vendredi 17 mars 2023

Hubert.

Nous ne croiserons plus celui qui sillonnait l’agglomération en tous sens, été comme hiver.
Comme nous avions connaissance du point de départ et d’arrivée de l’inlassable cycliste, nous savons que ce n’est pas qu’une silhouette qui s’efface du voisinage.
Un homme est parti, une « belle personne », un homme libre. 
« Cette existence qui est la nôtre est aussi éphémère que les nuages d'automne. » 
Une citation cueillie sur les chemins que tu arpentais,  peut nous rassembler, le temps de marquer tout notre respect pour toi le sage, irréductiblement indépendant.
Quand l’Eternité pointe son nez, j’hésite entre le tutoiement de la vie pressée et les mots à majuscule.
Tu avais estompé ton prénom : Umberto, et tout le monde savait qui était Hubert.
La solennité d’aujourd’hui ne contredira pas une vie souriante du plus populaire des voisins,à la rencontre de chacun de nous dans la diversité de nos caractères et de nos opinions.
Nous avons partagé des moments de rire, d’indignations ou de rêves, de la vie de tous les jours et des mouvements de la planète.
Depuis certains escrocs obstinément dénoncés jusqu’aux bonbonnes de gaz hilarants qui témoignaient à la fois d’une société qui s’étourdit et ne sait pas réparer, ces registres relevaient du colibri extincteur. Le recueil des bouchons d’amour n’était pas anecdotique.
Faire sa part : le citoyen exerçant ses responsabilités rend dérisoires les déplorations systématiques.
La convivialité cultivée chaque jour au-delà d’une soirée d’été n’était pas que produit à consommer, elle nous a rendu plus polis.
Il n’est pas commun qu’à la sortie des garages nous soyons amenés à citer quelques personnes avisées de nos connaissances tels Camus ou Hugo, après que tu n’aies pas renoncé de rappeler à l’ordre gentiment les radios truffées de publicité. 
Du tri de nos poubelles aux cathédrales, aux constructions en piécettes, de celles que les SDF te cédaient.
Tu as rendu fertile le sable en de belles arabesques colorées pour des mandalas de toutes tailles pour petits et vieux, dispersant le plus indestructible des quartz pour accorder l’immensité des temps géologiques au souffle fulgurant d’un instant.
Ta spiritualité ne t’éloignait pas du monde, au contraire, rien d’austère ni de pontifiant, une grande tolérance, des doutes à partager plutôt que des certitudes qui éloignent.
Lorsque les souvenirs des moines de Tiberine rejoignent les mots du Bouddhisme :  
« On peut allumer des dizaines de bougies à partir d'une seule sans en abréger la vie. 
On ne diminue pas le bonheur en le partageant. » 
la Bible peut nous réunir comme la poésie en ces moments où il est question de vie et de mort: « Le sable de la mer, les gouttes de la pluie, les jours de l'éternité, 
qui peut les dénombrer ?  
La hauteur du ciel, l'étendue de la terre, la profondeur de l'abîme, 
qui peut les explorer? »
Hubert, nous cherchons.
Les châteaux des royaumes enfantins appellent des images de fantômes et s’associent à des constructions éphémères, mais quand nous reviendrons au pied du Néron, au château, nous garderons ton souvenir.
Quand la fenêtre ouverte sur la nuit, une petite clochette sonnera, nous penserons à toi.
Promis, ce n’est pas sur Internet que j’ai trouvé mon ultime citation, mais dans un livre pour enfants qui évoque la croyance au Père Noël qui serait comme le son d’un des grelots de l’attelage de son traineau :
« Au début, la plupart de mes amis entendaient la clochette, mais au fur et à mesure que passaient les années, elle se tut pour eux tous.
Bien que je sois devenu vieux, la clochette sonne toujours pour moi, comme pour tous ceux qui y croient encore. »  

1 commentaire:

  1. Très bel hommage, Guy. Je me demande si j'ai connu Hubert, mais n'en suis pas sûre. Ton mémorial me fait regretter de ne pas l'avoir connu, ou connu plus.
    Ecce homo, comme on dit. Quoi de plus grand ?
    "On ne diminue pas le bonheur en le partageant" OUI, je suis une croyante fervente dans cette parole, comme dans la nécessité de chercher à voir la beauté de notre monde, humain ou pas. Qui cherche... trouve.
    Des banalités, peut-être, mais ton texte n'est pas banal.
    Merci.

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