Eric Conan nous a présenté aux amis du musée de Grenoble l’artiste
dont le musée rénové de Valence possède la collection la plus importante après
celle du Louvre et de l'Ermitage à St-Petersburg.
Né au temps de Louis XV, le dessinateur et peintre est mort
sous Napoléon.
En 1754, il arrive à Rome où il restera 11 ans sous la
protection du fils du Duc de Choiseul pour lequel son père avait été valet. Il
suit les cours de l’académie et accumule les dessins appréciés dès ses débuts par des collectionneurs ;
ils se retrouvent désormais dans le monde entier.
Dans la ville pittoresque et ses environs, il accumule les
souvenirs visuels avec une vivacité d’exécution remarquable. Il poussera
jusqu’à Naples où les vestiges sont plutôt grecs.
Il représente les premiers touristes dans les ruines. Ses
jardins sont peuplés de statues, de lazzaroni, de lavandières, de bergers, de
mamans avec enfants...
Sa façon de dessiner ressemble à celle de Fragonard qu’il
rencontre là bas. Bien des graveurs s’en inspireront.
Les ruines font, en ce XVIII° siècle, office de
vanités : « combien Rome fut
grande et belle ».
Son sens de la gradation de la lumière où il joue bien des
réserves, ses jets d’eau vaporeux, ses effets atmosphériques et ses
recompositions de paysages imaginaires vont l’amener au succès.
Membre de l’académie royale, il est chargé de dessiner, d’aménager des jardins au moment
de la vogue des jardins à l’anglaise.
A Versailles après Le Nôtre, des arbres sont abattus, le
bassin d’Apollon réaménagé, le petit Trianon renouvelé. Une laiterie aux
meubles en acajou, avec plafond à caisson, fausse grotte et cascade a des
allures de temple.
Le Moulin Joli à Colombes est une ferme joliment ornée où
les clôtures ont disparu remplacées par un dénivelé dit « ahah ».
A Ermenonville, domaine du marquis de Girardin, où Rousseau finit
sa vie, des fabriques sont édifiées dans le parc. Les physiocrates pensaient
que la richesse de la nature était bonne pour le pays.
A Méréville, l’influence d’Hubert Robert est plus manifeste
avec temples, colonnes rostrales, cénotaphe en l’honneur de Cook.
En outre, Il était tout désigné pour dresser un relevé des
antiques en Languedoc.
Sur un même tableau figurent le pont du Gard, la maison
carrée, les arcs de triomphe de Saint Rémy et d’Orange.
Il sait saisir aussi
l’actualité et son talent va au-delà de son surnom que le conférencier
s’est gardé de rapporter : « Robert des Ruines » pour éviter
d’inscrire un stéréotype chez ses auditeurs, pas plus qu’il ne nous racontera
cet épisode étonnant trouvé dans Libération: « incarcéré à la prison parisienne de Sainte-Pélagie, avant d'être
conduit à celle de Saint-Lazare. Il dut sa mésaventure aux fonctions
officielles qu'il occupait pour la famille royale. Loin d'être accablé par son sort,
il s'acharne à continuer à peindre et, quand le support habituel lui fait
défaut, il continue à le faire sur les assiettes de Saint-Lazare. Pour la
petite histoire, l'artiste dut de ne pas être guillotiné à l'insignifiance de
son patronyme. Un jour que l'on faisait l'appel des condamnés dans la cour de
la prison, un citoyen s'avança hors des rangs quand il s'entendit nommer. Il
s'appelait, lui aussi, Robert, et c'est lui qui monta sur la charrette qui le
conduisit à l'échafaud. Le citoyen Robert Hubert, quant à lui, tétanisé par la
sentence, était resté statufié. Son nom de Robert lui a donc assuré la survie,
avant de devenir célèbre dans l'histoire de l'art. »
Il avait peint la fête de la fédération, Louis XVI à sa
dernière messe, André Chénier à Saint Lazare et une distribution de lait dans
cette prison, la démolition de la
Bastille et des habitations sur le pont de Notre Dame, le
décintrement du Pont de Neuilly, l’incendie de l’Hôtel Dieu, des polichinelles
qui peignent et chantent , madame Joffrin qui se fait livrer son déjeuner par
une domestique et se promène chez les
abbesses à la mode…
L’incorrigible a bien envisagé des projets d’aménagement du
Louvre mais ne put s’empêcher de
l’imaginer en ruines où seul l’Apollon du Réverbère tient debout.