dimanche 28 mai 2023

Othello. Jean- François Sivadier.

Trois heures pour un chef d’œuvre datant de 1603 et qui toujours nous concerne : il faut le faire,  surtout que les dégâts de la jalousie ne constituent pas forcément pour moi un enjeu majeur. 
« La jalousie ? Un monstre qui s'engendre lui-même et se nourrit de soi. » 
Othello va préférer écouter un arriviste retors plutôt que son amoureuse qu’il dit aimer très fort.
Dans le balancement éternel de la fidélité à la version originale et son actualisation, le metteur en scène mêlant habilement la comédie à la tragédie, réussit une nouvelle fois à nous intéresser. Délicate opération quand l’accumulation burlesque des cadavres évite le grotesque. 
Même si des procédés deviennent par trop coutumiers : acteurs venant de la salle, décors en suspension … le grand linceul final m’a paru somptueux. 
Nicolas Bouchaud  en Iago, d’une cruauté manipulatrice emblématique, séduit une fois encore.
Son dernier geste dessinant au sang le sourire du Joker concentre tout le propos du metteur en scène de 2023, après le « white face » d’Othello ayant fait volte face depuis son amour absolu devenu haine envers Desdémone.
Même si parfois on peut se demander si des répliques sont vraiment de Shakespeare, les réflexions sur les femmes au volant étant carrément inutiles, tant de sagesse, d’acuité, de poésie venant de si loin méritent les guillemets : 
« Il ne tient qu'à nous d'être ceci ou cela : nos corps sont des jardins, dont nos volontés sont les jardiniers, de sorte que si nous voulons y planter des orties, ou y semer de la laitue, y mettre de l'hysope et y sarcler du thym; les combler d'une seule espèce d'herbe où les troubler en en semant plusieurs; les rendre stériles par l'oisiveté, ou les féconder par le travail, eh bien, le pouvoir et l'autorité qui dirige tout cela résident dans le vouloir. » 

1 commentaire:

  1. Et bien, je suis contente d'avoir échappé à ça... je ne supporte pas Sivardier depuis le temps. Notre petit groupe a échappé à la traduction d'"Othello" car je ne voulais, ne pouvais, pas supporter de me plonger dans cet univers si désespérant.
    Le pouvoir de notre volonté ? Au point où j'en suis de mon existence, il me paraît bien faible face à autant de déterminations qui pèsent si lourdement sur nos destins.
    Pour "Othello", il se trouve que Desdémone trahit son père, et ce faisant, elle agit pour mettre en question sa... fidélité, comme le père fait si bien remarquer à Othello, qui finit par succomber à cette parole.
    Et puis, qu'est-ce qu'une femme va faire dans une garnison, en plein milieu de braves militaires ? Desdémone et Othello paient très cher leur besoin d'aventure et exotisme (qu'on peut comprendre...).
    Oui, la fin m'inspire une horreur et une pitié comme Aristote avait compris. Elle est terrible...Je doute que Sivardier soit à la hauteur des enjeux de cette tragédie.

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