vendredi 22 octobre 2021

Le Postillon. N° 62. Automne 2022.

Je continue à lire le bimestriel grenoblois radicalement anti technologies nouvelles, 
bien que mis dans de mauvaises dispositions à cause de leur positionnement anti pass pourtant habillé d’humour : «  Siamo tutti antipassti »
Ils ne vont pas au-delà des étiquettes pour comprendre ce qui amène l’extrême gauche à manifester aux côtés de l’extrême droite et des « intégristes criant-sans aucune ironie : « touchez pas à nos enfants » », voire à suivre Didier et Raoul suppôts de Philippot.
L’usage des jeux de mots donne du punch aux articles : «Cafetiers pas cafteurs », cependant le contenu n’en est pas moins parfois contestable à mes yeux. Le mélange des genres nuit parfois à leur crédibilité quand l’ironie submerge l’information. 
Par contre dans la parodie, ils sont dans leur élément : un faux publireportage concernant les « e-shoes », chaussures à assistance électrique révèle avec verve les absurdités de certains engouements contemporains. 
Et leur page rigolarde après la défaite de Piolle aux primaires écologistes les amène à dresser un tableau piquant des loosers de la cuvette : 
«  Les bibliothécaires grenobloises. Cinq semaines de grève contre le passe sanitaire après avoir manifesté des mois contre la fermeture des bibliothèques il y a cinq ans, mais pas un seul article dans la presse nationale, ne serait ce que dans Libération. Meghan Markle change de chaussettes  et BFMTV arrête ses programmes. Si l’attaché de presse des bibliothécaires n’est pas un tocard, qu’est ce que c’est alors ? » Depuis la presse nationale en a causé. 
A mon avis, c’est leur combat qui n’est pas le bon : alors que chacun doit prendre sa part dans la lutte contre la pandémie, leurs positions outrancières ne peuvent que susciter l’incompréhension. 
Quant au chœur des soignantes ayant refusé la vaccination: elles geignent autour d’une situation qu’elles ont-elles-mêmes créée. 
Les critiques des rédacteurs sont affutées pour déceler le ridicule des discours technocratiques et la vacuité de certaines innovations tels des chèques cadeaux proposés aux citoyens qui ont bien trié leurs déchets. La numérisation du service des Métrovélos ne pouvait qu’attirer leurs remontrances.
Et c’est leur originalité que d’apporter des éléments vus nulle part ailleurs à propos du dossier de la « Papothèque », structure en difficultés financières qui s’occupe des personnes âgées dans le quartier du Lys rouge en soulignant les contradictions de la majorité municipale et l’opportunisme des oppositions. Leur vigilance concernant «  La Seveso valley » est salutaire et leur positionnement à côté d’une salariée abusivement licenciée du Synchrotron est attendu comme leur dénonciation des lenteurs d’Actis à propos de logements mal isolés voire insalubres. 
Leur coup de patte spécial sera cette fois pour Glenat et ses évasions fiscales et les tests comparatifs concernant les « bars-concepts » ne leur font pas vraiment une bonne publicité.
Les dilemmes des associations invitées à s’installer dans le nouveau centre commercial Neyrpic à Saint Martin d’Hères sont intéressants car nous sommes amenés à nous faire à l’idée que des démarches inédites sont à entreprendre lorsque les formules de l’éducation populaire « ne font plus recette ».
Ils abordent rarement les sujets culturels, mais à l’occasion de la sortie d’un livre : « Grenoble calling, une histoire orale du punk dans une ville de province », ils partagent l’humanité des rédacteurs mais trouvent que la musique est trop bruyante.

1 commentaire:

  1. Et bien, Guy, je suis en pleine rédaction d'un article critique sur "Le Marchand de Venise" de mon cher William, et j'arrive à ma dernière ambition : traiter le conflit qui oppose Shylock, usurier juif pratiquant l'intérêt à des taux frôlant l'extorsion, et Antonio, marchand chrétien qui délivre les infortunés tombés sous les griffes de Shylock, mais, sans se priver de dénoncer les Juifs et leurs forfaits.
    On peut voir dans "Le Marchand de Venise" des mauvais Juifs et des mauvais Chrétiens s'entredéchirer.
    Quand on a passé autant de temps dans la pièce que moi, on finit par conclure que l'Homme doit régulièrement trouver un objet pour vider sa rancune, y attacher sa hargne, sa haine, son besoin structural d'exclure l'autre, en allant, si nécessaire, jusqu'à le tuer.
    Dans la pièce, les projets de Shylock ne sont pas déguisés, et il peut reconnaître qu'il veut tuer Antonio, parce qu'il le hait, et parce que ce dernier lui nuit en affaires. Antonio, par contre, ne peut pas reconnaître sa haine.
    Cela me fait penser au constat suivant : je sais qu'à la Révolution française, quantité de clavecins ont été jetés dans les flammes par des esprits dans les dispositions ci-dessus. De nos jours, pourtant, nous sommes devenus plus civilisés (je ne fais pas une apologie de la civilisation maintenant. Mon crédo est "tous les avantages ont leur inconvénient, et vice versa.") Nous ne jetons plus les clavecins dans les flammes, nous installons les pianos dans les gares !
    Des esprits... en pâte à modeler pourraient s'imaginer que cette initiative est faite pour amener la culture au peuple, mais je n'en crois rien. Je crois que c'est une manière nouvelle et améliorée de jeter les clavecins dans les flammes. En se racontant une tonne de bobards pour se donner bonne conscience, qui plus est. L'Homme a un talent inépuisable pour se raconter des bobards.
    Comme d'habitude, Guy, je ne te trouve pas très nuancé sur la dernière Très Grande Passion que nous sommes en train de vivre. "Passion" à la hauteur de ce qu'une civilisation en pâte à modeler peut produire, qui plus est.
    Non, je ne suis pas trop nuancée non plus. Voir plus haut...

    RépondreSupprimer