vendredi 10 octobre 2025

Vieux N° 6.

Le trimestriel à destination des têtes chenues relate « l’actualité heureuse », comme se positionnnait jadis  « Jour de France » qui s’intéressait aux têtes couronnées. 
Antoine De Caunes donne le ton en mentionnant entre parenthèses : (rires), lors de ses interviews que ce soit avec la dynamique Michèle Laroque ou l’increvable Marie Claude Pietragalla entre un Don Quichotte et un spectacle à propos de Barbara.
Le talentueux compère de l’homme de « Nulle part ailleurs », Laurent Chalumeau, a rencontré Didier Lembrouille et commet un savoureux article concernant « les combats de trop ». 
« Ce n’est pas de plaire ou d’être cohérent dont l’âge dispense,
c’est de rester digne et élégant »
Isabelle Autissier et Diane Kurys racontant Montand et Signoret participent la fête.
Bernard Moitessier est cité à l’occasion de la sortie d’une BD autour de lui.
Ce numéro se consacre au 
« temps qu’il faut donner au temps, parce que le futur vient bien assez tôt ».
 - Etienne Klein s’y colle : « Tout instant présent est un instant inédit. »
 - Les retraités ne tuent pas forcément le temps sur leur canapé mais constituent 
« un maillon essentiel à la bonne santé de notre société » en particulier dans le bénévolat.
- Les sportifs de haut niveau gèrent leur précoce obsolescence programmée.
- Alors que la formule de Nietzche «  deviens ce que tu es » reprise de Pindare figure à deux reprises dans les 130 pages, le récit de la vie d’une peintre tardive Grandma Moses nous revigore.
- Facile pour le chroniqueur Thomas Legrand de constater que « le temps de la politique s’emballe alors que celui de la loi s’attarde ».
- Un maître des horloges, un vrai, les répare à Blois depuis 1977.
- Quelques invitations à savourer l’instant en cassant la routine viennent compléter une anticipation ludique offrant des perspectives intrigantes quand la sagesse sera augmentée par l’intermédiaire d’avatars holographiques nourris de l’IA ensemencée de nos souvenirs.
De vieux raseurs dont je suis déplorent la disparition du style ; il est significatif que "Vieux" abrite quelques jolies plumes :
- Gérald Arno dans un éloge du retard.
- Nicolas d’Estienne d’Orves estime que l’ennui est un luxe sous le patronage de Vialatte : 
«  Le temps perdu se rattrape toujours. Mais peut-on rattraper celui qu’on n’a pas perdu. » 
- Jackie Berroyer, qui évite de prendre des repas entre ses grignotages, nous entretient du caca.
- Les histoires vraies emmerdent Patrice Leconte.
- Patrick Picard en vieux con visite une exposition.… 
Chalumeau a déjà été cité.
L’actualité de le littérature est bien traitée, le retour sur « La fin de chéri » de l’implacable Colette éveille la curiosité alors que la digression autour de l’expression « planter » à propos d’une prof poignardée, constitue la seule intrusion d’une actualité violente.

jeudi 9 octobre 2025

Bordeaux # 4

Nos premières attentions  se portent sur Gédéon, notre voiture, car le garage Saint Martin consulté ce matin se montre moins optimiste que le Renault d’à côté. 
Mais après nous être rendus dans deux garages inopérants, l’un parce qu’il ne possède plus la licence et l’autre étant fermée, la voiture va beaucoup mieux  et n’affiche plus rien de négatif ou d’inquiétant.

Nous partons l’esprit tranquille pour la base sous-marine et ses bassins de lumières. Pour y accéder, traverser des quartiers neufs  ne s’avère pas d’une grande simplicité pour le GPS, qui fait de son mieux. Mais nous parvenons finalement au bon endroit  et garons la voiture dans le parking gratuit devant l’entrée.
Nous passons le contrôle vigie pirate et la billetterie sans faire de queue et nous plongeons dans l’obscurité de la base réquisitionnée pour l’exposition « De Vermeer à Van Gogh, les maitres hollandais » et « Mondrian l’architecte des couleurs ».
L’exhibition  monopolise quatre « alvéoles » (bassins) sur onze de la fortification en béton, afin d’effectuer des projections grandioses faites d’éclats de couleurs dans un noir profond, exhausteur de tons.
Le public se trouve  en immersion totale parmi les  peintures surdimensionnées qui épousent  toutes les surfaces murales et se reflètent dans les eaux sombres.
Il  perd  ses repères dans l’immensité du lieu ressenti comme un sanctuaire mystérieux.
Parfois, des tableaux s’animent légèrement, lorsqu’il s’agit  de tempêtes ou de guerre, mais sans être dénaturés, parfaitement réalisés.
Quant à la musique diffusée, elle pioche dans le répertoire du baroque ou du jazz, toujours bien adaptée et choisie avec soin.
A l’intérieur d’un  grand cube une création contemporaine  générée par ordi « Foreign nature » de Julius Horsthuis, tente d’associer art et mathématiques sans parvenir à nous convaincre avec son style intergalactique. Nous négligeons aussi « Kaze, Tales of the wind » de Niels Prayer.
Nous préférons nous noyer un moment encore dans les œuvres du passé, nous laisser éblouir, circuler avec précautions sans autres lumières que celles des tableaux successifs, et passer sur les passerelles qui enjambent les bassins  pour mieux apprécier leurs reflets.
Lorsque nous sortons sous le charme enveloppant de l’exposition, nous cherchons un restau ouvert mais n’optons pas pour les halles Bacalan pourtant proches  trop fréquentées, trop bruyantes, trop ensoleillées pour un retour à la réalité.
Nous nous contentons d’un modeste poké bowl quai Lucien, bien assez  climatisé et aseptisé, après avoir contourné une sculpture en forme de soucoupe volante dans le bassin à flot n°1.
Nous restons dans le quartier où tout près de la base marine et du bassin n°1, se tient le musée Mer Marine, rue des étrangers.
Ce musée privé ouvert en 2019 dans un bâtiment contemporain s’avère une belle découverte.
Une statue de requin en inox de Philippe Pasqua nous accueille en haut des marches toutes dents dehors. Couché sur le flanc, une corde le maintient  suspendu par la queue à un portique, et  sa position indique qu’il tente furieusement de se dépêtrer de ses liens. Des touristes s’amusent l’un après l’autre à se lover dans sa gueule le temps d’une photo pour s’amuser et conjurer la peur qu’inspire cet animal.
Dans la grande salle du bas, consacrée à l’exposition permanente, de nombreuses  maquettes de vieux gréements voguent dans les airs à différentes hauteurs, tels des avions. 
L’exposition s’emploie à relater l’histoire de la navigation depuis les pirogues des 1ers temps en passant par l’antiquité des Egyptiens, des grecs et des romains,
sans oublier les embarcations africaines  ou traditionnelles de pays exotiques 

et les bateaux de la royauté ( corsaires et pirates compris). 

Des objets collectés, quelques peintures, ou encore  des instruments maritimes anciens de belle facture et de noble matière illustrent le tout.

Mais le plus impressionnant reste le superbe bateau demi-lune complet originaire du Bangladesh remplissant  l’espace près de la fenêtre
Le premier étage s’intéresse à d’autres types d’embarcations :
bâtiments de guerre, de tourisme (aviron, trimaran), sous-marins, voiliers variés.
Le musée ne se satisfait pas que de souvenirs matériels,  il rend aussi  hommage aux hommes de la mer : les écrivains et chanteurs  (Segalen, Antoine, Brel), Titouan Lamazou, les disparus en mer (Colas, Tabarly, Moitessier), de même il laisse la parole aux migrants qui ont dû affronter des traversées dangereuses et qui expriment  leur reconnaissance à la France.
Nous grimpons encore d’un étage. Il se divise en 2 centres d’intérêt. Le 1er met en valeur le travail inattendu de Pascal Obispo, un enfant du pays. Il expose « Arthérapie », un ensemble de tableaux très colorés, originaux, avec une pointe d’inspiration de Combas par moments.
Le 2ème se focalise sur la « planète Océan » et alerte sur sa fragilité :

une sculpture représentant des mâchoires de requin béantes  et brillantes donnant sur un miroir obstruant le fond de sa gorge, un nautilus grandeur nature, un container ouvert débordant de méduses, des fossiles, toutes ces installations  accompagnent le propos. Lorsque nous quittons le musée, l’idée d’aller à la cité du vin et du négoce assez proche nous  effleure,  mais nous la connaissons d’un autre voyage, 
c’est une visite copieuse, nous lui préférons une visite plus courte.

Donc, d’un coup de voiture, après quelques déviations dues aux travaux  d’extension de la ville, nous roulons vers le FRAC nouvelle Aquitaine. Il  est hébergé parvis Corto Maltese  dans un immeuble imposant contemporain au 5ème et 6ème étages. Nous ne rencontrons aucun problème de stationnement  pour nous garer Quai Paludate.

Nous  nous engageons sur la rampe passant sous le porche, sans trouver d’abord d’accès,  jusqu’à ce que nous contournions le  bâtiment car l’entrée se trouve plus bas, côté axe routier et Garonne. Peu de panneau indiquent la présence du musée dans la MECA : Maison de l’Economie Créative et Culturelle en Nouvelle Aquitaine. Nous pénétrons dans un gigantesque hall vide, hormis un bureau d’accueil et un petit bar perdus dans la vastitude. Informés par une hôtesse et un vigile, nous prenons l’ascenseur pour le 5ème étage.
Le titre de l’exposition« Arpenter, photographier la nouvelle Aquitaine » nous renseigne  sur le type d’art contemporain qui nous attend : la  photo.
parmi elles :« le monde rural »  de Noémie Goudal  « le génie du lieu », et « White pulse » avec ses montagnes usant du procédé de l’anamorphose (illusion d’optique. Photo collée sur un long pan blanc à l’image  des estampes japonaises)
« Les migrations » de Maitetxu Etcheverria réalisant de beaux portraits.
Un montage sur cinq écrans s’intéressant à la situation écologique  et montrant la forêt landaise avec  ses bergers sur échasses « côté atlantique », paradoxes et contradictions de Valérie Mréjen.( Des fragments de texte entrecoupent le montage diaporama de Royan à la côte basque , médoc, Arcachon)
Au bout de la pièce, une  terrasse extérieure ouverte au public offre une vue dégagée sur la gare et sur la  ville.

Nous montons au 6ème étage  bien que vide d’exposition actuellement,  parce ce qu’il dispose d’un point panoramique derrière des baies vitrées, celui-ci donnant  sur la Garonne. 
Le soleil baisse, les jambes s’alourdissent, nous déclarons forfait et, après quelques courses nous rentrons manger et nous reposer.

mercredi 8 octobre 2025

A mots doux. Thomas Guillardet.

Un spectacle autour de Mylène Farmer  me semblait ad hoc pour commencer la saison 2025/26 à la MC2, dans la légèreté et la curiosité puisque j’avais à apprendre de la mystérieuse reine du vidéo clip et des ventes de disques. 
Il y a deux ans, l’approche théâtrale réussie de l’univers de Johnny Halliday m’avait convaincu de revenir aux questionnements concernant les interprètes de chansons populaires. 
Cette version chaleureuse s’intéressait à un groupe d’admirateurs de l’interprète de
« Retiens la nuit » alors que cette fois il s’agit d’un enfant seul fasciné par 
« Je, je suis si fragile Qu'on me tienne la main ». 
Des personnages surgis de son imagination depuis le lit de sa chambre viennent l’aider dans ses interprétations sous le patronage de Baudelaire: 
« Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis, »
 
Les mises en scènes de différents tableaux sont inventives avec des musiques aux moyens modestes restituant l’allégresse des rythmes, malgré la noirceur des paroles :  
« Tout est chaos à côté
Tous mes idéaux, des mots abimés
Je cherche une âme, qui pourra m'aider
Je suis d'une génération désenchantée
Désenchantée » 
Les coulisses se découvrant en conclusion viennent souligner que l’auteur n’est pas dupe des artifices du music-hall, mais le placent dans une position surplombante qui contredit quelque peu ses intentions d’explorer avec empathie les relations passionnelles entre public et artiste, fan et idole.
« Ton Kamasutra
A bien cent ans d'âge
Mon Dieu que c'est démodé
Le nec plus ultra
En ce paysage
C'est d'aimer les deux cotés »

mardi 7 octobre 2025

Le chanteur perdu. Didier Tronchet.

Je ne savais si je devais préciser qu’il s’agissait d’une histoire vraie, bien qu’arrangée, tant la recherche passionnée du dessinateur est incroyable. 
Pourtant bien des récits de l’auteur de Raymond Calbuth partent de situations vécues. 
Rémi B, héros de ces 180 pages, de son vrai nom Jean Claude Rémy, reconnu par Brassens, a produit un album édité par Pierre Perret puis s’est retiré dans une île malgache. 
Parti à sa recherche, le narrateur, bibliothécaire dépressif, offre une occasion de se remémorer Raoul de Godewarsvelde, un autre chanteur : 
« Quand la mer monte
J'ai honte, j'ai honte
Quand elle descend
Je l'attends
A marée basse
Elle est partie hélas
A marée haute
Avec un autre. »
 
Le Belge s’était pendu et le métis Rémi B, né au Vietnam, héros très discret de cette BD, lui avait consacré une chanson : 
« Mais quand le mal est trop profond
Et la débine et l'abandon
Si durs, revient la tentation
De la corde et du tabouret
Que cette idée au début peine
Habituelle et souterraine
Devient relance quotidienne
Et puis un jour, drôle de jour,
Un jour d'hiver, un fait divers
Chien écrasé, au Cap Gris-Nez ».
 
De Paris vers Morlaix, Berck, l’île aux nattes, les paysages sont variés.
Les années ont passé depuis le temps des cassettes, mais même à l’heure des amnésies fatales, « on a tous dans le cœur » quelques chansons inoubliables et quelques secrets à découvrir.

lundi 6 octobre 2025

Sirāt. Óliver Laxe.

 « Sirāt » qui signifie dans la tradition islamique, le pont entre paradis et enfer, 
se situe en enfer.
D’abord curieux de connaître le monde des rave parties avec le désert comme décor, j’ai mis de côté les invraisemblances du scénario, pour voir un road movie tournant à la fable noire : la fin du monde a commencé et nous nous étourdissons de sons.
Effectivement, pendant 115 minutes, la musique tape aux tympans et de belles images de l’Atlas sautent aux yeux, mais que vient faire ce père perdu avec son fils dans un milieu où des blessés de la vie ont l’honnêteté de ne pas l’accepter jusqu’à ce qu’il paye de l’essence pour avancer ?
Sommes-nous devenus si sourds, qu’il nous faut tant de boum boum, façon grand guignol à la sauce techno ? 
Faut-il que tout sens soit perdu pour que tant d’énergie se dévoie en sautillantes transes et breuvages oublieux ?  
Nous survivons depuis Musset et nous sirotons «  Les plus désespérés sont les chants les plus beaux ». 
Pourtant il avait écrit d’autres choses : 
« Il faut, dans ce bas monde, aimer beaucoup de choses,
Pour savoir, après tout, ce qu’on aime le mieux,
Les bonbons, l’Océan, le jeu, l’azur des cieux,
Les femmes, les chevaux, les lauriers et les roses. »

dimanche 5 octobre 2025

Enzo. Laurent Cantet Robin Campillo.

Un jeune garçon de 16 ans, fils de professeur et d’ingénieure, entame un apprentissage de maçon. 
L'aperçu de distance de classe en période d’adolescence est finement traité avec des personnages forts sans être caricaturaux, servis par d’excellents acteurs amateurs comme Maksym Slivinskyi, un vrai maçon, ou professionnels chevronnés comme Pierfrancesco Favino. 
Enzo dans cette étape pleine de vibrations et d’incertitudes, va apprendre à mettre des gants et bien plus, quand la guerre en Ukraine s’invite au bord des piscines et que les corps sont magnifiques.
Cette heure trois quart, « A fleur de peau », ne masque pas les violences, mais en ne délivrant ni recette ni leçon, séduit et interroge aussi à propos des mensonges, de la peur, de l’identité…

samedi 4 octobre 2025

Ascendant beauf. Rose Lamy.

Le bob rose, très second degré, offert en produit dérivé à l’achat du livre m’a ouvert l’appétit sur un sujet qui m’interroge depuis longtemps. 
Mais la question « Pourquoi le RN séduit plus facilement les pauvres que la gauche » reste en suspens et les critiques concernant les médiatiques transfuges de classe ne sont pas assez développées.
Même si je suis passé facilement par-dessus l’excluante écriture inclusive de l’auteure, j’ai apprécié davantage ses récits autobiographiques et ses incertitudes qui lui font oublier le point médiant quand elle se définit comme « beaufe » plutôt que ses plates amorces d’analyses, paresseusement bourdieusiennes.
Rien de bien neuf depuis l’opposition première entre Duduche et son beauf créé par Cabu : 
« misogyne, machiste, homophobe, raciste, xénophobe, anti-intellectuel, partisan de l’ordre, conservateur, conformiste, grossier, obtus, belliqueux, chasseur, militaire, fan de centrale nucléaire, ignorant, bête, inculte. » 
La barque répétitive est quelque peu chargée.
La notoriété de Rose Lamy, née sur Instagram, lui a valu d’être publiée dans un processus déjà en place pour les chanteurs de la génération d’après les Goldman, Aznavour et Dassin qu’elle cite abondamment avec tendresse.
Dans ces 176 pages faciles à lire, sa critique du film « Vingt dieux » est pertinente 
comme son rappel utile du juste combat bannissant l’excuse «  meurtre passionnel » pour qualifier les féminicides. 
Mais quand elle ironise: 
« quand j’aurai besoin de désigner un homme méprisable, bête et de moralité douteuse, je dirai qu’il est un macroniste »
son arrogance est du même ordre que celle de la bourgeoisie à l’égard des classes populaires décrites par... Gramsci qu'elle cite: 
«  Un ensemble de pauvres hères moralement et intellectuellement inférieurs, un ramassis de brutes qui se préoccupent seulement de se remplir le ventre, de faire l’amour et de cuver leur soûlerie dans un profond sommeil. » 
ou pour s’en tenir à des dates plus récentes (2012), dans la même veine que Technikart qu’elle épingle, décrivant Guéret sous le titre «  La bouse ou la vie » : 
« Un parking où zonent quelques bouseux en casquette-survêt- banane tchachant probablement de la mobylette à Greg. »    

vendredi 3 octobre 2025

Quatre pieds.

Difficile de ne pas s’improviser psychologue lorsque le diagnostic de la folie se confirme chaque jour avec
 le président américain et ses grossières paroles pour nier le réchauffement climatique, alors que la planète suffoque. Son nez clignotant nous aveugle, la déraison a gagné le monde entier.
Plus près de chez nous, même si la tonalité crépusculaire persiste, Jean Louis Bourlanges offre un raccourci pertinent sur l’évolution du paysage politique : 
« Jadis la droite incarnait la fidélité, la gauche la justice, le centre la concorde et la modération. Aujourd’hui, la gauche incarne le ressentiment, la droite la crainte et l’exclusion, et le centre est devenu l’arbitre récusé des divisions nationales et des passions inconciliables. » 
Le contexte concernant les affaires publiques à défaut de faire battre les cœurs, nous tape sur les nerfs. 
L’Europe pas plus que la France n’est un monolithe mais elle se trouve minée de l’intérieur.
La Hongrie illibérale, l’Italie gouvernée par l’extrême droite nous accoutument à l’idée d’une victoire de leurs amis cheminant à couvert sous les braillements d'en face vers qui tous les micros clonés se tendent. Farage gagne des parts de marché, l’AFD progresse et tous les sondages donnent le RN en tête. Grande-Bretagne, Allemagne, France : l’Occident n’est pas menacé seulement par la Russie revancharde, la Chine vigoureuse, ni par les duperies de Trump.
Les institutions se paralysent, les réformes pour une meilleure efficacité de l’Etat réclamée par ceux qui l’entravent sont ajournées.
Chaque camp, en mode intermittent, souhaite une justice indépendante au gré des condamnations jugées trop clémentes ou trop sévères alors qu'il est sain de confirmer que la loi s’applique à chacun sans distinction. Ce qui n'empêche pas de regretter par ailleurs une judiciarisation à l'américaine où l'empilement des recours entrave l'action publique.  
Depuis le temps que les tables sont à « renverser », d’après des commentateurs paresseux, elles doivent se retrouver remises sur leurs quatre pieds.
Tout le monde appelle au dialogue, au compromis, mais les mêmes chérissent ultimatums et lignes rouges. Il ne reste qu’à prier quelques dieux républicains, auxquels on ne croit guère, pour non plus « changer la vie » mais boucler un budget.
Nous chérissons nos ennemis quand ils sont caricaturaux et certains écologistes n’ont pas besoin des falsifications de l’intelligence artificielle pour être ridicules. Mais la colère à l’encontre des lanceurs d’alerte et des porteurs de solutions est folle : nous avons besoin d’éoliennes et de panneaux solaires pour compléter les centrales nucléaires.
Après l'assassinat d'un influenceur conservateur sur un campus américain, un sondage auprès des étudiants indique qu'un tiers d'entre eux estime légitime d'employer le violence afin de faire taire un orateur: y a-t-il un démocrate dans la salle? 
L'intolérance croit à mesure que l'incertitude apparait à l'horizon.  
Je préfère m’extraire de ces méli-mélodramatiques en savourant une victoire de l’OM contre le PSG et oublier pendant deux heures le tourbillon des algorithmes menant à une terre plate. 
 « Mon exigence pour la vérité m'a elle-même enseigné la beauté du compromis. » Gandhi 

jeudi 2 octobre 2025

Bordeaux # 3

De là, nous empruntons la fameuse rue Sainte Catherine qui s’étire de la place de la Comédie jusqu’à la place de la Victoire. 
Cette longue artère rectiligne, existant depuis les Romains, détient le record de la plus longue rue commerçante et piétonne d’Europe.
Très vivante, souvent noire de monde, elle propose en plus d’une promenade de 1km 250 des restaurants et toutes sortes de boutiques
dont celles du passage Saget
et le bel immeuble des galeries Lafayette.
Nous bifurquons vers l’ancienne place Royale, ex place de la liberté puis à nouveau place royale et aujourd’hui place du parlement. Rendue aux piétons alors que les voitures en stationnement l’encombraient, elle a bénéficié d’un nettoyage efficace de ses façades très noircies au fil du temps.
En longeant la rue du parlement saint Pierre, nous arrivons devant l’église Saint Pierre, la plus ancienne puisqu’elle date du XIV-XVème siècle mais elle fut reconstruite au XIXème. 
Elle se trouve sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.
Nous continuons jusqu’à la porte Caihlau ou porte du palais
Cet autre  monument emblématique de Bordeaux concentre plus de touristes. Son nom en gascon « porta deu Calhau »  signifie porte du  caillou, Cailhau devint aussi le patronyme d’une riche famille bordelaise médiévale. 
Entrée principale de la ville en venant des quais, bâtie au XVème  en face de l’ancien château d’Aliénor, et de style gothique/renaissance, elle montre des caractéristiques défensives : mâchicoulis, herse, meurtrières. Pourtant apparaissent déjà des éléments plus décoratifs comme les accolades au dessus de fenêtres à meneaux, des tourelles… l’intérieur se visite, mais n’est pas prévu dans notre tour de ville.
Alors nous nous acheminons vers la célèbre Place de la Bourse, quittons le Moyen-âge pour le siècle de Louis XV. Les architectes Gabriel père et fils, les mêmes qui réalisèrent la place Vendôme se chargent de son élaboration. 
Au centre, la fontaine des trois grâces remplace  la statue équestre du roi de France, prévue à l’origine. Deux pavillons en arc de cercle abritent  à droite le palais de la bourse et à gauche  l’hôtel des douanes ( hôtel des Fermes).
Des mascarons figurent au dessus de fenêtres ou ouvertures, ils se réfèrent à la mythologie (Neptune) mais aussi  évoquent le commerce colonial de la ville avec des têtes d’esclaves et de femmes africaines.
De l’autre côté de la rue, le miroir d’eau et les jardins occupent l’ancien emplacement du port et d’entrepôts. Ils sont dans la prolongation de la place, et participent  à sa grandeur en dégageant l’espace jusqu’à la Garonne.
Si le miroir d’eau constitue une source infinie d’images qui se reflètent, nuages, bâtiments, personnes, et peut offrir une distraction faisant oublier la notion du temps, les quais promettent une agréable promenade le long du fleuve.
Avant de nous quitter, notre guide nous fournit pêle-mêle encore quelques infos :
sur le port, dit port de la lune à cause de sa forme,
sur l’envasement de l’estuaire
sur la ville des 3 M : Montaigne, Montesquieu et Mauriac et rappelle l’aide apportée par Malraux  pour que les particuliers puissent rénover leurs biens avec une participation fondamentale de l’état.
Nous nous séparons du guide et du groupe, nous  projetons de déjeuner quartier Saint Michel  au restau « Le passage » aujourd’hui ouvert.
Au menu : pâté atatxi, poulet macéré et frites, un dessert et un verre de Bordeaux vieille vigne  pour un prix  très raisonnable.
Puis nous chinons dans la brocante adjacente avant de chercher un barbier près du marché des Capucins, investi par les « gens de couleurs » et des barbiers maghrébins : 10 € pour une barbe bien taillée sans attente et en 10 minutes alors que plus au centre dans les quartiers bobos pas moyen d’obtenir un RDV avant plusieurs jours. Sans hâte, nous rebroussons chemin en direction du parking.
Nous  remontons le cours Victor Hugo, vers la grosse cloche.
Nous poussons la promenade jusqu’à la rue Vital près de la place du parlement où loge la librairie Mollat qui se revendique comme étant la grande librairie indépendante d’Europe. Impressionnante indubitablement ! 
Et nous continuons à flâner vers le centre commercial  de forme circulaire et tout en verre Place des Grands Hommes, sur le terrain d’un ancien marché.
Nous retrouvons la voiture pour rentrer à Pessac que nous souhaitons gagner avant la fermeture du garage Renault voisin de notre Airbnb : en effet  le voyant orange concernant l’antipollution apparu sur l’écran nous inquiète. Après une petite attente, un employé s’occupe de nous, il  ne peut réparer l’incident dans l’immédiat mais il nous rassure en nous disant que  tant que le voyant ne passe pas au rouge, nous pouvons circuler, sinon, il nous faudra nous arrêter immédiatement. Après cette journée bien remplie, les pattes fatiguées, nous nous installons dans la casa, mangeons légèrement, et allons  nous coucher tôt.