vendredi 8 octobre 2021

L’après littérature. Alain Finkielkraut.

Maintenant qu’il est désigné comme un ennemi par la meute, je ne cache plus ma tendresse à l’égard de l’émotif philosophe que j’écoute et lis volontiers.
S’il force un peu sur le tragique, c’est bien avec les écrivains Roth, Kundera et tant d’autres appelés à la rescousse qu’il retarde un peu le constat que les livres n’impriment plus. 
« Néoféminisme simplificateur, anti racisme délirant, oubli de la beauté par la technique triomphante comme par l’écologie officielle, déni de la contingence tout au long de la pandémie qui nous frappe : le mensonge s’installe, la laideur se répand, l’art est en train de perdre la bataille » 
J’appartiens à ce camp allergique au « woke », même si je ne l’accompagne pas dans son aversion envers les éoliennes qui offrent une option de plus au bouquet énergétique. Je préfère assumer les inconvénients de nos usages de consommateurs, de vivants.
Ses propos sont limpides, nuancés, tout en étant exigeants. 
« L’identité, c’est paradoxalement la part de soi qui n’est pas soi, le nous dans le je, la généalogie dans l’individu, le fil à la patte. » 
Pour l’ancien soixante-huitard que je fus, comme lui, le balancement entre les acquis et les abus de cette période et son insistance à propos de l’école me vont bien.
«  De ce que la philosophie des Lumières nous a appris à considérer comme le propre de l’homme : penser et agir par soi-même, l’école a fait non plus le fruit d’une maturation, mais une propriété naturelle et même native. Dès lors les adolescents et même les enfants sont devenus « les acteurs de leur propre éducation » et l’autorisation a succédé à l’autorité. »
«  Ces adolescents ne trouvent pas les mots qui leur ouvriraient les yeux sur la complexité et sur la richesse du réel, car l’école a cessé de leur donner. » 
Quant avec son goût des paradoxes, je bois du petit lait quand il décrit la situation actuelle : 
«  L’idéologie a remplacé la superstition. On se représente l’état comme un Léviathan redoutable alors qu’il est faible et n’en mène pas large. Sa marge de manœuvre ne cesse de se réduire. Et plus il est empêché, ligoté, paralysé, plus on lui reproche d’être coercitif, invasif, irrespirable. On a rarement menti avec un tel sentiment de clairvoyance. On a rarement divagué en étant aussi fier de regarder la réalité en face. Personne ne tremble devant le pouvoir politique. Ce sont les politiques qui tremblent devant le pouvoir judiciaire, la pouvoir médiatique et celui des réseaux sociaux. »

 

1 commentaire:

  1. Je crois qu'il n'y a pas d'exercice plus hasardeuse que d'essayer de cerner ce qu'on a sous les yeux au moment où on le regarde.
    Difficile de savoir combien de pouvoir a l'état en ce moment. En tout cas, il semble avoir le pouvoir de dicter ce que les Français doivent croire, et c'est un pouvoir considérable, tout de même. Il a pas mal de pouvoir de gouverner... par la crainte de l'amende, et ce n'est pas rien non plus.
    Petit rappel que l'état français saborde sa propre autorité, son exemplarité, depuis des lustres maintenant, en recourant aux vacataires au lieu d'embaucher des fonctionnaires, avec des droits de fonctionnaires. Que les fonctionnaires, dans certains cas, brandissent une impunité qui vient de sentir la toute puissance de l'état derrière eux.
    Celui qui veut être respecté, il fait mieux d'être exemplaire que hors la loi, même si c'est l'Etat lui-même.
    Plus il se comporte en hors la loi, et dans l'impunité, plus il sape son autorité ET sa légitimité, et détruit... son crédit vis à vis des citoyens.
    On ne peut pas gouverner sans crédit. Ce n'est pas possible.
    On peut gesticuler, brasser de l'air, avoir un simulacre d'actions, d'activisme, pour faire semblant, mais gouverner ?
    Dans un climat de défiance généralisée ?
    Et ceux qui voudraient nous faire croire que nous n'avons d'autre choix que de nous en remettre toujours à des gouvernants qui ne cachent même plus leur mépris ?
    Que faut-il faire maintenant ?
    Je ne sais plus.
    C'est très décourageant.
    J'aime Finkielkraut aussi. Quelqu'un qui est intègre dans un monde qui ricane, dans l'ensemble.
    C'est fou, mais j'ai découvert en France, malheureusement, cette faculté humaine de ruer de coup de pieds celui qui est déjà par terre.
    Pfuitt. Sans commentaire.

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