Le ciel arbore à nouveau ses couleurs des beaux jours, mais la température prouve qu’on n’est pas encore en été. Notre logeuse met à notre disposition son téléphone pour que nous communiquions avec nos familles et french friends.
Nous sommes contraints de quitter notre Métro bondé pour un problème de portes qui ne ferment pas normalement. Une charmante dame s’inquiète de notre sort et nous oriente pour poursuivre notre chemin, nous ne nous en sortons pas mal après avoir demandé à des employés municipaux rassemblés, vêtus de vert, jaune, orange fluo (sont-ils en grève ?)
Nous nous faufilons avec bonheur dans la queue des propriétaires du sésame Pass City, plus rapide que l’autre file sans billet. Il faut passer un contrôle de sécurité avec portique et vérification des sacs par des machines vidéos, enlever veste, montre, ceinture, vider ses poches, c’est à peine s’il ne faut pas découdre les fermetures éclair tant les engins sont sensibles. Les postes sont nombreux, les policiers diligents et organisés et la foule des touristes s’entasse dans les ferries assez rapidement. Nous nous installons sur le pont supérieur dont les bancs sont inutiles, nous sommes mieux debout pour découvrir la vue du quai et des gratte-ciel que nous laissons dans notre dos, et pour photographier Miss Liberty qui nous regarde approcher.
Le ferry se vide presque entièrement. Nous louons des audio-guides en français pour 7 $ et commençons par contourner la statue de Bartholdi, véritable mastodonte sur son piédestal. Nous devons confier obligatoirement nos sacs à dos à la consigne et devons subir un deuxième contrôle de sécurité qui fait râler ma femme d’ordinaire patiente. Pour la première fois nous testons le portique scanner qui nous propulse de l’air par le bas et nous fait dresser les cheveux sur la tête. Nous enchaînons avec le portique traditionnel avant de pouvoir nous rhabiller. Enfin nous sommes autorisés à pénétrer dans le musée, très bien fait où nous découvrons que Violet Leduc puis Eiffel ont contribué à fabriquer la structure métallique intérieure de la statue, avec une armature suffisamment souple, comme pour les ponts, nécessaire pour affronter la puissance des vents. La statue fait face à la France en signe de reproche envers le manque de libertés sous le règne du « dictateur Napoléon III ».
Nous faisons le tour du monument, et au moment de récupérer les sacs à la consigne, nous sommes refoulés d’urgence vers l’entrée du site, au-delà de l’esplanade au drapeau américain dont l’espace vidé est seulement occupé par une policière et un soldat lourdement armé. On attend la levée de l’alerte pour savoir qu’il s’agissait d’un sac trouvé abandonné : les américains sont chatouilleux sur les questions de sécurité, nous avait- on dit.Le ferry nous transporte à deux brasses de là, à Ellis Island, l’île qui vit passer la multitude des immigrants pauvres (12 millions) du vieux continent entre1892 et 1954. Toujours avec l’audio guide après une coupure repas sandwichs-frites dans une salle du musée, qui servait de réfectoire, nous suivons le périple de l’immigrant débarqué : la salle des bagages, la salle d'enregistrement. Des médecins, postés en haut des marches, faisaient un premier diagnostic en observant comment les immigrants montaient les marches. 2% étaient repoussés.
C’était la porte de la terre promise, au risque d’être écarté par un signe à la craie tracé sur le vêtement. La nourriture paraissait parfois exotique aux nouveaux arrivants ; comme cette polonaise qui engloutit une banane avec la peau, ou cet autre ayant donné son plat aux oiseaux. Etaient refoulés les gens présentant des maladies contagieuses, ainsi se servant de retourne boutons, les médecins vérifiaient-ils les yeux malades.
Tout était prévu pour lâcher ensuite les immigrants à l’aventure : banque, provisions, plan des chemins de fer… Les lieux sont gardés tels quels, avec leurs carrelages muraux blancs et des pans de murs avec graffitis sont conservés. Beaucoup de panneaux présentent des portraits, des bateaux « faisant leur beurre » grâce aux troisièmes classes peu exigeantes en service, mais entassées en grand nombre sans confort. L’exil s’explique par les pogroms, les persécutions en Europe… Nous n’avons pas le temps de finir complètement la visite, la fermeture est proche ainsi que le dernier ferry qui nous mène à Manhattan au Battery Park.
Nous longeons l’Hudson sur une promenade piétonne aménagée bien agréable pour les touristes, les joggers et les chiens tenus en laisse ; nous sommes attirés par un bâtiment en verre à l’intérieur duquel nous apercevons de palmiers. C’est le World Financial Building qui une fois traversé, nous place face à la fosse gigantesque laissée par les tours jumelles. Déjà neuf ans. Plaie qui tarde à cicatriser, vaste chantier qui ne s’élève pas vite. Nous ne voyons aucune marque, aucune indication, aucun commentaire qui retrace la tragédie.
Nous rejoignons à pied Wall Street, la Bourse et la statue de Washington. Nous cherchons le taureau emblème du quartier de la finance, symbole de l’optimisme, au contraire de l’ours, pessimiste, ainsi les investisseurs haussiers ou baissiers. Cette bête puissante et virile en bronze d’Arturo Di Modica inspire les touristes en quête de photos souvenirs.
La nuit tombe, l’obscurité s’installe vite entre les buildings qui rivalisent de richesse et de hauteur.
Nous prenons le chemin du retour par le Métro C.La photo 2 est de Dany et la 3 du musée.
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