lundi 2 février 2009
« Il Divo »
J’aime l’Italie, et je fais à chaque fois l’étonné quand s’accumulent les preuves d’un état gangréné par la maffia. Pas besoin d’être très au fait des arcannes de la vie politique de nos voisins, le parcours d’Andreotti de ces cinquante années au pouvoir est accablant pour la société transalpine, et en même temps le cinéma français est bien incapable de produire un film aussi fort sur son personnel politique. L’humour du « pape noir », de « l’inoxydable » lui épargne un costume trop caricatural de salaud :"on m’accuse à peu près de tout, sauf des guerres puniques". Chaque plan est parfait, non comme un habillage branché, mais au service d’une investigation, qui va au-delà d’un destin politique : la caméra s’approche du masque de l’énigmatique insomniaque, et balaie les sombres palais Romains à un rythme endiablé. « Belzébuth » va se confier à un prêtre très tôt le matin, entouré d’une armada de policiers ; des suicides, des règlements de compte s’accumulent en parallèle, Aldo Moro est sacrifié. Des cartouches assassins énoncent la grossièreté de l’immunité du sénateur. Nous suivons le bossu impénétrable et solitaire dans sa vie de petit bourgeois migraineux, nous entendons la férocité de l’état et notre incrédulité s’excite :"le mal est nécessaire pour arriver au bien".
dimanche 1 février 2009
Arena à la MC2
Sur la scène, une idée d’arène pour un spectacle de flamenco. Le plancher vibre sous les pas énergique du danseur, dispositif élémentaire pour cette danse du corps tendu : claquement de doigts, frappe des mains, talons rageurs. Les chants envoûtants aux accents arabes s’ajoutent à l’évocation de la corrida dont le vocabulaire me demeure bien mystérieux avec des intermèdes présentant des vues de foule sur écran : pourquoi ces mouchoirs s’agitent? Mais la vitalité primale de la danse en dialogue avec la musique est là, intensément. Le mâle se cambre, en défi, en rupture, en attente, en explosion, même avec une pointe d’ironie. C’est l’occasion d’aller rechercher le poème de Llorca pour la mort d’Ignacio Sanchez Mejias.Il cogne au cœur et se marie à la danse,terriblement. A las cinco de la tarde:
« … Les plaies brûlaient comme des soleils
à cinq heures du soir,
et la foule brisait les fenêtres
à cinq heures du soir.
A cinq heures du soir.
Aïe, quelles terribles cinq heures du soir!
Il était cinq heures à toutes les horloges.
Il était cinq heures à l'ombre du soir! »
« … Les plaies brûlaient comme des soleils
à cinq heures du soir,
et la foule brisait les fenêtres
à cinq heures du soir.
A cinq heures du soir.
Aïe, quelles terribles cinq heures du soir!
Il était cinq heures à toutes les horloges.
Il était cinq heures à l'ombre du soir! »
samedi 31 janvier 2009
Histoire de France en chansons
Livre utile et agréable édité par Larousse sous l’égide de France bleu.
Les chansons accompagnent notre vie, elles distinguent les générations :Johnny enterra Tino et NTM démoda « Chanson plus bi florée »,elles constituent ici une culture commune.
Les auteurs ont mêlé les chansons d’une époque et des évocations contemporaines, ainsi « Faut rigoler » d’Henri Salvador ouvre la chronologie à la page nos ancêtres les gaulois jusqu’à Mickey 3D « d’ici quelques années, on aura bouffé la feuille »
- Occasion de déguster des couplets ignorés
« Quand Dagobert mourut,
Le diable aussitôt accourut ;
Le grand saint E loi
Lui dit : Ô mon roi !
Satan va passer,
Faut vous confesser.
Hélas dit le bon roi,
Ne pourrais-tu mourir pour moi »
« Hideux dans leur apothéose
Les rois de la mine et du rail
Ont-ils jamais fait autre chose
Que dévaliser le travail ?
Dans les coffres-forts de la banque
Ce qu’il a créé s’est fondu ;
En décrétant qu’on le lui rende
Le peuple ne veut que son dû.
(Au refrain) : C’est la lutte finale… »
- de découvrir par exemple « le printemps retourné » (1586)
« Nous ne tenons plus de foy
Ny de loy,
Tant nous sommes gens
Ignares.
Nous sommes esblouis
Des cieux,
Gratieux
A tous nos peschez barbares »
- de constater dans ce petit dictionnaire que la délicieuse Marianne de Delpech passe à la postérité, ainsi que Renaud, Graeme Alwright, Montand, Lavilliers, Souchon… que du bon.
- de retrouver :
« Ces messieurs de Grenoble avec leurs longues robes
Et leurs bonnets carrés »
« Nous tisserons le linceul du vieux monde »
« J’aime Jeanne ma femme :
Eh bien ! j’aime mieux
La voir mourir que voir
Mourir mes bœufs »
Les chansons accompagnent notre vie, elles distinguent les générations :Johnny enterra Tino et NTM démoda « Chanson plus bi florée »,elles constituent ici une culture commune.
Les auteurs ont mêlé les chansons d’une époque et des évocations contemporaines, ainsi « Faut rigoler » d’Henri Salvador ouvre la chronologie à la page nos ancêtres les gaulois jusqu’à Mickey 3D « d’ici quelques années, on aura bouffé la feuille »
- Occasion de déguster des couplets ignorés
« Quand Dagobert mourut,
Le diable aussitôt accourut ;
Le grand saint E loi
Lui dit : Ô mon roi !
Satan va passer,
Faut vous confesser.
Hélas dit le bon roi,
Ne pourrais-tu mourir pour moi »
« Hideux dans leur apothéose
Les rois de la mine et du rail
Ont-ils jamais fait autre chose
Que dévaliser le travail ?
Dans les coffres-forts de la banque
Ce qu’il a créé s’est fondu ;
En décrétant qu’on le lui rende
Le peuple ne veut que son dû.
(Au refrain) : C’est la lutte finale… »
- de découvrir par exemple « le printemps retourné » (1586)
« Nous ne tenons plus de foy
Ny de loy,
Tant nous sommes gens
Ignares.
Nous sommes esblouis
Des cieux,
Gratieux
A tous nos peschez barbares »
- de constater dans ce petit dictionnaire que la délicieuse Marianne de Delpech passe à la postérité, ainsi que Renaud, Graeme Alwright, Montand, Lavilliers, Souchon… que du bon.
- de retrouver :
« Ces messieurs de Grenoble avec leurs longues robes
Et leurs bonnets carrés »
« Nous tisserons le linceul du vieux monde »
« J’aime Jeanne ma femme :
Eh bien ! j’aime mieux
La voir mourir que voir
Mourir mes bœufs »
vendredi 30 janvier 2009
L’appel des appels
Et après la manif ?
Le texte ci-dessous montre la cohérence des réformes engagées par la droite au-delà des ressentis dans des domaines différents.
C’est le cœur de l’humanisme qui est visé.
Déjà qu’ils ont été désastreux avec nos sous !
Certes nous sommes sollicités quotidiennement pour signer des pétitions mais le ton de celle-ci a convaincu déjà 20 000 personnes.
L'initiative de l'"Appel des appels" revient à Roland Gori, professeur de psychopathologie de l'université d'Aix-Marseille. "J'étais frappé d'entendre, dans des milieux variés qui ne se connaissent pas forcément, s'exprimer la même souffrance sociale. C'est comme une maladie du lien social, qui proviendrait de l'indexation de notre civilisation sur les valeurs de l'ultralibéralisme. On impose aux professionnels des logiques de mobilité, de flexibilité, de traçabilité et de profit à court terme, dans une logique de casse des métiers. Or, ces valeurs nous ont conduits directement à la crise."
L'Appel des appels cherche à fédérer la protestation sociale
« Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, attirons l’attention des Pouvoirs Publics et de l’opinion sur les conséquences sociales désastreuses des Réformes hâtivement mises en place ces derniers temps.
A l’Université, à l’École, dans les services de soins et de travail social, dans les milieux de la justice, de l’information et de la culture, la souffrance sociale ne cesse de s’accroître. Elle compromet nos métiers et nos missions.
Au nom d’une idéologie de "l’homme économique", le Pouvoir défait et recompose nos métiers et nos missions en exposant toujours plus les professionnels et les usagers aux lois "naturelles" du Marché. Cette idéologie s’est révélée catastrophique dans le milieu même des affaires dont elle est issue.
Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, refusons qu’une telle idéologie mette maintenant en "faillite" le soin, le travail social, l’éducation, la justice, l’information et la culture.
Nous appelons à une Coordination Nationale de tous ceux qui refusent cette fatalité à se retrouver le 31 janvier 2009 à Paris. »
http://www.appeldesappels.org/
Le texte ci-dessous montre la cohérence des réformes engagées par la droite au-delà des ressentis dans des domaines différents.
C’est le cœur de l’humanisme qui est visé.
Déjà qu’ils ont été désastreux avec nos sous !
Certes nous sommes sollicités quotidiennement pour signer des pétitions mais le ton de celle-ci a convaincu déjà 20 000 personnes.
L'initiative de l'"Appel des appels" revient à Roland Gori, professeur de psychopathologie de l'université d'Aix-Marseille. "J'étais frappé d'entendre, dans des milieux variés qui ne se connaissent pas forcément, s'exprimer la même souffrance sociale. C'est comme une maladie du lien social, qui proviendrait de l'indexation de notre civilisation sur les valeurs de l'ultralibéralisme. On impose aux professionnels des logiques de mobilité, de flexibilité, de traçabilité et de profit à court terme, dans une logique de casse des métiers. Or, ces valeurs nous ont conduits directement à la crise."
L'Appel des appels cherche à fédérer la protestation sociale
« Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, attirons l’attention des Pouvoirs Publics et de l’opinion sur les conséquences sociales désastreuses des Réformes hâtivement mises en place ces derniers temps.
A l’Université, à l’École, dans les services de soins et de travail social, dans les milieux de la justice, de l’information et de la culture, la souffrance sociale ne cesse de s’accroître. Elle compromet nos métiers et nos missions.
Au nom d’une idéologie de "l’homme économique", le Pouvoir défait et recompose nos métiers et nos missions en exposant toujours plus les professionnels et les usagers aux lois "naturelles" du Marché. Cette idéologie s’est révélée catastrophique dans le milieu même des affaires dont elle est issue.
Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, refusons qu’une telle idéologie mette maintenant en "faillite" le soin, le travail social, l’éducation, la justice, l’information et la culture.
Nous appelons à une Coordination Nationale de tous ceux qui refusent cette fatalité à se retrouver le 31 janvier 2009 à Paris. »
http://www.appeldesappels.org/
jeudi 29 janvier 2009
Le mois du graphisme
Tous les deux ans, depuis 18 ans, la ville d’Echirolles - la seule en France avec Chaumont - consacre un mois au graphisme.
Lors d’une nocturne, j’ai pu apprécier au musée Géo Charles des productions de graphistes à Madagascar, au Cambodge, à Taiwan et à New York.
Aux moulins de Villancourt, des livres originaux de tous les pays du monde avec un mur complet décoré des interprétations imagées de Madame Bovary nous réjouissent par leur diversité.
La Rampe accueille les productions de Philippe Apeloig auteur de l’affiche du festival ; il joue avec les lettres, c’était le thème cette année. Son élégance peut être jugée un peu froide, mais lorsque ses lettres s’animent dans de courtes séquences filmées, quand les guides explicitent les démarches, nous pouvons être convaincus, d’autant plus que le buffet était excellent et les intermèdes musicaux bienvenus.
Cet événement n’est pas qu’un affichage ponctuel, mais une cohérence politique associe aussi des artistes à des habitants dans le cadre d’un contrat urbain de cohésion sociale. Dans un domaine où les marchands sont les maîtres, à Echirolles ce sont les créateurs qui sont les rois. Les trois lieux cités ne sont pas les seuls à se consacrer à l’évènement, le réseau des bibliothèques est dans le coup ainsi que le Lycée Marie Curie qui offre des formations de graphistes.
Dans ma commune du nord de l’agglomération, la population n’avait pas voulu de lycée.
-------------------------------------------------------------------------------------
Petites blagues au temps du marasme:
- Pourquoi les agents immobiliers ont-ils arrêté de regarder par la fenêtre le matin?
- Pour qu'il leur reste quelque chose à faire l'après-midi.
Un employé de banque demande à un collègue:
- Salut vieux, comment ça va?
- Bien
- Excusez-moi j'ai dû faire une erreur...
La différence entre Dieu et Gordon Brown?
- Dieu ne pense pas qu'il est Gordon Brown.
Lors d’une nocturne, j’ai pu apprécier au musée Géo Charles des productions de graphistes à Madagascar, au Cambodge, à Taiwan et à New York.
Aux moulins de Villancourt, des livres originaux de tous les pays du monde avec un mur complet décoré des interprétations imagées de Madame Bovary nous réjouissent par leur diversité.
La Rampe accueille les productions de Philippe Apeloig auteur de l’affiche du festival ; il joue avec les lettres, c’était le thème cette année. Son élégance peut être jugée un peu froide, mais lorsque ses lettres s’animent dans de courtes séquences filmées, quand les guides explicitent les démarches, nous pouvons être convaincus, d’autant plus que le buffet était excellent et les intermèdes musicaux bienvenus.
Cet événement n’est pas qu’un affichage ponctuel, mais une cohérence politique associe aussi des artistes à des habitants dans le cadre d’un contrat urbain de cohésion sociale. Dans un domaine où les marchands sont les maîtres, à Echirolles ce sont les créateurs qui sont les rois. Les trois lieux cités ne sont pas les seuls à se consacrer à l’évènement, le réseau des bibliothèques est dans le coup ainsi que le Lycée Marie Curie qui offre des formations de graphistes.
Dans ma commune du nord de l’agglomération, la population n’avait pas voulu de lycée.
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Petites blagues au temps du marasme:
- Pourquoi les agents immobiliers ont-ils arrêté de regarder par la fenêtre le matin?
- Pour qu'il leur reste quelque chose à faire l'après-midi.
Un employé de banque demande à un collègue:
- Salut vieux, comment ça va?
- Bien
- Excusez-moi j'ai dû faire une erreur...
La différence entre Dieu et Gordon Brown?
- Dieu ne pense pas qu'il est Gordon Brown.
mercredi 28 janvier 2009
De mer, la classe. Faire classe #19
J’aimais à penser que les lumières de l’école allumées l’hiver avant le réveil des enfants s’inscriraient prioritairement dans mes souvenirs; et puis les témoignages des anciens élèves qui ressassaient leur classe de mer m’ont amené à me confondre avec eux dans la célébration de ces hautes heures.
« Ce n’est pas en sortant du port, mais en y entrant qu’on détermine la réussite d’un voyage. » H.W Beecher
Nous avions choisi la Bretagne exotique pour les montagnards que nous sommes.
Voyage en train, traversée de la France : La Roche Migène sous la clarté de la lune.
Nous avons pratiqué les activités spécifiques à l’océan: pêche à pied, catamaran, kayak, étude d'une faune et d'une flore particulières, sorties à Concarneau, au Guilvinec. C’était grand !
Deux classes de la commune bénéficiaient du séjour. Des enseignantes en retraite apportaient leur expérience pour aider à l’encadrement de la vie collective. Nous avons partagé avec ces amis, travail, fatigue et plaisirs. Nous avons vécu intensément, à évoquer dans tous les rapports « le projet de l'école centré sur le développement de l'écoute et du langage », cette formule sent le procès-verbal administratif qui aime entendre : « nos préoccupations quotidiennes portent sur le civisme ».
L'océan et la Bretagne constituent des milieux propices à une ambiance de légendes, de contes. Comme chez les korrigans, en soirée, nous nous sommes regroupés au coin du feu d’une vraie cheminée et nous avons été enchantés.
La vie en groupe avec ses contraintes, ses découvertes a été une chance pour s'ouvrir aux autres. Les exigences des éducateurs du centre de Beg Porz à Kerfany s’inscrivaient tout à fait dans nos démarches. L'emploi du temps particulier pour cette classe « bleue »a incité à faire son lit, à s’asseoir pour déjeuner tranquillement, à bien dormir, à bien manger, à dire « bonjour ».
Nous n’avons pas dérogé non plus à nos fondamentaux :
La lecture s’imposait pour découvrir des écrits concernant le milieu maritime, les documentaires, pour identifier les prises recueillies dans l'aquarium et développer des informations sur celles-ci, et les romans pour perpétuer la vieille lubie de l’instit’ qui prie pour le livre quotidien.
L'activité poésie se maintenait sous la forme d'engagements nourris par un recueil consacré au thème de la mer. Les élèves ont présenté leur travail aux parents lors d’une soirée avec une projection de séquences tournées au caméscope.
Les apprentissages systématiques en grammaire, conjugaison, orthographe ont été mis entre parenthèses. Mais des opportunités nombreuses favorisaient la production d’écrits dont les rectifications ont alimenté un lexique personnalisé (correspondances, comptes-rendus, carnet de bord personnel, journal de classe de mer commun).
Nous avons également communiqué par Internet des informations hors de tout artifice, avec l’apprentissage d’une solitude inédite et collectivement en direction des parents et de l’école.
A la frontière entre mathématiques et lecture nous avons pris connaissance des horaires de trains et l'étude des nombres sexagésimaux a pu s'appuyer sur des préoccupations naturelles ; utilisation d'unités nouvelles ; étude des coûts ; notion de budget ; la réalisation de plans du centre en vue de la présentation aux parents entrait pleinement dans le domaine géométrique (échelles).
Quotidiennement, nous avons relevé des données météorologiques directement liées à nos emplois du temps. « Ouest France » y a pourvu. La lecture de plans s'est élargie aux cartes marines.
Et la situation de plain-pied des classes a favorisé des activités difficiles à mettre en place dans l'école habituelle : tels que des travaux manuels bruyants ou salissants, et le ping-pong et le football enfin possibles!
Le sort de chaque crevette des aquariums ne laissait personne indifférent. Les algues livraient quelques secrets après des expériences originales. Au chapitre unité du monde vivant, la matière ne manquait pas pour appliquer une approche écologique de l'environnement. Elle a activé sans doute une prise de conscience de problèmes tellement abstraits vus de notre quartier. Nous sommes entrés un peu dans la complexité de la compréhension du phénomène des marées. Nous avons mis en œuvre des notions d'orientation. En technologie des instructions et des conseils ont été prodigués pour les appareils photographiques de chacun et aussi pour le numérique de la classe.
La nouveauté des paysages a rendu plus marquantes des observations concernant des repères historiques. Les sorties diverses à travers cette partie de la Bretagne (habitat, activités des hommes...) ont apporté des éléments de comparaison pour une géographie vivante tout au long de l'année. Nous avons eu l’occasion rare d’étudier le travail des hommes : ostréiculteur, pêcheurs.
Une plage à marée haute puis basse nous a procuré l’occasion de deux séances de dessin sur le champ; nous avons essayé de saisir la multitude d'occasions offertes pour lire ces paysages. La proximité de Pont Aven célèbre pour son école de peinture a fourni une opportunité d'enrichir nos cultures artistiques.
La pratique du kayak avec des déplacements inédits et le catamaran ont développé des solidarités indispensables en milieu instable. L’utilité de l’équipier n’est pas une construction de l’esprit.
Quelques vigoureux chants de marins ont rythmé le séjour.
Un livret avec des lectures, des documents, des cartes a constitué un outil pour les recherches,ainsi qu'un carnet de bord constitué au fil des jours sollicitant des compétences en expression écrite et artistique.
Nous avions installé en 2003 un site Internet pourtant réactualisé qui avait connu 80 000 visites jusqu’au jour où un fonctionnaire CRDpesque l’a fermé sans daigner m’en avertir. Il est vrai, je suis hors circuit.
Se sont donc empilés dans nos bagages (de « Lann Bihoué ») :
1. Documents Bretagne 20 pages : histoire, géographie, sciences.
2. Livret de lectures de 15 morceaux choisis : d’Hemingway à un documentaire sur les phares.
3. Un cahier bleu : réponses de lecture et vocabulaire.
4. 20 poésies.
5. 10 chansons en livret.
Nous avions bourré nos coffres à trésor, de romans, de documentaires, de pinceaux, de vernis, de grandes feuilles comme pour des aventures Caraïbes.
Les domaines civiques, géographiques, technologiques, de l'éducation physique, de l’expression orale et écrite ressortent clairement pour les éducateurs. La découverte de nouvelles saveurs, de nouvelles camaraderies, de nouveaux rythmes, de nouvelles émotions, de nouvelles compétences, une autonomie plus affirmée, une paix plus grande, s’inscrivent dans l’expérience des élèves. Les journées étaient tellement pleines que le sevrage de télévision et de play station fut indolore, et pourquoi le masquer un part de mon plaisir. Séjour 12 étoiles. Allez, je l’accepte : « c’était trop bien ! »
Nous avons vécu 24 heures sur 24 des moments de prédilection et d’empreintes, témoins de l’évolution des relations du précepteur avec ses ouailles. Finis les petits bonsoirs affectueux comme il y a dix ans : une cohorte de pédophiles à forte teneur médiatique était passée par-là. Accompagner des enfants à la douche devenait un objet de gène alors que les joyeuses ribambelles sous leurs serviettes respiraient la santé. L’homophonie approximative et cruelle atteint le pédagogue. Finalement après la séquence nostalgie d’un paradis perdu, je savais mieux voir les abus d'une institutrice envahissante sous ses câlineries interdites aux hommes. « Ma puce », quand l'émotionnel ficelle la liberté du petit.
« Ce n’est pas en sortant du port, mais en y entrant qu’on détermine la réussite d’un voyage. » H.W Beecher
Nous avions choisi la Bretagne exotique pour les montagnards que nous sommes.
Voyage en train, traversée de la France : La Roche Migène sous la clarté de la lune.
Nous avons pratiqué les activités spécifiques à l’océan: pêche à pied, catamaran, kayak, étude d'une faune et d'une flore particulières, sorties à Concarneau, au Guilvinec. C’était grand !
Deux classes de la commune bénéficiaient du séjour. Des enseignantes en retraite apportaient leur expérience pour aider à l’encadrement de la vie collective. Nous avons partagé avec ces amis, travail, fatigue et plaisirs. Nous avons vécu intensément, à évoquer dans tous les rapports « le projet de l'école centré sur le développement de l'écoute et du langage », cette formule sent le procès-verbal administratif qui aime entendre : « nos préoccupations quotidiennes portent sur le civisme ».
L'océan et la Bretagne constituent des milieux propices à une ambiance de légendes, de contes. Comme chez les korrigans, en soirée, nous nous sommes regroupés au coin du feu d’une vraie cheminée et nous avons été enchantés.
La vie en groupe avec ses contraintes, ses découvertes a été une chance pour s'ouvrir aux autres. Les exigences des éducateurs du centre de Beg Porz à Kerfany s’inscrivaient tout à fait dans nos démarches. L'emploi du temps particulier pour cette classe « bleue »a incité à faire son lit, à s’asseoir pour déjeuner tranquillement, à bien dormir, à bien manger, à dire « bonjour ».
Nous n’avons pas dérogé non plus à nos fondamentaux :
La lecture s’imposait pour découvrir des écrits concernant le milieu maritime, les documentaires, pour identifier les prises recueillies dans l'aquarium et développer des informations sur celles-ci, et les romans pour perpétuer la vieille lubie de l’instit’ qui prie pour le livre quotidien.
L'activité poésie se maintenait sous la forme d'engagements nourris par un recueil consacré au thème de la mer. Les élèves ont présenté leur travail aux parents lors d’une soirée avec une projection de séquences tournées au caméscope.
Les apprentissages systématiques en grammaire, conjugaison, orthographe ont été mis entre parenthèses. Mais des opportunités nombreuses favorisaient la production d’écrits dont les rectifications ont alimenté un lexique personnalisé (correspondances, comptes-rendus, carnet de bord personnel, journal de classe de mer commun).
Nous avons également communiqué par Internet des informations hors de tout artifice, avec l’apprentissage d’une solitude inédite et collectivement en direction des parents et de l’école.
A la frontière entre mathématiques et lecture nous avons pris connaissance des horaires de trains et l'étude des nombres sexagésimaux a pu s'appuyer sur des préoccupations naturelles ; utilisation d'unités nouvelles ; étude des coûts ; notion de budget ; la réalisation de plans du centre en vue de la présentation aux parents entrait pleinement dans le domaine géométrique (échelles).
Quotidiennement, nous avons relevé des données météorologiques directement liées à nos emplois du temps. « Ouest France » y a pourvu. La lecture de plans s'est élargie aux cartes marines.
Et la situation de plain-pied des classes a favorisé des activités difficiles à mettre en place dans l'école habituelle : tels que des travaux manuels bruyants ou salissants, et le ping-pong et le football enfin possibles!
Le sort de chaque crevette des aquariums ne laissait personne indifférent. Les algues livraient quelques secrets après des expériences originales. Au chapitre unité du monde vivant, la matière ne manquait pas pour appliquer une approche écologique de l'environnement. Elle a activé sans doute une prise de conscience de problèmes tellement abstraits vus de notre quartier. Nous sommes entrés un peu dans la complexité de la compréhension du phénomène des marées. Nous avons mis en œuvre des notions d'orientation. En technologie des instructions et des conseils ont été prodigués pour les appareils photographiques de chacun et aussi pour le numérique de la classe.
La nouveauté des paysages a rendu plus marquantes des observations concernant des repères historiques. Les sorties diverses à travers cette partie de la Bretagne (habitat, activités des hommes...) ont apporté des éléments de comparaison pour une géographie vivante tout au long de l'année. Nous avons eu l’occasion rare d’étudier le travail des hommes : ostréiculteur, pêcheurs.
Une plage à marée haute puis basse nous a procuré l’occasion de deux séances de dessin sur le champ; nous avons essayé de saisir la multitude d'occasions offertes pour lire ces paysages. La proximité de Pont Aven célèbre pour son école de peinture a fourni une opportunité d'enrichir nos cultures artistiques.
La pratique du kayak avec des déplacements inédits et le catamaran ont développé des solidarités indispensables en milieu instable. L’utilité de l’équipier n’est pas une construction de l’esprit.
Quelques vigoureux chants de marins ont rythmé le séjour.
Un livret avec des lectures, des documents, des cartes a constitué un outil pour les recherches,ainsi qu'un carnet de bord constitué au fil des jours sollicitant des compétences en expression écrite et artistique.
Nous avions installé en 2003 un site Internet pourtant réactualisé qui avait connu 80 000 visites jusqu’au jour où un fonctionnaire CRDpesque l’a fermé sans daigner m’en avertir. Il est vrai, je suis hors circuit.
Se sont donc empilés dans nos bagages (de « Lann Bihoué ») :
1. Documents Bretagne 20 pages : histoire, géographie, sciences.
2. Livret de lectures de 15 morceaux choisis : d’Hemingway à un documentaire sur les phares.
3. Un cahier bleu : réponses de lecture et vocabulaire.
4. 20 poésies.
5. 10 chansons en livret.
Nous avions bourré nos coffres à trésor, de romans, de documentaires, de pinceaux, de vernis, de grandes feuilles comme pour des aventures Caraïbes.
Les domaines civiques, géographiques, technologiques, de l'éducation physique, de l’expression orale et écrite ressortent clairement pour les éducateurs. La découverte de nouvelles saveurs, de nouvelles camaraderies, de nouveaux rythmes, de nouvelles émotions, de nouvelles compétences, une autonomie plus affirmée, une paix plus grande, s’inscrivent dans l’expérience des élèves. Les journées étaient tellement pleines que le sevrage de télévision et de play station fut indolore, et pourquoi le masquer un part de mon plaisir. Séjour 12 étoiles. Allez, je l’accepte : « c’était trop bien ! »
Nous avons vécu 24 heures sur 24 des moments de prédilection et d’empreintes, témoins de l’évolution des relations du précepteur avec ses ouailles. Finis les petits bonsoirs affectueux comme il y a dix ans : une cohorte de pédophiles à forte teneur médiatique était passée par-là. Accompagner des enfants à la douche devenait un objet de gène alors que les joyeuses ribambelles sous leurs serviettes respiraient la santé. L’homophonie approximative et cruelle atteint le pédagogue. Finalement après la séquence nostalgie d’un paradis perdu, je savais mieux voir les abus d'une institutrice envahissante sous ses câlineries interdites aux hommes. « Ma puce », quand l'émotionnel ficelle la liberté du petit.
mardi 27 janvier 2009
La brioche
Une nouvelle recueillie dans le livre « Paroles d’enfance » édité par radio France chez Librio (3€) qui assemble des extraits de lettres, de journaux intimes épatants, émouvants.
« Nous étions extrêmement pauvres. J'allais avoir cinq ans. Mon père était parti travailler en France. Ma mère faisait du mieux qu'elle pouvait pour nous élever, mon frère et moi. Le mandat qu'elle recevait de France suffisait à peine à couvrir les dettes du mois. Sa principale préoccupation était de nous nourrir. Ma mère m'envoyait souvent chez ma tante Rosine qui n'était pas mariée et n'avait donc pas d'enfants. Pour lui tenir compagnie, me disait-elle.
L'heure du goûter n'évoque pas pour moi le moment délicieux entre la sortie des classes et la partie de billes, la bouche pleine de chocolat et de friandises, ça je l'ai connu un peu plus tard en France.
Non, le goûter était l'un des trois repas que l'on ne faisait souvent pas. En tout cas à la maison. Mais chez ma tante, j'avais toujours droit à une tranche de pain. Pain que ma tante pétrissait elle-même et cuisait une fois par mois au four communal. Le pain était frais et tendre la première semaine, ensuite il durcissait. A la fin du mois, je me souviens qu'il fallait le mettre à tremper pour pouvoir le manger. Nous étions tous les gosses à jouer dans la rue.
Vers 5 heures, une mère, du pas de la porte, appelait : « Tonino, Giuseppe, a mangiare ». C'était comme un signal. Alors de chaque porte ou fenêtre, apparaissait une tête pour appeler son petit. Nous nous précipitions. Chacun chez soi. Il n'était pas de coutume en ce temps-là de s'inviter aux goûters. Même pour son anniversaire. Les jours fastes, ma tante étalait sur le pain un filet d'huile d'olive et la saupoudrait parcimonieusement de sucre. Et je replongeais dans la rue rejoindre mes camarades de jeux.
Un jour, en train de croquer ma tranche de pain, je vois ma petite voisine, sur le pas de sa porte, qui mangeait quelque chose que je n’avais encore jamais vu.
Intrigué, je m'approche et je lui demande ce qu'elle mange.
« Tu vois bien, c'est de la brioche, tu connais pas ? » « Ben non. » « Alors goûte. » Et elle me tend cette brioche prise entre le pouce et l'index qu’elle dépose dans ma bouche. Je n'avais jamais goûté quelque chose d'aussi mou, d'aussi tendre, d'aussi sucré.
« Tu vois, me dit-elle, pour goûter on a toujours de la brioche, maman me donne dix lires pour aller l'acheter à la boulangerie. » « Tu manges jamais de pain ? » « Ah non ! ». Je retourne chez ma tante et lui dis : « Je ne veux plus manger de pain au goûter, pourquoi tu m'achètes pas de la brioche comme le fait la mère d'Angela ? » « Mais malheureux, que dis-tu là? Jésus s’il t'entend te punira si tu ne lui demandes pas pardon ! Tu sais pourquoi elle mange de la brioche ? » « Non. »« Parce que ses parents sont tellement pauvres qu'ils ne peuvent pas se payer du pain ! Voilà pourquoi elle est obligée de manger de la brioche. Tu devrais remercier le Seigneur d'être dans une famille qui ne manque pas de pain »
Je me suis retrouvé tout penaud, malheureux d'avoir envié quelqu'un de plus pauvre que moi.
Je me voyais déjà condamné à manger de la brioche par la colère de Dieu qui ne manquerait pas de me priver de pain si je ne me rachetais pas. Je me suis alors précipité à l'église et je suis allé m'agenouiller au pied de l'immense crucifix. Tout en demandant à Jésus de ne jamais me faire manquer de pain, j'ai eu une pensée pour ma petite voisine et je l'ai remercié d'avoir donné quand même un si bon goût à la brioche, pour l'aider à mieux supporter son malheur. »
« Nous étions extrêmement pauvres. J'allais avoir cinq ans. Mon père était parti travailler en France. Ma mère faisait du mieux qu'elle pouvait pour nous élever, mon frère et moi. Le mandat qu'elle recevait de France suffisait à peine à couvrir les dettes du mois. Sa principale préoccupation était de nous nourrir. Ma mère m'envoyait souvent chez ma tante Rosine qui n'était pas mariée et n'avait donc pas d'enfants. Pour lui tenir compagnie, me disait-elle.
L'heure du goûter n'évoque pas pour moi le moment délicieux entre la sortie des classes et la partie de billes, la bouche pleine de chocolat et de friandises, ça je l'ai connu un peu plus tard en France.
Non, le goûter était l'un des trois repas que l'on ne faisait souvent pas. En tout cas à la maison. Mais chez ma tante, j'avais toujours droit à une tranche de pain. Pain que ma tante pétrissait elle-même et cuisait une fois par mois au four communal. Le pain était frais et tendre la première semaine, ensuite il durcissait. A la fin du mois, je me souviens qu'il fallait le mettre à tremper pour pouvoir le manger. Nous étions tous les gosses à jouer dans la rue.
Vers 5 heures, une mère, du pas de la porte, appelait : « Tonino, Giuseppe, a mangiare ». C'était comme un signal. Alors de chaque porte ou fenêtre, apparaissait une tête pour appeler son petit. Nous nous précipitions. Chacun chez soi. Il n'était pas de coutume en ce temps-là de s'inviter aux goûters. Même pour son anniversaire. Les jours fastes, ma tante étalait sur le pain un filet d'huile d'olive et la saupoudrait parcimonieusement de sucre. Et je replongeais dans la rue rejoindre mes camarades de jeux.
Un jour, en train de croquer ma tranche de pain, je vois ma petite voisine, sur le pas de sa porte, qui mangeait quelque chose que je n’avais encore jamais vu.
Intrigué, je m'approche et je lui demande ce qu'elle mange.
« Tu vois bien, c'est de la brioche, tu connais pas ? » « Ben non. » « Alors goûte. » Et elle me tend cette brioche prise entre le pouce et l'index qu’elle dépose dans ma bouche. Je n'avais jamais goûté quelque chose d'aussi mou, d'aussi tendre, d'aussi sucré.
« Tu vois, me dit-elle, pour goûter on a toujours de la brioche, maman me donne dix lires pour aller l'acheter à la boulangerie. » « Tu manges jamais de pain ? » « Ah non ! ». Je retourne chez ma tante et lui dis : « Je ne veux plus manger de pain au goûter, pourquoi tu m'achètes pas de la brioche comme le fait la mère d'Angela ? » « Mais malheureux, que dis-tu là? Jésus s’il t'entend te punira si tu ne lui demandes pas pardon ! Tu sais pourquoi elle mange de la brioche ? » « Non. »« Parce que ses parents sont tellement pauvres qu'ils ne peuvent pas se payer du pain ! Voilà pourquoi elle est obligée de manger de la brioche. Tu devrais remercier le Seigneur d'être dans une famille qui ne manque pas de pain »
Je me suis retrouvé tout penaud, malheureux d'avoir envié quelqu'un de plus pauvre que moi.
Je me voyais déjà condamné à manger de la brioche par la colère de Dieu qui ne manquerait pas de me priver de pain si je ne me rachetais pas. Je me suis alors précipité à l'église et je suis allé m'agenouiller au pied de l'immense crucifix. Tout en demandant à Jésus de ne jamais me faire manquer de pain, j'ai eu une pensée pour ma petite voisine et je l'ai remercié d'avoir donné quand même un si bon goût à la brioche, pour l'aider à mieux supporter son malheur. »
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