L’acteur joue pendant 1h 50 Serge Daney.
Les paroles du critique emblématique des Cahiers du cinéma et de Libération sont portées avec une vivacité extraordinaire. Le dispositif est original et sobre, avec des variations autour d’un extrait de « Rio Bravo » où l’acteur se projette sur l’écran.
Je retournerai lire les « Cahiers » qui m’avaient découragé à force de paroles péremptoires et souvent absconses. Nous recroisons des mots qui tapissaient notre mémoire : « faux raccords, yéyés, portes vitrées, photos charbonneuses, accident métaphysique, Ava Gardner, A bout de souffle, Nuit et brouillard, l’Amérique… »
Dans ce spectacle j’ai surtout retenu les hésitations du passeur, sa modestie, son originalité, et à travers l’évocation de son enfance, cette notion de promesse qui recommence à chaque fois qu’on envisage d’aller dans une salle obscure. L’interrogation sur notre position de spectateur va au-delà des références à nos films préférés, il s’agit rien moins que de notre conception de la vie, des autres.
« Par chance il se trouve que le cinéma - et ça je l'ai découvert plus tard - était né dès le début sur deux jambes, une jambe absolument populaire, basique, triviale, imaginaire, et une jambe cultivée, compliquée, philosophique, élitaire, et qui a fait la critique, et que donc choisir le cinéma c'était sans s'en rendre compte choisir une culture. . . une maison avec deux portes, une porte que tout le monde prend- et qu'il faut prendre sinon on comprend rien au cinéma, et puis aussi une porte dérobée dans laquelle les gens - dès le début. dès le début - ont demandé au cinéma des choses absolument extravagantes. Il suffit de lire. Je sais pas. les textes qu'Abel Gance jeune homme écrivait, c'était quand même un intellectuel malgré tout Abel Gance eh ben moi je m'en suis pas rendu compte à l’époque mais je trouve que c'était le bon choix - ça je le regrette pas - d'avoir choisi le cinéma puisqu'on pouvait y rentrer avec tout le monde ou tout seul. »
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