Voilà qu’entre déraison US et déboires du R.N. dans les prétoires s’invite la Justice en victime des populistes.
De beaux mots mots réapparaissent sur les plateaux de l'équitable balance:
instruction, délibération, « jugement au nom du peuple
français ».
Elus et juges présentés face à face habitent dans la même construction
démocratique héritée des siècles, et c’est notre luxe de pouvoir discuter de
leur légitimité réciproque.
Je ne sais, si je plaiderais encore longtemps contre
l’abstention, mais je respecte d’autant plus le verdict des urnes qu’il fut mis
en cause violemment ici autour des ronds points et là bas aux marches du
Capitole.
Louis XIV : « L’Etat
c’est moi ! »
Mélenchon : « La
République, c’est moi ! »
Ce dernier a estimé que la décision de destituer un élu
devrait revenir au peuple à l’occasion de la peine d’inéligibilité prononcée envers
Marine Le Pen avec laquelle il venait de faire voter la censure du temps de Barnier. Débrouillez
vous pour défendre l’Etat de droit !
Son ami Chavez « n’était
plus l’individu Chavez », il était devenu « la figure même du peuple » rappelle Ronsavallon dans un
entretien au « Monde » où il évoque :
« Camille
Desmoulins disait que le propre de la démocratie est de mettre les mots justes
sur les idées et sur les choses : il faut donc instaurer une vigilance du
langage et poursuivre sans relâche les voleurs de mots et les trafiquants
d’idées. »
La justice dans ses habits et ses rites hors d’âge a permis
à l’humanité de sortir de la loi du Talion. La précision de son vocabulaire, la
lenteur des processus, ne sont pas dans l’air d’un temps voué aux réactions
immédiates de démagogues sans courage, mus par le ressentiment, aux idées
courtes, au lexique réduit. L’impassibilité des instances juridiques permet à
ceux qui l’insultent aujourd’hui de faire appel à elles le lendemain.
Comme je décline, j’ai tendance à m’incliner, et tout en me
parfumant au mot de Clémenceau : « La révolution est un bloc »,
je me sens partie prenante d’une société toute entière juste de ses contradictions.
J’approuve le président centriste choisi par la nation et
respecte le maire écologiste de ma commune, sans besoin de faire valoir une quelconque vertu citoyenne, ni
reconnaître là mon goût des paradoxes. Je pense également à entretenir mon esprit
critique.
Faut-il que nos valeurs se soient effacées pour que le
rappel de fondamentaux paraisse ringard. « J’ai confiance en la justice de
mon pays ». J’ai confiance aussi en mon médecin, à la météo, avec une
foi comme celle du charbonnier, oui, je me
prosterne devant les palais de la République, ses estrades, la comprenant avec tous ces défauts
et pas seulement quand elle punit les adversaires. J’en apprécie la solennité
et les costumes qui l’extraient des vitupérations en claquettes-chaussettes.
L’homme à la coiffe de bison qui contestait la défaite de Trump fait
aujourd’hui partie des gagnants. Le Carnaval continue et le sourire des clowns
se fige en rictus, la justice n’est pas visée que par des pistolets à eau.
D’un côté à l’autre de l’éventail politique ce ne
sont pas seulement les méthodes d’agit prop que nous nous sommes copiées, mais
les masques ont fondu sur les visages et les radicalités se sont exacerbées.
Les barbouillages sur les murs « Police partout, justice nulle part ! » ne peuvent séduire que les délinquants, par contre si « police
nulle part, justice nulle part ! »
Pour un bas de page Voltaire est plus convenable:
« Un jugement
trop prompt est souvent sans justice. »
Non, non, et non...
RépondreSupprimerJe n'oublie pas que :
Dans un des monuments de la littérature qui nous montre l'origine de la justice pour la démocratie athénienne, "Les Eumenides", on voit le procès qui doit aboutir à un verdict de non coupable pour Oreste, en inaugurant le droit au procès par ses pairs. Exit le vieux droit des Erinyes, droit d'origine religieuse, poursuite implacable du coupable d'avoir porté atteinte à sa génitrice, entrée du beau droit d'Athéna, figure de la justice des modernes.
C'est beau, très beau, sauf que... dans ce procès, Apollon argumente, dans la tradition sophistique ? que la femme est le pur réceptacle passif du principe vivant mâle, donc, qu'elle ne compte pour rien dans l'engendrement du nouveau... citoyen ; elle peut donc être balayée aux yeux de la justice de la cité ? Et Athéna, (est-elle vraiment si... équitable que ça dans ce premier procès ?) avoue publiquement sa préférence pour les mâles (tout à fait naturelle, sa préférence, puisqu'elle est sortie en armure, comme Marianne, de la tête de son père, Zeus, sans ETRE PASSEE PAR LES VOIES DU BAS, source de grande humilité, les voies du bas), et donne sa voix pour acquitter Oreste du meurtre de sa mère.
Et voilà l'histoire de notre premier procès.
Très loin d'un quelconque idéal, à mon avis.
En quoi, les Anciens étaient bien plus intelligents que nous, parce qu'ils savaient que dans un monde pasfini, le ver est dans le fruit depuis le départ (ça s'avère souvent vrai, d'ailleurs, pour ceux qui sont observateurs).
Tous les avantages ont leurs inconvénients, et tous les inconvénients ont leurs avantages.
On a les moyens maintenant de constater à quel point une société légaliste (où la loi est maître de tous, et de tout) finit par avoir raison de la loi, et de l'Homme avec. Jésus l'avait constaté. D'autres l'ont constaté. Et ceux d'entre nous qui continuons à pouffer de rire à l'idée de la religion chrétienne, où en sont-ils de leur... naïveté devant ce constat ?
Je ne suis point impressionnée, là.
La religion chrétienne préconise que Jésus revienne... Pour nous sauver du légalisme une autre fois ?
On verra bien.
Entre temps, le symptôme Trump a bon dos devant le poids que pèse le légalisme sur notre société. Je dis bien le légalisme, qui est une forme d'abus de la justice, dans un monde où le mieux est toujours l'ennemi du bien.
Au mot "justice", je préfère le mot "justesse".