Le conférencier, devant les amis du musée de Grenoble, nous a aidé à
porter un regard nouveau sur une des personnalités essentielles pour comprendre
la transition vers l’art contemporain.
De nombreux autoportraits du peintre voyageur se retrouvent dans le monde entier.
Universellement connu, l’inspirateur des Nabis avait
dicté à Serusier leur tableau manifeste: "Le Talisman."
Eugène Henri Paul est le petit fils de Flora Tristan, d’origine
franco-péruvienne. Bien qu’elle ne soit pas la fille cachée de Simon Bolivar
comme elle en a fait courir la légende, celle-ci est considérée comme une des
premières féministes : « L’homme le plus opprimé peut opprimer un être, qui est sa
femme. »
Le peintre est né en 1848, en temps de barricades. Le père,
journaliste radical meurt sur le chemin de son exil vers le Pérou où le jeune
garçon, désormais toujours prêt à
partir, passe une partie de son enfance. Revenu en France,
après de médiocres études, il devient pilotin comme Manet puis sous-officier de
marine. Il est embauché à la Banque Bertin comme agent de change grâce à son
protecteur Arosa, amateur d’art chez qui il rencontrera Pissarro.
Il se marie
avec Mette
Sophie Gad avec laquelle il a cinq enfants.
Une crise boursière, en 1882, le conduit à quitter son travail.
Il se consacre entièrement à la peinture,
qu’il pratiquait en amateur dans le style de Corot comme dans ce Chemin
forestier. Mais il ne peut vivre de la vente de ses toiles exposées avec
les impressionnistes. Après avoir cohabité auprès de sa belle famille au
Danemark, il revient en France, avec un de ses enfants.Une crise boursière, en 1882, le conduit à quitter son travail.
La Bretagne offre des hébergements
moins chers que la capitale et Pont Aven fait école.
« J’aime la
Bretagne, j’y trouve le sauvage, le primitif. Quand mes sabots résonnent sur le
sol de granit, j’entends le son mat et puissant que je cherche en
peinture. »
Dans l’effervescence de l’époque qui
voit dans la famille des impressionnistes, l’émergence des divisionnistes, et
des pointillistes, autour de lui, se forme un
groupe avec Paul Sérusier,
Maurice Denis, Émile Bernard.
Il réalise le portrait de la soeur Madeleine
Bernard (Musée de Grenoble). La proximité des pantoufles et d’une scène
de danse, incite-t-elle à profiter de la vie sans attendre ?
Les influences entre ces jeunes gens enthousiastes sont
réciproques. La sculpture lui permet de simplifier sa peinture, et
si l’art du Japon l’inspire ainsi que tous les arts exotiques, avec le cloisonnisme
évoquant les vitraux bretons, les spécialistes de l’art placent le
précurseur des symbolistes et des expressionnistes dans la famille synthétiste.
La danse des quatre bretonnes tranche
avec les productions à la mode comme
Les Bretonnes au Pardon par
Dagnan-Bouveret.
« Ne copiez
pas trop d’après nature. L’art est une abstraction : tirez-la de la nature
en rêvant devant et pensez plus à la création qu’au résultat. »
La fête Gloanec « met
le feu à la peinture ».
Théo Van Gogh a payé le voyage de Gauguin à Arles
chez son frère Vincent à la recherche de la lumière du Japon, la rencontre
créative fera des étincelles.
Il était déjà allé à Panama, en Martinique, il part à Tahiti,
depuis 10 ans possession française, à la
recherche d’un Eden primitif. Rupe Rupe
(la Cueillette des fruits)
Il révèle le sacré dans la simplicité du monde avec Orana Maria (Je vous salue Marie) où l’ange Gabriel aux ailes
jaunes est là, face à Jésus et sa maman.
Il se fait ethnologue et s’offusque des coutumes brisées, il
entrera en conflit avec l’église.
Ses Femmes de Tahiti sont mélancoliques,
pudiques, leurs regards gênés. La tristesse de leurs yeux éteint la lubricité
dans les interprétations des frustrés de jadis.
Dans les "contes barbares" l’homme a des
griffes, le paradis est encore loin.
« D’où venons-nous
? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? » peint
après la mort de sa fille adorée, reprend tous les temps de la vie et brosse une
sorte d’histoire de l’humanité.
Paul Gauguin meurt en 1903 dans « la maison du
jouir » aux Marquises, brûlé par l’alcool.