jeudi 12 décembre 2024

La chapelle Matisse. Marc Chauveau.

Nous revenons dans la chapelle de Vence avec le  religieux conférencier devant les amis du musée de Grenoble. https://blog-de-guy.blogspot.com/2024/04/le-vitrail-moderne-frere-marc-chauveau.html
Le « résultat d’une vie consacrée à la recherche de la vérité » comme le disait ce questionneur de beauté,
auteur du grenoblois « Intérieur aux aubergines », est aussi une histoire d’amitié.
Monique Bourgeois, infirmière fut employée en 1941 par Henri Matisse, « le miraculé », qui avait besoin alors de soins constants. 
Devenue un de ses modèles, « Tabac royal », elle entre  peu après dans l’ordre des dominicaines et prend le nom de sœur Jacques-Marie.
La villa de Matisse «  Le rêve » est située à deux pas de la maison qui abrite la congrégation.
Ne disposant avec les autres soeurs que d’un garage comme lieu de culte, elle montre un projet de vitrail pour lequel le maître l’encourage, elle lui permet de rencontrer un jeune religieux Rayssiguier qui convainc rapidement l’artiste :  
« Votre chapelle nous allons la faire »
Il reste à vaincre la réticence des sœurs et à trouver un architecte véritable : Auguste Perret qui a l’élégance d’accepter d’assurer la direction technique derrière le dominicain pris un moment par le doute sur ses capacités à mener jusqu’au bout le chantier.
Imbriquée dans d’autres bâtiments, la chapelle s’adapte à sa position en contrebas de la route. Le transept est décalé dans une salle ressemblant à un grand livre ouvert où la lumière des vitraux apporte de la couleur aux dessins noirs sur carreaux blancs.
Ainsi dans le livre « Jazz » des gouaches découpées voisinent avec l’écriture.
Il  avait prévu  un vitrail « Fleuve de vie » qu’il a trouvé finalement trop agité pour un lieu de prières, c’est sous le nom « Les abeilles » qu’il  est réalisé pour une école maternelle au Cateau-Cambrésis, sa ville natale.
Les vitraux aux verts et bleus transparents, au jaune opaque se souviennent de Tahiti avec des motifs végétaux évoquant le figuier de Barbarie qui désaltère le voyageur dans les lieux les plus arides, sous un rideau protecteur.

Pour arriver à l’épure la plus sobre, de très nombreux dessins ont été nécessaires qui laissent le temps à la rêverie, à l’identification.
Son « Saint Dominique » de Vence reçoit les couleurs,
celui d’Assy en apporte. 
Dans un geste d’accueil, préfigurant en même temps la crucifixion, « La vierge à l’enfant », avec pour modèle une jeune fille en train de devenir femme qu’il s’est empressé de dessiner, se présente toute en élégance et douceur,
inspirée de celle de Fouquet.
De nombreuses esquisses témoignent de ses recherches voulant échapper aux modes qui se démodent.
Avec humilité, il met ses pas dans ceux des anciens dans son « Chemin de croix » où les scènes s’entremêlent, violentes. A la sixième station, sur le voile de Véronique la « Sainte Face » est le seul visage représenté dans la chapelle.
Il s’agit d’une œuvre d'art total, par l’architecture, les vitraux, les grands dessins sur céramique, l'autel réalisé avec la même pierre que le pont du Gard regardant les deux petites nefs, les objets liturgiques.
Bénitiers, tabernacle, confessionnal, chasubles se coordonnent.
Sur le linteau une autre « Vierge et l’enfant » figure aussi en tondo.
Impliqué pendant quatre ans, il  répondit à Picasso qui n’était pas d’accord avec son engagement dans un projet spirituel:  
« Au fond, il ne faut pas que nous fassions les malins. Vous êtes comme moi : ce que nous cherchons tous à retrouver en art, c'est le climat de notre première communion »
La Chapelle du Rosaire fut inaugurée en 1951. Trois ans avant la mort de l’artiste.

Le père Marc Chauveau avait revêtu la chasuble noire pour célébrer l’enterrement de sœur Jacques Marie en 2005.
« Cette petite chapelle est un grand témoignage - celui du vrai. 
Grâce à vous une fois de plus, la vie est belle. Merci. »
 Le Corbusier.

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