Nos nouveaux chauffeurs arrivent au petit déjeuner dans
deux 4X4 pour affronter les pistes d’un paysage qui change. Nous nous
arrêtons au bord d’un lac où nous dérangeons un homme qui se baignait nu,
il nous montre de l’autre côté de la route les restes brulés et putréfiés d’un
crocodile dévoreur de troupeaux qui venait s’alimenter dans cette crique :
il a fallu 18 hommes pour l’extirper de l’eau.
Sur le parcours nous achetons des bananes et des
pommes-cannelles. Au bord de la route, des enfants font montre de leur agilité
par des danses expressives, avec des roues, de grands écarts de face et pas
seulement de profil.
Nous nous arrêtons dans un village dorze de Chencha à 2500 m d’altitude. Les cases
tressées en forme d’ogive rappellent les
éléphants de jadis qui ont fui vers le Kenya. Ces constructions traditionnelles
s’élèvent facilement jusqu’à une dizaine
de mètres et leur durée de vie va de 70 à 100 ans. Le tressage en feuilles de
faux bananiers est rénové tous les 20 ans. Quant aux bambous qui constituent
l’armature, lorsqu’ils sont grignotés par les termites depuis la base, ou
abimés par l’humidité, la case diminue peu à peu. Il faut alors réajuster les
portes puis elle sera recyclée en annexe. Il existe une petite case pour les
jeunes mariés en attendant la
construction de leur case familiale. Un jeune guide rasta, Yoyo, nous fait
visiter l’intérieur de l’une de ces cases où les chaises en peau de vache
reçoivent les voisins lors des cérémonies du café qui se multiplient dans la
journée avec un facteur 3, puisque 3 services sont prévus à chacune des 3
invitations. C’est sur cette proposition de rythme que nous sommes réunis
autour d’un verre d’araké provenant du faux bananier(encète) agrémenté d’ail,
d’anis et titrant ses 65 °. Nous nous en
tiendrons à deux tournées hilarantes après la galette au piment puis au miel.
Quand on boit avec ses amis de la bière il convient de boire au goulot de la
calebasse, à deux en même temps, puis on transmet à deux autres.
Nous suivons le processus de fabrication des galettes cuites entre deux feuilles sur un feu
d’eucalyptus : de l’extraction de la pulpe depuis les feuilles qui donnent
également des fibres fournissant des cordages voire des cordes pour les
instruments de musique.
La pulpe est mise à vieillir passant d’une odeur de
concombre à celle du fromage. Le stockage peut aller de 3 mois à 7 ans.
Après dégustation des produits locaux qui ne nous ont pas
laissé indifférents, nous négocions de l’artisanat local dont la spécialité est
le tissage du coton cultivé près du lac, ramassé par les enfants, filé par les
femmes et tissé par les hommes. Les sobres étoles sont appréciées.
Au marché sont vendues des graines de tef, qui entrent dans
la fabrication des galettes et du gingembre.
Sur le chemin du retour, au moment où nous nous arrêtons
pour observer un beau point de vue un groupe d’enfants entame un chant
responsorial très rythmé. Le soliste raconte ce qu’ils veulent en tant
qu’écoliers et ce qu’ils n’ont pas en n’allant pas à l’école. Nous les
enregistrons y compris les demandes de T-shirts. Lorsque nous poursuivons la
route très pentue, les enfants prennent des raccourcis et réapparaissent avec
leurs danses. Tout est dans le déhanchement différent au nord avec les épaules
qui remuent alors qu’autour de l’Omo c’est plutôt le saut comme chez les Masaï.
A Arba Minch où nous nous dirigeons directement vers l’hôtel
Tourism qui a plusieurs restaurants très fréquentés et de nombreux bâtiments
aux chambres en rez de chaussée avec petits balcons et salons de jardin. Repas
aux chandelles dehors sous une température agréable au chant des grillons.