jeudi 9 janvier 2025

Les fenêtres. Marie Ozerova.

Au-delà des huisseries et des carreaux, la conférencière devant les amis du musée de Grenoble nous propose quelques ouvertures qui éloignent des ténèbres. 
La « Femme à la fenêtre » du romantique Caspar David Friedrich, vue de dos, nous invite à dépasser l’espace géométrique qui l’enferme, sans nous arrêter à l’anecdote d’un départ éventuel d'un marinier pour rêver d’ailleurs.
Au XI° siècle, les architectes byzantins permettent, depuis les fenêtres triples à l'image de la divinité, que parvienne un éclairage céleste exacerbé par les fonds dorés pour la « cathédrale Sainte-Sophie » de Kiev.
Cette lumière est tout aussi « incréé » chez Duccio di Buoninsegna représentant le royaume éternel, et pas notre monde provisoire. « La crucifixion ».
Les tailles différentes des personnages les situent dans la hiérarchie conformément aux textes, avec « La Maestà » (vierge en majesté) au centre du retable de Sienne composé de plus de 80 panneaux.
La « Vierge à l'enfant avec des anges » de Fra Angelico, lumineuse comme pierre précieuse, en relief sur fond dépourvu de perspective, se situe entre les humains enfermés dans une enveloppe de chair et le divin. Ce doux peintre « était allé visiter le paradis pour revenir le représenter », disait Michel-Ange.
Le paysage derrière « La Vierge à l'Enfant avec saint Laurent et saint Jérôme » de
Francesco Francia de Bologne, représente la terre promise, sereine sous un ciel d’éternité.
Léonard de Vinci
situe haut dans le ciel la maison de la jeune « Madonna Benois » dont les fleurs à quatre pétales évoquent la passion du Christ.
En arrière plan de l’ « Annonciation » de Cima da Conegliano
, le bâtiment en ruine est celui de la religion juive devant laisser la place à l’église chrétienne.
Robert Campin, peintre du Nord, représente en 1420 la vierge dans un intérieur flamand, vêtue de bleu, couleur du ciel.
Rogier van der Weyden s’est représenté en « Saint Luc dessinant la Vierge »,
présence miraculeuse au dessus de la ville vue depuis une terrasse. 
Les « Ouvriers de la onzième heure » de la parabole présentée par Rembrandt  reçoivent autant d’argent que ceux qui ont trimé toute la journée, comme un rappel des « derniers seront les premiers ».  
Dans « Le Chœur de la Chapelle des capucins à Rome » de Granet 
la lumière s’oppose au noir diabolique.
Derrière la charmille où fleurissent les roses mariales, Maurice Denis
peintre chrétien de « La visitation » fait apparaître la Jérusalem céleste.
« Le miracle de Pygmalion et Galatée »
par Boucher, aux couleurs nacrées de conte de fée devant les mains puissantes du sculpteur amoureux de sa statue, va au-delà de la légende : l’art donne vie à la matière inerte.
Toujours au musée de l’Ermitage à Saint Pétersbourg où travaille la conférencière : la richesse à la fois spirituelle et artistique se montre dans « Portrait d’un jeune homme », sans doute un autoportrait de
Domenico Capriolo.
Le veuf
« Antonio Agliardi », représenté par Lorenzo Lotto avec sa défunte épouse, ne l’oublie pas, contrairement à l’écureuil tout proche symbole de l’inconstance.
Les deux arbres ne font qu’un et confirment pour
David  
les liens de « Sapho, Phaon et l'Amour ».
Le bleu est aussi la couleur de l’intimité dans « La conversation » en pyjama de Matisse confirmée par le jardin clôt.  
 Les fenêtres ouvrent sur les secrets de l’art, de la vie émotionnelle, de la vie spirituelle, sur l’ailleurs et l’au-delà. 
« La fenêtre, en province, remplace le théâtre et les promenades. » 
Gustave Falubert.

2 commentaires:

  1. Pour un peu on pourrait oublier toute l'ambiguïté de l'enfermement qui... protège des fois autant qu'il limite. D'où notre très grande ambivalence, il me semble, qui n'est pas prêt à disparaître.
    Pas vu, l'écureuil ? Il n'est pas visible ?
    Pour une fois, le tableau de Roger Van de Weyden me déçoit beaucoup. Je le connais beaucoup plus inspiré...
    Merci pour la visite.

    RépondreSupprimer
  2. Il est au centre dans la partie très sombre.

    RépondreSupprimer