Plutôt que de faire semblant d’être dans le match depuis le
bord d’un terrain, en déblatérant au milieu d’explosions irréelles, je vais
essayer de me tenir à ce qui se présente sous mon nez, collé aux écrans. Grace à Facebook, je me tiens au courant d’une certaine vie
de la cité avec « saint- égrévois et fontanilois entre NOUS ».
Cartes de bus trouvées, chats et doudous perdus, clefs
oubliées, propositions de cours de danse, de baby-sitting et plat du jour,
hélicoptère dans le Néron, fumées suspectes … constituent le fil des
informations les plus fréquentes.
Quelques recherches de sociabilité passent
par des questions qui pourraient se résoudre en adressant des requêtes
directement aux moteurs de recherche : « Quelle est la pharmacie de
garde ? » Le ton et les échanges sont très majoritairement courtois,
mais comme l’intitulé du site le mettait en majuscule, la tentation de
« l’entre-soi » émerge parfois avec une certaine méfiance envers ceux
qui viendraient d’ailleurs. Et lorsqu’une tornade casse des branches, la
recherche d’un coupable arrive depuis quelques claviers.
Les bénéfices et limites d’Internet se lisent globalement et
localement.
Je commente rarement sur cet outil de proximité, comme j’ai
restreint mes interventions sur d’autres sites où les désaccords tournent vite
au vinaigre.
Même dans un groupe qui devrait être paisible, puisque
consacré aux dessins du délicat Sempé, l’administrateur est contraint de fermer
parfois les commentaires.
Petit claviste, j'ai été rassuré par mon inaptitude
à modifier le cours des choses. Les puissants auxquels on reproche leur
impuissance sont tellement entravés qu'ils abusent de la parole, bien qu'ils en connaissent les limites, voir l'impuissance des diplomates.
Les seuls à être respectés seraient-ils les porteurs de flingues ?
« Tu vois, le
monde se divise en deux catégories, ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui
creusent. Toi, tu creuses. »
Le bon, la brute et le truand.
Parmi les « vieux cons » de ma génération, souvent protégés
par un anonymat nuisible, nous aurions tendance à prêter nos insuffisances aux
autres. Pour un bon mot on endosserait des costumes à la férocité contagieuse.
Même si je sais bien que les Bisounours ont parfois le cul
sale, je m’en voudrais d’entrer dans la horde des jamais contents, des
méfiants. Maintenant que les slogans « l’école, la santé, c’est l’affaire de
tous » sont devenus obsolètes, car partagés par tous, j’ai tendance à faire confiance aux
pros, à mes kinés, à mes fournisseurs d’infos,
de salades, même si l’effacement de la conscience professionnelle me navre.
Mes anciens camarades, troquant bandiera rossa contre chasuble jaune, ont
fréquenté alors des crèmeries de comédie où coulaient beurre et argent du beurre :
moins d’impôts et plus de service publics.
Cet épisode a écrasé la social-démocratie et les ronds
points ont donné un ton braillard au Palais Bourbon, l’ « argent magique »
a commencé ses tours.
En ce moment, où quand même le problème des déficits
revient au premier plan, il n’est pourtant pas un interviewé qui ne demande pas
des sous à l’état. Cet état honni est toujours sollicité, « Tout
pour ma gueule » demande tout à la collectivité. Et sur le coup, en bon légitimiste, de nouveaux impôts concernant les plus riches me semblent une bonne mesure, au delà d'une symbolique plus forte que ne le croit Darmanin.
Les paradoxes, la dialectique, sont des moteurs, mais ne
doivent pas tourner à l’incohérence. Le PS a demandé la destitution mais ne la
votera pas : qui est déchu ?
Qui déchire la France, mettant en concurrence bourgs et tours ?
Les extrêmes chauffent leurs communautés et la stratégie prend le pas sur les
idées, la laïcité est passée où ?
Les américains nous précèdent toujours: dans notre exposition aux cornfakes news,
la « cancel
culture » entame la diversité des idées par les deux bouts.
Nous n’en sommes plus à demander à voir pour croire,
mais à rechercher à voir ce que
l’on croit.
« Avec un
mensonge on va loin, mais sans espoir de retour. »
Proverbe juif