« Le voyageur contemplant une mer de nuages » de
l’Allemand né au bord de La Baltique, en terre anciennement suédoise est devenu
l’image même du romantisme : nous pouvons nous identifier au solitaire vu
de dos, s’arrêtant face à l’infini.
« Lorsque je donne à l’ordinaire un sens élevé, au commun un
aspect mystérieux, au connu la dignité de l’inconnu, au fini l’apparence de
l’infini, alors je les romantise. » Novalis
Apprécié par un cercle restreint de son vivant, oublié après
sa mort en 1840, Friedrich trouvera la faveur du public dans la seconde moitié
du XX° siècle; il fait bon de mieux le connaître avec un fidèle conférencier auprès
des Amis du musée de Grenoble.
Le tempérament mélancolique de Caspar, on dirait dépressif,
peut s’expliquer par une enfance tragique avec la mort de ses sœurs et de son
frère disparu en le sauvant après que la glace ait cédé sous leurs poids.
« Deux
hommes au bord de la mer, au coucher du soleil ».
L’homme si petit face à l’infini, n’est pas une posture
affectée chez lui.
« Deux hommes contemplant la lune »
Né dans « Le port de Greifswald »
en Poméranie, dans la circonscription d’Angela Merckel, il reçoit une éducation
d’un protestantisme rigoureux. Hormis une période de formation artistique à
Copenhague, il s’éloigne très peu d’un axe menant de l’île de Rangen sur la
Baltique à Dresde.
Dans cette ville intellectuelle, « La fenêtre ouverte » donne sur l’Elbe. A bien observer cette aquarelle sépia (encre de
seiche), on aperçoit une partie de son visage dans le miroir.
Il marche beaucoup dans cette « Suisse saxonne »,
multiplie les dessins d’arbres, âmes de la nature, mais réinvente les paysages dans
son austère atelier.
Pendant ses séjours en forêt, il ne rencontre âme qui vive, alors
sa sensibilité en accord avec la nature interroge la création : « Portrait
rupestre d'Uttewald ».
« Le retable de Tetschen » exposé
parmi des cierges dans son atelier d’où il s’est absenté, deviendra un
manifeste de la nouvelle peinture romantique.
« Clos
ton œil physique afin de voir d’abord avec ton œil de l’esprit. Ensuite, fait
monter au jour ce que tu as vu dans ta nuit. »
La subjectivité permettrait de retrouver l’unité perdue avec
la nature.
« Matin
sur le Riesengebirge » : la bien
aimée amène vers Dieu, vers la croix toujours sur les hauteurs.
Le « Paysage de Bohême » est
sublimé.
« Ce qu'il y a de plus sublime dans les œuvres de l'esprit humain est peut-
être aussi ce qu'il y a de plus naïf. » V. Hugo.
Parmi les sapins, une église également élancée vers le ciel,
apparaît près d’un homme priant, ayant abandonné ses béquilles : « Eglise
dans un paysage d’hiver »
Dans le « Paysage d'hiver » le chêne est
foudroyé parmi d’autres arbres coupés, comme le furent tant de vies fauchées
par les armées napoléoniennes.
Le nationalisme allemand naît à cette époque, la « tombe
hunnique » marque le territoire au moment où les thèmes
nordiques reprennent vigueur et que se réinvente le moyen âge.
L’ancre abandonnée du « Port au clair de
lune », au premier plan de la toile où bateaux et clochers se
côtoient, symboliserait l’espérance religieuse attaquée par la raison
d’une révolution récente venue de chez nous.
Le silence du « Moine au bord de la mer » est radical, sans compromis.
« Il n’est rien de plus triste et de plus pénible
qu’une pareille situation dans le monde: être la seule étincelle de vie dans
l’immense empire de la mort, […] comme dans sa monotonie et son infinitude il
n’a d’autre premier plan que le cadre, on a l’impression, en le contemplant,
d’avoir les paupières coupées. »
Kleist
Il se marie à 44 ans, elle en a 19.
Caroline est en rouge dans « Falaises de craie à Rügen ».
Le tsar
Nicolas Ier avait acheté « Sur
le voilier » à la trajectoire sûre, au mouvement paisible.
« Le Naufrage
de l'Espoir » du
nom du bateau que les puissantes mâchoires de glace ont broyé. « Cet homme a découvert la tragédie du
paysage. » David D’Angers
Parmi tant de
cimetières souvent sous la neige, « L’entrée du cimetière »
est peut être le plus poignant : un couple reste à la porte, la tombe de
leur enfant est encore ouverte.
« L'arbre aux Corbeaux », propriété
du Louvre où la peinture allemande est peu présente, est de taille modeste
comme beaucoup de ses œuvres qui donnent pourtant de l’ampleur aux paysages, où
la centralité des éléments naturels n’était pas évidente pour ceux qui fréquentaient
pourtant les musées.
Et pourtant « Le grand enclos » pourra inspirer
Hodler ou Valotton.
Son portrait
par Gerhard von Kügelgen dit bien l’intensité du regard de l’artiste :
« Le peintre ne
doit pas seulement peindre ce qu’il voit devant lui, mais aussi ce qu’il voit
en lui-même »
« Je dois me donner à ce qui m'entoure, m'unir
aux nuages et
aux rochers pour être ce que je suis »
Merci pour cette visite, Guy.
RépondreSupprimerUn seul petit bémol, pourtant.
Je n'aime pas bien entendre la belle, la grande.. mélancolie réduite à notre piètre mot "dépression", ni qu'on fasse des explications pour en rendre compte.
L'Occident cultive une grande histoire d'amour avec la mélancolie.
Elle est consubstantielle de la conscience elle-même, de la présence à soi.
Nos ancêtres, plus cultivés que nous, avions bien conscience de cela.
C'est toute notre... insignifiance d'avoir réduit la mélancolie à une étiquette du DSM 4.
Nostra summa culpa, Guy.