dimanche 27 novembre 2022

L’Après-midi de Leyde. Thierry Vincent.

Le théâtre en appartement a bien du charme quand la compagnie « En Aparté » vous invite à partager une soirée avec Gustav Mahler et Sigmund Freud.
Nous sommes en bonne compagnie avec comme acteur amateur jouant le fameux psychanalyste, un pro de chez psy tout à fait crédible et son comparse tout aussi impliqué, alors que l’auteur de la pièce est également de la profession.
La rencontre eut lieu pour de vrai entre le musicien qui accompagne le film « Mort à Venise » et l’un des phares de notre civilisation en ce début du XX° siècle, elle nous offre les délices d’une conversation, mode devenu rare quand d’autres soliloquent « en apartheid ».
Nous révisons une variante d’un « Freud pour les nuls » présentée d’une façon vivante.
Le sage a en face de lui un passionné venant de recevoir la lettre ardente à lui adressée par l’amant de sa femme : geste on ne peut plus freudien comme ne peut le dire le thérapeute express.
Le bon sens de l’aubergiste qui reçoit les deux viennois aux Pays-Bas rejoint les pertinentes remarques du maître.
L’enfance est révisée, la judéité évoquée, le rapport à la musique développé, et surtout les relations aux femmes, ce « continent noir ».
Au cours des échanges après la représentation, j’apprends que la mise en sommeil des prédispositions musicales d’Alma  Mahler objet de la visite de Gustav avait été formalisée dans leur contrat de mariage. 
Un an après cette rencontre, il mourut après avoir composé sa neuvième symphonie comme Beethoven; ce chiffre maléfique pour lui l'avait hanté toute sa vie. On ne sait pas qui a payé la consultation dont la facture a été envoyée deux ans après.
Cette pièce donne aussi envie d’en savoir plus à propos de la vie extraordinaire d'Alma, l’absente si présente, d'écouter le musicien et de ne pas suivre forcément ceux qui cherchent à abattre ou déconstruire nos totems.
Malher: « Je vois que vous vous imaginez que la peinture ou la littérature sont plus accessibles à l’interprétation que la musique. En réalité vous vous trompez : l’élément rationnel ne constitue que le voile qui recouvre toute œuvre d’art, le fond est quasiment inaccessible. Il y a là un élément proprement mystique où réside le mystère de toute création. Un élément attractif puissant, un appel essentiel. Goethe en faisait l’Éternel Féminin. »
Freud : « C’est ici qu’il y a une différence essentielle entre vous et moi, Docteur Mahler. Ce que vous appelez l’élément mystique est un tour de passe-passe par où nous tentons de ruser avec l’inconscient. La vérité est tristement triviale. Ici, que vous le vouliez ou non, on retombe à nouveau sur la mère, votre mère, et le culte que vous lui vouez... »

1 commentaire:

  1. J'approuve le critique, la critique perspicaces... ;-)
    Merci.

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