jeudi 14 avril 2022

Sorolla. Catherine De Buzon.

Le tableau « La mère » attendait les auditeurs qui avaient rempli la salle de conférence des amis du musée de Grenoble. Le bonheur familial fonde ici le doux miracle de la vie. Nous allions pouvoir mieux connaître « le peintre du soleil », celui des pêcheurs et des rois.
« Joaquín Sorolla »
, prononcer « Soroya », est recueilli par un oncle serrurier après que ses parents ont été emportés par une épidémie de choléra, deux ans après sa naissance en 1863. Pendant l’adolescence, il suit des cours du soir puis ceux des Beaux-arts de Valencia.
Il fait la connaissance du photographe Juan Antonio García del Castillo dont il épouse la sœur « Clotilde » qui deviendra sa muse et la mère de leurs trois enfants.
La lumière perce déjà dans une de ses premiers tableaux : « Naturaleza muerta ».
Dégagé du décoratif  avec une « Marine »
il se coltine au « grand genre », la peinture d’Histoire :
«
 Le Cri du marchand de paille »  est celui de Vicent Doménech, premier opposant à l’occupation napoléonienne en1808. L'artiste obtient une bourse pour aller à Rome.
« El Padre Jofré, defendiendo a un loco »
souligne le rôle pionnier de la ville de Valence dans le traitement des fous.
Il passe par Paris. « Café de Paris » s’autorise à ne pas cadrer les pieds comme dans les estampes japonaises ou en photographie. En  1889, il revient en Espagne.
Dans la « Vente de melons » la lumière transcende les couleurs.
Tous les âges sont représentés dans « La famille de Ségovie », harmonieuse.
Par contre « Une autre Marguerite » a noyé son enfant.
« La Traite des blanches »
est un sujet  tout aussi social que
« Et en plus elles disent que le poisson est cher ! »
La consécration s’affirme avec ses toiles au bord de la Méditerranée, l’air est léger et le vent puissant dans « Retour de la pêche : halage de la barque »
« Pêcheurs de Valence »
La composition originale de « Cousant la voile » met dans la lumière le travail des humbles.
« Le transport du raisin » brille de tous ses sucres,
alors que «  L’emballage des raisins secs » se fait loin du folklore 
des mantilles et des éventails.
Dans un contexte où l’Espagne vient de connaître l’humiliation lors de l’indépendance de Cuba, le « Triste héritage » où la chair est misérable représente-t-il l’état du corps social ?
En 1906 une exposition personnelle propulse le peintre des plages sur la scène internationale : « Instantané » exprime la manière vive de l’artiste et rappelle l’histoire familiale.
 
« Je ne pourrais pas du tout peindre si je devais peindre lentement. Chaque effet est si passager, il faut le peindre rapidement. »
« Les Trois Voiles » 
: la lumière est intègre et la vie simple avec
« Le bateau blanc » .
Dans la scansion des obliques apparaît la
« Petite fille sur la plage ». 
« L'on ne discute pas avec un homme qui vous fait voir, d'un bon coup de poing dans les yeux, comme on dit, "trente-six chandelles". On se contente de l'éblouissement que vous cause cette prodigalité de luminaires » Arsène Alexandre.
La mer devient villégiature, « Clotilde et Elena parmi les rochers de Jávea »
« Promenade au bord de la mer »
.
« Courir sur la plage »
appelle la mythologie quand les enfants s’envolent,
« Après le bain »
si charmant, se passe de commentaires.
Il ne se contente pas des portraits familiaux, « Maria »
ou l’adorable « Teresita » voire
«  Femme nue »
perle dans son écrin,
il réalise le « Portrait d'Alphonse XIII en uniforme de hussard »
ou celui de « Mr. Taft, Président des Etats-Unis d'Amérique ».
Il va consacrer dix ans de sa vie à la réalisation d’une « Vision de l’Espagne » dont les dimensions  impressionnantes 3,50 m sur 70 m imposent celles du bâtiment pour «The Hispanic Society of America ».
Malgré cet éloignement, sa renommée ne s’est pas estompée. Au moment de ses funérailles en 1923, une querelle éclate quant au lieu de sa sépulture, finalement c’est à Valence qu’il sera enterré.Un musée à son nom est installé à Madrid dans la maison aux trois jardins qu’il avait acquise. Artiste de pleine nature, il considérait l’atelier comme « un garage, un endroit pour stocker des images et les réparer, jamais un endroit pour les peindre. »

1 commentaire:

  1. Magnifique, éblouissant. Merci de m'avoir fait découvrir ce peintre que je ne connaissais pas. Un génie.
    Un peu l'esprit de l'impressionnisme français avec cette nécessité de peindre vite...l'urgence, même.
    La photo est déjà là, dans l'histoire, poussant le peintre dans ses retranchements. L'art du portrait peint ne va pas y survivre, il me semble.

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