jeudi 3 avril 2014

De la parure à la nudité.

Serge Legat aux amis du musée ouvre sa conférence avec la photo peinte d’Arielle Dombasle dévêtue parmi les fraises de Pierre et Gilles. Sous des couleurs venues de Bollywood chatoyantes et sirupeuses, la lumière rayonne comme dans l’iconographie religieuse.
Et c’est là, que tout au long de l’histoire, le nu se met en scène avec Adam et Eve et les représentations de la crucifixion.
Au VI° siècle dans le manuscrit des Évangiles de Rabula, le Christ était revêtu de sa tunique entre les larrons ne portant qu’un linge de pudeur; pourtant  lors de ce châtiment les suppliciés étaient entièrement nus.
Sept siècles plus tard, le grand crucifix de Cimabue avec à ses extrémités Marie et Saint Jean au chagrin manifeste rompt avec les codes byzantins, tout comme le périzonium, le linge couvrant le sexe divin en sa moderne souplesse. La forme et la surface de ce pagne de pureté permet les datations.
Plus tard, Giotto, premier peintre moderne d’après Malraux, l’a rendu transparent.
La renaissance redécouvre les sculptures antiques, le corps se réaffirme et notre passage terrestre devient digne d’intérêt. Après la symbolique de la pureté, la nudité s’affiche héroïque. L’art  illusionniste joue désormais à l’illusion de la vérité.
Une gravure du quattrocento, par Pollaiolo représentant un combat d’hommes nus sous toutes leurs faces, est remarquable.
Bien plus célèbre, le David de Michel Ange, dont j’ai surtout perçu cette fois la concentration, n’est pas un éphèbe contrairement à celui de Donatello, déhanché.
Notre étonnement  et notre admiration de voir au plafond de la Sixtine, http://blog-de-guy.blogspot.fr/2013/03/les-fresques-de-la-sixtine-de-lharmonie.html, tous ces corps dont la vérité anatomique avait été nourrie par  l’observation au cours de dissections de cadavres sont ravivés par les polémiques récentes où l’église catholique se montre bien plus frileuse que ne l’étaient les papes commanditaires autour des années 1512. Et dire que Michel Ange qui préférait la sculpture ne voulait pas travailler sur des fresques ! Merci Jules II  d’avoir insisté. Ainsi l’étincelle de vie qui passe de Dieu à Adam, idéal mâle, nous électrise encore.
Comme Cézanne plus tard, ses représentations de femmes s’inspiraient de modèles masculins.
Léonard de Vinci,  lui, n’avait pas l’homosexualité refoulée, et son homme de Vitruve du nom d’un architecte de l’Antiquité aux proportions parfaites est la mesure de toute chose, il est au centre de l’univers. L’homme nu représentait la vertu, forcément céleste, alors que la femme avec plus ou moins d’atours restait sur notre si jolie terre. 
Si  Florence a excellé pour représenter les hommes, Venise privilégie la femme : Raphaël  peint ses trois grâces sous tous les angles comme le permet également un miroir au moment de la toilette pour Bellini. Pourtant Botticelli et sa blonde Vénus naissante est florentin. Celle ci est debout contrairement à bien d’autres couchées comme celle du Titien qui nous regarde dans les yeux, son petit chien fidèle endormi à ses pieds.
Avec Danaé sous une pluie d’or, du Tintoret à Klimt en passant par Rembrandt, et tant d’autres Vénus rondes de Rubens à Vélasquez, le nu masculin se marginalise.
Les odalisques esclaves vierges, au dernier rang social, servaient les concubines du harem, celles de Boucher à Picasso en passant par Ingres, nous enchantent de leur sensualité.
La maya desnuda de Goya était recouverte de la vestida et Lacan avait commandé un paysage à André Masson pour couvrir une forêt non épilée figurant sur l’"Origine du monde" de Courbet.
Par contre le tableau de l’école de Fontainebleau où Gabrielle d'Estrées a le sein pincé par une autre femme torse nu symbolise sa grossesse, il n’a rien de libidineux ; la maitresse à qui Henri IV avait promis le mariage tient un anneau à la main. Les répliques contemporaines de ce duo laissent entendre quelques lesbiennes relations pendant qu’un trio stylisé en noir et blanc du photographe Robert Mappelthorpe permet de résumer plaisamment  la thématique de la soirée.

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