jeudi 27 mai 2021

La revue du Crieur. N°15 février 2015.

Paraissant trois fois par an, cette publication répond à un des intitulés : « plongée dans la fabrique des idées ».  Mais il convient de prendre son souffle, sans croire qu’il s’agit comme une autre publicité le proclame « sans chapelles » : c’est une publication de Médiapart, intéressante et quelque peu orientée.
La date de parution a son importance. La question posée dans un article «  Doit-on protéger les enfants ? » laissant entendre que la notion de protection est un signe de la domination adulte serait sûrement à revoir. « La vulnérabilité supposée » des enfants parait scandaleuse aujourd'hui.
Le constat sur le long terme concernant l’éducation nationale de Nathalie Quintane ne laisse aucune illusion : il est titré « R.I.P. ». Ses descriptions où une trousse, les toilettes bouchées , prennent toute la place et traduisent avec verve l’ennui de collégiens, comme une visite à la médiathèque voisine provoque rire amer et désespoir. Les photographies d’une sinistre école Robespierre ou Babeuf un jour d’hiver, voire la fière inscription Rosa Parks sur un collège de Gentilly ponctuent 40 pages sur 160. L’écrivaine est plus convaincante que la politique : bien qu’encore jeune, elle a la nostalgie de professeurs rebelles des années 70 et sa radicalité qui la conduit à mettre tous les ministres dans le même sac d’Haby à Blanquer ne la rend pas très crédible.*
L’enquête sur l'Organisation Internationale pour les Migrations offrant des subventions à des artistes africains pour dissuader leurs compatriotes de mettre leur vie en péril en traversant la Méditerranée m’a paru une démarche intéressante, plutôt qu’un scandale quand le rédacteur parle de messages « sédentaristes ».
A la rubrique « Monde des idées », les mots nouveaux, pour un étranger au monde universitaire, ne manquent pas: à vocation intersectionnelle l’ « écologie queer » se cherche, comme les « undercommons », alors que les « maintenance studies » iraient à l’encontre des innovations bien que «  l’accélérationnisme de gauche » comporte des angles morts. C’est qu’il ne convient pas de s’appesantir sur le « cognitariat ». 
Si la critique d’Uber essentiellement sous l’angle spéculatif ne rend pas compte des motifs du succès éclair de cette entreprise, 
l’approche des évolutions du marché de l’art négligeant les caractéristiques de la matière même des objets de ces transactions est également partielle.
Le portrait de Renaud Camus, l’obsédé du « grand remplacement » est documenté, mais que penser de la critique de cette idole des suprémacistes blancs et de son esthétique vénérant la violence, le chaos, 
alors que la bombe aérosol, dont l’histoire est contée par ailleurs, va
 se heurter avec ses graffs « aux stratégies de maintien de l’ordre social et esthétique des villes »?
Voir dans la panne d'électricité à New York de l'été 1977, « une fenêtre sur l’émancipation » est tout aussi excessif que le terme « nuit des animaux » qui avait alors été retenu par la presse américaine.
Il est aussi question de « StripTease », la défunte émission de télévision, politiquement incorrecte, 
et de sex-toys qui bien qu’évoqués en écriture inclusive concernent essentiellement les femmes.
Le reproche adressé aux créateurs qui se sont exprimés sur l’Europe, recourant à des « oppositions faciles et usées » pourrait s’appliquer à bien des rédacteurs de cette revue.
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 * Le livre de Nathalie Quintane « Un hamster à l’école » dont sont extraits plusieurs chapitres, développe sur 198 pages une vision désespérante de l’école où les enseignants et les élèves  s’ennuient. Mais ce parti pris ironique, vachard, est fascinant, porté par une écriture peut-on dire poétique ? Oui. Les ouvrages à propos de l’école sont souvent le fait de profs remarquables, elle, est en retrait, en surplomb, tout en ne se donnant pas forcément le beau rôle. Son tranchant, revigorant, à la lucidité vaine, s’il change des propos nostalgiques et des vœux pieux, est le reflet amer d’une époque qui a abandonné ses ambitions éducatives.

mercredi 26 mai 2021

Amiens # 3

Une fois seuls et dehors, nous ne résistons pas à la devanture des macarons de Jean  Trogneux (parents de Brigitte Macron).
La dégustation prometteuse nous incite à la dépense.
Nous passons rapidement à la maison
avant de gagner le quartier saint Leu où nous nous posons pour casse crouter dans une petite gargote maghrébine familiale. Sans perte de temps, il nous y est servi un menu reconstituant : sandwich libanais, frites et  bouteille de Vittel.
Nous nous dirigeons donc tranquillement de bonne heure vers les célèbres hortillonnages fermés au public le matin et accessible au public à partir de 13h30,
malheureusement sans réservation possible.
A l’heure d’ouverture, pour accéder au guichet, nous ne nous attendions pas à trouver une telle file d'attente sagement rangée sur le trottoir du  pont  qui surmonte le départ en bateau.
Car c’est la 1ère fois que nous voilà confrontés à la foule touristique depuis le début de notre voyage. 
Nous avons le temps de regarder le va et vient incessant des embarcations pleines de clients.
A 14h30, nous montons enfin dans une barque à moteur électrique d’une capacité de 12 plaisanciers appelés au micro.
Pris en main par un guide /conducteur, nous écopons d’un bavard très content de pouvoir servir ses blagues plutôt lourdes.
Mais il nous favorise en voyant l’appareil photo de Guy pendu à son cou, et il nous installe d’office à l’avant. 
Tout ce dédale de canaux est très ancien
et autrefois, ces hortillonnages appartenant aux  hortillons (maraîchers) et hortillonnes couraient jusqu’à la cathédrale. 
Le bateau glisse en douceur sur l’eau entre les berges consolidées par des madriers en acacia et des planches de chênes  indispensables pour contenir la terre des parcelles plus en hauteur. 
Cet écosystème convient  à une faune aquatique composée de poissons bien sûr, de grenouilles, de rats musqués friands de moustiques, de couleuvres, mais  les ragondins qui détruiraient  les bords ne sont pas les bienvenus. 
A notre grande déception, nous n’apercevons que peu de jardins maraichers, ils sont  remplacés par des cabanons  sans eau courante ni électricité entourés d’un jardin  servant de résidence secondaire aux citadins. 
L’association de protection des canaux est à l’initiative d’un concours des rives les mieux fleuries incitant les propriétaires à bien entretenir leur domaine. La promenade passe par des canaux  de profondeurs variables et  certains plus petits prennent le nom de fossés. Par endroits  ils s’élargissent en lacs miniatures, une vraie invitation à se baigner. Nous débarquons au bout de 45 minutes. 
Nous enchainons alors avec  le circuit de l’Office du tourisme à la découverte du quartier Saint Leu parfois surnommé la petite Venise du Nord.
Nous laissons le pont du Cange lieu de l’embarcadère pour longer le quai Belu, puis déviés vers la rue Dame Jeanne à cause d’une passerelle fermée pour dangerosité, nous apercevons un parc de détente avec jeux d’eau et aires de pique-nique.
Nous passons par la rue Queue de vaches car les animaux venaient s’y abreuver, par la rue Motte avec ses vieilles maisons basses colorées.
La statue de Lafleur, le guignol local caractérise la place Aristide Briand 
  tout comme les maisons recouvertes de clins de bois peints au rez-de-chaussée
Plus loin,  les moulins  « passe avant passe arrière » bénéficient d’une restauration partielle. Mais l’ancienne vinaigrerie et deux grandes roues placées de chaque côté du canal menacent ruine.
Le quartier ne s’endort pas dans son passé comme en témoigne l’Université  Jules Verne qui contraste avec son architecture contemporaine
Puis nous arrivons devant le théâtre de marionnettes et bien qu’il n’y ait pas de représentation à cette heure, 
la personne à l’intérieur nous autorise à jeter un œil sur les Lafleur garde-champêtres et autres poupées croquignolesques exposées.
La boucle est bouclée, 
nos pas nous ramènent à la place du Don, bondée de monde aux terrasses des bars.
Nous empruntons l’escalier qui conduit au parc de l’évêché, à la cathédrale, et au troquet d’hier où nous consommons les mêmes boissons.
Avant de rentrer nous flânons dans le quartier commerçant près de l’hôtel de ville et de la poste.
Nous  traversons  la place Marie-sans-chemise et son horloge/statue Dewailly.
Et nous renonçons à nous rapprocher de la Tour Perret  que nous voyons bien de notre logement au 7ème puisque de toutes façons elle ne se visite pas, occupée par des habitations privées et des bureaux.
Nous ressortons à la nuit tombée pour assister à  Chroma, le spectacle de projection sur la cathédrale. 
Il évoque tout d’abord le bleu unique d’Amiens, rappelle les drapiers à travers de lourdes étoffes de lumière glissant sur la cathédrale, souligne les figures géométriques et les lignes directrices de la construction.
Le plus intéressant à mon goût, reste la coloration des statues, les ornements, l’architecture,  tel que cela devait exister à l’origine, et je ne peux m’empêcher de faire un parallèle avec les délirants temples hindous.
Le cri des mouettes dans le ciel de la ville omniprésent  a momentanément disparu sous la puissance de la bande son.

mardi 25 mai 2021

L’homme le plus flippé du monde. Théo Grosjean.

Avant son arrivée sur terre le petit Théo n’avait pas reçu le livre sacré de « La méthode d’intégration d’un groupe en soirée » ; sa vie ne sera qu’angoisse. 
En devenant auteur de bande dessinée, avec une bonne aptitude à l’auto dérision, il va faire du bien à ses lecteurs stressés, et à lui-même si bien que lorsque dans de rares moments où il trouve la paix, il s’angoisse de ne plus trouver d’idées pour son album.
La pandémie est une aubaine mais la concurrence est vive pour le titre de « plus flippé du monde ». En tous cas dans la catégorie de la plus drôle des autobiographies, il tient la corde. 
La mort vient s’asseoir à côté de lui et les petits personnages logeant dans son cerveau se disputent. Ses projections dans le futur ou ses retours vers l’enfance, sa procrastination, nous font sourire. 
Souvent bavard, romantique avec son amie qui aime bien se dévaluer aussi, il peut livrer deux pages sans paroles : après avoir symbolisé son manque d’énergie tout au long de la journée en dessinant une batterie de téléphone à son plus bas niveau, ce n’est que lorsqu’il éteint la lumière que sa vitalité revient et l’empêche de dormir.
Un critique lui a dit : 
« Tu n’es pas le flippé que tu prétends être, juste un peu anxieux comme monsieur tout le monde » 
Il va se mettre dans tous ses états devant son miroir :  
«  C’EST A MOI QUE TU PARLES ! » 
Si ce tome 2 s’intitule  « Tentatives d’adaptation » nous comptons bien qu’il ne guérisse pas trop vite de sa tendresse, de son humour et qu’il nous livre de son trait aussi clair que son honnêteté, des pages toujours aussi réjouissantes : on a tellement envie de le consoler à notre tour, de le rassurer.

lundi 24 mai 2021

Garçon chiffon. Nicolas Maury.

Parfait pour retourner dans les salles, ce premier film parle de cinéma, des difficultés à se trouver, quand les regards se croisent ou fuient.
L’acteur principal est le réalisateur, froissé, « chiffon » : mot de tendresse devenu insupportable à force d’être répété par Nathalie Baye, sa mère pas si caricaturale qu’une comédie l’appellerait.
Après le suicide du père, une vie de comédien aléatoire, un retour vers la mère aimante et agaçante, la conclusion en chanson est ouverte. 
« A nos visages de velours,
Je prends ce que tu me donnes et j’en fais mon amour. »  
Quelques séquences hystériques, surréalistes, à la Demy, sont émouvantes. Il est question de l’histoire d’une « étoile et d’un lion » de Vanessa Paradis, et d’Anne Sylvestre en duo pour bien dire les rapports de filiation : 
« Moi, je t'ai lissé les ailes
Ma chérie
- Mais je peux lisser les tiennes
Moi aussi
- Ça ne se fait pas si vite
Déjà tu ne comprends plus
Tu as l'âge de la fuite
Moi, celui du déjà-vu »
 Ce film musical retrouve les affres parisiennes habituelles dans les métiers du cinéma, et la dualité entre province et capitale. 
Est-ce que nous avons mûri ou parce qu’ils sont traités avec finesse sous des dehors extravertis, l’autisme et l’homosexualité ne sont pas sujets de controverse ? 
Jouées avec sincérité, intensité, ces deux heures fraîches prennent leur temps, mêlant le rigolo des « jaloux anonymes » et le pathétique de l’amoureux apeuré peu aimable car trop aimant, perdu dans un amour éperdu, adolescent qui n’a pas fini d’apprendre à s’aimer. 
Il répète «  L’Éveil du printemps » où un enfant se mue en adulte, une pièce de théâtre de Wedekind dont l’aperçu donne envie de mieux la connaître.

dimanche 23 mai 2021

Indocile heureux. Bénabar.

Oui Bruno Nicolini est un anticonformiste: positif, tendre, drôle, il ne se prend pas au sérieux, mais nous ravit depuis - je n’arrive pas à m’y faire - vingt ans, le prenant toujours pour le petit dernier des chanteurs qui ont des textes et une personnalité. 
Au delà des formules heureuses, des points de vue nouveaux, pour des scénettes vives où il sublime la banalité, accompagnées de musiques sautillantes, notre quotidien en est tout éclairé. Il se permet d'être cérémonieux pour traiter avec distance des sujets pas si anodins que ça. Son romantisme le plus vibrant nous touche grâce à un humour très contemporain qui met de la légèreté à la gravité.
Le temps passe : « Oui et alors » : 
« … Il ne faut pas douter
Qu’on se passera de nous
Comme nous de nos ainés ». 
Toujours garder « Un lego dans la poche ». 
«  L’enfance est si courte
Et dure si longtemps. »
 L’amour en fuite :  
« Tous les divorcés »
 Se sont aimés tendrement
Un weekend sur deux,
Ils le répètent à leurs enfants
Quel est le plus important, l’premier amour ou l’plus récent ? »
 Toujours croire « Les belles histoires » où subsiste : 
«… le piment doux
Des premières querelles d’amoureux ». 
Il renouvelle la vieille histoire: « On ne choisit pas d’aimer » : 
« Tu peux faire le blasé
Arguer que tu t’en moques
T’as pas fini de pleurer
Si ce n’est pas réciproque. »
A un enterrement, il a jeté sa rancune à la rivière : 
« Au nom du temps perdu », il trouve  belle la veuve qui a été sa femme.
Le refrain d’« Une âme de poète » a beau contenir:  
«  Ça me troue l’fion bordel à cul »:  
« On connaît des gens très classes
Distingués, bien comme il faut
Qui disent des trucs dégueulasses
Sans employer de gros mots » 
Pour évoquer les classes moyennes « William et Jack » Dalton sont parfaits. 
Et le slogan « Exigeons l’impossible » risque de se résoudre 
 «  quand les poules auront des caries ».
 Plaisir de vacances avec « Le bain de 23h 30 » 
et celui de chaque jour :
« Les filles de plus de 40 ans » 
« N’aiment pas qu’on leur mente
Sauf quand on fait semblant
De leur en donner 30 ».
« Les indociles heureux » fait la distinction entre les vrais et les faux rebelles de cour d’école ou des open space, les anarchistes de ministère, les insoumis à la fashion week: 
« Y'a les rebelles d'Internet,
Révolutionnaires de Twitter
Et qui vont sauver la planète
En postant partout des petits cœurs
De faux rebelles sous toutes les formes,
L’époque est à la vaine querelle
Anticonformiste, c'est la norme,
Rebelle c'est consensuel » 
Je biche.

 

samedi 22 mai 2021

Nœuds de vie. Julien Gracq.

Je ne comprenais pas le titre au moment où j'ai abordé la première partie de ses
«notules», dont la suite est à venir en 2027, 20 ans après sa mort, et puis j’ai plongé dans les paysages décrits par le géographe.
« Presque tous les paysages des contrées faites d’alluvions récentes sont ingrats : aussi bien le Bourbonnais que la Crau, le plateau suisse que le Bas Dauphiné : mouvements de terrain inharmonieux, incohérents, sont ceux de la boite à sable des Kriesgspiele ou des chantiers en proie aux bulldozers, végétation coriace et branchue, qui tend partout vers le groupement abâtardi du fourré, yeux d‘eau louche qui font penser non à des étangs, mais à des creux de marnières et de ballastières noyées. »
Finalement, par petites touches, je m’aperçois qu’il s’agit bien d’enlacements, de détours lorsque l’auteur, cité dans de nombreux articles, entre finement, poétiquement, dans les détours des fonctions « lire » et « écrire »,la complexité rencontre l’originalité. 
Ses portraits sont ciselés : 
« Le pharmacien, ami de jeunesse de mon père, violoniste et boute-en train comme lui, avait la laideur avenante et mobile, la turbulence et le lorgnon bas perché d’Offenbach, qu’il adorait ; sa femme, dans une des deux ou trois familles de la haute dévotion florentaise, raccourcissait avec pondération la bride à son mari bohème… » 
Ses appréciations sur le milieu littéraire sont âpres, et on aime ça.
Il parle de l’œuvre d’un collègue :
« … prend aujourd’hui pour moi je ne sais quelle apparence parcheminée et cuite, comme le visage de certaines vedettes, précocement rôti par les sunlights. » 
Comme l’usage du dictionnaire n’est plus guère usité, il vaut mieux garder son téléphone à portée de main : ainsi j’ai découvert le mot « gemmail » (panneau constitué de morceaux de verre translucides colorés juxtaposés et superposés, sans sertissage), il convient parfaitement à une appréciation de la poésie.
L’acte d’écrire nous révèle à nous mêmes : 
« Ecrire sans discontinuer, ce n’est pas tant céder à la préférence abusive qu’on a pour son moi, qu’aliéner ce moi dans son fort le plus reculé, en le soumettant tout entier aux mécanismes extérieurs du langage.»
 Et ses réflexions de solitaire vont bien au-delà de sa fenêtre : 
« La Terre a perdu sa solidité et son assise, cette colline, aujourd’hui, on peut la raser à volonté, ce fleuve l’assécher, ces nuages les dissoudre. Le moment approche où l’homme n’aura plus sérieusement en face de lui que lui-même, et plus qu’un monde entièrement refait de sa main à son idée – et je doute qu’à ce moment il puisse se reposer pour jouir de son œuvre, et juger que cette œuvre était bonne. »

vendredi 21 mai 2021

Territoires.

Au cours de ces derniers mois, nous nous sommes tenus à proximité de chez nous et avons arpenté notre « territoire » mot devenu inévitable dans les débats autour des empilements administratifs, élément de rhétorique prétendant s’ancrer dans une glèbe laissée aux ronces. 
D’autres « territoires » sont venus se rappeler à nos mémoires autour de Jérusalem trois fois sainte, où les haines se déchainent. Les mâles de là bas, front contre front, échappent à l’écriture inclusive. 
Comme en photographie, je m’en tiens aux gros plans maintenant que les drones envisagent joliment les paysages de si haut et ne m’attarde pas en des lieux que je ne connais pas. 
Je ne connais pas plus le latin et le grec, mais  leur remise en cause par un prof de Princeton m’interpelle, car ces langues seraient à ses yeux, une « fabrique du suprématisme blanc » rejoignant avec un degré de noire bêtise de plus, les attaques contre ces enseignements de l’ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem. 
Sans illusion sur les bienfaits de « rosa rosam » auprès de tous, les impossibilités de travailler pour les ultimes Mohicans enrichis par ces options interroge chez moi la dernière notion  colorant ma nostalgie de la gauche : l’égalité. Déjà que la notion de liberté s’est réduite à un «  je fais ce que je veux », un nivellement par le bas serait-il le but de ceux qui ne savent voir du même œil, un charpentier et un chercheur du CNRS ? Khâgne et hypokhâgne ne seraient pour les maîtres à penser correctement que la seule antichambre ouvrant vers un pays de Cocagne avec teuf tous les soirs ?
Et dire que maintenant c’est de courage dont il faut faire preuve pour souhaiter l’excellence au bout d’un parcours où apparaitraient clairement les étapes sélectives à franchir, en se dispensant de promettre la lune à tous. Mais il est vrai comme dit Nassim Nicholas Taleb: « étudier le courage dans les manuels ne rend pas plus courageux que manger du bœuf ne transforme en bovin. » J'aurai même préféré « taureau» à la place de « bovin».
Les dénonciateurs de l’empire du fric indexent trop souvent la valeur d’un métier à sa valeur marchande. Par ailleurs pour me complaire dans les métaphores de ceux qui ont popularisé la notion de « Bullshit jobs », je considère mieux l’aide soignante auprès de pépé et ses couches que le brasseur d’or in the City.
Au moment de s’orienter, les sortis du bac choisissent option « décoration de façade » ou « plantation de tubercules »,  pourquoi d’autres ne préféreraient pas entretenir les racines de notre langue et rendre service à tous, en éloignant les malentendus ? Aucune dignité ne serait amputée, avec de surcroit des découvertes dans l’ADN de nos mots encore à divulguer. 
« Ma patrie, c'est la langue française » Albert Camus.
De bonnes âmes s’alarment de voir le Ramassis National au plus haut alors que sa cheffe ne dit mot, mais qui donc la ferait monter ?
L’individu se risquant à critiquer les excès de l’extrême gauche des amphis est vite catalogué à l’extrême droite et expulsé de ce côté. Il rejoint les étiquetés racistes parce qu'ils défendent le droit au blasphème quand des réserves sur l’écriture inclusive en amènent  d’autres aux abords d’Auschwitz : ça fait du monde à repousser depuis les réseaux sociaux et sur les murs de Sciences Polpot. Les dénonciateurs bruns du temps de Vichy ont fait des émules rouges : des affichettes style « Wanted » avaient été apposées au centre ville avec la tête de députés ayant voté contre les convictions des colleurs.
Ce climat de chasse à l’homme est partagé dans les deux camps d’une façon pour le moment plus métaphorique qu’au Moyen Orient, mais également virils. Les peintures aux entrées de Grenoble concernant le président de la République restent en vue plus volontiers que les tags insultant un autre candidat local aspirant à de plus hautes fonctions.
Nous avons laissé partir au fil de l’eau : nation, sécurité et laïcité.   
La Marine naufrageuse est venue piller les bateaux échoués.  
« Le sable de la mer, les gouttes de la pluie, les jours de l'éternité, qui peut les dénombrer ?La hauteur du ciel, l'étendue de la terre, la profondeur de l'abîme, qui peut les explorer ?Mais avant toute chose fut créée la Sagesse... »  La bible.