Thomas Piketty décidément fait autorité :
« Les privilèges de naissance et le
patrimoine viennent concurrencer le capital humain, le mérite…
Je pense
possible un retour des structures de classes plus proches du XIXe
siècle que de celles des Trente Glorieuses. »
Le vocabulaire
classieux est il à nouveau de
mise ?
Avec Stéphane Beaud
sociologue, Dominique Voynet (EELV), Francis Parny (PCF) en intervenants au
forum de Libération à Grenoble, on peut
penser que la réponse est : « oui ».
Même si l’expérience du terrain complexifie les
appréciations quand cohabitent à l’intérieur de chaque individu le sentiment
d’impuissance et des réflexes égoïstes. Quand la peur du déclassement fait perdre du sens et que les solidarités
s’étiolent.
La gauche dans les années 80 a vu le fossé s’élargir
entre ses ambitions et les réalités avec un langage de protection qui isole. Bien que la jeunesse souffre, la lutte des
âges n’est pas la même pour ceux qui sont victimes des discours de stigmatisation
et ceux qui adhèrent aux préconisations
de « Terra Nova » qui ne voit plus d’intérêt pour la gauche à s’occuper des ouvriers.
Pourtant Olivier Ferrand Ferrand, président de la fondation a pu dire face à JF
Kahn qui a toujours plaidé pour les classes
populaires :
« La solution pour
faire revenir les classes populaires dans le giron de la gauche passe par la
ré-industrialisation de la France. Si l'économie s'améliore, le Front National
s'affaiblit, c'est mathématique ».
Je ne sais plus s’il s’agit d’un mot prononcé au cours du
débat ou une écriture incertaine mais quand je me relis « rappeur de
classe » en place du « rapport de classe » j’aime y voir un
heureux lapsus. La différenciation géographique
n’en est pas moins sociale mais elle a pris le pas sur
l’appartenance à un collectif sur le
lieu de travail. Le monde ouvrier est
disqualifié à mesure que se dégrade l’emploi. La construction de soi se fait
par la religion et non plus la classe sociale.
"La
cristallisation raciste en milieu populaire se fixe moins sur le comportement
des parents immigrés à l’usine que sur celui de leurs enfants à l’extérieur.
Autrement dit, ce qui reste de destin partagé et de souvenirs communs (travail,
luttes, ‘‘rigolade’’) entre vieux ouvriers à l’usine constitue encore un écran
protecteur contre la ‘‘contamination’’ des idées racistes, alors que, hors de
l’usine, ces mécanismes ne jouent pas ou plus, laissant ainsi se développer la
spirale du racisme d’une fraction du groupe ouvrier, ‘‘établie’’ mais en voie
de déclassement, contre les jeunes issus de l’immigration, victimes du chômage
et de diverses formes de stigmatisation."
S Beaud « Retour sur la
condition ouvrière »
Pourtant l’opposition capital/ travail est plus que jamais
d’actualité, avec des salariés qui devraient mieux participer aux choix de
gestion quand les exonérations fiscales
n’ont pas créé d’emplois. Le mot à la
mode « gouvernance » va à l’encontre du rapport de force et bien que
« démocratie participative » ne soit plus de saison, la place des travailleurs dans l’entreprise reste décisive pour la
démocratie.