vendredi 18 juin 2021

La société malade. Jean-Pierre Le Goff.

Celui qui sait si bien dénoncer les baratins n'a pas eu besoin d'aller bien loin pour trouver un titre à cette analyse de la période que nous vivons où les faiblesses de l’état ne se résolvent pas avec une verticalité à la fois réclamée et critiquée.
Le pouvoir : « gère tant bien que mal une société morcelée, impatiente et caractérisée par une mentalité victimaire d’ayant-droit. » 
Mais est-ce parce que je suis d’accord avec lui tout au long des 280 pages que je regrette  de moins retrouver l’originalité vigoureuse du philosophe par contre toujours aussi clair ?
Oui le confinement « a accentué fortement des tendances au repli individuel et au refuge face à un monde plongé dans la confusion et le chaos. » 
Ayant été lui-même atteint par la maladie, sa confiance en la science, ses attentes, pour n’être pas conventionnelles en ce moment, sont réconfortantes. 
« Les limites de la science et de la technique que certains considèrent comme l’incarnation d’une volonté prométhéenne de dominer la nature se faisaient sentir cruellement. » 
Le rappel des 30 millions de victime du SIDA est utile, et significatif l’effacement de la religion quand « se rendre dans un lieu de culte » n’a pas figuré comme motif d’autorisation de sortie alors que « n’étaient pas oubliés les besoins des animaux de compagnie ». 
Sa critique des médias et de « l’hôpital-entreprise » est juste comme est mesurée sa position face à la restriction des libertés et le mélange des genres entre science et politique.
«  La perte du « sens commun » ne concerne pas seulement une partie de la classe politique, mais nombre de journalistes militants et d’intellectuels qui ne s’embarrassent guère des «  réalités empiriques » pour faire valoir leurs propres conceptions. »  
A l’abord d’une conclusion qui n’oublie pas les bouleversements de nos héritages culturels, je me dis que ce livre illustre bien une phrase de Tocqueville qui  
«  soulignait que le despotisme nouveau se chargerait d’assurer leur jouissance [des citoyens] et de veiller sur leur sort » avant d’ajouter : 
« Que ne peut-il ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ? »

1 commentaire:

  1. Ce matin, j'ai écrit à une amie que je trouve que nous sommes encore agités par des peurs millénaristes.
    Je songe à la panique qui nous a collectivement saisi autour du passage à l'an 2000, et l'idée que les ordinatueurs s'effondreraient, nous laissant seuls et désemparés devant la nécessité de recommencer à penser pour et par nous-mêmes, et pas... déléguer la pensée à nos machines ?
    C'est fou comme l'homme est doué pour essayer de se défausser de sa pensée sur... une machine, un autre homme. Tout est bon pour déléguer. Décourageant.
    Ceci dit... le concept de réalité empirique me semble un peu flou. Curieusement, si nos scientifiques, nos hommes politiques passaient plus de temps dans la grande littérature, ils auraient encore les moyens de relativiser un certain nombre de choses que les scientifiques du passé, MOINS RANGES DANS LEURS PETITES BOITES ETANCHES DE SCIENTIFIQUE, pouvaient apprécier.
    Mettre tous ses oeufs dans un panier, ou une classification étanche est la ruine de la pensée.
    C'est vrai que j'ai... profité de ce confinement pour me mettre encore plus en mode "refuge". Je n'en ai pas honte. Quand vous remarquez que le rouleau compresseur veut vous écraser, et avoir votre peau, si vous avez un grain de bon sens, vous fuyez. (Y compris des lieux... désincarnés et désincarnant susceptibles de faire rouleau compresseur...)
    Oui, la lecture de Tocqueville est encore salvatrice pour avoir des points de comparaison pour comprendre ce que nous vivons maintenant. Tocqueville est un comparatiste, et celui qui ose comparer n'affectionne pas le fait de mettre le monde dans de petites boites étanches.
    Pour les limites de la science...
    Il ne faut pas faire de mauvais procès à la science. La nature même de la science est d'avancer... par controverse, un peu comme l'Eglise avançait... par le biais des controverses, dans le temps. Il est non seulement normal mais souhaitable que les gens ne soient pas d'accord dans les milieux scientifiques. Il s'agit de la liberté d'expression, on pourrait dire.
    Ce qui n'est pas normal, c'est que nos dirigeants politiques balancent des protocoles élaborées pour gérer UNE CRISE SANITAIRE, des protocoles qui ont déjà fait leurs preuves par le passé, en faveur de conduites complètement nouvelles, inexpérimentés, avec la logique "à nouveau virus, il faut un nouveau protocole".
    Ça... c'est la ruine de la science, et de la raison. Pourquoi bazarder des procédés qui ont déjà fait leurs preuves par le passé en faveur du nouveau... à tout prix ?
    D'où on voit que le besoin du nouveau... est une religion.
    Serait-ce en rapport avec notre.. NATALITE EFFONDREE, des fois ?...
    Il n'y a pas plus "nouveau" que... le "nouveau né".
    Il faut être un peu tordu ? pour s'imaginer que l'effondrement de la natalité est un souverain bien pour l'humanité... et il faut raisonner seulement en regardant les chiffres brutes...
    Se pourrait-il que nous soyons en train de nous féliciter pour quelque chose qui est le symptôme de notre très grand malheur... et fourvoiement ?
    Les Anciens pensaient que l'effondrement de la natalité était le signe de la peste. Le signe... que l'Homme avait fauté contre Dieu. Ils pensaient... le contraire de nous, maintenant, on dirait... Nous, nous nous félicitons de l'effondrement de notre natalité.
    Mais c'est un fait qu'il n'y a rien comme un nouveau né pour incarner l'a-venir...

    RépondreSupprimer