à chaque fois que
je l’ouvrais, je redoutais de retrouver la litanie des solitudes et des douleurs.
Trois personnages différents, mais s’exprimant d’une même
façon désespérée, rendent compte de leur pauvre vie dans un Angola en révolte
contre le Portugal colonialiste.
« L’Angola j’en avais
plus que ma claque, toute cette confusion, cette misère, tout ce silence qui m’assourdissait
parce que même les arbres on les entend pousser, même l’herbe, même les ongles,
il n’y a rien qui ne grandisse en nous acculant à la mer de plus en plus
distante nous empêchant de fuir, elle le soir
- Tu me fais pitié tu
restes là sans solution remuant le sable et dissolvant le passé, le sourire de
ma femme pendant un instant
- Au revoir au
revoir »
Les odeurs, les couleurs de là bas arrivent sous nos
ampoules hivernales, dans un rythme obsédant scandé par des interruptions qui
crient la vérité d’une transcription très « nouveau roman ».
Les souvenirs cachent des situations d’une violence de
dingue là bas et ici :
« … et puis la neige et puis l’hiver neuf
mois par an, et puis les brochettes de veuves rien que nez et mentons et ma
grand-mère remontant la rue, dissimulée sous leur châle, dans une tempête de
pantoufles jusqu’à la chapelle tout en haut pour rendre visite à un Dieu qui
bien que plus petit et plus pauvre que celui de la place se démène comme un
possédé pour l’accomplissement des vœux… »
J’avais été enthousiaste après avoir vu au théâtre « Le
cul de judas », voyage au bout de le nuit africaine, mais le temps d’une
pause je vais chercher dans ma bibliothèque des volumes plus rose, tout en
gardant le souvenir dans mon enfer de ces mots implacables, ces atmosphères
lourdes, noires, désespérantes, poétiques.
« L’Angola est
là tout près là sur l’autre rive de la mer car ils appellent mer ce fleuve avec
plus d’eau et plus d’écume que les autres, frottant ses rochers dans un sens
puis dans l’autre en farfouillant dans les tiroirs, emportant ce qu’elle
s’empresse de nous rendre, coquillages, cailloux, bouts de bois venus d’où mon
Dieu, avec un moteur énorme, à moitié fichu, chevrotant là-dessous et quand
elle se retire voilà les crabes de retour claudiquant vers nous avec cette
détermination entêtée des estropiés et au-dessus le vide, des oiseaux, la feuille
sans arbre d’une mouette réduite à un bec et des yeux, dans une attente
éternelle, moi à Domingas, sans les mots
- Que faisons-nous
ici ? Nous attendons qu’on nous ramène en Afrique
… »
Trop chochotte, je
regrette de ne pas être à la hauteur pour faire valoir cet auteur, qu’il serait
dommage de ne pas connaître.
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