J’aime ce trimestriel pour la variété de ses points de vues
qui courent sur 200 pages, même quand je ne suis pas d’accord avec Marie Despléchin dans la persistance de
sa lutte après l’abandon du projet Europa City de Gonesse. Ainsi dans un numéro essentiellement consacré à la banlieue,
un entretien avec Hélène Carrère
d’Encausse secrétaire perpétuel de l’académie française trouve parfaitement
sa place :
« J’ai été
élevée dans l’idée inverse du communautarisme : qu’on ne doit pas
s’enfermer avec les siens, mais se fondre dans la France »
avant qu’une chanson d’Alonzo soit expliquée par Bertrand Dicale :
« RS4, pas de
plaque
Ma gadji c’est une
Bagdad
Kalash sous le clic
clac…
J’ai bu quatre packs
La belle vie le’
zin »
Cela deviendrait presque insolite de lire des auteurs exprimant
leur amour de la France:
« c’est le meilleur
pays pour être malade » Susie
Morgenstern
L’intérêt des articles est rehaussé par une qualité
d’écriture d’écrivains renommés.
Daeninckx dénonce
le clientélisme à Aubervilliers mais se requinque à Fontenay-sous-bois où il a
déménagé.
Leïla Slimani
apporte des arguments pour se déconnecter des réseaux :
« une personne
qui passe sa journée devant son écran est-elle plus « connectée » que
quelqu’un qui cultive son jardin ? »
D’anciens ministres continuent leur lutte, Corine Lepage pour la biodiversité,
Jean Louis Borloo prône la création
d’une cour d’équité territoriale.
Les cartes commentées par Le Bras mettent en évidence des
réalités surprenantes :
« la proportion
d’ouvriers s’accroit d’autant plus que l’on s’éloigne des grandes
villes. »
« L’image
négative de la banlieue est très ancienne » comme un historique le rappelle.
Une ancienne prof dans le 93 change
d’établissement, mais elle ne met pas en
cause les gamins,
Azouz Bégag
évoque :
« la niaque de
ceux qui n’ont rien à perdre ».
D’un jardin entre les immeubles à Saint Denis
à des écoles Simplon dans les quartiers en difficulté qui
proposent des formations aux métiers du codage informatique,
les claviers solidaires de l’association Emaüs Connect,
des associations de Sénégalais qui financent des
réalisations dans leur villages,
un village d’innovation éducative dans les quartiers Nord de
Marseille
et l’industrie textile se remettant en marche du côté de
Roubaix
donnent des motifs d’espoir.
Jaenada raconte
plaisamment une rencontre avec des lecteurs à Saint Omer lieu de son dernier
roman,
et Kaouther Adimi dans sa
nouvelle « Le pêcheur de langouste » nous emmène loin, quoique...
Près de la centrale de Bugey, sur les photos le village de
Saint Vulbas est paisible.
Si je n’ai pas apprécié les articles à sensation de Régis Jauffret, dont il est difficile
de distinguer le vrai du faux, la réalité étant suffisamment surprenante,
la BD
de Mathieu Sapin nous remet dans de bonnes dispositions.
David Djaïz faisant l’historique de l’amour dans la société
française est passionnant, alors que Laurent
Theis nous remémore Madame de Staël dont son ennemi Napoléon avait concédé:
« elle restera ».
« Les jouissance
de l’esprit sont faites pour calmer les orages du cœur »
Arthur Frayer-Laleix
est toujours aussi régalant et éclairant, cette fois il a passé sa semaine chez
un pharmacien, après les pompiers du numéro précédent.