Comme les peintures aimables et joyeuses de Renoir sont
exposées jusqu’au 23
novembre 2014 à la Fondation Gianadda à Martigny (Suisse), Alain
Bonnet a présenté aux amis du musée de Grenoble, et commenté, quelques unes des
nombreuses toiles d’un des artistes les plus populaires de par chez nous.
Le peintre de « l’éternel été » a renouvelé ses
thèmes parmi 6000 tableaux : scènes de la vie quotidienne, nus, portraits,
paysages.
A ses débuts, au sortir de l’atelier de son maître Gleyre,
sa « Diane chasseresse »
est refusée au salon de 1867. Lise Thérot qui lui avait servi de modèle fut exposée l’année
suivante en « Lise à
l’ombrelle ». Le jury finalement n’avait pas que les sujets
mythologiques en tête.
Il continue pourtant à faire allégeance au modèle académique
bien que ses « Baigneuses au
griffon » soient présentées sur un fond esquissé. Nous sommes au bord
de l’eau dont les lumières vont impressionner les toiles.
« Le Cabaret de
la mère Antony » en forêt de Fontainebleau reçoit ses amis Monet, Sisley, Bazille ;
le journal "L´Evénement" est
sur la table.
Zola écrit là, impressionné par ses amis à la touche
cursive, il sait que leurs œuvres sont « vivantes, parce qu'ils les ont prises dans
la vie et qu'ils les ont peintes avec tout l'amour qu'ils éprouvent pour les
sujets modernes ».
« Allée cavalière
au bois de Boulogne » sera elle aussi refusée.
Quand la corporation organise une association « Société anonyme
coopérative et à capital variable des artistes, peintres, sculpteurs, graveurs »
avec Monet et Sisley pour
montrer leurs œuvres en 1874, boulevard des Capucines, il présente La Loge.
Wolff du Figaro ne
manque pas de verve: « Ces
soi-disant artistes s'intitulent les intransigeants, les impressionnistes; ils
prennent des toiles, de la couleur et des brosses, jettent au hasard quelques
tons et risquent le tout. Mais dans la mutuelle admiration de leur égarement
commun, les membres de ce cénacle la haute médiocrité vaniteuse ont élevé la
négation de tout ce qui fut l'art à la hauteur d'un principe, ont attaché un
vieux pinceau à un manche à balai et s'en sont fait un drapeau... » Il
parle de Pissarro, Degas, Cézanne, Monet...
Pissarro par fidélité politique continue à participer aux
expositions collectives, Renoir finit lui
par se retrouver dans le salon officiel avec Degas et Fantin Latour.
Après les danses du « Bal
du Moulin de la Galette »
et les taches claires et sombres de
« La balançoire », son
« Portrait de madame Charpentier et de ses enfants » avec ses
personnages tout en rondeurs dans une ambiance familiale simple et sans apprêt,
et ses jeux de tissus, retient l’attention des critiques.
Sa fortune d’alors accompagne une crise artistique : il
va en Italie pour se mettre à l’école de Raphaël et en Afrique du nord dans les
pas de Delacroix.
Avec ses « Baigneuses »
il est allé au bout de l’impressionnisme, revenant aux naïades antiques, et « Le jugement de Pâris » emmène
hors du temps.
Si les fractures entre académies paraissent désormais moins
tranchées quand l’impressionnisme lui même peut apparaître à certains comme un
académisme, c’est bien cette école qui a amené le plein air dans les musées.
Les « Parapluies »
dont les personnages massifs émergent parmi les touches légères qui
papillonnent pourraient résumer le joli parcours d’une vie.
Perclus de rhumatismes, vers la fin de sa vie, il répond à
Matisse lui demandant :
« - Auguste,
pourquoi t’obstines-tu à peindre alors que tu souffres le martyre ?
- La douleur passe, la
beauté reste. »