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vendredi 20 octobre 2023

« La cabane est tombée sur le chien »

Vendredi dernier, à l’échéance de ma publication hebdomadaire de bavardages politiques, je n’ai pas publié de texte, j’ai pas pu.
Face aux rumeurs et aux clameurs, les mots manquent quand toute pensée est ensevelie.
Sur ce blog, j’essaye de ne pas délivrer de trop contreproductives leçons; il ne me reste qu’à plaindre profs et parents qui se doivent d’expliquer l’innommable.
De beaux textes se sont multipliés, mais je retiendrai que « Le Monde » a titré «  terrorisme islamiste » et une représentante du SNES a utilisé aussi cette expression auparavant  taboue pour certains. Panot n’a pas les mots : l’ignominie de la responsable des Insoumis à l’assemblée refusant de qualifier les auteurs du dernier pogrom en a peut-être poussé quelques autres à désigner clairement les choses. 
Boko Haram est explicite dès son intitulé qui signifie : « l'éducation occidentale est un péché ». 
« Depuis six mille ans la guerre
Plaît aux peuples querelleurs,
Et Dieu perd son temps à faire
Les étoiles et les fleurs. » 
Victor Hugo
L’inconcevable barbarie ne se dissout pas dans le progrès technique: depuis toujours au cœur des hommes, elle s’accroit chaque jour, favorisée par les marées cliqueuses.
Dans l’actualité de cette mi-octobre devenue une liste des horreurs, n’était pas encore venu s’insérer le poignard de l’assassin d’Arras, alors que les sables du Néguev avaient déjà ajouté une couche à nos découragements.
Les terres brûlées des Dieux uniques obscurcissent nos horizons : rendez nous Zeus et Vénus !
Palestiniens et Israéliens s’accordent pour aggraver leurs situations et l’idée même de discussion apparait plus vaine que jamais, ridicule. Les dessins où se tiennent par les épaules un enfant à kippa et un autre à keffieh sont dérisoires, voire niais.
Les trop chrétiens arméniens du Haut Karabagh, affamés depuis des mois, passent furtivement en bas de nos écrans, réfugiés parmi les réfugiés.
La déraison est sans frontières : alors que le Président en Corse ouvrait un chemin de conciliation, lors d’une « nuit bleue » de plus, explosaient quelques résidences secondaires d’impurs continentaux, sans que soit émise la moindre protestation des Indignés patentés.
« La France, soit tu l’aimes soit tu la quittes » était un slogan du Front National.
Quand « France » est remplacée par « Corse » cela deviendrait-il progressiste ?
En marge de ce maelström d’inhumanités, « la cabane est tombée sur le chien » comme on disait dans les  matchs de rugby. La pittoresque expression serait  appropriée pour dépeindre l’ensemble de nos accablements. Les réactions de  Fabien Galthié refusant d’entrer dans les critiques adressées à l’arbitre viennent confirmer les vertus de ce sport : respect.
Dans le bain des moqueries, des dérisions, des satires, un spot d’une campagne contre le harcèlement scolaire ne peut que s’éteindre aussitôt qu’il s’allume. Le mépris devenu tellement courant dans les relations permet aux dédaignés de jouer les victimes et d’insulter les autres. Les gilets jaunes avaient illustré l’irrévérence contre l’indifférence, mais l’arrogance n’a pas de camp :  dans la provocation crachotante, il y a du Trump chez Mélenchon. 
Comment croire en la force des mots et des modes quand les informés Patrick Cohen et Anne Sinclair s’étonnent que « Meetoo » ne soit pas connue en banlieue ? Seraient-ils à ce point dans l’illusion de leur pouvoir, eux qui savent que de trolls de types pensent que la terre est plate ?
La parole écologiste n’a jamais été autant répandue et pourtant sert de repoussoir dans bien des contrées. Parler du temps qu’il fait n’est plus anodin, mon atavisme paysan me fait souhaiter la pluie et bannir le terme « beau temps » tandis que les thermomètres automnaux explosent. Sale temps.
Pour ne pas me complaire dans le négatif comme tant de mes compatriotes, il me plait d’évoquer un beau moment vécu à l’occasion d’une soutenance de thèse portant sur les atteintes cardio-vasculaires chez des enfants présentée par un jeune homme plusieurs fois opéré du cœur. Le sauvé est devenu soignant et pas seulement des corps, il redonne un peu de vigueur à notre foi en l’Homme. Au moment où l’humanité s’acharne contre elle même, les exigences du jury faisaient plaisir et l’éternel serment d’Hippocrate a concerné et ému ses nombreux amis dans l’assistance. 

vendredi 29 septembre 2023

Entre deux.

« L’école est devenue une activité entre deux week-end », je serais tenté d’étendre la formule, dont j’ai usé abondamment, au boulot en général pour le situer entre deux burn-out, ou à quelque vie sentimentale entre deux tabassages, un parcours scolaire entre deux harcèlements, voire une vie tout court entre avortement raté et suicide (assisté) réussi.
Nous sommes dans un temps où il est nécessaire de rappeler que notre liberté est plus sûre, le confort plus courant, le savoir mieux partagé avec les accélérations technologiques et une croissance économique qui progresse dans le monde.
Mais quand la planète s’effondre comment ne pas voir la vie en noir ?
Le droit à l’avortement est devenu un enjeu politique majeur dans bien des pays, le travail une méprisable activité au moment où le chômage régresse. Les rapports sociaux se réduisent à une violence saturant les canaux d’information de récits de femmes battues ou d’ados tourmentés par leurs pairs.
Dans les couches paisibles de l’Occident, le désir de reproduction devient un sujet d’étonnement, alors que l’envie de transmettre connaissances et valeurs sent l’obsolescence comme le terme « vocation » caractérisant jadis hussards noirs et prêtres en soutane.
Ferry Jules parlait de « flétrir l’égoïsme » dans sa « lettre aux instituteurs » de 1883 .
Les formules pour assiettes à l’entrée des appartements du temps du Formica se retrouvent sur les réseaux sociaux qui aiment la brièveté et la solennité. L’une d’elles vantant les vertus de l’école s’est attiré un commentaire lapidaire rappelant le rôle de l'éducation nationale dans la reproduction sociale. Cette remarque portée par les analystes les plus progressistes peut servir d’alibi à tous les renoncements, à toutes les passivités.  
« Ce n’est pas en ignorant la gravité et l’aérodynamique que l’on peut inventer des avions.
Et ce n’est pas en méconnaissant tout ce qui pèse de façon constitutive sur nos structures sociales que nous pourrons trouver des voies d’émancipation. » Bernard Lahire.
Les certitudes en pédagogie sont provisoires depuis « La société sans école » jusqu’au retour de la badine. Quelques capacités d’adaptation sont requises en la matière : de l’instruction à l’éducation, de la démission des parents à leur omniprésence, de la confiance aveugle à la défiance systématique, de la toute puissance du maître à l’effacement de la professeure des écoles. Les bacs +5 se font prier pour exercer alors que sont en retrait les lauréats des baccalauréats bradés de 68. J'obtins celui-ci avant d’exercer à 18 ans devant des enfants de 15 ans.
Nous nous recroquevillons, nous désolant de la virulence de l’Intelligence Artificielle alors que nous pourrions nous enorgueillir de ce type de production humaine. 
« L'intelligence artificielle se définit comme le contraire de la bêtise naturelle. » Woody Allen
Les bricolages génétiques avec marchandisation des corps pourraient nous inquiéter bien autant. 
Les causeurs en recherche de clics et leur cause d’un jour ne savent s’appesantir sur les échecs. Un clou chasse l'autre, par exemple l’exaltation des moments de fièvre jaune a duré le temps d’un feu de palettes mais aucune leçon n’a été tirée, et les titres à propos de l'interdiction de signes religieux à l'école n'ont pas porté sur l'efficacité du ministre.
Pour échapper à la complexité du monde, une petite querelle subalterne mais pas tant que ça finalement : les appréciations méprisantes contre la cérémonie d’ouverture de la coupe du monde de rugby confirment notre perte du sens du second degré et confortent les attaques de ceux qui vomissent La France, que nous influençâmes jadis sur leurs terres africaines bien que nous les ayons quittés depuis quelques décennies. 
« L’Angleterre s’écroule dans l’ordre, et la France se relève dans le désordre. » 

vendredi 22 septembre 2023

Rocard, l’enchanteur désenchanté. Jean-Michel Djian.

Venu à Grenoble présenter son documentaire « J’irai dormir en Corse » sur la vie de l’ancien premier ministre disparu il y a six ans, Jean-Michel Djian dédicaçait son livre au titre parfait pour résumer l’apport de Rocard à la vie politique français et amorcer une réponse à la question : 
« Par quelle injustice alors sa pensée survit-elle moins que sa caricature, qu’entrés en scène au mitan du siècle dernier ses épigones l’escamotent ? ». 
J’en avais profité pour regretter qu’il reprenne trop dans le film la critique malencontreuse envers la complexité du verbe de l’ancien maire de Conflans Saint Honorine ; les 150 pages du livre ont permis de détromper cette impression. 
« Qui au sein des nouvelles générations nées en ce début du troisième millénaire sait que ce gros fumeur fut aussi l’instigateur de la loi anti-tabac, de la CSG, de la paix en Nouvelle Calédonie, du compte individuel de formation, de la réforme d’air France et des PTT, du livre blanc des retraites, du revenu minimum d’insertion surtout ? » 
L’intitulé du film extrait d’une lettre testament est également significatif de la richesse de sa personnalité qui au moment du dépôt de son urne funéraire avait valu de Jacques Dutronc habitant de Monticello, la formule : « Un Rocard sinon rien ! »  
« Je n’ai pas une goutte de sang corse, et n’avais jamais mis les pieds sur l’île avant 1968. Le mois de mai de cette année-là avait échauffé les esprits. Je ressentis puissamment le besoin de rassembler pour une bonne semaine, la quarantaine la plus active d’étudiants et de cadres du PSU. La mutuelle étudiante rendit cela possible en Corse. »
L’ouvrage acquis comme consolation de voir en une ville qui fut jadis « rocardienne » seulement une cinquantaine de personnes blanchies sous le harnois à l’invitation de Michel Destot,  ancien maire, est comme son objet, tranchant, honnête, stimulant. 
« Comment voulez-vous éclairer les électeurs avec des gens qui cherchent sans cesse à attiser les peurs, déformer vos propos, les décontextualiser, les tirer vers le bas. »

vendredi 15 septembre 2023

« Maladresse » rappeuse.

Un vieux laïcard comme moi, respectueux quand même de toute grenouille de bénitier, peut se sentir menacé d’une « crucifixion » par Médine, nouvelle idole des NU(L)PES, car je ne prends pas de telles paroles pour une « maladresse ». Par là, je réutilise son mot d’
«excuse » tellement facile pour ses propos anti sémites, alors que bien peu lui ont demandé des comptes pour sa violence envers ceux qui respectent toutes les religions pourvu qu’elles ne s’imposent pas dans l’espace public.
La faiblesse humaine vaut mieux que l’infaillibilité divine.
Martine Panot, qui n'est pas Jaurès, participe à la déconstruction de la poésie française: elle voit celui dont la notoriété est liée à ses provocations dans la lignée de… Brassens et Hugo ! Cette députée vivant aussi d’outrances contribue à l’échauffement des échanges politiques et témoigne de l’effondrement des connaissances et du discernement dans une civilisation sans repères.
Face à des monceaux d’insultes culminant avec l’usage courant du mot « dictateur » appliqué à des acteurs élus de notre démocratie et banalisant les vrais tyrans, les vertus de l’esprit critique tendent à devoir être relativisées. 
Pour avoir eu la prétention de cultiver le jugement de mes élèves leur demandant de justifier leurs avis, je serai tenté de privilégier aujourd’hui, la reconnaissance, le respect, tant la chicane, la diatribe sont devenues hégémoniques.
Le jeune péteux que je fus en classe dite de philo, qui voulait ignorer Bergson parce qu’il n’était pas sur la photo où Sartre montait sur un tonneau, peut ébaucher une autocritique et avouer ne rien savoir alors de l’auteur de « L’être et le néant » sinon quelque aphorisme pour carnet rouge.
Aujourd’hui, vieux pétard mouillé, je me la pète en mon blog et regrette que toute annonce gouvernementale soit submergée par les blâmes à la crédibilité relative ne reconnaissant jamais le moindre aspect positif. 
« De tous les conformismes, le conformisme du non-conformisme est le plus hypocrite et le plus répandu. » Jankélévitch
Mes regrets naïfs de voir s’aggraver les discordes ne peuvent rien face aux stratégies assumées de radicalisation des débats quand il importe si peu de savoir à qui profite l’invective. 
En manque d'humour, plus que jamais, je suis adepte du « en même temps » de la fluidité,  de l’adaptabilité, en ces temps qui se veulent d’airain d’autant plus que « tout fout le camp ».
Et je continue à accumuler dans mon débarras à paradoxes des figures nouvelles de « base jumpers » et autre funambule dont la mise en danger n’est pas étrangère à des recommandations excessivement protectrices. Nul n'est censé ignorer les effets pervers mais la démarche éducative apparait illusoire quand dans les faits la première cause de mortalité est le cancer et la première cause de cancer est la consommation de tabac. 
Les climato-sceptiques n’ont jamais tant prospéré qu’en cet été meurtrier pour la planète.
Les habitudes ne changent pas aussi facilement que les injonctions constantes le voudraient.  Les campagnes publicitaires, l’augmentation des prix, ni la répression ne sont décisives.
- « En 2021, selon Santé publique France, 31,9% des 18-75 ans ont déclaré fumer, un chiffre en hausse par rapport à 2019. »
- « La consommation totale de viande en France a augmenté sur le long terme, passant de 3,8 millions à 5,8 millions de tonnes équivalent carcasse entre 1970 et 2022 (+ 50 %).»
Et le cannabis ? Et l’héroïne ? 
C’est pas gagné et pas si simple, mais c’est bien joli : 
« La liberté commence où l'ignorance finit. » Victor Hugo
J’y ai cru et ça vaut mieux que : 
« Je scie l'arbre de la laïcité avant qu'on le mette en terre, 
Marianne est une Femen tatouée "Fuck God" sur les mamelles ». Médine.

vendredi 8 septembre 2023

D’artifice.

Quand l’extrême droite progresse en Suède ou aux Pays-Bas, modèles jadis de justice, de tolérance, un recul s’impose quant à cette banalité irrésolue :
« tout profite au Rassemblement National ! »
Mélenchon prenant le saccage d’un magasin Lacoste pour les prémices du Grand Soir, cajole le communautarisme avec le zèle de l’ancien laïcard défroqué. S’exprimant avec violence, encourageant les violents, quelle fraternité peut-il prôner ? Pourtant il semble bien que l’individualisme constitue la forme élémentaire du libéralisme. Il abime la démocratie comme Rousseau banalise le RN en assignant tout contradicteur à la catégorie facho.
Mettre l'islamophobie à toutes les sauces chahute la logique tandis qu'est nié par des commentateurs de "mauvaise foi" le caractère religieux de l'abaya. 
Les annonceurs d’apocalypse climatique ou raciale confortent les haineux dans leur peur, révulsent les modérés et les propulsent dans le camp d’en face.
Kébab et bar à chichas font partie du paysage français comme la laïcité.
Les distanciations s'incrustent d’autant plus que les non-dits dominent, on ne se parle plus, en français.
Les ressentiments s’amarrent de part et d’autre de la Méditerranée ou du périf.
La mosquée prospère et l’église devient un musée. Dans le domaine des arts et des spectacles, plus de saint à qui se vouer, tant le destroy a remplacé le sublime, l’inarticulé, la clarté : le déconstruit ne sait reconnaître la décivilisation.
On s’amuse, le ludique est devenu le maître mot de la pédagogie, le festif celui de la communication, alors une fois dissipés les panaches des fumigènes cheminots ou des supporters en virage, saurons nous voir plus clair ?
Les feux d’artifices éclairaient la fête nationale, les mortiers les propulsant sont devenus des armes et les images des jubilations fêtardes ont tout recouvert .
L’émotion supplante la raison: marches blanches hebdomadaires et RIP pour Jane et moins pour Tachan, alors vient en réaction pour qualifier les vandales, une syllabe imbécile : 
les cons ! 
Les voitures brûlées étaient entrées dans le folklore du 14 juillet ou de la saint Sylvestre, mais depuis fin juin, les faits divers ont rejoint les colonnes des rubriques politiques et franchi les colonnades de l’assemblée. 
« … les violences urbaines se déclenchent régulièrement tels des feux follets, ces inflammations de méthane émanant des zones humides et marécageuses. Leur ampleur varie, mais ce phénomène est hélas devenu récurrent en dépit des multiples « plans banlieue » et autres rénovations urbaines. » Jérôme Fourquet.
Le mot « intégration » continue à être invoqué, quand les mots à préfixes contrariants pullulent : démolir, déraciner, démonter, déconstruire, désintégrer… 
Demandant tout à l’état et se plaignant de son emprise tout en sapant quotidiennement son autorité, les factieux en appellent à l’unité et à couper de têtes. Ils fournissent du carburant aux cyniques et scient les pattes des bonnes volontés.
«  La crise  constitue justement dans le fait que le vieux ne meurt pas et que le nouveau ne peut pas naître ; dans cet interrègne se vérifient les phénomènes morbides les plus variés ». Gramsci dont la belle phrase peut être citée par chaque bord, ne fera pas plus consensus que la transition écologique ou l’aggravation de la dette publique, éléments de cette nouveauté …

vendredi 30 juin 2023

Scolaire.

Cette dernière page de la saison s’inscrit dans un calendrier aux allures scolaires ; je reprendrai mes écritures en principe à la rentrée.
A tous coups, le mot « scolaire » ramène chez moi quelques obsessions, bien que ma légitimité s’amenuise pour m’exprimer sur un milieu quitté depuis bientôt 20 ans.
Quand s’affole l’immédiateté, ce regard rétro implorera l’indulgence malgré les rabâchages: l’école-devenue-une-activité-entre-deux-week-ends ne dicte plus un tempo voulu par l’industrie du tourisme.
Je me garderai cependant de désigner comme unique coupable un secteur d’activité, fut-il prépondérant dans notre vieux pays où poussent musées et autres attractions sur les friches industrielles, tant la désignation simpliste par exemple de « Big pharma » comme mère de tous les maux a épuisé toute tolérance.
La dénonciation systématique de boucs émissaires pèse méchamment dans le débat public, alors que s’impose la mise en évidence de la complicité de tous dans une consommation effrénée de loisirs modifiant en profondeur les mentalités.
Quand la retraite devient le graal, le travail est grillé.
A réenfiler les perles élimées de valeurs caduques, j’aggraverai mon cas en n’apportant pas de nuances, en généralisant. 
« Un grand nombre de secteurs ne va pas se relever avant longtemps : la restauration, le tourisme, l’industrie du spectacle » Quand Jacques Attali à propos de la pandémie de Covid 19 prophétise ainsi, on peut se permettre de causer aussi. 
A l’encontre de la tendance à éviter le labeur et ses pollutions, je n’ignore pas la volonté de ré industrialisation de l’exécutif pas plus que les progrès en matière de chômage qui ont fait passer cette préoccupation jadis prioritaire au second plan. Et dans la lignée de mon légitimisme, concernant les décisions réformant des retraites qui n’ont guère flatté l’opinion, je reprendrai volontiers l’image d’un journaliste allemand à propos d’une question quelque peu orientée sur la semaine de quatre jours en la mettant à la sauce bretonne : qui refuserait un Kouign aman à la chantilly qui fasse perdre 5 kg ?
D’après la même source étrangère, il semble que la crise des recrutements dans les écoles, dépasse les limites de l’hexagone, la multiplication des temps partiels appelant un nombre plus grand de candidatures.
Le salaire n’est pas la cause unique de la crise des vocations en milieu scolaire.
Ma persistance à lire « Le Monde » prend des allures encore plus aristocratiques avec une porteuse qui glisse dans ma boite désertée de tout autre papier, le jadis « journal de référence », la Poste n’étant plus en mesure d’assurer ce service d’une façon fiable.
Mais le vieux lecteur a de quoi « stresser » quand dans les titres, est dénoncé le stress de lycéens au moment de leur orientation, alors que l’épreuve de philo ne les stresserait pas suffisamment ! Je me trouve ridicule à penser que la philo ne servirait pas seulement à gagner des points. La marchandisation du monde touche aussi ceux qui la dénoncent quand ils refusent toute tâche non rémunérée. Leurs élèves les suivent en comptables de points pourtant accordés généreusement au bout d’une scolarité qui a évité tout chiffrage.
Titulaire d’un bac en 68, j’approuve Luc Ferry : 
« Pour ne pas avoir le bac, il faut en faire la demande » 
Un dernier paradoxe relevé avant de solaires vacances: les radicaux écologistes venus de loin en voiture pour s’opposer à une ligne ferroviaire Lyon Turin avaient noté sur un panneau :
« Plus de trains, c’est plus de camions » avant de s’approvisionner en cailloux depuis le balast  où roule la SNCF sur les voies qui conduisent aux plages et autres grèves.          

vendredi 26 mai 2023

Balancier.

Je rejoins la sagesse populaire qui se rassure en constatant que les mouvements de la société se succèdent en corrigeant les excès précédents.
L'alternance passant du en « même temps » centriste au populisme risque d'être plus rude. Avant le verdict annoncé des urnes, les extrêmes se donnent la main : la gauche de la Nulpes crie et la droite du Ramassement National tire nous dit-on, les marrons du feu. 
L'autorité de l'état est remise en cause par ceux là mêmes qui regrettent l'affaiblissement des pouvoirs tout en ayant des pudeurs de gazelle pour ne pas oser nommer la brutalité, les violences, l'inhumanité qui nous minent.
Les gilets jaunes en ne respectant pas les usages démocratiques dans leur façon de manifester ont attiré les excessifs, et c’est ainsi que dans les confusions politiques, les délitements culturels et moraux, un président de la République est considéré comme un monarque à guillotiner; les implacables de chaque extrémité se confondant dans l’anonymat. D’ailleurs au pays des justiciers masqués, pour tout reportage, même anodin, les personnes interrogées exigent de figurer incognito, alors qu’au royaume des pseudos, l’exposition narcissique se montre bien souvent indécente.
Les boutefeux de la haine admirés par les benêts pour leur éloquence sont d’autant plus condamnables qu’ils maitrisent, eux, la différence entre symbole et réalité, contrairement à leurs soumis inaccessibles au second degré. 
Je révise mes nuances rétrospectives, quand nous hésitions à mettre un signe égal entre Staline et Hitler, les millions de morts n’ayant donc pas suffi à convaincre leurs nostalgiques partisans. Communisme et nazisme : même désastre! Et pires sont ceux qui les excusent, pas instruits des horreurs du passé. L'actualité immédiate inquiète du futur, ignorant le passé, ne laisse que des miettes colorées aux collés des écrans. 
Extrême gauche = extrême droite.
Nos ancêtres ont construit des palais pour la justice, mais nous ne savons pas vivre avec l’injustice, déjà autour des pelouses où les caméras de la VAR (Video Assistant Referee) supplantent l’arbitre ; la technologie prend la place de l’homme faillible. Le foot rend visible tares et passions de notre monde : les supporters brûlent de plus en plus vite ce qu’ils ont adoré quelques instants avant.
Rêveurs de princesses nous avons beaucoup divorcé, et émis des gaz délétères après avoir bouffé trop d’oxygène, nous faisons semblant de ne pas savoir notre condition de mortel.
Jadis les enfants ne parlaient pas à table, désormais les parents se taisent.
Je suis disposé à modérer la phrase précédente prise dans un relevé de paradoxes pour éviter toute généralisation caricaturale, d’autant plus que j’ai admiré les praticiens en pédagogie Freinet attachés à donner la parole aux enfants. Ils fourbissaient, sans compter leur temps, les outils pour permettre à leurs élèves une expression claire afin de gagner la reconnaissance des adultes par les journaux scolaires élaborés en classes coopératives.
Mon éloignement des années d’active dans l’école m’excuse-t-il de ne plus savoir où en sont les associations de parents depuis les crocs tops et celles des étudiants aux voix voilées?  
Les acteurs de l’école émettent bien peu, et quand ils s’expriment, le ridicule n’est pas loin: le SNES, dont on ne compte pas le nombre de jours d’appel à la grève, trouve que le Service Civique Universel ferait manquer des heures de cours.
J’éviterai de me placer en surplomb en trouvant bien incultes quelques journalistes des plus péremptoires aux liaisons incertaines, mais je récuse le procès répétitif fait à l’exécutif d’être sourd et méprisant. Les casserolades qu'ils amplifient sont significatives du bruit fait pour ne pas entendre les arguments envisageant le long terme. Le mépris se reflète dans leur miroir, comme les noirs desseins prêtés aux autres. Sandrine Rousseau est en tête. 
« Qui jette son soulier sur ses bienfaiteurs va balancer dans la soupe distinguée de l'intelligence un gros pavé prosaïque : le Goulag et l'esclavage qu'il désigne. » 
André Glucksmann

vendredi 19 mai 2023

Coup de chaud.

Le bloggeur hebdomadaire serait bien ridicule s’il prétendait échapper aux faiblesses des débats ambiants et des redites. 
Les mots s’usent : «  changement »  ne vit plus qu’accolé à «  climatique ». L'expression qui accompagne toute vie a pris un coup de chaud. 
Le neuf n'est plus bien porté, la nouveauté suspecte,  le conservatisme devient de plus en plus costaud sous des atours divers : SUV d’un côté, dreadlocks de l’autre, BFM télé et Télérama. La déploration envers le temps présent se paralyse sous les populismes bigarrés brun, rouge, brun-rouge. 
Depuis la dernière fois que l’étranger installa à Vichy une extrême droite, les valeurs du dernier triptyque qu’elle inscrivit sur les timbres ont  pris de sérieux coups de vieux : 
« travail, famille, patrie », flageolent. Et on nous fait le coup de la nouveauté !
A écouter ceux qui se plaignent de ne pas être écoutés, le mieux serait de ne rien faire,
et ainsi satisfaire les conservateurs de toujours et les squatteurs hirsutes aux imaginaires chérissant l’âge d’avant l’agriculture.
En ce moment, le courage passe pour de l’autoritarisme, la vision à long terme pour de l’arrogance. 
Les loups sont plus respectés que les beaufs, les humains perdent leur instinct de survie et se bouffent entre eux.
On prête une âme aux choses et ce sont elles qui ont pris la main, la toute puissance humaine efficace dans la malfaisance parait bien faible dans la réparation.
Les bouleversements de la Nature accélérés par l’homme n’évoluent pas en bien malgré la bonne volonté médiatique adossée à une radicalité militante.
CO2 et particules fines nous filent entre les doigts, les espaces infinis qui effrayèrent Pascal ne sont plus silencieux : les températures ont beau s’afficher à toutes les devantures, la fièvre climatique ne retombe pas.
Le rideau de fer est de retour après un cycle d’évènements initiés par l’explosion de tours jumelles. Quand s’oublie aussi facilement la mort de Samuel Paty, les excès des plus fanatiques peuvent se réactiver. Nous avions ignoré si longtemps les religions dans nos conversations, emportés par le déclin de l’une et ignorant l’essor de l’autre, que nous réévaluons peut être avec excès leur impact. 
Le sempiternel remord de missions pédagogiques ratées, dévoyées, peut se consoler en constatant un paysage éducatif loin d’être uniforme. Le zèle pour élever correctement ses enfants sans soda ni  trop écrans est proportionnel au renoncement d’autres qui s’en remettent aux autres pour dire non, voire qui ont abandonné toute ambition de transmission en n’ayant aucun héritier.
Une taille des familles raisonnable que ni le Hamas ni les orthodoxes juifs ne recommandent n’est pas audible non plus chez les affolés solitaires qui pensent que la civilisation s’arrêtera avec eux. 
En attendant ces ambiances apocalyptiques familières des jeux vidéos, des domaines essentiels comme le transport où des mesures efficaces sont à portée de décision voient la diversité des intérêts particuliers entraver toute évolution réalisable.  Les parts de marché du fret ferroviaire s’effondrent : on ne peut pas dire que les grèves à répétition n’y sont pour rien au risque de confirmer l’irresponsabilité des agents du service public. Les Zones à Faible Emission (ZFE) sont en route, mais empêchées y compris par ceux qui ne cessent de mépriser les automobilistes pouvant bien leur rendre leur dédain quand est dérangé le développement du rail entre Lyon et Turin. 
Nomade ou sédentaire. La construction de maisons se heurte aux égoïsmes limités au seuil des portes, villas témoins de nos difficultés à envisager un avenir allant au-delà d’une paire de kilomètres en vélo électrique. 
« Si le feu brûlait ma maison, qu’emporterais-je ?
J’aimerais emporter le feu... » Jean Cocteau

vendredi 12 mai 2023

Désert.

Les temps changent. 
Alors que pour partager les émotions dans un stade avec un enfant, il convient malheureusement d’hésiter, je viens de voir avant le défilé du premier mai, une caméra posée sur une maman qui équipait son enfant en poussette de lunettes pour le protéger des gaz lacrymogènes ! Juste après une mamie faisait porter uniquement à la police la responsabilité des violences, prise dans les projecteurs de la toute puissance d’un prométhéen mouvement social à qui tous les gentils Sisyphe pardonnent.
Albert Camus est moins noir qu’Albert Cohen : 
«  Chaque homme est seul et tous se fichent de tous et nos douleurs sont une île déserte. »
« Il n’y a plus de déserts. Il n’y a plus d’îles. Le besoin pourtant s’en fait sentir. 
Pour comprendre le monde, il faut parfois se détourner ; pour mieux servir les hommes, les tenir un moment à distance. » 
Pour avoir beaucoup cotisé au club des naïfs, j’en suis à noircir le caractère de mes semblables souvent dans le déni et l’indulgence coupable envers la brutalité. Alors que progrès scientifique et déploiement des aides sociales ont rendu pour la plupart la vie plus confortable, la moindre anicroche nous insupporte, la moindre contrariété nous fait criser. 
Et les foules africaines qui suivent aveuglément les néo-colonisateurs du XXI° siècle en dénonçant ceux du XIX° me consternent.
Dans la marmite des commentaires, l’étude expéditive des caractères a pris le pas sur le débat de fond. 
Après la contradiction des gilets jaunes : moins d’impôts plus de services, bien peu d’objections sont apportées à ceux qui optent pour la décroissance en demandant la retraite à 60 ans, alors que dans le même temps, plus de pouvoir d’achat demande de la croissance. « Plus d’argent pour profiter de plus de loisirs » ne s’affiche pas aussi nettement que « travailler plus pour gagner plus » mais connaît davantage de succès.
Quand l’agressivité peut en arriver à se déchainer sur le personnel soignant, les profs, les pompiers … les gardiens de la paix, je doute des vertus des référendums, le citoyen disparaissant derrière le consommateur. Les clashs séduisent et les gueulards mateurs prouvent leur efficacité, la modération passe pour de la faiblesse. L’adrénaline spray des disputes est un euphorisant qui comme le gaz hilarant donne des couleurs à l’ordinaire des jours. 
Les «cacerolazos» , firent du bruit contre Allende et les marches au flambeau ne fascinent pas que les fascistes. Ils aiment la nuit propice aux rêves et aux dissimulations; les réveils tardifs sont parfois difficiles.
Avons-nous appris à vivre avec nos faiblesses, nos addictions, nos rides, la mort ?
Ciel bleu et cocotiers figurent le paradis et malgré le funeste réchauffement climatique, le soleil est toujours synonyme de beau temps.
La météo n’est plus un sujet anodin, et dans le bavardage radiophonique qui alerte sans cesse sur la sécheresse, je m’étonne que l’annonce d’une amélioration signifie encore le retour de la chaleur bien qu’on en vienne à prier pour la pluie dans la phrase précédente. 
« L’espérance, c’est sortir par un beau soleil et rentrer sous la pluie.»  Jules Renard

vendredi 5 mai 2023

Brouillés.

Bien avant les petits Biafrais, les enfants chinois étaient cités pour forcer les enfants occidentaux à finir leurs assiettes ; ce n’est plus le cas.  
J'avais écrit: « D’ailleurs on n’entend plus beaucoup d’échos de famines de par le monde en dehors des conflits » alors que mon quotidien vespéral rendait compte d'une alerte de l'ONU : « le nombre des personnes en insécurité alimentaire ( 250 millions) a triplé en six ans»
N'empêche: il est plutôt question de droit à l’avortement ou des libertés LGBT+ qui mesurent essentiellement le degré de liberté d’une nation. 
Avons-nous mesuré les progrès qui permettent de vivre plus dignement, de vivre tout court, sur notre planète épuisée qui croule sous le nombre de ses occupants ?
Les frontières se hérissent de murs, mais Sébastopol n’est pas que le nom d’un boulevard parisien, près et loin fricotent, passé et présent tricotent.
Héritiers bâtards des lumières, nous avons perdu Dieu et nos désirs d’enfants, alors que la religiosité gagne ailleurs grâce aux intégristes et leurs familles nombreuses.
J’ai l’impression de déclencher un souffleur à feuilles mortes en essayant de distinguer le vrai du faux dans le fatras des mots à notre disposition.
Sans avoir mis en titre le mot «  brouillé », j’avais déjà usé du terme tant les brumes (de  chaleur) nous enserrent. 
Quand la liberté de l’individu qu’on voulait avec l’école, émanciper, ne veut plus s’inscrire dans la société, la fraternité est méprisée. Les titres de la presse qui avaient un certain prestige du temps du papier jouent avec la forme brève, le titre polémique en version web.
Quand la valeur du travail ne se mesure plus qu’en €uros et que sont ignorés les aspérités de la vie, le rapport au réel est bouleversé.
Tout est arasé, et comme certains sommets de la littérature ou de la culture en général paraissent inaccessibles autant les mépriser. Et c’est ainsi que des démagos flattent les ignorants en traitant d’arrogants ceux qui étaient familiers des exigences intellectuelles plutôt que de d’amener leurs followers vers une complexité ardue.
Les limites entre l’homme et la machine, entre l’homme et l’animal voire avec « le concombre masqué », entre l’homme et la femme, sont bousculées. Les distances entre jeunes et vieux peuvent à la fois être niées ou exacerbées. 
Un mineur parmi ses ancêtres est plus prestigieux que des quartiers de noblesse : le transfuge de classe en fera des tomes pendant que bébé requiert  ses droits d’auteur.
3000 milliards d’€uros de dette ne comptent pas.
Celles et ceux qui reprochent à l’occident colonisateur d’avoir voulu imposer ses valeurs n’arrêtent pas de vouloir dicter à leurs congénères, le contenu de leurs assiettes, de leurs lits, de leurs livres : y a bon Banagnangnan !
Sur les ondes, les bienveillants les plus doux compatissent avec les plus radicaux, cultivant un goût pour le barouf et la haine. Alors qu’ils rejettent le « en même temps » centriste, ils aiment les dits pacifistes qui viennent à la manif, cagoulés.
Les masques « anonymus » étaient tendance et les pseudos sont la règle sur les réseaux sociaux, mais je suis choqué que dans les reportages l’habitude se répand de s’exprimer sous des noms d’emprunt. Sans invoquer le courage partie prenante des romans de chevalerie, pourrait-on évoquer la responsabilité ? 
Ainsi chaque matin se révisent les vertus de nos grands-mères alors que dans la foulée est dénoncé l’héritage des boomers. 
 « France, mère des arts, des armes et des lois...", pourquoi veut-on toujours y brouiller les premiers avec les derniers? » 
Françoise Sagan.

vendredi 28 avril 2023

Mépris.

Les débats dans la plus politique des nations -dit-on- ne me semblent guère politiques, ni dans le sens de l’intérêt général ni dans la prospective. Nous sommes plutôt abreuvés d'intéprétations à l'arrache sur les caractères forcément mesquins des protagonistes, loin d’une psychologie fine et éclairante.
Je ne vais cependant pas bouder mon plaisir à tremper dans les chamailleries.
Les médias portent une attention soutenue aux enjeux climatiques mais desservent la cause écologique et féministe en donnant exclusivement la parole à Sandrine Rousseau. Elle devient la meilleure propagandiste du barbecue tant elle se montre méprisante à l’égard de ses contradicteurs qui n’ont qu’à la laisser parler pour emporter le morceau.
Par contre si Mélenchon ou Le Pen, les Roux et Combaluzier des extrêmes, avaient appelé à « casser la baraque » les réactions indignées n’auraient pas manqué. 
Mais quand c’est Berger, l’intouchable de l’heure, qui proclame cette intention, avant de s’excuser quand même,  «  ça passe crème ». 
Il regrette «  une crise démocratique » qu’il alimente, se montrant intransigeant en dénonçant l’intransigeance des autres, excitant le mépris envers le « méprisant de la République ». 
Les appels à la négociation n’ont pas manqué, et quand elle arrive : les syndicats logent à l’« hôtel du cul tourné ». Des politiques ont obtenu des modifications mais ne se sont pas montré plus fiables que ceux qui ont regretté la retraite à points sans le défendre quand elle était à l’ordre du jour.
L’avis du conseil constitutionnel devait être la date limite, les cheminots CGT ne l’entendaient pas ainsi, alors le chef  de la CFDT, premier syndicat de France, les a suivis. 
Le courage appartient au passé d’une organisation qui avait connu des dissidences du temps de Maire, Notat, Chérèque ; est-ce que cela avait permis une clarification profitable au réformisme ?
Je ne vais pas insister dans la pochade envers Rousseau la petite femme et Berger l’homme modérément grand se réservant la place du prudent quand sonnent les casseroles qu’il a contribué à mettre en mains.
Le refus de toute réforme va avec l’affichage du mot Révolution : «  la retraite en CE1 » tagué sur le mur d’un lycée pourrait faire sourire, rappelant des slogans surréalistes d’un autre siècle, mais révèle aussi la volonté de sortir de l’Histoire, de s’abstraire du monde, d’affirmer une ignorance de son appartenance à l’Europe. Qui se souvient que celle-ci nous bien aidé pendant la pandémie et la crise qui en suivit ?
Innocents à jamais, cachés derrière leurs écrans saturés de cœurs en bandoulière, câlinant leurs chatons virtuels, confinés dans leur égo, les déambulateurs du soir s’accordent  parfois une sortie ludique sur les boulevards ou rue des Martyrs. Le jour c’est pour les vieux, et les scrutins c’est trop tôt le matin, un dimanche !
Victimes toujours, la haine envers leurs représentants n’éclabousse-t-elle pas le jugement porté à eux-mêmes ?
« Dieu n'existe pas. S'il existait, depuis le temps que je dis des horreurs, il m'aurait déjà foudroyé. Ou Dieu est un mythe, ou il est sourd, ou c'est du mépris. » Francis Blanche

vendredi 21 avril 2023

Critique.

Tout au long des semaines, sur ce blog, je joue au critique de cinéma (lundi), de BD (mardi), de livres (samedi), de spectacles (dimanche), et jette un regard conjoint de touriste le mercredi ou d'amateur vis à vis des œuvres d’art le jeudi, attendant le vendredi pour critiquer les critiques en politique : plus de 4000 articles.
Les frontières entre ces domaines ne sont pas étanches et je jubile quand la femme de Hopper pense que le personnage de « Cape Cod Morning » regarde  
« si le temps est assez clément pour étendre son linge dans le jardin. » 
J’aime cet avis pragmatique et j’extrapole : les artistes jadis offraient leurs œuvres au monde et puis le temps passant, les gloses, les commentaires les plus sophistiqués, les plus délirants ont pu s’y accrocher. L’art contemporain n’aurait-il pas inversé le cours des choses en fournissant l’exégèse avant le geste, le « dire » avant le « faire » ? 
Pour essayer de se débattre dans les débats confus de l'heure, la tentation est grande de généraliser pour masquer ses rabâchages quand la description des passions individuelles les plus péjoratives passent devant les analyses économiques et que les micros trottoirs tapinent dans le coin.
En politique, royaume de la proclamation, comme dans la sphère privée où parfois « les désirs se prennent pour la réalité », ces facilités voire les mensonges s’aggravent. Le virtuel déborde des écrans et les distances sont abolies, symboles et réalité ne se distinguent plus.
Don Quichotte ne se saoule plus de romans de chevalerie, désormais il « like » madame Bovary sur son Smartphone, toujours aussi triste malgré ses millions de « followers».
Dans cette opposition des paroles et des actes, j’ai vu en pédagogie la mise en retrait du pragmatisme, au détriment de théories fumeuses élaborées en fac qui ne pouvaient être démenties par des faits parfois contrariants.
Concernant l’éducation en général, les coachs en bienveillance préconisent depuis leurs applications numériques et les parents entre deux livraisons Uber s’abstiennent d’élever la voix, n’ayant plus voix au chapitre. Quels enfants-rois descendants de dynasties royales se roulant devant les présentoirs des super-marchés vont arriver sur le marché ? Comment des papas et mamans de bonne volonté acceptent cette tyrannie des petits qui savent pourtant bien déceler la sincérité d’une remontrance, les limites du pouvoir ou l’hypocrisie d’une impassibilité de commande? La médiatisation d’actes de barbarie parentale, de violences, de négligences, participe de la même hystérie que le refus de dire « non » ou d’étouffer toute liberté en devenir sous l’omniprésence des «  je t’aime ».  
« L'éducation ne se borne pas à l'enfance et à l'adolescence. L'enseignement ne se limite pas à l'école. Toute la vie, notre milieu est notre éducation, et un éducateur à la fois sévère et dangereux. » Paul Valéry 
Dans l’effervescence des querelles générationnelles une fois cramées les amoureuses de Tino, restent les rappeurs aux prises avec les rockers bientôt aussi décadents que les amateurs de jazz dans une société vieillissante en mal d’attentions maternelles. La génération Marine a succédé à celle de Jean-Marie et plus grand monde se souvient de Rocard qui avait ringardisé Mitterrand.
Aujourd’hui le courage apparaît comme une valeur bien trop mâle alors que tant de civilisations tiennent grâce aux mamas, aux femmes qui ont mieux à faire que la guerre ou se la péter dans les maffias.
Détermination et volonté en arrivent à passer pour de l’arrogance dans ces temps où la mollesse est vertueuse pourvu qu’elle se maquille en bienveillance. Pourtant ces vertus devraient être mises en œuvre pour tenter de diminuer les effets du réchauffement de la planète. Nous en sommes si loin quand on voit les difficultés pour que des ZFE (Zones à faibles émissions) soient installées. Les verts les plus radicaux bien qu'ils assurent en vélos préfèrent habiller les femmes en homme-grenouille que d'assumer le fret par train ou péniche ou les portails taxant les camions.
Bien des souffrances se sont éloignées de par chez nous si bien que nous avons du mal à concevoir notre finitude. Le déclin démographique appelle la main d’œuvre étrangère pour occuper les emplois que nos jeunes dédaignent, il ne se traduit pas seulement dans les courbes mais dans un ramollissement du dynamisme, un rabougrissement des audaces. Il convient de craindre non seulement une montée des eaux mais aussi une submersion par les sots.  
Le temps court des individus a pris le pas sur le temps long du collectif aussi bien chez les néolibéraux que chez les néo-bolchos.
Puisque seules des mesures sucrées sont acceptées, les notes risquent d’être salées pour les générations futures pour lesquelles tout le monde dit se soucier, tout en n'investissant qu'à court terme. 

vendredi 14 avril 2023

Extrêmement.

L’image d’un individu qui a « les fils qui se touchent » pour dire les déraisons de l’heure peut rejoindre la banale constatation qu’en politique les extrêmes s’épaulent, se confortent, se touchent parfois.
L’étiquette « extrême droite » collée à tout contradicteur osant rappeler le nombre de policiers blessés, banalise le parti de la famille Le Pen qui en arrive à apparaître à la vue des commentateurs comme le seul bénéficiaire de toutes les péripéties politiques.
Avant de garnir les bancs du Palais Bourbon, le RN s’est installé dans les comportements revendicatifs et dans les têtes, grâce parfois à ses accusateurs. On ne peut oser dire qu’il a gagné dans le domaine de la culture tant les subtilités d’un monde plus éduqué, plus sophistiqué sont à l'opposé de ses objectifs anti-élites, bien que dans ce champ les acteurs du cinéma proclament leur anti fascisme sans intermittence, sans grande efficacité.
Les universitaires sont en tribune, alors que les leçons de l’histoire ne sont pas seulement oubliées des masses mais ignorées, voire niées, pendant que le niveau des passions s’élève  à mesure que celui des connaissances baisse.
Les héritiers des Croix de feu désormais cravatés ont perdu le monopole de l’anti parlementarisme lorsque leurs concurrents NUPES donnent une image déplorable de la représentation nationale. Ils furent complices sur les ronds points, d’où ils ont multiplié les images de guillotine pourtant abolie par Badinter. 
La manifestation de la place de la Concorde du 16 mars 2023 ne ressemblerait-elle pas à celle des ligues factieuses du 6 février 1934 ?
Si 1789 représente pour tout républicain une date sacrée, une évocation par Mélenchon, ne manquant pas de culot, oublie la légitimité républicaine qui différencie un président de la République d’un roi. 
« Le 5 et le 6 octobre 1789 les femmes marchent sur Versailles contre la vie chère. Elles ramènent le roi la reine et le dauphin de force à Paris sous contrôle populaire. Faites mieux le 16 octobre. »
« Le Monde » journal jadis influent, rapporte que des influenceurs d'Internet sont contre la réforme des retraites, sous influence semble-t-il d'une nouvelle pensée unique qui n'a même plus à faire appel à des démographes ou à des obsédés de la dette, comme au temps des épidémiologistes nés dans la nuit, lors de la pandémie.
Le pamphlet «  L’insurrection qui vient » de Coupat a fait saliver bien les journalistes aux regards complaisants envers toute ZAD, ils en conservent la scansion, mais je n’y échappe pas en voyant arriver, s'installer des troubles cultivés, un séparatisme amplifié, des désaccords irréductibles. Je n'échappe pas au jeu des outrances en soulignant des faits minoritaires générateurs de généralisations abusives.  
Les blocages anti-démocratiques sont des entraves au droit de faire grève ou pas.
Quand des étudiants de Science Po affichent sur un mur dit de la honte, le nom de ceux qui s’opposent à ces entraves, je m’insurge contre la timidité des donneurs de leçons habituels.
Théâtreux, chercheurs, étudiants ne se distinguent pas de leurs ennemis en jetant l’opprobre sur les modérés et en approuvant les délateurs balançant ceux qui ont mal voté aux meutes.
Cette toute puissance (verbale) qui veut ignorer les contraintes économiques, financières, diplomatiques, les intérêts divergents d’une société, est du même ordre musclé que les hommes nouveaux promus jadis, au front fier, au poing déterminé, à la mâchoire serrée.
Extrêmes droite et gauche unies, honnissant pareillement l'Europe, se distinguent encore sur leur position à l’égard des étrangers, mais hormis la couleur de l’icône en vue, la même recherche de pureté les guide (voir la traduction du mot "guide" en allemand ou  en italien). 
Une douce police de la pensée  s’essaye, sans conduire à des goulags barbelés, elle sévit à l’intérieur de ces partis. Ils ont la liberté chatouilleuse et entre eux s’excluent, font taire les dissidents, faisant craindre des dérives liberticides au cas où ils accèderaient aux responsabilités. 
Le populisme, la démagogie en mettant la pression sur les élus, détériorent les liens sociaux, hystérisent les débats et conduisent de dangereux farfelus sur les plateaux, voire à incarner la République. Si quelques sages peuvent se rassurer en pensant que ces excès prouvent leur incapacité à gouverner, Trump les détrompe. 
« Le triomphe des démagogies est passager, mais les ruines sont éternelles. » Charles Péguy