jeudi 4 mai 2023

Anna-Eva Bergman. Thomas Schlesser.

Le directeur de la fondation Hartung-Bergman, auteur du livre « Anna-Eva Bergman, vies lumineuses », commissaire de l'exposition « Rothko-Hartung : une amitié multiforme », était à l’écran devant les amis du musée de Grenoble, en écho de l’exposition consacrée à la dessinatrice, peintre et graveuse : « Voyage vers l'intérieur » du 31 mars au 16 juillet 2023 au musée d’Art Moderne de Paris.
« Atelier à Antibes ».
Née à Stockholm en 1909, elle devient norvégienne après le divorce de ses parents, copie son oncle qui fait de la copie, mais dans la famille duquel, elle garde surtout le souvenir de ses peurs.
Sa mère qu’elle ne voit qu’épisodiquement se sert de la tenace petite fille comme cobaye pour ses expériences d’orthopédie. « Portrait 1933 » Elle étudie à l’Académie des Beaux-Arts d’Oslo, à Vienne à École des Arts Appliqués puis à Paris dans l’académie d’André Lhote. Après avoir été imperméable à l’art moderne lors de ses premiers contacts, elle sera marquée par son compatriote Münch, avant sa rencontre et son mariage avec Hans Hartung de nationalité allemande comme Georg Gross, Otto Dix au « réalisme magique » dont l’ironie l’inspirera en particulier dans ses dessins satiriques.
« Anna-Eva Bergman et Hans Hartung »
Les jeunes mariés s’installent à Minorque, mais le typhus et l’incompréhension du voisinage allant jusqu’à des soupçons d’espionnage les chassent de ce « Paradis »ensoleillé et pas cher. De retour à Berlin, elle est également suspectée d’espionnage par les nazis.
Elle publie « Turid en Méditerranée » et quitte Hartung en 1937. Elle épouse le fils de l’architecte Lange érudit médiéviste avec lequel elle poursuit ses recherches sur la divine proportion, tout en s’initiant aux techniques avec feuilles d’or ou d’argent. 
Son remariage est un fiasco, tandis que Hans se remarie avec Roberta Gonzalez, fille du sculpteur Julio Gonzalez qui l’a accueilli dans son atelier.
« Composition n° 5 »
Pendant la guerre, elle se réfugie dans les montagnes norvégiennes pour fuir la réquisition des Allemands en tant que traductrice.
« 
No 26-1981 » Lors de ses voyages en bateau le long des fjords, son goût de la spiritualité l’amène à aller à l’essentiel des lignes.
« Deux formes noires »
Elle devient une peintre, rendant la beauté fascinante des îles et la lumière du soleil de minuit, passant à l’abstraction à partir des fissures de rochers, en venant à une « scissiparité » géologique, soulevant les montagnes.
« La grande montagne » Elle a connu Rothko et Soulages,
« Grand horizon bleu »
, espace accessible et pourtant inatteignable.
« Œuf d’or ou Un Univers » (1960) C’est du Finnmark et de la Norvège du Nord que je rêve. La lumière me met en extase. Elle se présente par couches, et donne une impression d’espace différents qui sont en même temps très près et très lointains. On a l’impression d’une couche d’air entre chaque rayon de lumière, et ce sont ces couches d’air qui créent la perspective. C’est mystique. »
« No Ca-1948-50 »  A l’approche de la genèse du monde dans ces lieux dépouillés, elle  donne un rythme et anime le monde minéral. Les pierres en deviennent «  quintessentielles ». Elle est retournée à Berlin où les gravats persistent dans l’après guerre, les blessures de l’histoire sont aussi minérales.
Elle se remarie avec Hans Hartung vingt huit ans après leur premier mariage,
ils s’installent dans la quiétude à Antibes en 1973 dans une maison dessinée par leurs soins,
36 ans après leur première maison de Minorque. Hans l’amour de sa vie, s’associait pour elle, à Fra Angelico et Bach sur le sentier d’une piété cosmique. Elle meurt en 1987.

1 commentaire:

  1. En regardant... les grandes lignes, je ne peux m'empêcher de trouver que la révolution qu'apporta la Renaissance italienne dans la manière de rendre l'incarnation (de l'Homme), cette... douceur qu'on peut voir dans les visages des madones, des femmes à l'enfant, cette tendresse, tout cela a progressivement fui notre monde... moderne, au profit de cette passion folle pour l'abstraction... de l'Absolu qui finit par avoir raison de l'Homme, et le détruire comme roseau pensant et sensible. Malgré une beauté tenue dans certains des tableaux ci-dessus, je vois... une terrible errance, et la défaite de l'Homme qui continue à l'entraîner vers le fond.

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