mercredi 17 mars 2021

Reims # 2

Nous changeons d’époque en entrant dans le palais du Tau.
Propriété de l’archevêque  et résidence royale, le palais  était destiné à recevoir les futurs rois à la veille de leur sacre. 
Son nom provient de sa forme en T. 
Aujourd’hui, classé au patrimoine de l’Unesco, comme la cathédrale, il est reconverti en musée et  conserve des éléments fragiles de l’église ou des œuvres en relation avec l’histoire du lieu.
- Dès l’entrée des gargouilles qui tirent la langue nous accueillent ; lors de l’incendie de l’église, le plomb du toit a fondu et s’est engouffré dans les gargouilles où il s’est refroidi, ajoutant dans les gueules béantes une langue que leur créateur n’avait pas prévue.
- Outre des maquettes, sont exposées des statues originales de la cathédrale trop altérables pour  occuper encore leur emplacement  initial. C’est le cas d’une Eve qui porte un dragon avec une pomme dans la gueule 
ou de ce Goliath armé de plus de 5 mètres de haut autrefois situé  au-dessus de la grande rose de la façade occidentale. 
De même l’authentique gable du couronnement de Marie pesant plusieurs tonnes a trouvé ici un refuge contre des intempéries destructrices.
- De vieilles tapisseries recouvrent encore les murs apportant couleurs et sans doute chaleur à toute cette pierre
- Dans la salle du festin une vidéo diffusée dévoile  le déroulement du sacre, fixé sous Saint Louis. 
Elle explique clairement  les symboles qui s’y rattachent ;
ainsi, la remise de l’anneau lie le Roi à son peuple, le sceptre représente le bâton du berger, la main : la justice, la(les) couronne(s) : le pouvoir,  le manteau: la majesté royale et enfin  les étriers et l’épée : la chevalerie.
Après une  cérémonie de 5 à 6 heures  il s’ensuivait un repas  se réduisant d’une centaine à une douzaine de personnes triées sur le volet (en référence à la Cène). Puis le cortège se déplaçait vers la cathédrale Saint Rémi, nom du 1er évêque de Reims à sacrer un roi. 
Après la consécration, le roi touche les écrouelles : Dieu guérit. 
Bien sûr le bâtiment n’est pas qu’un écrin, il est lui-même un monument  digne d’intérêt et un témoignage architectural de l’art gothique, remanié au fil du temps.
Nous nous orientons maintenant vers la basilique Saint Rémi (Reumi), assez  excentrée, ce qui nous permet de marcher après nos piétinements muséaux. 
Nous découvrons  un édifice oscillant entre roman et gothique, lui aussi très endommagé par les bombardements de 14/18 (gros dégâts dans la charpente).
Si l’extérieur  n’atteint pas la splendeur de la cathédrale, l’intérieur est un ravissement.
 On y accède par le transept.
Dans le chœur, le tombeau de Rémi reconstitué au XIXème siècle, est placé derrière l’autel, séparé du  magnifique déambulatoire par un enclos. Des arcades en plein cintre surmontent les chapelles illuminées joliment grâce à une pièce de 2 €
Pour éclairer la nef principale, une « couronne de lumière » est suspendue, équipée de nombreux bougeoirs. Elle s’apparente à celles de l’époque byzantine visible encore en Turquie, dans les mosquées ou à Sainte Sophie. 
Quant aux deux nefs latérales, elles adoptent  des voûtes en ogive supportées par des piliers assez bas ornés de chapiteaux corinthiens grossièrement sculptés.
Des  vitraux laissent  entrer une lumière colorée, et dénotent l’empreinte du gothique.
Enfin, des plaques de marbre divisées en carreaux s’intègrent dans le dallage, avec des incrustations de plomb qui soulignent des dessins figuratifs (ex : Moïse et les juifs).
Lorsque nous ressortons, nous nous arrêtons un moment face à une statue moderne érigée à côté de la basilique qui rappelle le baptême de Clovis âgé de 15 ans et ses 3000 soldats par Rémi : «  Baisse toi fier Sicambre, brûle ce que tu as adoré et adore ce que tu as brûlé »
Nous retournons en flânant vers le centre-ville  en empruntant  la rue des Capucins, 
puis faisons un crochet rue de Vesle pour admirer l’opéra art déco mais fermé au public (rénové après bombardement), les galeries Lafayette et le bâtiment situé  de l’autre côté du tram.
Nous tirons jusqu’à la fontaine Subé surnommée l’asperge : cette petite colonne trapue chapeautée d’une victoire ailée (ou renommée) d’un doré étincelant fut subventionnée par les dons des Rémois.
Mais elle fut peu appréciée à son inauguration à cause des nymphes nues visibles à sa base : en effet, leur nudité représentait une mauvaise publicité pour l’industrie textile des donateurs…. 
Nous nous accordons un temps de repos à la maison  avant de revenir en ville au café du Lion près de la fontaine Subé ; nous dinons vers 21h d’une salade du lion (haricots verts, thon, olives, anchois, salade verte, oignons rouges ) avec une Grimbergen ou une Leffe, en attendant les projections lumineuses sur la cathédrale prévues à 22h45 :  «Les régalia ». 
Un vrai moment de magie nous est offert  en cette fin de soirée:
Au début, un oiseau solitaire lance le spectacle, plus tard  plusieurs volatiles s’éparpilleront en partant de la rosace vers les spectateurs
L’architecture est mise en valeur  par des éclairages  et des ombres sélectifs,
les images disparaissent en mille grains de poussière qui  tombent.
Des tuyaux d’orgue s’affichent sur les deux tours, des bannières colorées se déroulent, des attributs royaux  apparaissent, l’image tremblotante de l’église  lui donne un aspect liquide ou sépulcral
Les différents « tableaux » s’enchaînent sur une musique instrumentale et vocale proche de celle de Bruno Coulais  avec cette voix d’enfant qui me rappelle le film Microcosmos.
Ce spectacle clôture en beauté une journée bien remplie.

1 commentaire:

  1. Merci pour cette visite instructive. Je m'intéresse à Reims, la cérémonie du sacre du Roi. Merci d'avoir sorti de l'ombre un peu la symbolique...

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