quelque sorte, fait par un cinéaste auteur avec une filmographie suffisamment étoffée pour lui permettre de se citer lui-même.. (je ne suis pas une grande connaisseuse de la filmographie d'Eastwood. Le dernier film que j'ai vu fut "Sur les routes de Madison", une histoire d'amour fulgurant entre deux êtres : une femme d'origine italienne immigrée aux U.S., vivant dans un petit coin du Middle West bien tranquille, en famille de classe moyenne, avec une vie modestement/modernement moyenne, mais une soif d'autre chose plus grand dans sa vie de femme, un homme photographe, citadin, marginal, cultivé. Ces deux-là vivent un amour passion l'espace d'un weekend qui transforme leurs deux vies, avant de se séparer pour reprendre le cours de leurs vies respectives. Très beau film.)
Eastwood incarne, et raconte l'histoire d'un vieux père/mari/homme marginal qui refuse de se coucher, et veut durer debout.
Earl, à plus de 70 ans, et 12 ans avant le début supposé des événements de l'histoire, est un vieux charmeur horticulteur qui vit pour ses fleurs, des lys qui fleurissent un jour, et puis se fanent. Il a passé sa vie à bichonner des créatures de pure grâce, éphémères, et fragiles, mais emplies de beauté.
Il a fait son devoir en défendant son pays dans la guerre de Corée (tout comme mon père, d'ailleurs), et il est ancien vétéran, fréquentant d'autres vétérans qui n'aiment pas trop qu'on ridiculise et dévalorise les services qu'ils ont rendus au pays dans le temps, même si c'est avec de bonnes intentions toutes dégoulinantes.
Son travail, en vraie passion, l'a tenu debout, et il s'y est dévoué pendant sa vie d'adulte, délaissant femme, fille... famille, quoi...qui lui font bien sentir, avec une amertume acariâtre, à quel point il n'a pas été à la hauteur de leur amour...Elles lui en veulent toujours d'avoir choisi son travail plutôt que leur amour...
Ce travail l'a fait "louper" la cérémonie de mariage de sa fille qu'il devait donner à l'autel, mais qui est restée en plan (manifestement, Earl n'a pas eu de fils, mais de filles. Détail très important.).
Bref, Earl a fait ses choix dans son existence, et sa famille est passée derrière.
Le jour où Internet a raison de son commerce des fleurs, il doit mettre sa clef sous la porte, et trouver une solution, et c'est là qu'il commence à faire la mule pour un cartel de drogue, ignorant dans un premier temps ce qu'il transporte.
Earl aime conduire, et sur de longues distances : c'est son côté cowboy moderne qui aime tracer les routes, sans jamais avoir de P.V.
Et il faut avouer, qu'à plus de 80 ans, il est une mule assez improbable POUR TOUT LE MONDE, gangsters ET flics, qui ont de terribles préjugés pour des gens convaincus d'être o combien.. réalistes dans notre monde, et semblent penser que les vieux sont faibles ET débiles DE NATURE !
Earl va transporter une quantité de coke impressionnant pour ses nouveaux employeurs, prenant progressivement conscience de ce qui se passe.
Et il va gagner une fortune en contrepartie, qu'il dépensera à renflouer l'association de Vétérans, à aider la communauté, à s'acheter un nouveau pick-up tout rutilant, à racheter son commerce des fleurs, et sa maison.
Son contact avec le monde de la drogue va le transformer, ET transformer ses employeurs, dans un premier temps. Ce vieil homme dur à cuire va adoucir les moeurs barbares des nouveaux jeunes barbares, pour un temps.
Plusieurs histoire s'enchevêtrent dans le film, et malfrats et justiciers sont dépeints avec finesse et complexité dans des séquences où nous voyons un jeune malfrat s'ouvrir à une vision plus complexe du monde, alors qu'un flic submergé par son boulot entrevoit la pente savonneuse où mène l'oubli de la famille dans l'exercice d'un métier passionnant et prenant.
Je précise qu'Earl n'est pas du tout un saint, et que même à 85 ans passés, ça ne lui déplaît pas de se trouver en compagnie de belles filles qui lui offrent leurs services, mais le film est plus que pudique sur la nature de ces services, et nous en sommes soulagés.
Et à la fin, la rédemption arrive pour Earl, qui a "sacrifié" sa famille, mais qui regagne l'amour des siens... sur le tard.
Pour Eastwood, le pardon est possible, même tard, et après une vie de fautes, et cela nous donne de l'espoir...
Et.. il y a un happy end pour un vieil homme de 85+, dont le corps est tout noué, tatoué, pas beau, avec que des restes fugaces de la beauté virile qui fut la sienne.
Un happy end où Earl finit debout... ET LIBRE, aussi libre qu'on puisse être à 85 ans, dans le monde qui est le nôtre.
Un très grand moment de cinéma humaniste.

2 commentaires:

  1. Oui, j'ai envie de le voir, mais j'ai peur...
    Je l'avais tellement aimé dans "The Bridges of Madison County"... Tellement.
    On prêche bien mieux qu'on pratique, n'est-ce pas ?
    On prêche d'autant mieux qu'on n'arrive pas à pratiquer, peut-être.
    Ainsi va le monde. On ne va pas fouetter des chats pour ça.

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  2. Je l'ai vu hier soir, et je suis encore sous le choc.
    Un immense film testament, qui traite avec finesse de ce qui me travaille maintenant que je commence à être une vieille femme, que je commence à sentir mon âge, et savoir que le temps devant moi est moins conséquent que le temps derrière. Ça change tout...
    Eastwood dépeint le sort d'un marginal dans un pays où l'individualisme est un credo.. "national", mais où la marginalité n'est pas si bien tolérée que ça.. DANS LES TETES, qui sont formatées par des fichus stéréotypes, comme on le voit bien. "On" n'a peut-être pas le "droit" d'être raciste, mais ridiculiser les vieux, et bien, ça passe en Amérique...
    L'enjeu de la relation entre hommes/femmes, conflit égal à lui-même depuis qu'Enée "abandonne" Didon pour continuer son chemin... d'homme qui ne veut pas, et ne va pas, s'asseoir pour regarder sa bien-aimée dans les yeux 24h/24, et fonder Rome, est très présent dans le film, et Eastwood montre une réconciliation familiale qui préserve tous les intéressés, et surtout... Earl en tant qu'homme qui refuse de vivre dans une cage douillette, avec les gentilles poules autour de lui qui le bichonnent, MAIS A QUEL PRIX ??
    (Ironie de la fin où Earl est plus "libre" à sa manière que dans n'importe quel autre contexte...)
    Mixité sociale, et entre les générations, grâce à Earl qui fait le liant, et rassemble les uns et les autres à sa manière.
    Je vais revoir le film.
    Il est plus que plaisant à mes yeux. Il est un défi bien réalisé pour nous donner de l'espoir, et j'en ai besoin, moi...qui me sens bien plus proche d'Earl à certains moments que de Mary, même si... quand je ne suis pas un chat, je suis un chien.
    Oui, Mary doit s'appeler "Mary" aussi... tu peux sentir ça ? (J'espère que je ne me trompe pas... Eastwood est un grand homme.)
    Les paysages de ma prime jeunesse m'ont donné le mal de pays, mais je m'en remettrai, comme toujours.

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