samedi 24 avril 2021

Serge. Yasmina Reza.

Entre Serge son ainé qu’il a toujours suivi et sa sœur Nana, le narrateur Jean est sans qualité. 
La dramaturge qui les met en scène a toutes les qualités :
humour et tragique, légèreté et profondeur mettent à nu les liens d’une famille juive et mesurent le temps qui passe : 
« Chez ma mère, sur sa table de chevet, il y avait une photo de nous trois rigolant enchevêtrés l’un sur l’autre dans une brouette. C’est comme si on nous avait poussés dedans à une vitesse vertigineuse et qu’on nous avait versés dans le temps. » 
Les enfants de la fratrie devenus adultes se retrouvent lors d'une visite à Auschwitz : 
« Mon frère et ma sœur je nous vois sur cette route bordée de cheminée et de pierres mortes et je me demande ce qui nous a fait tomber fortuitement dans le même nid, pour ne pas dire dans la vie même. » 
où l’omniprésence de selfies pourrait donner lieu à des images faciles, la subtilité au service de la force, va au cœur du mystère humain, sans grandiloquence. 
« Elles vont dire terrible, indicible, etc, à tout bout de champ ? me suis-je demandé. J’ai décidé de ne pas me laisser énerver trop vite par elles. » 
Il se rappelle un reportage sur Verdun : 
« On leur avait dit quinze mille morts sous vos pieds, les boyaux à l’air ! Les touristes extasiés. Ils viennent avec leurs gosses: grand-papa s’est battu pour toi. Pour moi ? Et comment il me connaît, dit le gamin. » 
Avec tant de sincérité, les moments les plus ténus de la vie, prennent une acuité terrible : la tendresse succède à la violence, la lucidité la plus tranchante à l’oubli. 
« Dans le rétroviseur, il m’a semblé un peu content ; le soleil rentrait dans la voiture. Tout était bien. Ou alors tout était triste. Allez savoir comment sont les choses. »

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