Bien des auditeurs de la conférence de Christian Loubet aux
amis du musée avaient en tête des images du beau film avec Salma
Hayek dont il a été dit le plus grand bien, mais comme tous les films
concernant les peintres, celui-ci ne pouvait présenter beaucoup de peintures
pour des questions de droits.
Il fut beaucoup question de peinture, elle se revendique
d’une culture populaire indigène et d’un engagement politique révolutionnaire total,
mais
impossible d’échapper à la biographie : 150 autoportraits qu’elle a
réalisés attestent du lien évident entre son œuvre intense et sa vie de
douleurs.
La peinture comme thérapie, comme résilience :
depuis l’arbre généalogique où son père photographe juif allemand anti fasciste
figure à côté de sa mère sur fond de paysage mexicain jusqu’au tableau total « Le
marxisme redonnera la santé à la malade » avec Karl qui étrangle Sam et elle qui jette ses béquilles.
La petite polio
voulait devenir médecin, mais après
un accident d’autobus, elle a
commencé à peindre, allongée sur son lit où un miroir est au ciel. Elle ne
voudra pas être couchée dans son cercueil, en 1954, au bout de 47 ans de vie ;
son dernier mot fut « Viva la vida ».
L’abdomen traversé
par une barre de fer, le bassin brisé, elle a subi 15 opérations et 3
avortements.
Mariée à Diégo Rivera
de 21 ans son ainé, séparée puis remariée, il fut l’homme inconstant de sa vie,
même si elle entretint des relations amoureuses avec des femmes ou Léon
Trotsky :
« On m’a amputé
la jambe il y a six mois qui me paraissent une torture séculaire et quelques
fois, j’ai presque perdu la tête. J’ai toujours envie de me suicider. Seul
Diego m’en empêche, car je m’imagine que je pourrais lui manquer»
Sa peinture naïve, simple, d’un réalisme souvent brutal,
projette un onirisme qui aurait pu convenir aux surréalistes. Elle, dont Breton
qui l’a accueillie à Paris disait :
« C’est une
bombe avec un ruban autour »
a méprisé les parisiens Picasso ou Kandinsky qu’elle a
rencontrés :
« J'aimerais
mieux m'asseoir par terre dans le marché de Toluca pour
vendre des tortillas que d'avoir quoi que ce soit à voir avec ces connards artistiques de Paris »
Elle ne fut pas
fascinée non plus par l’Amérique du Nord où Diégo rayonnait. De cette période elle avait laissé
seulement « Ma robe suspendue là bas ». Un drapeau mexicain à la main dans « Autoportrait
à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis » elle a choisi
entre le monde où règne le machinisme et celui de la régénération, de la
fécondité tropicale.
Les couleurs vives
peuvent convenir aux rêves et depuis le pays où les squelettes sourient, quand
un oiseau tient dans son bec un ruban, c’est au dessus d’une scène de crime dont le meurtrier a dit
que les coups mortels qui ensanglantent même le cadre n’étaient que « quelques petites piqûres ».
Diégo à ce moment là commençait une relation amoureuse, cette fois, avec sa
belle sœur Christina.
Au dessus de ses sourcils en ailes d’oiseaux, Diégo est
parfois représenté, lui qui possède le troisième œil, celui du génie. Ses
tableaux sont souvent foisonnants de références exhaustives alors que la
solitude éclate dans tant d’auto portraits à la troublante beauté.
Même sous les couronnes de fleurs un regard grave persiste.
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