Les bateaux chargés de clandestins arrivent chez nos voisins italiens ou dans quelques enclaves espagnoles au Maroc, mais aussi en territoire français à Mayotte où des habitants des Comores voisines veulent bénéficier d’un meilleur niveau de vie.
L’auteur de cette BD est
un médecin dont j’avais trouvé également très fort, le premier
album « Soupe froide ».
Il dresse ici en 435 pages un portrait de l’île aux charmes
coloniaux vénéneux ; la misère existentielle occidentale trempe ses pieds au
bord du lagon où les habitants miséreux d’Anjouan se noient parfois lors de
traversées périlleuses.
Des hommes venus de Paris ou Grenoble sont à la recherche
d’un Eldorado tout comme les belles malgaches qu’ils vont rencontrer.
« Et quand t'es
une belle fille, l'infinie misère est toujours moins profonde que quand t'es un
mec. Surtout quand des Blancs avec des cartes bleues traînent en boîte de
nuit. »
Le sexe apparait comme une exploitation parfois consentie,
sans caricature.
Nous suivons une sage-femme qui débarque dans le milieu
« métro » où nous croisons un gérant d’un magasin de téléphonie au
romantisme saugrenu. Les idéalistes doutent, un des protagonistes est bien
chargé, mais la galerie des portraits est variée comme celles de leurs
conquêtes.
Le récit de traversées dangereuses à bord des « kwassas »
scande les chapitres où les dessins efficaces teintent de nuit un découpage
limpide.
Les nuances, les contradictions, la reconnaissance des faiblesses humaines
n’amoindrissent pas la force du témoignage militant, au contraire !
Nous avons la chance d’être né du bon côté de la frontière, ne
pourrait-on avoir un peu plus de compassion envers les pauvres, les dépouillés ?
Pourquoi.... est-ce que par moments je n'ai pas tant que ça l'impression d'avoir eu de la chance, Guy ? (Mais ne crois-pas que j'estime que je suis à plaindre, non plus...)
RépondreSupprimerParce que je suis une petite enfoirée à tête brûlée qui n'arrive pas à m'extasier sur tous les bienfaits de mon niveau de vie ? (Encore que je n'ai pas tous les gadgets, donc je suis peut-être... moins chanceuse ? moins condamnée ? que d'autres ?)
Difficile à savoir qui il faut envier en ce moment (puisqu'on carbure à l'envie, il faut croire)... les sédentaires d'Occident qui appuient sur des boutons pour faire leur travail plus vite, en mettant le réveil pour partir courir afin de ne pas trop s'engraisser, et parfois meurent... gaga à des âges incroyables dans les maisons de retraite, les "pauvres" qui bouffent les produits bas de gamme de l'industrie agroalimentaire et s'engraissent... au chômage, ou les "pauvres" qui vivent dans les lieux que nous regardons avec pitié, mais.. qui savons encore, pour certain(e)s, fabriquer avec la sueur de leur front, et par leurs mains, de beaux objets que nous ne pouvons même plus apprécier, tellement nous sommes gavés de came bon marché, à la portée de toutes les bourses.
De quelque côté qu'on se trouve...clandestin abreuvé des images de la télé occidental désirant fuir son... quotidien misérable, encore plus misérable qu'il a une télé qui lui montre l'herbe de l'autre côté de la barrière, ou.. nanti abreuvé des images du paradis perdu dans les tropiques, désirant fuir son quotidien terne et morne, son état de sans désir, l'El Dorado... ça reste le paradis.. "perdu".
Personnellement, je ne vois pas que je suis à envier, Guy. Plutôt.. ce qu'on m'envie a eu un prix... pour moi, et pour nous, de manière générale.
La contrepartie intéressante de cette position, c'est que je n'estime pas de manière inconditionnelle que le "pauvre" est à plaindre, et je ne trouve pas.. décent ? de vouloir... A TOUT PRIX qu'il ME ressemble.. pour son "bien", bien entendu...