lundi 28 juin 2021

Nomadland. Chloé Zhao.

Il n’y a pas plus américaine, à mes yeux de français, que la réalisatrice d’origine chinoise qui parle à tout le monde dans un langage cinématographique original.
Elle nous avait déjà régalés par son empathie, chez les derniers cow-boys
et chez les indiens 
sans l’ombre d’un factice romantisme. 
Cette fois il s’agit d’un « road moovie », on ne peut plus « road moovie », échappant aux facilités du genre et cependant d’une grande beauté, sans faux pittoresque. 
L’actrice principale Frances Louise McDormand ne parle pas beaucoup, mais nous interroge profondément. 
La lenteur du film permet à la poésie d’infuser et les morceaux de country viennent naturellement. 
Les conditions sociales dans le milieu des vagabonds en van a beau être très rude, l’entraide, la vitalité qui se retiennent de cette heure cinquante nous donnent une belle image de l’humanité, loin des jérémiades et des violences. 
Ce film sur la mémoire, la dignité, la liberté est d’une grande richesse.
A la sortie cette inscription sur un mur: 

4 commentaires:

  1. Bon, tu m'as donné envie de voir ce film, ce qui est un exploit. J'ai eu le livre entre les mains, et ai lu la moitié à peu près, avant d'estimer que j'en avais déjà fait le tour.
    Je suis ambivalente sur l'individualisme américain maintenant... conduit-il à des phénomènes tribaux ? Est-ce que je veux vivre dans une tribu ? Je ne crois pas.
    C'est quoi exactement le "factice romantisme" ?
    Il me semble qu'on conspue l'idée de montrer n'importe quel sentiment en ce moment. Je me trompe ? Ce serait.. impudique ? lâche ? de laisser apparaître ses sentiments ? C'est ça ?
    Pourtant ça me fait un peu marrer cette idée d'attaquer le romantisme... à moins que ce soit une manière d'attaquer LA FOI dans l'amour romantique ? Une conduite de désabusés, désenchantés ? Je vois cela à l'oeuvre dans la société. Cela m'attriste.
    Cela me fait marrer qu'on attaque le romantisme quand j'entends des débordements... hystériques ? du matin au soir dans les médias de masse. Décidément, on ne sait pas plus ce qu'on est que ce qu'on fait...

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  2. Depuis sa chaise de camping, elle savoure la vue de paysages sans les filtres habituels. Le romantisme a souvent abusé de grands mots, ici pour vivre sa vie il faut qu'elle s'arrache, qu'elle accepte des conditions vraiment pas confortables: c'est pas fleufleurs le long d'un fleuve tranquille.

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  3. J'ai vu le film hier soir. Il m'a beaucoup ému, et m'a donné le mal de pays. Je ne pensais plus pouvoir le ressentir, le mal de pays...
    Des scènes qui me sont allées droit au coeur : la confrontation entre les deux soeurs, l'une vivant une vie de bourgeoise relativement aisée, SOUS UN TOIT, alors que l'autre a toujours été excentrique, pas conformiste. Le sentiment de l'une, celle qui s'est sédentarisée ? d'être rejetée au loin. Oui, je comprends ça. Ces gens vivant de ventes immobilières sont de braves gens essayant de s'en sortir comme ils peuvent dans le cauchemar du monde tout marchandisé, quand l'argent, et le travail monnayé vont TROP LOIN.
    Et l'autre, qui ne peut plus dormir avec un toit au-dessus de la tête... mais qui récite la poésie de mon cher William, (comme je sais le faire, moi aussi, et fais...), cher William, une des dernières valeurs communes de la civilisation anglo-saxonne, que les paysans, les pauvres gens connaissaient et aimaient autant, sinon plus que les gens aisés, il tombe dans l'oubli à l'heure actuelle.
    Mais je ne pourrais pas vivre comme Fern, même si je dois passer du temps dans l'année sans toit au dessus de la tête pour dormir. Non, passé un certain stade, on ne peut plus s'attacher, et on se fait emporter comme un tumbleweed, une de ces boules qu'on trouve dans le désert, et qui roule sur elle-même en se déplaçant au gré du vent.
    Non... je n'envie pas le sort de Fern, même si elle a au moins accès à une chaleur humaine qui fait cruellement défaut en France en ce moment, de mon point de vue...

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  4. Ce matin, je reviens ici pour mon commentaire, car à quoi bon s'indigner sur un torchon obscène, finalement ? Ce serait indigne de s'indigner sur un petit torchon obscène (qui, en passant, contribue à sa manière à dévaloriser l'image de l'homme en Occident, mais que ne ferait Hollywood maintenant pour dévaloriser l'image de l'homme, je me le demande...) quand ici, il y a de la matière, noble, et bonne.
    Il me semble que ce que veut éprouver Fern est la liberté, et elle veut l'éprouver d'autant plus qu'elle sent à quel point la civilisation dans laquelle elle vit fait tout pour réduire l'Homme à un degré d'insignifiance et d'inconséquence dont je parle souvent ici. Elle éprouve ce que j'éprouve aussi, qui aiguise ma mélancolie tous les jours.
    Bernard Charbonneau, que tu peux lire sur "La Grande Mue", a vécu une vie marginale et improbable à faire sa recherche pour essayer de comprendre du plus près comment l'Homme... construit sa propre prison, pour se mettre bien au chaud, bien au confort, même pour pouvoir éteindre les neurones, se sentir porter par le flot, tout en battant de manière hystérique le tambour de la liberté (mais... pas la bonne, d'après moi, en tout cas).
    Charbonneau s'attache à... l'état. Il y voit l'origine de notre très grande aliénation moderne, et de notre sentiment d'impuissance.
    J'en parle très mal. Charbonneau est un penseur poète. Il en parle beaucoup mieux.
    Un des éléments de sa biographie qui me touche le plus est cette chose dont je rêve avec une nostalgie... romantique ? Enfant il est parti avec d'autres faire des camps scout, dans la nature (qui n'était pas comme "notre" nature maintenant, certainement).
    Tout comme mon papa chéri, qui est parti faire les camps scout dans la nature, et qui a appris comment se débrouiller pour faire du feu, trouver de la nourriture. Lui aussi est parti dans une nature qui n'était pas encore une cage dorée avec des panneaux de signalisation partout pour nous empêcher de nous...perdre.
    Charbonneau parle des amitiés rugueuses qui voient le jour dans les camps comme ça. Quand les hommes (oui, je crois que c'est plutôt ça...) se retrouvent pour vivre ensemble le quotidien, hors des villes, discuter le soir autour d'un feu de camp ? de ce qui importe le plus pour eux, de ce qui les fait carburer, vivre, qui leur met encore des étoiles dans les yeux.
    Ces camps me font rêver (rêve romantique ?). Rêver de camaraderie, (comme la camaraderie que trouve Fern en vadrouillant dans son camping car ?). La camaraderie n'est pas une valeur... féminine. Je ne sais pas s'il y a de la camaraderie entre femmes. De toute façon, j'ai toujours été... une mauvaise femme, quelque part. Au mieux, il pourrait peut-être y avoir une forme de camaraderie entre l'homme et la femme, à certains moments ? mais je ne sais pas. Difficile à dire. Ce que je sais, c'est que j'aime la camaraderie. Beaucoup.
    Cette camaraderie me fait penser à ce qu'il y avait entre Achille et Patrocles ; Alexandre et Hephaistion, et que les rois du porno en mal d'érection ont besoin de tourner en érotisme pour pouvoir... bander. Hollywood, une grosse machine pour faire bander ? (ou... débander...)

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