Mes contemporains me chiffonnent quand ils ne se tiennent
pas à l’heure :
les écrans s’affichent à la minute près, mais à moins le
quart, toujours personne au rendez-vous de la demie.
Cette désinvolture très partagée ignore les impératifs des
autres. Nous ne sommes loin du temps de la diligence.
Des communes ont été amenées à infliger des amendes à des
parents qui systématiquement ne récupéraient pas leurs enfants à l’heure.
Alors tropisme familier pour ma bafouille du jour : je
ne peux m’empêcher de relier cette nonchalance essoufflée, à peine excusée, au
problème des rythmes scolaires.
Leur réforme a aggravé la fatigue des enfants quand elle
visait à la réduire, alors quand les élèves sont plus fatigués le lundi matin,
ce sont les loisirs qu’il conviendrait de revoir.
Les nouvelles dispositions donnent le pouvoir aux communes,
elles mettent en évidence la perte de pouvoir de l’école : ce n’est plus
elle qui structure le temps. Elle ne contredit plus les enfants rois issus de
dynasties que nous avons élevées dans la méfiance de l’institution/ institutrice et la toute puissance des émois
et du moi.
Au moment de se placer en pôle emploi position, à bac donné
plus quelques années cadeaux, comment accepter de choisir de se poser face à de
jeunes arrogants?
Pénurie de profs et ce n’est pas qu’une affaire de salaire,
l’arbre de transmission est brisé et les câbles pètent.
On ne parle que d’échecs, subséquemment il est question de
supprimer toute note, pendant que les évaluations redoublent d’intensité.
Toujours est-il que les contrariés, les décrocheurs se
multiplient.
Tous ne se « sauvent » pas en Irak, mais les
brigades internationales d’aujourd’hui ne tirent pas pour un monde meilleur, en
se suicidant, les aspirants visent le paradis.
Tous ne traduisent pas leurs ressentiments en allant vers l’extrême
droite, mais ils barbouillent nos fenêtres, foutent en l’air le peu d’innocence
qui nous restait.
Avoir chanté : «
mais on est chez nous » dans un Bourgoin-Grenoble et se retrouver
devant une affiche du FN qui dit pareil : alors là ce n’est plus du jeu !
J’en étais à ces réflexions harassées quand je trouve dans
Libération de samedi 18 octobre, un entretien avec Alex Williams et Nick
Srnicek qui viennent d’écrire un manifeste… « accélérationiste » qui
s’appuie sur les technologies pour « reconquérir
le futur, délaissé par la gauche nostalgique ». Un petit extrait
« Rafraîchir la
modernité consisterait à reprendre possession des idéaux de l’universalisme, du
progrès, de l’humanisme, de la raison et l’émancipation. Cela signifierait
combattre la conception néolibérale limitée de la liberté et admettre que la
liberté doit inclure une dimension positive, constructive et pas seulement une
protection négative contre l’Etat. Et reconnaître la valeur du raisonnement
collectif (qui doit être opposé à tous points de vue aux images classiques de
la raison). » Vive la jeunesse.
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La photo en noir et blanc est de Chema Madoz qui a
illustré d’autres articles de ce blog : http://blog-de-guy.blogspot.fr/2014/09/rencontres-photographiques-arles-2014.html
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Dans le Canard de cette semaine :