Les saisies révolutionnaires vont alimenter les cimaises du
musée de Grenoble et son premier conservateur Louis-Joseph Jay va se montrer particulièrement avisé en choisissant
nombre de toiles remarquables.
Valérie Lagier lui a rendu hommage lors de sa deuxième
conférence aux amis du musée consacrée aux œuvres françaises du XVII°.
Oui, il est question de peinture française, même si la
notion de nationalité est incertaine avec des frontières mouvantes.
Le Lorrain est né en Lorraine qui n’avait alors point Paris
pour capitale, Philippe de Champaigne est né à Bruxelles, Poussin passa sa vie
en Italie, école de tous ceux qui font profession de peindre. Quand il n’y a
plus d’ateliers en France, c’est Rubens, le flamand, qui vient pour la déco.
Ce XVII° siècle connaît
trois rois : Henri IV, Louis XIII, Louis XIV et deux régences de Marie de
Médicis et Anne d’Autriche. La période
est troublée avec huit guerres de religion, alors les commandes des églises
sont plus rares. Les cardinaux Richelieu et Mazarin mécènes et grands
conservateurs ont le pouvoir : la noblesse et les protestants se
soumettent.
La contre réforme est plus lente à se mettre en place chez
nous qu’en Italie.
Les formes picturales seront moins exaltées, plus
cérébrales, plus mesurées, les martyrs moins sanglants.
Un petit livret
intitulé joliment « les couleurs du ciel », disponible au
Musée, situe quelques tableaux de la collection grenobloise dans leur établissement
religieux d’origine en complément d’une
exposition qui aura lieu au musée Carnavalet jusqu’au 23 février.
Plus amateur des impressionnistes que de ces
impressionnants, je regarderai désormais
avec plus d’attention ces tableaux
Claude Vignon et
son Jésus parmi les docteurs a le
réalisme du Caravage, avec une touche vénitienne dans les étoffes.
Jacques Blanchard,
Le Titien français, a peint un Saint
Jérôme émouvant.
Provenant de l'abbaye de Saint-Antoine, l’anachorète, patron des traducteurs est également remarquable
avec ses jambes démesurées, peint par Georges
De La Tour.
Le maître du clair obscur, réputé à son époque puis oublié, fut réhabilité grâce à un
historien de l’art allemand en 1915.
Devant un majestueux paysage, un personnage se bouche le nez
parmi la foule compacte lors de la résurrection de Lazare par Philippe de Champaigne dont l’Assomption de la vierge est plus
retenue que celle de Rubens.
Son christ cloué par
quatre clous, et non pas trois, venant du monastère de la Grande Chartreuse
témoigne de l’influence des jansénistes de Port Royal et de ses scrupules à
respecter les écritures à la lettre. Saint
Jean Baptiste désignant le christ « l’agneau
de dieu qui ôte les péchés du monde » accompagne le courant qui prône
un retour à des règles monastiques plus strictes.
Simon Vouet est
le chef de la colonie française de Rome, il introduit une dimension flamboyante
dans ses peintures. Les belles couleurs
du repos de la Sainte Famille
se retrouvent avec Le christ apparaissant
à Saint Antoine abbé tout en arrondis et drapés gracieux.
Eustache Le Sueur met
en scène Marie Madeleine, souvent choisie par les peintres d’alors, au moment
où elle reconnaît le christ qui lui demande de ne pas la toucher : Noli me tangere.
C’est sa reproduction qui figure en tête de compte-rendu.
Laurent de la Hyre
est fidèle au texte lui aussi avec Les pèlerins d’Emmaüs
"... Or une fois
à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et Ie
leur donna. Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent... mais il avait
disparu de devant eux. Et ils se dirent l'un à l'autre: « Notre cœur n’était-il
pas brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin et qu’ 'il nous
expliquait les Écritures ? »
Il est considéré comme un représentant éminent de
l’atticisme (venant de l’Attique en Grèce), tout en élégance et simplicité.
Charles Le Brun, anobli par Louis XIV, fut l’œil du roi
soleil, sa Marie Madeleine à la grotte de
la Sainte Baume est installée dans un magnifique paysage et les chardons ne
sont pas là par hasard, ils sont le symbole de l’immortalité.
Louis Testelin
est protestant, il répond aux commandes des catholiques ainsi Saint Louis soignant les malades de la peste.
Jean Baptiste Jouvenet met
en lumière, d’une façon quelque peu grandiloquente, Saint Ovide dont les reliques vont connaître un certain succès
avant que des doutes soient émis quant à leur authenticité.
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